Annonce

Réduire
Aucune annonce.

« ‘Tu signes ici, c’est tout’ : Procès injustes au Maroc fondés sur des aveux à la police »

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • « ‘Tu signes ici, c’est tout’ : Procès injustes au Maroc fondés sur des aveux à la police »

    Il ne pourra y avoir de procès équitables que lorsque les tribunaux écarteront toute déclaration arrachée par la torture ou les abus
    21 juin 2013

    (Rabat) –Les tribunaux marocains condamnent certains accusés en se fondant sur des aveux qui selon ces derniers ont été obtenus sous la torture ou falsifiés par la police, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui. La réforme de la justice planifiée par le pays doit prévoir de meilleures protections pour veiller à ce que les tribunaux écartent des preuves utilisables toute déclaration faite aux policiers sous la torture ou les mauvais traitements.

    Le rapport de 100 pages, « ‘Tu signes ici, c’est tout’ : Procès injustes au Maroc fondés sur des aveux à la police », étudie en détail cinq procès qui ont eu lieu entre 2009 et 2013 et qui ont concerné en tout 77 personnes – notamment des manifestants réclamant des réformes, des activistes du Sahara occidental et des personnes accusées de complot terroriste. Human Rights Watch a découvert que dans les affaires étudiées, les juges avaient manqué d’examiner sérieusement les affirmations des accusés selon lesquelles leurs aveux avaient été obtenus par des moyens illégaux avant d’être utilisés comme le fondement principal pour les condamner, voire le seul. Ce manquement des tribunaux encourage de fait les policiers à utiliser la torture, les mauvais traitements et les faux pour obtenir des déclarations, a déclaré Human Rights Watch.

    « Une fois que les policiers marocains ont votre déclaration en main, ce n’est pas pour vous le commencement d’un procès impartial qui cherche à découvrir la vérité », a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch. « Vous êtes à bord d’un train qui fonce vers le verdict de culpabilité. »

    La loi marocaine pénalise la torture et interdit aux tribunaux d’utiliser toute déclaration qui aurait été obtenue par « la violence ou la contrainte ». Pourtant, dans les cinq procès étudiés par Human Rights Watch, les tribunaux n’ont pas examiné consciencieusement les allégations d’abus policiers émises par les accusés avant d’accepter leurs aveux comme preuve à charge principale. Les tribunaux ont condamné 76 des 77 accusés, dont 38 sont toujours en prison.

    Human Rights Watch a observé le déroulement des procès, étudié des documents officiels des tribunaux, s’est entretenue avec des avocats de la défense et a inclus dans le rapport quantité d’informations reçues de la part des autorités marocaines.

    Plusieurs accusés ont décrit à Human Rights Watch comment ils avaient été frappés, bourrés de coups de pieds, giflés et menacés par la police pendant leur interrogatoire, et comment ils avaient été forcés à signer des déclarations qu’on ne leur laissait pas lire et qu’ils ont plus tard récusées au tribunal.




    D’autres, qui avaient pu lire et signer leurs déclarations, ont déclaré que les autorités les avaient trafiquées par la suite pour les impliquer dans des crimes.
    La loi marocaine donne le droit de contacter un avocat lors de la garde à vue. Mais dans la grande majorité des cas étudiés par Human Rights Watch, les accusés n’ont pas eu accès à un avocat, que ce soit avant ou pendant leur interrogatoire, ou bien lorsque la police leur a présenté leur déclaration à signer.

    Lorsque les accusés ont plus tard parlé des violences physiques au juge d’instruction ou au juge siégeant au tribunal, les magistrats n’ont pas ouvert d’enquête et parfois même ont rejeté ces allégations en disant qu’ils ne voyaient aucune trace sur le corps de l’accusé ou qu’il aurait dû émettre ces allégations avant. Dans une affaire où le procureur a tout de même ordonné un examen médical des accusés, toutes les preuves indiquent que cet examen a été superficiel et bien en-deçà de ce qu’exigent les normes internationales.

    Les juges marocains devraient éplucher les procès-verbaux de police de façon plus déterminée lorsque les accusés les récusent, et convoquer tous les témoins pertinents à cet égard, notamment, si cela s’avère utile, les agents de police qui ont préparé les déclarations qui incriminent les accusés. Un examen plus approfondi des procès-verbaux seraient aussi, pour les policiers, le signal qu’ils doivent recueillir des preuves par des moyens légaux et non par la torture, a déclaré Human Rights Watch.

