Pour l’avocat international*, les deux pays sont voués à se rapprocher face à la montée en puissance de l’islam djihadiste sunnite au moyen-Orient.
Iran-Israël : de futurs alliés?
A première vue, rien ne destine l’Iran et Israël à un rapprochement. La question du nucléaire iranien, au coeur des enjeux internationaux depuis une dizaine d’années, ne cesse d’exacerber les sentiments.
Etonnamment, l’échec de la rencontre d’Almaty, début avril, entre l’Iran et les membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU plus l’Allemagne, n’a pas remis au goût du jour la menace de frappe militaire contre les installations iraniennes. John Kerry a même déclaré que la voie diplomatique continuait d’être la voie à privilégier.
En fait, les protagonistes attendent le résultat de l’élection présidentielle iranienne du mois de juin prochain, qui mettra à la tête de l’Iran un nouveau visage plus présentable face à la communauté internationale. En Effet, l’isolement de l’Iran et la détresse économique du pays du fait des sanctions sont tels qu’à l’unanimité les élites du pays veulent en sortir. Tous savent que la voie vers Washington passe par Israël et un accord sur le nucléaire.
Or, dans ce ménage à trois entre Israël, les Etats-Unis et l’Iran, il y a eu l’irruption brutale de l’hiver islamiste arabe. Le regard que l’Iran porte sur son voisinage est le même regard inquiet que les Israéliens et les Américains portent sur l’évolution du monde arabo-musulman. Ces trois pays concentrent sur eux la haine des intégristes salafistes et des Frères musulmans. Il suffit aux Israéliens de regarder au-delà de leurs frontières pour voir la Syrie graduellement se transformer en un laboratoire d’al-Qaida, contrôlé par des mouvements comme le Jabhat al-Nosra, qualifié d’organisation terroriste par les Amériains. De regarder en direction de la Jordanie pour y voir la montée graduelle des Frères musulmans. D’ailleurs, les gardes frontières israéliens sont pris pour cibles par les rebelles islamistes sur le Golan. Les Américains ont reçu, eux, la réponse du discours d’Obama au Caire dans les balles ayant pris pour cible leur ambassadeur en Libye.
Les Iraniens contemplent avec une égale crainte l’évolution de leur voisinage. Certes, leur soutien à Damas est motivé par leur volonté de garder au pouvoir un de leurs rares alliés arabes, mais il n’y a pas que ça. Il est clair que le conflit syrien devient de plus en plus à caractère religieux. C’est ainsi que le mot d’ordre à Bagdad proclame que si le dictateur Assad devait tomber, les chiites devraient se battre pour leur survie devant les barricades des villes saintes chiites de Nadjaf et de Karbala. Le soutien sans faille apporté par les pétromonarchies du Golfe Persique aux rebelles islamistes en Syrie n’a échappé ni aux Iraniens ni aux Israéliens. Ces derniers, en effet, se souviennent tout particulièrement du soutien financier des 400 millions de dollars apportés par l’émir du Qatar au Hamas lors de sa visite d’il y a quelques mois à Gaza. Visite célébrée par le Hamas avec le lancement de 89 missiles Katioucha sur le territoire israélien. Le chef historique de ce mouvement, Khaled Mechaal, réélu à ses fonctions, a son siège à Doha, à l’instar des talibans, et non plus à Damas.
De même, Israël est en manque d’alliés dans la région. Il est difficile de considérer l’Egypte, avec l’avènement du Frère musulman Morsi, comme la continuité du soutien sans faille de Moubarak. La Turquie, pour sa part, pour sa part, poursuit la politique néo-ottomane de son ministre des affaires étrangères Davutoglu, avec comme résultat non pas la politique proclamée de “zéro voisin sans problème”. Alors que, sur l’insistance du président Obama, le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a présenté ses excuses à Erdogan pour l’affaire de la flotille pour Gaza, ce dernier lui a réservé un accueil froid, contraignant John Kerry à faire escale à Ankara afin de tenter une nouvelle médiation.
L’Iran est sur le point d’enclencher son grand retour sur le devant de la scène internationale qui coïncide avec l’éruption d’un islam djihadiste sunnite. Cette expression d’un islam radical prend pour cible indifféremment tant Israël que l’Iran chiite. Il s’agit là d’un premier point de convergence qui ne manquera pas de marquer un rapprochement entre Iran et Israël…
Le Figaro, publié le 4 mai 2013
ARDAVAN AMIR-ASLANI
* Dernier ouvrage : “Iran-Israël, Juifs et Perses”, Nouveau Monde, 2013
Iran-Israël : de futurs alliés?
