Écrit par Jean-François Coustillière
Huntington avait tort. Le clash prévu ne concerne pas les civilisations entre elles, mais s’applique au moins aujourd’hui au sein même de l’islam dans le monde arabo-musulman.
Ce sont des composantes archaïques et rétrogrades du monde musulman qui tentent d’imposer leur loi à d’autres croyants musulmans, dont la foi s’exprime de façon différente, visiblement plus sereine, ouverte et humaniste tout en affichant leur respect des préceptes du Livre saint. Il convient de s’alarmer de cette situation, soutenue par des stratégies d’influence venues d’un ailleurs étranger à la région méditerranéenne, car elle constitue une menace tant pour les pays visés que pour leurs voisins, y compris non musulmans.
Le constat
Les révoltes arabes ont fait naître, dans les pays qui ont connu le renversement de leur régime politique, un grand espoir de liberté, de dignité et d’émergence de la capacité égale des citoyens de participer aux choix politiques qui président à leur destinée.
Dans les faits, ces révoltes ont conduit à l’accession au pouvoir de mouvements politiques islamistes qui se sont révélés répondre à une certaine aspiration des citoyens à moins de corruption, à plus d’équité, ainsi qu’à un renforcement de la valorisation de leur identité arabo-musulmane.
Il est certain que cette région, qui depuis les indépendances a connu la domestication du fait religieux par les pouvoirs autoritaires, éprouve une religiosité intrinsèque qui la met en résonance avec les démarches de certains pays du Golfe arabe prônant le retour aux sources de l’islam et la rend vulnérable aux instrumentalisations extérieures. La chaîne Al Jazeera et son prédicateur vedette Al Qaradawi en constituent l’un des vecteurs1.
Deux ans après les premiers soulèvements, force est de constater que ces bouleversements ont, avec la complicité active des nouveaux gouvernements ou en raison de leur incapacité à contrôler les ailes les plus dures de leur parti, ouvert la porte à des composantes politiques le plus souvent brutales et violentes, drapées dans leur version du religieux, pour promouvoir un retour à un passé idéalisé sans rapport avec les réalités actuelles. Ces composantes, sous des formes diverses2 y compris djihadistes, se réclament toutes du wahhabisme3, mouvement politico-religieux saoudien, fondé par Mohammed ben Abdelwahhab, qui estimait que l’islam devait être ramené à sa forme originelle, selon son interprétation du Coran et des hadiths, différant ainsi des autres doctrines de l’Islam, très largement majoritaires. Les wahhabites rejettent tous les autres courants de l’Islam qu’ils considèrent comme hérétiques.
En Tunisie, Libye, Egypte, Syrie, à des niveaux divers et en fonction des situations politiques, nous observons :
L’établissement de régimes autoritaires sous l’impulsion des islamistes prônant ou favorisant les règles et usages wahhabites et/ou lutte des milices islamistes armées contre le pouvoir, élu comme en Libye ou imposé comme celui d’Assad, tout en s’affrontant aux autres composantes laïques ou non wahhabites pour imposer leur domination.
L’apparition de brigades réprimant des comportements jugés non conformes aux critères wahhabites, pourchassant les attitudes jugées licencieuses entre hommes et femmes.
La destruction de mausolées, d’églises ou de mosquées non rattachées au wahhabisme, squat de mosquées, condamnation des fêtes et célébrations religieuse de rite malékite, agression contre les manifestations artistiques et festives sortant des codes salafistes.
Des actes violents allant jusqu’à l’assassinat de personnalités progressistes, des actions contre des manifestants non religieux et des incidents dévoilant l’existence d’armes et de mouvements terroristes se réclamant du djihadisme.
L’accroissement des actions d’intimidation et d’humiliations contre les étrangers, les chrétiens, spécifiquement les Coptes, les juifs, mais également contre les chiites, les alaouites, les soufis.
La prolifération des conférences de chouyoukh wahhabites, création d’associations religieuses fondamentalistes, multiplication de prêches salafistes, multiplication des visites de chouyoukh du Golfe tout cela dans des régions de tradition étrangère au wahhabisme.
Les pays n’ayant pas connu de révoltes subissent également cette volonté de domination wahhabite.
