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Partagez la littérature, le sel et l’eau

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    Nous sommes le peuple du partage. Le partage est l’essence, et le sens de la vie. On se partage le pays, son soleil, ses langues et son histoire.

    Du moins ce qu’il devrait être, ce qu’il fallait être ! Pour vivre ensemble, mais en différence, en multiplicité, en pluralité et en diversité, il faut que le partage soit une culture et un comportement.
    Afin que le partage prenne son goût, il faut accepter l’autre. S’accepter en présence de l’autre. On partage les souffles du corps, son feu et sa cendre, avec celle qu’on aime, afin de voir la vie autrement, belle et élevée. Les jours coulent dans le miel et dans la flamme. On partage le bonheur, même si le bonheur n’est qu’illusion, avec ceux frappés par le malheur. On partage le malheur, même si le malheur est une réalité, afin de vérifier la patience des autres, et la nôtre aussi. On partage le plaisir d’écrire avec le lecteur, afin de déguster la magie du mot et le spiritisme du verbe. Sans le partage, il n’existera ni l’envie de l’écriture, ni celle de la lecture. Quand la littérature devient partage, elle se métamorphose en miroir et en regardeur dans le miroir à la fois.

    On partage la littérature ; plutôt la littérature éclot en partage, dans le partage. Elle est née partagée. Elle est faite à deux mains, avec deux mains. Celle qui écrit et l’autre qui lit.

    On partage le sel, el-melh, le sens noble du sel, pour dire et vivre l’hospitalité. On dit : l’écriture est le sel de la vie. La lecture aussi. Le partage du sel a un sens mystique. Le sel c’est aussi le pain. Le sel c’est aussi la confiance. Le sel c’est aussi la fidélité. Le sel c’est aussi la virilité. Le sel c’est aussi la paix. Nous sommes le peuple des nuages. On prie pour rentrer au Paradis et on prie pour la pluie. La pluie a sa prière spéciale.

    On partage l’eau pour exprimer la générosité et l’amour commun de la vie. L’eau partagée c’est la vie partagée. La gourde c’est l’honneur. Il faut sauvegarder l’honneur. La culture, la vraie culture, c’est le partage. Et c’est défendre la culture du partage. Se partager, avec joie, loin de tout égoïsme aveugle, les valeurs humaines produites depuis la nuit des temps, sur cette petite planète errante. Si la culture inculque à l’être humain le respect de l’autre et le partage avec lui du sourire et le rêve, la politique, quant à elle, inculque à l’être humain le sens de l’hégémonie et de la dominance.

    La culture est un acte de civisme et de civilisationnel parce qu’elle relève du partage, tandis que la politique est acte sauvage et bestial parce qu’elle est basée sur l’adoration du pouvoir.

    La culture nous apprend l’amour, et la politique nous enseigne la haine ou la méfiance.

    L’intellectuel, à mes yeux, le vrai intellectuel, est celui qui a le sens du partage. Partager avec l’autre le beau et le bien. L’intellectuel, à mes yeux, avant-gardiste ou organique qu’importe, est celui qui excelle en partageant ce qu’il a dans la langue, dans le cœur et entre les mains. Celui qui défend l’hospitalité comme philosophie dans la nouvelle cité. Celle de demain. Celui qui, après la fin des ères des prophètes envoyés par le Ciel, est capable de jouer le rôle d’apôtre moderne annonciateur de la charte de vivre ensemble, où on défend la différence. Et on se partage la pomme, le pain, le sel, l’eau et le poème.

    Amine ZAOUI, Liberté
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