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La bactérie H041"serait bien pire que le sida

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  • La bactérie H041"serait bien pire que le sida

    "La superbactérie du sexe" qui n'en est pas une
    Le Point.fr
    Depuis plusieurs semaines, la rumeur d'une "super bactérie du sexe" affole les réseaux sociaux. La bactérie H041, c'est son nom, "serait bien pire que le sida, capable de tuer en quelques jours et de se propager rapidement d'homme à homme". Simple vent de panique ? Des chercheurs américains prennent la menace très au sérieux, et ont réclamé 38 millions de dollars aux autorités sanitaires afin d'endiguer tout risque de pandémie. Mais selon des scientifiques français, derrière cette bactérie au nom mystérieux se cache un banal gonocoque, une bactérie responsable de maladies sexuellement transmissibles (MST) et le risque serait exagéré par leurs collègues d'outre-Atlantique.

    Contactés par Le Point.fr, le Dr Béatrice Berçot et le Pr Emmanuelle Cambau (bactériologistes, laboratoire associé au Centre national de référence des gonocoques) ainsi que le Dr François Lassau (praticien hospitalier, membre du syndicat des dermato-vénéréologues) du groupe hospitalier Saint-Louis-Lariboisière-Fernand Widal (APHP) de Paris se veulent rassurants. "Décrit pour la première fois dans la littérature vers 1 700 avant J.-C., le gonocoque est responsable d'une urétrite très douloureuse que l'on appelle vulgairement chaude-pisse ou gonorrhée. La bactérie a aussi la particularité de pouvoir se loger au niveau de l'anus, de l'utérus et de la gorge. C'est d'ailleurs au niveau de la gorge d'une prostituée japonaise que l'on a découvert, pour la première fois, la souche de gonocoque appelée H041. Malgré les rumeurs, "elle n'est pas plus virulente et ne se transmet pas plus facilement que les autres souches", tiennent-ils d'emblée à préciser.

    Multirésistance aux antibiotiques

    "Le gonocoque H041 n'est donc pas plus dangereux qu'un autre gonocoque, mais il est plus difficile à éradiquer. La particularité de cette souche est sa résistance à notre antibiotique de référence pour le traitement de la gonorrhée (céphalosporine de 3e génération). L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'en inquiétait dès juin 2012, tout comme le Centre européen pour la prévention et le contrôle des maladies (ECDC)", déclarent-ils. Ces trente dernières années, les gonocoques ont acquis rapidement des résistances aux antibiotiques à la pénicilline puis à la tétracycline, aux quinolones et enfin aux céphalosporines. En 2013, trois souches résistantes aux céphalosporines ont été recensées. Ce sont ces nouvelles résistances qui inquiètent actuellement la communauté scientifique et que les médecins américains médiatisent à outrance.

    Pour lutter contre ces nouvelles souches, les médecins américains réfléchiraient à un nouvel antibiotique. Pourtant, comme l'affirment Béatrice Berçot et Emmanuelle Cambau, "quelques antibiotiques restent encore actifs sur ces souches", mais les recommandations américaines ne sont pas les mêmes que les européennes. "En Europe, il est préconisé de traiter les patients avec de fortes doses d'antibiotiques par voie injectable, des doses qui sont deux fois plus élevées qu'aux États-Unis", précisent-elles.

    "Le choc septique reste exceptionnel"

    Béatrice Berçot, Emmanuelle Cambau et François Lassau tiennent aussi à minimiser le risque de mortalité liée à la bactérie H041. De l'autre côté de l'Atlantique, certains de leurs confrères affirment pourtant le contraire. À les croire, un patient infecté pourrait mourir d'un choc septique en moins de trois jours. Là encore, en France, le discours n'est pas aussi fataliste : "Si l'une des complications d'un gonocoque est la septicémie (1 à 3 % des infections non traitées), le risque de défaillance multiviscérale (ou choc septique), lors du passage du gonocoque dans le sang, reste exceptionnel."

    Pour autant, il faut prendre au sérieux les effets d'un gonocoque. Lorsque la bactérie infecte l'anus, le pharynx et l'utérus, il n'y a pas de symptôme dans 50 à 70 % des cas. "Des complications peuvent alors apparaître par manque de traitement. Le dépistage par des tests de diagnostic rapide et la réalisation de cultures bactériennes sont alors primordiaux pour s'assurer que la souche est sensible aux antibiotiques. Quoi qu'il en soit, la seule façon de se débarrasser d'un gonocoque est un traitement antibiotique, et cela de même pour le gonocoque H041", insistent-ils.

    "Une pandémie peu probable"

    Interrogées sur la probabilité d'une pandémie, Béatrice Berçot et Emmanuelle Cambau se montrent là encore rassurantes. "À l'heure actuelle, il existe une souche multirésistante H041 isolée au Japon, et deux autres souches appelées F89, isolées en France et en Espagne. Une pandémie est donc peu probable, mais il faut rester vigilant. On peut estimer que près de 10 % des souches de gonocoques isolées dans le monde auraient la potentialité de devenir rapidement résistantes aux céphalosporines, cette vigilance passe donc par un état de veille sanitaire." De son, côté, le Dr François Lassau tient à souligner la recrudescence du gonocoque chez les jeunes, en particulier chez les jeunes femmes, et dénonce "un manque de moyen criant pour le dépistage et l'information des patients".

    En cas d'un rapport à risque, pas d'affolement, mais "dépistage et traitement restent de mise". La meilleure attitude consiste à ne jamais oublier de se protéger, et ce même lors de rapports oro-génitaux. "La gonorrhée est un germe fragile qui ne se transmet que par contact avec les muqueuses et on ne s'infecte pas en touchant des poignées de porte", tiennent à conclure Beatrice Berçot, Emmanuelle Cambau et François Lassau.
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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