A Bahreïn, l’Arabie saoudite et les autres Etats du Golfe conduisent une répression meurtrière contre un mouvement de protestation chiite, opposé au pouvoir sunnite minoritaire. La monarchie saoudienne a volé au secours de son allié prétextant l’instrumentalisation de la rébellion par l’Iran chiite et craignant sans doute de voir s’exacerber l’opposition chiite dans le royaume wahhabite.
Le Liban est depuis longtemps confronté à cette pression qui s’exerce le plus souvent à travers les camps palestiniens à Tripoli bien sûr4, mais aussi en d’autres sites.
Au Sahel, plus précisément au Mali, ces mouvements sous le drapeau de milices islamistes alliées à des bandes de trafiquants ou de terroristes se réclamant pour partie d’Al Qaïda ont élargi leur zone d’action. Après avoir conquis le nord du pays le soumettant à des règles rétrogrades appuyées sur une vision de la charia interprétée dans son acception la plus archaïque, ces mouvements ont entrepris d’occuper le Sud en détruisant au passage les fondements identitaires et religieux des populations locales : destruction des mausolées, destruction de documents historiques et religieux, application brutale de la charia dans une version fondamentaliste étrangère aux us locaux, etc.
Le Maroc, peu après l’explosion des révoltes arabes en 2011, a été démarché pour rejoindre le club des monarchies arabes du Golfe : le Conseil de coopération du Golfe. La Jordanie elle-même, épargnée par ces révoltes jusqu’à aujourd’hui, plus perméable sans doute aux influences du Golfe, faisait acte de candidature spontanée au Conseil de coopération du Golfe arabe (CCEAG)…
L’Algérie, où le régime a su se préserver du mouvement des révoltes arabes, à la fois pour des raisons liées à son histoire récente, mais aussi compte tenu des structures du pouvoir, semble également sous la pression de cette volonté dominatrice wahhabite. Elle se retrouve désormais avec des combattants salafistes rescapés des combats internes des années 1990, notamment au Sud, sur ses frontières avec le Sahel, et ceux-ci ont fait la liaison avec les mouvements opérant hors de ses frontières. Néanmoins, si des tentatives de créer un parti d’obédience wahhabite sont apparues, celles-ci ne semblent pas en mesure d’atteindre leur objectif.
Ces divers événements ne peuvent pas être innocents et il est difficilement imaginable qu’ils ne soient pas reliés. Ils relèvent d’une même dynamique.
Quelle stratégie sous-tend ces démarches ?
A partir de ce constat, il est difficile de ne pas identifier une volonté stratégique qui peut s’exprimer selon les trois priorités suivantes :
Tout d’abord, sous couvert d’un retour à la « vraie foi », soumettre les populations à des exigences reposant sur une interprétation archaïque des textes fondamentaux et ainsi, à travers ce carcan qui règle le quotidien de tous les instants, étouffer toute velléité des individus de recherche d’autonomie, de libre arbitre et d’ouverture au monde5. Les concepts mêmes de démocratie, de droits de l’Homme, d’équité hommes-femmes, de liberté de conscience, d’égalité entre les êtres humains sont de facto hors la loi.
Ensuite, imposer la loi divine selon son interprétation wahhabite comme seule et unique référent du pouvoir. Ainsi, les autres expressions de l’islam étant écartées, le pouvoir est étroitement lié à la source du wahhabisme ouvrant la voie à un califat musulman englobant le monde arabo-musulman, voire plus si affinité, qui assure la domination religieuse et donc politique par cette source6. Le danger de la reproduction des révoltes nées dans des pays non féodaux est ainsi écarté7.
Si les monarchies ont, semble-t-il, constitué des remparts contre les soulèvements, il convient aussi de s’assurer qu’elles ne puissent pas être contaminées par l’émergence de ce si mal nommé « Printemps arabe ». Pour cela, il est imaginé de rassembler ces monarchies dans une alliance8 qui aurait pour avantage de regrouper les pays à faible démographie du Golfe avec d’autres plus peuplés, au Maghreb ou au Proche-Orient, pour faire bénéficier à l’ensemble non seulement de la disponibilité de masses humaines mobilisables, mais aussi des moyens militaires organisés et entraînés de leurs forces armées.
