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La relation banques-Etat a besoin d’être encadrée

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  • La relation banques-Etat a besoin d’être encadrée

    Lies Kerrar. Economiste et expert en finances

    «La relation banques-Etat a besoin d’être encadrée»


    El Watan le 12.06.13 | 10h00


    Economiste et spécialiste des questions financières, Lies Kerrar dirige actuellement le cabinet Humilis, spécialisé dans les services et conseils en ingénierie financière et investissement.
    A travers ce bref entretien, il nous livre son analyse sur la problématique de l’accumulation récurrente de créances non performantes dans les portefeuilles des banques publiques.


    - Malgré l’amélioration des dispositifs de gestion prudentielle, les banques publiques continuent à enregistrer de forts taux de mauvaises créances. Comment expliquez-vous cet état de fait ?

    Sur l’état des portefeuilles des créances des banques publiques, nous n’avons pas de données complètes présentées de manière régulière sur plusieurs années pour pouvoir en faire une analyse. Cela n’est malheureusement pas présenté de manière détaillée dans le rapport annuel de la Banque d’Algérie ou dans les états financiers publiés par les banques. Tout ce que nous avons, ce sont des chiffres ou pourcentages tirés de déclarations épisodiques. Selon ces déclarations, la situation s’est améliorée. Ceci est cohérent avec les différentes vagues d’assainissement des portefeuilles, notamment en ce qui concerne les entreprises publiques. En «assainissant» des mauvaises créances, on améliore ponctuellement le bilan des banques. Cela permet d’assurer leur solvabilité. Par contre, si de telles opérations sont récurrentes, cela ne solutionne pas les problématiques à la source des taux élevés de mauvaises créances. C’est un travail de fond sur le processus de gestion du risque crédit qui permet d’améliorer la performance des banques. A ce niveau, il y a des progrès à faire tant au niveau interne des banques, au niveau de leur gouvernance, qu’au niveau externe. Par exemple, au niveau externe, il n’est pas possible d’escompter développer des pratiques de gestion de risque crédit et d’analyse de crédit sans que le CNRC ne mette à la disposition des acteurs économiques une base de données électronique des états financiers des entreprises. Il s’agit de la «matière première» de l’analyse financière, sur laquelle repose la gestion du risque de crédit.

    - Les créances douteuses des banques sont-elles essentiellement dues aux dettes liées aux dispositifs de soutien à l’emploi ?

    L’implication massive des banques dans le financement des dispositifs Ansej et CNAC date de février 2011, dans la foulée du Printemps arabe. Ces dispositifs prévoient des congés d’intérêt et de remboursement de principal de trois ans. Cela veut dire que si ces prêts ne sont pas économiquement performants, cela ne commencera à apparaître dans les bilans des banques qu’à partir de 2014. Pour la partie de ce dispositif qui a débuté en 2011, il n’est pas possible de constater que les entrepreneurs remboursent ou ne remboursent pas car ils n’ont tout simplement aucun paiement à faire avant trois ans.

    - Les interférences politco-bureaucratiques dans la gestion des banques publiques pèsent-elles lourd sur la qualité de leurs portefeuilles de crédit ?

    C’est un argument fréquemment évoqué sans que l’on puisse en analyser scientifiquement l’ampleur et le processus. Mais historiquement, ce n’est pas une spécificité à l’Algérie. Et la recherche, au niveau mondial, montre qu’il y a une forte corrélation entre le niveau de créances non performantes et la part des banques publiques dans le système bancaire. Le lien entre l’Etat et les banques, s’il n’est pas encadré par une gouvernance suffisamment articulée, pose naturellement, à terme, des problèmes de motivation et d’incitation du management. Cela rend invisible la performance du management des banques. Cela est aggravé si les gestionnaires encourent des risques pénaux dans l’exercice de leurs fonctions, même s’ils n’agissent pas délibérément de façon malhonnête.
    Il est donc ainsi naturellement nécessaire de supprimer, sans plus tarder, la pénalisation de l’acte de gestion, mais aussi de renforcer la bonne gouvernance de façon à permettre aux administrateurs et gestionnaires de remplir leurs fonctions en toute sérénité, avec diligence et professionnalisme. C’est aussi une des raisons pour lesquelles le FCE et Nabni recommandent de sortir des banques publiques les actifs qui ne correspondent pas à une exploitation commerciale normale. Le management n’aura ainsi ni les rentes ni les boulets du passé à gérer et pourra se concentrer (et rendre compte) sur le défi de construire, à partir des ressources humaines et du réseau existant, la banque répondant aux défis de transformation de l’économie.

    Akli Rezouali
    Othmane BENZAGHOU
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