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Au Liban le triomphe de la Foi sur l'acier

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  • Au Liban le triomphe de la Foi sur l'acier

    Au Liban Sud, le soleil est là les enfants jouent et même si rien ne sera comme avant, la vie reprend ses droits pour ses libanais qui ont la résistance dans le sang et où la foi a été plus forte que le déluge d'acier qui s'est abattus sur sa terre et ses habitants.

    ===

    Par cette matinée ensoleillée, la vue des enfants qui courent dans tous les sens sur la plage de Saïda est apaisante. Tantôt ils se baignent, tantôt ils se roulent dans le sable doré, sous le regard comblé de leurs parents. Lesquels jettent instinctivement, des coups d’œil fugaces vers le ciel. Les armes se sont tues depuis déjà une semaine et les cris avertissant du danger d’un bombardement israélien également. Cependant, les «tayarane, tayarane (aviation, ndlr)» bourdonnent encore dans les oreilles de plus d’un habitant du Liban-Sud. Qui n’ont pas peur de mourir mais ne prennent pas de risques inutiles. Ils tiennent à préserver leur vie pour faire face à l’invasion israélienne. Les Libanais du Sud, en grande majorité des chiites, sont des résistants. Ils naissent résistants. Rien ne les ébranle : ni la faim et la soif, ni la douleur et encore moins la mort. Leurs ennemis sont les sionistes, leur rêve est El Qods. Vivre dignement sur leur terre est leur aspiration même si pour cela ils doivent irriguer le sol libanais de leur sang. Cet univers, palpé de près, durant les quelques semaines passées au Liban, renseigne sur la force de la foi de ces gens-là

    Dès qu’on foule le sol syrien, l’agression qui s’abat depuis quelques semaines déjà sur le Liban se fait ressentir. Le tarif d’une course en taxi jusqu’à Beyrouth est exorbitant. Au chauffeur qui accepte de slalomer durant quatre heures, sous un ciel qui pleut des missiles, à la recherche d’un chemin encore accessible jusqu’à la capitale libanaise, il faut payer le prix du risque.
    C’est avec une vitesse extrême, fenêtres grandes ouvertes et dans un silence de mort -à l’affût de chaque bruit- que la route est parcourue durant la première demi-heure.

    Le chemin est complètement dévasté. Les bombardiers israéliens qui cherchaient depuis le 12 juillet à couper les routes d’approvisionnement en armes du Hezbollah n’ont pas manqué de cibler toutes les voies reliant le Liban à la Syrie à l’exemple de celle menant au poste de Masnaa, à la frontière avec la Syrie ou encore la route qui relie de nombreux villages de la plaine de la Bekaa à la Syrie. Les routes d’une zone escarpée à l’est de Baalbek ont également été bombardées. Le véhicule avale des kilomètres de chemins abrupts avant de commencer à traverser les villages. Là, le paysage devient paisible. Les petites maisons coloniales rappellent étrangement les petits villages chrétiens sous d’autres cieux. Au cœur de Arida, Haman, Tabardja, Johnny ou encore Tripoli, rien n’indique la peur. Dans le nord du Liban, les magasins sont ouverts, les rues grouillent de monde et le vacarme des voitures est assourdissant.

    Les villages du Nord ne sont pas en guerre. Même à Beyrouth, il suffit de rejoindre un quartier au lieu d’un autre pour se savoir en sécurité. «Là, il n’y a pas de risque», expliquent des Libanais qui avouent être complètement dépassés depuis le début des hostilités par un conflit «livré sur notre territoire entre une puissance étrangère, Israël, et un parti armé se comportant comme un État souverain, le Hezbollah». Et si certains, adeptes d’autres confessions religieuses, se sont élevés contre «l’aventurisme» du Hezbollah, d’autres ont affiché leur soutien indéfectible contre le sionisme. Des réactions attendues avec la cohabitation de dix-sept confessions religieuses officielles au pays du Cèdre. Les habitants du Liban se sont même segmenté, habilement, des territoires pour chaque communauté. Malgré cette diversité confessionnelle, ils étaient nombreux à se convaincre que l’agression israélienne contre leur pays a démontré l’unité du peuple. D’autres affirment sans détour qu’«au Liban, il n’y a pas d’unité. Les Libanais n’ont pas la culture de l’amour de la patrie mais chacun porte son amour à son idole, le ‘‘zaïm’’». Tous refusent le désarmement de la milice du Hezbollah : «Cette question pourrait attendre.» Il s’agit là d’un accord tacite entre tous les Libanais à travers lequel ils reconnaissent l’incapacité de leur Etat à les protéger.

    Surtout durant ces jours où l’aviation israélienne n’a pas cessé d’inonder les quartiers de Beyrouth, annonçant l’intensification de son attaque. Une attaque qui avait déjà englouti tous les quartiers à forte concentration chiite, dans la banlieue de la capitale. Un simple tour à El Dahiya suffit pour se rendre compte qu’il ne reste plus grand-chose à voir. Sauf peut-être l’organisation parfaite des «yeux» du Hezbollah. Des hommes qui gardent le carré sécurisé en sillonnant les rues en scooter, sifflant au passage de tout véhicule «suspect». D’ailleurs, il faut prendre rendez-vous auprès d’El Hadja Wafa pour pouvoir visiter le carré sécurisé. Le cas échéant, il est aimablement signifié au visiteur de quitter les lieux. Le plus surprenant dans cette banlieue, c’est de voir, au moment où les raids israéliens s’acharnent sur le carré sécurisé, sortir des décombres de ce territoire-fantôme un combattant pour vous crier : «Qu’est-ce que vous faites là ? Fuyez au plus vite cet endroit.» Même au cours de cette dernière nuit, veille de l’application de la résolution 1701, où l’aviation israélienne s’est «défoulée» sur les zones chiites, les combattants du Hezbollah étaient toujours terrés entre deux immeubles en feu. Une nuit inoubliable. Se retrouver à 21h passées à Dahiya relevait de l’inconscience, certes, mais instinctivement une voix vous guide vers l’inconnu.