A première vue, rien ne destine l’Iran et Israël à un rapprochement. La question du nucléaire iranien, au coeur des enjeux internationaux depuis une dizaine d’années, ne cesse d’exacerber les sentiments.
Etonnamment, l’échec de la rencontre d’Almaty, début avril, entre l’Iran et les membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU plus l’Allemagne, n’a pas remis au goût du jour la menace de frappe militaire contre les installations iraniennes. John Kerry a même déclaré que la voie diplomatique continuait d’être la voie à privilégier.
En fait, les protagonistes attendent le résultat de l’élection présidentielle iranienne du mois de juin prochain, qui mettra à la tête de l’Iran un nouveau visage plus présentable face à la communauté internationale. En Effet, l’isolement de l’Iran et la détresse économique du pays du fait des sanctions sont tels qu’à l’unanimité les élites du pays veulent en sortir. Tous savent que la voie vers Washington passe par Israël et un accord sur le nucléaire.
Or, dans ce ménage à trois entre Israël, les Etats-Unis et l’Iran, il y a eu l’irruption brutale de l’hiver islamiste arabe. Le regard que l’Iran porte sur son voisinage est le même regard inquiet que les Israéliens et les Américains portent sur l’évolution du monde arabo-musulman. Ces trois pays concentrent sur eux la haine des intégristes salafistes et des Frères musulmans. Il suffit aux Israéliens de regarder au-delà de leurs frontières pour voir la Syrie graduellement se transformer en un laboratoire d’al-Qaida, contrôlé par des mouvements comme le Jabhat al-Nosra, qualifié d’organisation terroriste par les Amériains. De regarder en direction de la Jordanie pour y voir la montée graduelle des Frères musulmans. D’ailleurs, les gardes frontières israéliens sont pris pour cibles par les rebelles islamistes sur le Golan. Les Américains ont reçu, eux, la réponse du discours d’Obama au Caire dans les balles ayant pris pour cible leur ambassadeur en Libye.
Les Iraniens contemplent avec une égale crainte l’évolution de leur voisinage. Certes, leur soutien à Damas est motivé par leur volonté de garder au pouvoir un de leurs rares alliés arabes, mais il n’y a pas que ça. Il est clair que le conflit syrien devient de plus en plus à caractère religieux. C’est ainsi que le mot d’ordre à Bagdad proclame que si le dictateur Assad devait tomber, les chiites devraient se battre pour leur survie devant les barricades des villes saintes chiites de Nadjaf et de Karbala. Le soutien sans faille apporté par les pétromonarchies du Golfe Persique aux rebelles islamistes en Syrie n’a échappé ni aux Iraniens ni aux Israéliens. Ces derniers, en effet, se souviennent tout particulièrement du soutien financier des 400 millions de dollars apportés par l’émir du Qatar au Hamas lors de sa visite d’il y a quelques mois à Gaza. Visite célébrée par le Hamas avec le lancement de 89 missiles Katioucha sur le territoire israélien. Le chef historique de ce mouvement, Khaled Mechaal, réélu à ses fonctions, a son siège à Doha, à l’instar des talibans, et non plus à Damas.
De même, Israël est en manque d’alliés dans la région. Il est difficile de considérer l’Egypte, avec l’avènement du Frère musulman Morsi, comme la continuité du soutien sans faille de Moubarak. La Turquie, pour sa part, pour sa part, poursuit la politique néo-ottomane de son ministre des affaires étrangères Davutoglu, avec comme résultat non pas la politique proclamée de “zéro voisin sans problème”. Alors que, sur l’insistance du président Obama, le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a présenté ses excuses à Erdogan pour l’affaire de la flotille pour Gaza, ce dernier lui a réservé un accueil froid, contraignant John Kerry à faire escale à Ankara afin de tenter une nouvelle médiation.
L’Iran est sur le point d’enclencher son grand retour sur le devant de la scène internationale qui coïncide avec l’éruption d’un islam djihadiste sunnite. Cette expression d’un islam radical prend pour cible indifféremment tant Israël que l’Iran chiite. Il s’agit là d’un premier point de convergence qui ne manquera pas de marquer un rapprochement entre Iran et Israël…
Le Figaro, publié le 4 mai 2013
ARDAVAN AMIR-ASLANI
* Dernier ouvrage : “Iran-Israël, Juifs et Perses”, Nouveau Monde, 2013
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