Vie ! ô bonheur ! bois profonds,
Nous vivons.
L'essor sans fin nous réclame ;
Planons sur l'air et les eaux !
Les oiseaux
Sont de la poussière d'âme.
Accourez, planez ! volons
Aux vallons,
A l'antre, à l'ombre, à l'asile !
Perdons-nous dans cette mer
De l'éther
Où la nuée est une île !
Du fond des rocs et des joncs,
Des donjons,
Des monts que le jour embrase,
Volons, et, frémissants, fous,
Plongeons-nous
Dans l'inexprimable extase !
Oiseaux, volez aux clochers,
Aux rochers,
Au précipice, à la cime,
Aux glaciers, aux lacs, aux prés ;
Savourez
La liberté de l'abîme!
Vie ! azur ! rayons ! frissons !
Traversons
La vaste gaîté sereine,
Pendant que sur les vivants,
Dans les vents,
L'ombre des nuages traîne !
Avril ouvre à deux battants
Le printemps ;
L'été le suit, et déploie
Sur la terre un beau tapis
Fait d'épis,
D'herbe, de fleurs, et de joie.
Buvons, mangeons ; becquetons
Les festons
De la ronce et de la vigne ;
Le banquet dans la forêt
Est tout prêt ;
Chaque branche nous fait signe.
Les pivoines sont en feu ;
Le ciel bleu
Allume cent fleurs écloses ;
Le printemps est pour nos yeux
Tout joyeux
Une fournaise de roses.
Tu nous dores aussi tous,
Feu si doux
Qui du haut des cieux ruisselles ;
Les aigles sont dans les airs
Des éclairs,
Les moineaux des étincelles.
Nous rentrons dans les rayons ;
Nous fuyons
Dans la clarté notre mère ;
L'oiseau sort de la forêt
Et paraît
S'évanouir en lumière.
Parfois on rampe accablé
Dans le blé ;
Mais juillet a pour ressource
L'ombre, où, loin des chauds sillons,
Nous mouillons
Nos pieds roses dans la source.
Depuis qu'ils sont sous les cieux,
Soucieux
Du bonheur de la prairie,
L'herbe et l'arbre chevelu
Ont voulu
Dans leur tendre rêverie
Qu'à jamais le fruit, le grain,
L'air serein,
L'amourette, la nichée,
L'aube, la chanson, l'appât,
Occupât
Notre joie effarouchée.
Vivons ! chantons ! Tout est pur
Dans l'azur ;
Tout est beau dans la lumière !
Tout vers son but, jour et nuit,
Est conduit ;
Sans se tromper, le fleuve erre.
Toute la campagne rit ;
Un esprit
Palpite sous chaque feuille.
- Aimons ! murmure une voix
Dans les bois ;
Et la fleur veut qu'on la cueille.
Quand l'iris a diapré
Tout le pré,
Quand le jour plus tiède augmente,
Quand le soir luit dans l'étang
Éclatant,
Quand la verdure est charmante,
Que dit l'essaim ébloui ?
Oui ! oui ! oui !
Les collines, les fontaines,
Les bourgeons verts, les fruits mûrs,
Les azurs
Pleins de visions lointaines,
Le champ, le lac, le marais,
L'antre frais,
Composent, sans pleurs ni peine,
Et font monter vers le ciel
Éternel
L'affirmation sereine !
L'aube et l'éblouissement
Vont semant
Partout des perles de flamme ;
L'oiseau n'est pas orphelin ;
Tout est plein
De la mystérieuse âme !
Quelqu'un que l'on ne voit pas
Est là-bas
Dans la maison qu'on ignore ;
Et cet inconnu bénit
Notre nid,
Et sa fenêtre est l'aurore.
Et c'est à cause de lui
Que l'appui
Jamais ne manque à nos ailes,
Et que les colombes vont
Sur le mont
Boire où boivent les gazelles.
Grâce à ce doux inconnu,
Adam nu
Nous souriait sous les branches ;
Le cygne sous le bouleau
A de l'eau
Pour laver ses plumes blanches.
Grâce à lui, le piquebois
Vit sans lois,
Chéri des pins vénérables,
Et délivrant des fourmis
Ses amis
Les cèdres et les érables.
Grâce à lui, le passereau
Du sureau
S'envole, et monte au grand orme ;
C'est lui qui fait le buisson
De façon
Qu'on y chante et qu'on y dorme.
Il nous met tous à l'abri,
Colibri,
Chardonneret, hochequeue,
Tout l'essaim que l'air ravit
Et qui vit
Dans la grande lueur bleue.
A cause de lui, les airs
Et les mers,
Les bois d'aulnes et d'yeuses,
La sauge en fleur, le matin,
Et le thym,
Sont des fêtes radieuses ;
Les blés sont dorés, les cieux
Spacieux,
v.hugo
Nous vivons.