    En août 2009, le roi Mohammed VI a annoncé un effort d’envergure visant à refondre la justice. La constitution de 2011 comprend un certain nombre d’articles conçus de façon à renforcer l’indépendance judiciaire et les droits des accusés, ainsi qu’à interdire la torture et la détention arbitraire. Depuis 2012, une Haute instance du dialogue national sur la réforme de la justice a été chargée par le roi de rédiger une charte de réforme de la justice, dont la publication est prévue pour les semaines à venir.

    « Il n’est pas toujours facile de déterminer la vérité lorsqu’un accusé clame que la police l’a forcé à signer de faux aveux », a déclaré Sarah Leah Whitson. « Mais c’est seulement lorsque les juges auront la volonté, les compétences et le courage de le faire – et d’écarter les aveux douteux – que nous pourrons dire que la réforme de la justice est vraiment en cours. »

    Human Rights Watch a étudié les condamnations prononcées en février 2013 contre 25 Sahraouis pour agression contre les forces de sécurité qui démantelaient un campement de protestation à Gdeim Izik, au Sahara occidental; contre 6 membres du mouvement social protestataire du 20-Février, en septembre 2012, en lien avec une manifestation à Casablanca; contre 2 syndicalistes et 8 jeunes gens en juin 2011, en lien avec une manifestation à Bouarfa; contre un boxeur trop audacieux en septembre 2010, sur la base d’accusations de fraude suspectes; et contre 35 hommes en juillet 2009, accusés de faire partie d’un complot terroriste connu sous le nom d’« affaire Belliraj ».

    Le boxeur, Zakaria Moumni, a décrit comment les policiers lui avaient présenté ses déclarations après l’avoir passé à tabac pendant ses trois jours de détention au secret :

    Ils ont mis les papiers en face de moi, mais ils cachaient le haut de la page. J’ai dit que je voulais lire ce que j’étais en train de signer. Ils ont répondu : « Tu signes ici, c’est tout, tu récupéreras tes affaires et tu pourras t’en aller. » Quand j’ai insisté pour lire, ils m’ont remis le bandeau sur les yeux, m’ont écrasé les pieds et m’ont menacé de me renvoyer là où j’étais avant… A ce moment-là j’ai signé beaucoup de choses sans même savoir ce que c’était.

    Les policiers ont alors amené Moumni au tribunal, où il a été jugé le même jour pour des accusations de fraude très contestables. Moumni a déclaré plus tard à Human Rights Watch qu’il avait montré au juge des bleus et des coupures sur ses tibias en lui expliquant que ses interrogateurs l’avaient frappé avec des tiges de fer. Le juge n’a pas réagi, d’après Moumni. Condamné à trois ans de prison, ce n’est que plus tard que Moumni a découvert que les documents qu’il avait signés comprenaient des aveux complets et une renonciation à son droit d’être représenté par un avocat pendant le procès.
    Les autorités marocaines devraient prendre les mesures suivantes pour garantir des procès plus équitables et combattre la torture et les mauvais traitements:
    • Garantir que toute personne placée en garde à vue soit informée immédiatement de son droit aux services d’un avocat, notamment à recevoir rapidement la visite d’un avocat;
    • Veiller à ce que le tribunal donne réellement aux accusés l’occasion de lire leur procès-verbal de police, de récuser toute inexactitude éventuelle, et d’émettre à tout moment de l’instruction ou du procès des allégations de mauvais traitement ou de torture en garde à vue;
    • Garantir que les tribunaux examinent toute allégation de torture faite par les accusés, que si elles sont crédibles, ils rejettent comme preuve toute déclaration faite sous la torture, comme l’exige la loi marocaine, et qu’ils renvoient l’accusation de torture, qui est un crime, devant le ministère public;
    • Réviser l’article 290 du Code de procédure pénale, qui donne aux procès-verbaux préparés par la police une crédibilité inhérente dans les affaires impliquant des infractions passibles de peines de prison de moins de cinq ans. Cette loi place la charge de la preuve sur l’accusé, qui doit démontrer que la déclaration préparée par la police est fausse; la loi devrait être révisée pour qu’un procès-verbal de police soit traité de la même façon que toute autre preuve, sans préjuger de sa crédibilité.