Cette stratégie n’est évidemment pas affichée, d’autant plus qu’elle est l’objet d’une concurrence entre l’Arabie et le Qatar9, qui jouent cependant la même partition pour leur bénéfice propre et pour celui des Etats-Unis : le containment de l’Iran. Ces Etats poursuivent des politiques différentes avec des partenaires parfois distincts10, et des priorités occasionnellement divergentes11, mais étroitement déterminées par les rapports existants entre ces pouvoirs et les Oulémas qui sont sensiblement différents.
Elle est d’ores et déjà dénoncée par les responsables les plus éclairés. Cela apparaît dans des travaux universitaires12, des déclarations politiques ou sur des sites internet, dont nombreux sont l’émanation de musulmans qui s’insurgent contre ce qu’ils vivent comme une violence faite à leur propre foi : « Ce groupe [les wahhabites], qui se nourrit d’ignorance dans la croyance, d’extrémisme dans le dogme et de violence dans l’action, ne réussit à diffuser sa propagande que grâce aux richesses des pétrodollars. »13
Mais il est plus pertinent de faire référence à des hommes de religion tel le cheikh Chemseddine Baroubi Aljazaïri, célèbre imam algérien, qui n’hésite pas à mettre en garde les Tunisiens contre « l’invasion du wahhabisme »14. Il est aussi possible d’évoquer la création, le 31 janvier 2013 à Alger, de la ligue des oulémas du Sahel destinée à « combattre l’extrémisme, le fanatisme et la criminalité » et à « trancher les questions de la religion et éviter ainsi le recours à des canaux et des pensées qui sont loin de refléter notre ouverture sur le monde, notre pratique religieuse et nos références théologiques ». Les conclusions de cette rencontre fondatrice dénoncent ainsi « les crises qui touchent le monde musulman constituent une atteinte à ses références religieuses, à son unité territoriale et à ses principes fondamentaux (…) »15.
Une stratégie apparaît donc bien visant à imposer une certaine vision obscurantiste de l’islam, une domination religieuse et donc politique par une seule source de pouvoir et enfin un modèle unique de gouvernance monarchique pour le monde arabo-musulman.
Huntington avait tort. Le clash prévu ne concerne pas les civilisations entre elles, mais s’applique au moins aujourd’hui au sein même de l’islam dans le monde arabo-musulman.
Ce sont des composantes archaïques et rétrogrades du monde musulman qui tentent d’imposer leur loi à d’autres croyants musulmans, dont la foi s’exprime de façon différente, visiblement plus sereine, ouverte et humaniste tout en affichant leur respect des préceptes du Livre saint. Il convient de s’alarmer de cette situation, soutenue par des stratégies d’influence venues d’un ailleurs étranger à la région méditerranéenne, car elle constitue une menace tant pour les pays visés que pour leurs voisins, y compris non musulmans.
Le constat
Les révoltes arabes ont fait naître, dans les pays qui ont connu le renversement de leur régime politique, un grand espoir de liberté, de dignité et d’émergence de la capacité égale des citoyens de participer aux choix politiques qui président à leur destinée.
Dans les faits, ces révoltes ont conduit à l’accession au pouvoir de mouvements politiques islamistes qui se sont révélés répondre à une certaine aspiration des citoyens à moins de corruption, à plus d’équité, ainsi qu’à un renforcement de la valorisation de leur identité arabo-musulmane.
Il est certain que cette région, qui depuis les indépendances a connu la domestication du fait religieux par les pouvoirs autoritaires, éprouve une religiosité intrinsèque qui la met en résonance avec les démarches de certains pays du Golfe arabe prônant le retour aux sources de l’islam et la rend vulnérable aux instrumentalisations extérieures. La chaîne Al Jazeera et son prédicateur vedette Al Qaradawi en constituent l’un des vecteurs1.