L'essor sans fin nous réclame ;
Planons sur l'air et les eaux !
Les oiseaux
Sont de la poussière d'âme.
Accourez, planez ! volons
Aux vallons,
A l'antre, à l'ombre, à l'asile !
Perdons-nous dans cette mer
De l'éther
Où la nuée est une île !
Du fond des rocs et des joncs,
Des donjons,
Des monts que le jour embrase,
Volons, et, frémissants, fous,
Plongeons-nous
Dans l'inexprimable extase !
Oiseaux, volez aux clochers,
Aux rochers,
Au précipice, à la cime,
Aux glaciers, aux lacs, aux prés ;
Savourez
La liberté de l'abîme!
Vie ! azur ! rayons ! frissons !
Traversons
La vaste gaîté sereine,
Pendant que sur les vivants,
Dans les vents,
L'ombre des nuages traîne !
Avril ouvre à deux battants
Le printemps ;
L'été le suit, et déploie
Sur la terre un beau tapis
Fait d'épis,
D'herbe, de fleurs, et de joie.
Buvons, mangeons ; becquetons
Les festons
De la ronce et de la vigne ;
Le banquet dans la forêt
Est tout prêt ;
Chaque branche nous fait signe.
Les pivoines sont en feu ;
Le ciel bleu
Allume cent fleurs écloses ;
Le printemps est pour nos yeux
Tout joyeux
Une fournaise de roses.
Tu nous dores aussi tous,
Feu si doux
Qui du haut des cieux ruisselles ;
Les aigles sont dans les airs
Des éclairs,
Les moineaux des étincelles.
Nous rentrons dans les rayons ;
Nous fuyons
Dans la clarté notre mère ;
L'oiseau sort de la forêt
Et paraît
S'évanouir en lumière.
Parfois on rampe accablé
Dans le blé ;
Mais juillet a pour ressource
L'ombre, où, loin des chauds sillons,
Nous mouillons
Nos pieds roses dans la source.
Depuis qu'ils sont sous les cieux,
Soucieux
Du bonheur de la prairie,
L'herbe et l'arbre chevelu
Ont voulu
Dans leur tendre rêverie
Qu'à jamais le fruit, le grain,
L'air serein,
L'amourette, la nichée,
L'aube, la chanson, l'appât,
Occupât
Notre joie effarouchée.
Vivons ! chantons ! Tout est pur
Dans l'azur ;
Tout est beau dans la lumière !
Tout vers son but, jour et nuit,
Est conduit ;
Sans se tromper, le fleuve erre.
Toute la campagne rit ;
Un esprit
Palpite sous chaque feuille.
- Aimons ! murmure une voix
Dans les bois ;
Et la fleur veut qu'on la cueille.
Quand l'iris a diapré
Tout le pré,
Quand le jour plus tiède augmente,
Quand le soir luit dans l'étang
Éclatant,
Quand la verdure est charmante,
Que dit l'essaim ébloui ?
Oui ! oui ! oui !
Les collines, les fontaines,
Les bourgeons verts, les fruits mûrs,
Les azurs
Pleins de visions lointaines,
Le champ, le lac, le marais,
L'antre frais,
Composent, sans pleurs ni peine,
Et font monter vers le ciel
Éternel
L'affirmation sereine !
L'aube et l'éblouissement
Vont semant
Partout des perles de flamme ;
L'oiseau n'est pas orphelin ;
Tout est plein
De la mystérieuse âme !
Quelqu'un que l'on ne voit pas
Est là-bas
Dans la maison qu'on ignore ;
Et cet inconnu bénit
Notre nid,
Et sa fenêtre est l'aurore.
Et c'est à cause de lui
Que l'appui
Jamais ne manque à nos ailes,
Et que les colombes vont
Sur le mont
Boire où boivent les gazelles.
Grâce à ce doux inconnu,
Adam nu
Nous souriait sous les branches ;
Le cygne sous le bouleau
A de l'eau
Pour laver ses plumes blanches.
Grâce à lui, le piquebois
Vit sans lois,
Chéri des pins vénérables,
Et délivrant des fourmis
Ses amis
Les cèdres et les érables.
Grâce à lui, le passereau
Du sureau
S'envole, et monte au grand orme ;
C'est lui qui fait le buisson
De façon
Qu'on y chante et qu'on y dorme.
Il nous met tous à l'abri,
Colibri,
Chardonneret, hochequeue,
Tout l'essaim que l'air ravit
Et qui vit
Dans la grande lueur bleue.
A cause de lui, les airs
Et les mers,
Les bois d'aulnes et d'yeuses,
La sauge en fleur, le matin,
Et le thym,
Sont des fêtes radieuses ;
Les blés sont dorés, les cieux
Spacieux,
v.hugo