    Les autorités marocaines devraient en outre libérer les 21 accusés de l’affaire de Gdeim Izik et les 17 de l’affaire Belliraj qui sont actuellement en prison, ou bien leur accorder un nouveau procès qui soit équitable. En ce qui concerne les accusés de Gdeim Izik, tout nouveau procès devrait se tenir devant un tribunal civil, à la place du tribunal militaire qui les a condamnés la première fois. S’ils sont rejugés, les tribunaux devraient étudier les allégations de torture des accusés, que les traces physiques des possibles actes de torture soient visibles ou pas, et veiller à ce qu’aucune déclaration obtenue par la violence ou sous la contrainte ne soit admise comme preuve.

    Human Right Watch
    Dernière modification par jawzia, 21 juin 2013, 20h10.

  • #2
    Le rapport de 100 pages, « ‘Tu signes ici, c’est tout’ : Procès injustes au Maroc fondés sur des aveux à la police », étudie en détail cinq procès qui ont eu lieu entre 2009 et 2013 et qui ont concerné en tout 77 personnes – notamment des manifestants réclamant des réformes, des activistes du Sahara occidental et des personnes accusées de complot terroriste.
    Pas bon pour les affaires, tout cela. L'étau se resserre !

    Commentaire


    • #3
      Pas bon pour les affaires, tout cela. L'étau se resserre !
      ALLO,ALLo,

      Kennedy,C.RICE,Ross............................

      Commentaire


      • #4
        Au Maroc, une voie express vers le verdict «coupable»
        21 juin 2013

        On peut réformer les tribunaux de mille façons, mais les procès équitables ne sont possibles que si le pouvoir judiciaire fait valoir son rôle de surveillance des activités de la police et se montre moins empressé à accepter comme preuves des déclarations réfutées par leurs auteurs.
        En 2010, la police marocaine a arrêté Taki Machdoufi à Laâyoune (Sahara occidental) et l'a interrogé pendant cinq jours sur les affrontements mortels qui venaient juste d'avoir lieu entre des manifestants sahraouis et des policiers. À chaque fois que ce militant sahraoui niait toute implication dans la violence, nous a-t-il déclaré, deux agents le frappaient au cou et à la tête. «Tu peux dire tout ce que tu veux», ont-ils ajouté d'après son récit. «De toute façon on va écrire ta déclaration comme bon nous semble.»

        Une fois l'interrogatoire terminé, les policiers ont présenté à Machdoufi un procès-verbal de sa déclaration afin qu'il le signe. Il a demandé de pouvoir le lire. Mais au lieu de cela, un des agents s'est mis derrière lui, a attrapé sa main qui était menottée derrière son dos, et a appuyé son doigt sur un tampon encreur puis sur le procès-verbal, se souvient Machdoufi.

        Tout comme ses co-accusés, Machdoufi n'a vu aucun avocat pendant sa garde à vue. Devant le tribunal, lui et les autres ont tous récusé leurs déclarations à la police; la plupart d'entre eux ont déclaré que les policiers les avaient torturés. Mais le tribunal n'a ordonné aucun examen médical pour vérifier ces allégations de violences, avant de condamner l'ensemble des 25 accusés pour attaques contre la police. Seule preuve contre eux : les aveux qu'ils contestaient. Après deux ans de prison, Machdoufi est désormais libre; mais ses co-accusés purgent des peines allant jusqu'à 30 ans de prison.

        Pendant près de deux décennies, le Maroc a suivi une voie de réformes graduelles, faisant davantage de place à la critique et aux protestations. Certaines des plus graves violations des droits humains commises par les services de sécurité sous le règne de feu le roi Hassan II, telles que les disparitions forcées, ont disparu. L'Instance Equité et Réconciliation, nommée par le roi Mohammed VI, a permis au pays de reconnaître des crimes du passé et de dédommager des victimes, même si aucun responsable n'a été traduit en justice.

        Pourtant la justice a été la mauvaise élève du processus de réforme. En effet un État qui n'est que partiellement réformé, tout en levant le pied sur la force brute comme outil de répression, aura tendance à compter davantage sur un pouvoir judiciaire soumis pour punir les opposants qui iraient trop loin.

