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Foyer pour personnes âgées d'El Aouana à Jijel : Au royaume de l'indiférence

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  • Foyer pour personnes âgées d'El Aouana à Jijel : Au royaume de l'indiférence

    Rassemblés sous un même toit par un concours de circonstances, elles sont là, ces victimes de la bêtise humaine, livrées, dans l’indifférence totale, à un cruel destin.

    C’est le foyer des personnes âgées, où les pensionnaires semblent résignés à vivre dans un autre monde, loin du regard d’une société peu soucieuse de leur cause. «Même le voisinage immédiat est hostile à la présence de ce foyer», nous confesse-t-on. «L’été dernier, des voisins sont allés se plaindre à la police pour leur signifier qu’on fait du tapage nocturne lorsqu’on a organisé une soirée musicale pour casser l’ennui des pensionnaires», nous révèle-t-on encore.

    L’occasion de la journée nationale des personnes âgées, fêtée, le 27 avril dernier, nous a mené aux portes de ce foyer, ouvert au mois de septembre 2010, dans un endroit peuplé par des résidants d’un quartier de la ville d’El Aouana, à l’ouest du chef-lieu de la wilaya de Jijel.


    La quiétude des lieux, entrecoupée par des chansons diffusées pour mettre un petit grain d’animation à l’occasion de cette journée, est d’emblée un signe qui en dit long sur un calme imposé par le poids de l’âge, un handicap, ou tout simplement une volonté de se murer dans leur propre silence. Hormis quelques cas qui manifestent une certaine turbulence, voire de l’agressivité, le centre vit au rythme d’une même activité.

    Chaque pensionnaire traîne avec lui une histoire, une souffrance ou une injustice. La cause en est toujours la famille ou l’attitude d’une société peu regardante, pour ne pas dire inhumaine. Des SDF, des handicapés, des veuves sans famille, des femmes et des jeunes filles, des hommes aussi, à qui la vie a tourné le dos, et des vieillards, tous sont là réunis sous la même bannière de la souffrance et de la privation.

    Sans le dire, ils semblent méditer sur leur sort. Le comble est que tout ce «beau monde» est pris en charge, dans des circonstances difficiles, par un personnel non qualifié, issu de l’Anem ou du filet social. Les 33 pensionnaires de ce foyer, dont une femme qui, à une année près, bouclera son siècle d’existence, alitée et souffrant d’escarres et d’ulcères de jambes, et d’autres octogénaires et des nonagénaires, incommodés par leur alitement, en plus des handicapés et des cas relevant du domaine psychiatrique, nécessitant des soins spécialisés, sont tous entre les mains d’employés presque bénévoles. Le nombre de personnes titulaires ne dépasse pas les 9, dont 6 sont des éducateurs spécialisés et 3 du domaine de l’administration.


    Centre cherche médecin et infirmiers


    Tout le reste, soit une quinzaine, est constitué de jeunes filles contractuelles de l’Anem et du filet social qui tentent de faire le travail de l’infirmier ou du psychologue. «Nous avons besoin d’infirmiers en soins et en soins psychiatriques et d’au moins un médecin», nous déclare Boudjaâda Fettouma, une brave et courageuse directrice qui semble mener le combat de sa vie pour gérer ce foyer. «Il y a quelques jours, j’ai déposé ma démission pour ne pas faire face à la souffrance des pensionnaires qui ne bénéficient pas de soins appropriés, faute de médecin et d’infirmiers, en plus d’autres problèmes difficiles, voire impossibles, à surmonter, avant de me résigner à revenir sur ma décision juste pour la cause humaine de ma mission», affirme-t-elle.

    Le manque de personnel est l’obstacle le plus cruel à une meilleure prise en charge des pensionnaires qui ont besoin de spécialistes en soins gériatriques, psychiatriques ou psychologiques, sans oublier l’indispensable présence d’un médecin à leur chevet.

    En plus de la gestion de ces difficultés liées aux soins quotidiens, la directrice nous révèle que les traitements psychiatriques sont un fardeau de plus sur le budget de l’établissement. Des SDF, sans le moindre document d’identité, suivis par des psychiatres, ne peuvent pas bénéficier de la carte Chifa qui leur ouvre droit à la gratuité des médicaments.

    Au royaume de cette indifférence humaine, les gémissements des locataires de cet établissement, diminués et affaiblis physiquement et psychologiquement, sont loin de traverser les murs de l’établissement pour titiller la conscience des responsables et celle d’une société qui leur tourne le dos.

    Zouikri A.- El Watan
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