Deux ans après les premiers soulèvements, force est de constater que ces bouleversements ont, avec la complicité active des nouveaux gouvernements ou en raison de leur incapacité à contrôler les ailes les plus dures de leur parti, ouvert la porte à des composantes politiques le plus souvent brutales et violentes, drapées dans leur version du religieux, pour promouvoir un retour à un passé idéalisé sans rapport avec les réalités actuelles. Ces composantes, sous des formes diverses2 y compris djihadistes, se réclament toutes du wahhabisme3, mouvement politico-religieux saoudien, fondé par Mohammed ben Abdelwahhab, qui estimait que l’islam devait être ramené à sa forme originelle, selon son interprétation du Coran et des hadiths, différant ainsi des autres doctrines de l’Islam, très largement majoritaires. Les wahhabites rejettent tous les autres courants de l’Islam qu’ils considèrent comme hérétiques.
En Tunisie, Libye, Egypte, Syrie, à des niveaux divers et en fonction des situations politiques, nous observons :
L’établissement de régimes autoritaires sous l’impulsion des islamistes prônant ou favorisant les règles et usages wahhabites et/ou lutte des milices islamistes armées contre le pouvoir, élu comme en Libye ou imposé comme celui d’Assad, tout en s’affrontant aux autres composantes laïques ou non wahhabites pour imposer leur domination.
L’apparition de brigades réprimant des comportements jugés non conformes aux critères wahhabites, pourchassant les attitudes jugées licencieuses entre hommes et femmes.
La destruction de mausolées, d’églises ou de mosquées non rattachées au wahhabisme, squat de mosquées, condamnation des fêtes et célébrations religieuse de rite malékite, agression contre les manifestations artistiques et festives sortant des codes salafistes.
Des actes violents allant jusqu’à l’assassinat de personnalités progressistes, des actions contre des manifestants non religieux et des incidents dévoilant l’existence d’armes et de mouvements terroristes se réclamant du djihadisme.
L’accroissement des actions d’intimidation et d’humiliations contre les étrangers, les chrétiens, spécifiquement les Coptes, les juifs, mais également contre les chiites, les alaouites, les soufis.
La prolifération des conférences de chouyoukh wahhabites, création d’associations religieuses fondamentalistes, multiplication de prêches salafistes, multiplication des visites de chouyoukh du Golfe tout cela dans des régions de tradition étrangère au wahhabisme.
Les pays n’ayant pas connu de révoltes subissent également cette volonté de domination wahhabite.
A Bahreïn, l’Arabie saoudite et les autres Etats du Golfe conduisent une répression meurtrière contre un mouvement de protestation chiite, opposé au pouvoir sunnite minoritaire. La monarchie saoudienne a volé au secours de son allié prétextant l’instrumentalisation de la rébellion par l’Iran chiite et craignant sans doute de voir s’exacerber l’opposition chiite dans le royaume wahhabite.
Le Liban est depuis longtemps confronté à cette pression qui s’exerce le plus souvent à travers les camps palestiniens à Tripoli bien sûr4, mais aussi en d’autres sites.
Au Sahel, plus précisément au Mali, ces mouvements sous le drapeau de milices islamistes alliées à des bandes de trafiquants ou de terroristes se réclamant pour partie d’Al Qaïda ont élargi leur zone d’action. Après avoir conquis le nord du pays le soumettant à des règles rétrogrades appuyées sur une vision de la charia interprétée dans son acception la plus archaïque, ces mouvements ont entrepris d’occuper le Sud en détruisant au passage les fondements identitaires et religieux des populations locales : destruction des mausolées, destruction de documents historiques et religieux, application brutale de la charia dans une version fondamentaliste étrangère aux us locaux, etc.
Le Maroc, peu après l’explosion des révoltes arabes en 2011, a été démarché pour rejoindre le club des monarchies arabes du Golfe : le Conseil de coopération du Golfe. La Jordanie elle-même, épargnée par ces révoltes jusqu’à aujourd’hui, plus perméable sans doute aux influences du Golfe, faisait acte de candidature spontanée au Conseil de coopération du Golfe arabe (CCEAG)…
L’Algérie, où le régime a su se préserver du mouvement des révoltes arabes, à la fois pour des raisons liées à son histoire récente, mais aussi compte tenu des structures du pouvoir, semble également sous la pression de cette volonté dominatrice wahhabite. Elle se retrouve désormais avec des combattants salafistes rescapés des combats internes des années 1990, notamment au Sud, sur ses frontières avec le Sahel, et ceux-ci ont fait la liaison avec les mouvements opérant hors de ses frontières. Néanmoins, si des tentatives de créer un parti d’obédience wahhabite sont apparues, celles-ci ne semblent pas en mesure d’atteindre leur objectif.