        Conscient du mécontentement public envers le système juridictionnel marocain, Mohammed VI a fait de la réforme de la justice le thème d'un discours à la nation de 2009. Quant à la constitution de 2011, elle présente de nombreux articles qui pourraient améliorer l'indépendance de la justice. Une haute instance du dialogue national sur la réforme de la justice, nommée par le roi, devrait bientôt révéler une « charte » pour la réforme du secteur conçue à la lumière de la nouvelle constitution.

        On peut réformer les tribunaux de mille façons, mais les procès équitables ne sont possibles que si le pouvoir judiciaire fait valoir son rôle de surveillance des activités de la police et se montre moins empressé à accepter comme preuves des déclarations réfutées par leurs auteurs.
        Human Rights Watch a observé plusieurs procès politiquement sensibles impliquant des activistes sahraouis, des manifestants et des gens accusés de complot terroriste. Nous nous sommes entretenus avec des dizaines d'avocats marocains sur la défense des clients impliqués dans les affaires politiquement sensibles. Le constat général était clair : une fois que les policiers ont obtenu un procès-verbal signé – quelles que soient la méthode employée, les formulations improbables qu'il contient ou la minceur du reste du dossier – l'accusé se trouve sur une voie express vers le verdict «coupable».

        «Tout se passe comme si le procès s'était déjà tenu au poste de police», nous a déclaré un des avocats. «Il n'y a presque rien que vous puissiez faire au tribunal pour revenir sur votre déclaration.»

        La loi marocaine offre aux accusés de solides protections en pénalisant la torture et en obligeant les juges à exclure toute preuve obtenue par «la violence ou la contrainte». Mais il y a d'autres lois qui doivent être réformées. Celle qui accorde aux accusés placés en garde à vue le droit de contacter un avocat devrait être améliorée pour garantir une rencontre plus rapide et face-à-face avec lui. Dans les affaires que nous avons étudiées, peu d'accusés ont vu un avocat avant que la police ait terminé leur interrogatoire et leur ait présenté un procès-verbal à signer.

        Un autre problème vient du fait que le Code de procédure pénale veut que le tribunal considère les procès-verbaux préparés par la police comme faisant foi jusqu'à preuve du contraire. Les législateurs devraient amender cet article, qui s'applique seulement aux délits (passibles de moins de cinq ans de prison), et exiger du tribunal qu'il traite un procès-verbal de police comme n'importe quel autre élément de preuve, plutôt que de charger l'accusé lui-même de la tâche de le réfuter.

        Réformer la justice implique non seulement de réviser les lois mais aussi de former et d'instruire les magistrats pour qu'ils réagissent immédiatement aux allégations de violences policières. Il est tout à fait envisageable que certains accusés disent la vérité quand ils clament avoir été torturés ou maltraités pour signer de fausses déclarations.

        Un juge devrait interroger tout accusé qui émet ce type d'allégation sur ce qu'il a vécu en garde à vue, mais aussi, le cas échéant, ordonner un examen médical impartial et convoquer l'agent de police qui a pris la déclaration. L'importance d'une enquête se fait encore plus sentir lorsque toute l'affaire ne repose que sur des aveux contestés, sans aucun témoin à charge ni aucune preuve matérielle.

        Il n'est pas toujours facile pour un juge de déterminer ce qu'il s'est réellement passé lorsqu'un accusé était seul avec la police. Mais les normes internationales sont une source de conseils sur la façon d'interroger les victimes supposées de torture afin d'établir leur crédibilité, même en l'absence de traces visibles. Les juges doivent accomplir leur devoir aux yeux de la loi et exclure toute preuve arrachée par «la violence ou la contrainte».

        S'ils prenaient ce devoir au sérieux, les juges porteraient un grand coup non seulement en faveur de l'équité des procès mais aussi contre la torture et les mauvais traitements, et ils enverraient aux policiers un signal : ils doivent désormais soit recueillir leurs preuves par des moyens légaux, soit prendre le risque de voir le tribunal les rejeter.

        Eric Goldstein est directeur adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à Human Rights Watch

        Commentaire


        • #5
          ALLO,ALLo,

          Kennedy,C.RICE,Ross............................
          tu tappes ici, c'est tout!

          tala3 nivo assahbi!

          Commentaire

          Chargement...
          X