Ces divers événements ne peuvent pas être innocents et il est difficilement imaginable qu’ils ne soient pas reliés. Ils relèvent d’une même dynamique.
Quelle stratégie sous-tend ces démarches ?
A partir de ce constat, il est difficile de ne pas identifier une volonté stratégique qui peut s’exprimer selon les trois priorités suivantes :
Tout d’abord, sous couvert d’un retour à la « vraie foi », soumettre les populations à des exigences reposant sur une interprétation archaïque des textes fondamentaux et ainsi, à travers ce carcan qui règle le quotidien de tous les instants, étouffer toute velléité des individus de recherche d’autonomie, de libre arbitre et d’ouverture au monde5. Les concepts mêmes de démocratie, de droits de l’Homme, d’équité hommes-femmes, de liberté de conscience, d’égalité entre les êtres humains sont de facto hors la loi.
Ensuite, imposer la loi divine selon son interprétation wahhabite comme seule et unique référent du pouvoir. Ainsi, les autres expressions de l’islam étant écartées, le pouvoir est étroitement lié à la source du wahhabisme ouvrant la voie à un califat musulman englobant le monde arabo-musulman, voire plus si affinité, qui assure la domination religieuse et donc politique par cette source6. Le danger de la reproduction des révoltes nées dans des pays non féodaux est ainsi écarté7.
Si les monarchies ont, semble-t-il, constitué des remparts contre les soulèvements, il convient aussi de s’assurer qu’elles ne puissent pas être contaminées par l’émergence de ce si mal nommé « Printemps arabe ». Pour cela, il est imaginé de rassembler ces monarchies dans une alliance8 qui aurait pour avantage de regrouper les pays à faible démographie du Golfe avec d’autres plus peuplés, au Maghreb ou au Proche-Orient, pour faire bénéficier à l’ensemble non seulement de la disponibilité de masses humaines mobilisables, mais aussi des moyens militaires organisés et entraînés de leurs forces armées.
Cette stratégie n’est évidemment pas affichée, d’autant plus qu’elle est l’objet d’une concurrence entre l’Arabie et le Qatar9, qui jouent cependant la même partition pour leur bénéfice propre et pour celui des Etats-Unis : le containment de l’Iran. Ces Etats poursuivent des politiques différentes avec des partenaires parfois distincts10, et des priorités occasionnellement divergentes11, mais étroitement déterminées par les rapports existants entre ces pouvoirs et les Oulémas qui sont sensiblement différents.
Elle est d’ores et déjà dénoncée par les responsables les plus éclairés. Cela apparaît dans des travaux universitaires12, des déclarations politiques ou sur des sites internet, dont nombreux sont l’émanation de musulmans qui s’insurgent contre ce qu’ils vivent comme une violence faite à leur propre foi : « Ce groupe [les wahhabites], qui se nourrit d’ignorance dans la croyance, d’extrémisme dans le dogme et de violence dans l’action, ne réussit à diffuser sa propagande que grâce aux richesses des pétrodollars. »13
Mais il est plus pertinent de faire référence à des hommes de religion tel le cheikh Chemseddine Baroubi Aljazaïri, célèbre imam algérien, qui n’hésite pas à mettre en garde les Tunisiens contre « l’invasion du wahhabisme »14. Il est aussi possible d’évoquer la création, le 31 janvier 2013 à Alger, de la ligue des oulémas du Sahel destinée à « combattre l’extrémisme, le fanatisme et la criminalité » et à « trancher les questions de la religion et éviter ainsi le recours à des canaux et des pensées qui sont loin de refléter notre ouverture sur le monde, notre pratique religieuse et nos références théologiques ». Les conclusions de cette rencontre fondatrice dénoncent ainsi « les crises qui touchent le monde musulman constituent une atteinte à ses références religieuses, à son unité territoriale et à ses principes fondamentaux (…) »15.
Une stratégie apparaît donc bien visant à imposer une certaine vision obscurantiste de l’islam, une domination religieuse et donc politique par une seule source de pouvoir et enfin un modèle unique de gouvernance monarchique pour le monde arabo-musulman.
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