    Le chauffeur de taxi qui accepte d’embarquer les voyageurs inconscients –que nous sommes- pendant le couvre-feu de Saïda jusqu’à la banlieue de Beyrouth avait fait son choix : «Si je reviens sain et sauf chez moi, j’aurai au moins assuré le pain de mes enfants pour quelques jours. Cela fait un moment que je n’ai rien gagné. Que Dieu nous protège !» Une heure après, le voyage se termine à quelques mètres d’un pont détruit, juste à l’entrée de Dahiya. «Je n’irai pas plus loin. Dahiya est sous les bombardements», dit le chauffeur en actionnant sa marche arrière.

    Avant même qu’il ne disparaisse, un autre véhicule s’arrête, celui de Abbas, un des hommes du Hezbollah. Ce dernier avertit du danger quand nous lui demandons de nous accompagner vers le quartier «Rouis», mais n’y trouve aucun inconvénient : «Que Dieu nous vienne en aide. Priez !» La voiture s’ébranle dans le noir. A grande vitesse.


    Au loin apparaît un des immeubles de l’avenue Nassrallah, en feu. Tout autour, des décombres d’où se dégage une épaisse fumée. Il faut continuer à pied. A peine le véhicule dissimulé, le flash actionné, le cri de notre jeune accompagnateur se fait entendre : «Fuyez, tayarane !»

    Dans ce silence de mort, le bruit du moteur de l’avion israélien perce les tympans. C’est justement à ce moment précis que les coups de feu des combattants du Hezbollah se font entendre. Ils étaient là quelque part derrière les feux et les flammes ! La réaction israélienne ne se fera pas attendre. Une grande explosion résonne et la terre tremble sous nos pieds. Déséquilibre et chute. Abbas est déjà loin mais revient sur ses pas pour nous «ramasser».

  • #2
    Cachés sous le perron d’un immeuble vacillant, nous trouvons la dizaine ou tout au plus la quinzaine de minutes interminable. Les explosions s’intensifient, nos prières aussi. En ces moments où le temps semble se figer, les images de toutes ces victimes retirées calcinées de sous les décombres défilent sous nos yeux. Abbas tremble de tout son corps. Un frissonnement qui n’était pas l’effet de la peur. Dans sa voix qui récitait des versets coraniques, une force se dégageait. Celle de sa foi.

    Cette force de croyance est constatée chez tous les chiites, qu’ils soient combattants, réservistes ou simples civils. Ces derniers, rencontrés à Beyrouth où ils sont venus chercher refuge ou dans leur village au Liban-Sud où ils affrontaient les affres de la mort, étaient toujours prêts à offrir leur vie et celle de leurs enfants pour la «mouquawama». Comme cette femme, mère de famille, qui a choisi de rester à Nabatiya, auprès de son mari médecin.
    Dans ce village au Liban-Sud, elle a passé les trente-trois jours sous les bombardements sans jamais plier.

    «Nous sommes les descendants d’Ahl El Beït, Dieu nous protège. De plus, celui qui renonce à sa terre renonce à son honneur et il est hors de question que nous exécutions les ordres des sionistes. Ce n’est pas à eux de nous ordonner de quitter nos maisons», explose cette mère dont la maison a été détruite alors qu’elle se cachait avec ses enfants dans l’un des refuges du village.
    Sans nourriture ni eau, vivant dans le noir, cette femme-courage du Sud refuse de s’encombrer de ces détails. Elle tient à lancer un seul message à tous ceux qui veulent bien l’entendre : «Toute cette dévastation et ces ruines ne valent pas une goutte de sueur de Hassan Nasrallah. Nous sommes tous prêts à sacrifier nos vies pour le Hezbollah.» Ils le pensent tous, ces enfants du Hezbollah. Et cela depuis leur jeune âge. Comme ces bouts de chou rencontrés lors des enterrements des victimes de Qana, Aïtaroun ou encore Bent Djebeïl. Ces jeunes enfants tiennent dans leur main des drapeaux jaunes avec au centre une main qui brandit un fusil mitrailleur et, au-dessus, en lettres arabes, «ceux du Hezbollah seront les gagnants».

    Avec cet emblème du Hezbollah près du cœur, les enfants du Sud accompagnent leurs parents à leur dernière demeure en criant : «Nous sommes des fidèles du Hezbollah et, dès que nous serons un peu plus grands, nous irons au front combattre les sionistes.»

    Cette réalité semble être ignorée par Israël. L’Etat hébreu aspire à l’anéantissement du Hezbollah. Il néglige le fait que, pour le faire, il faut passer par l’extermination de toute la population chiite. Et ce ne sera qu’un début car, dans cette guerre contre les Israéliens, les combattants de Nasserllah ont le soutien effectif de nombreux autres Libanais, d’autres confessions et de milliers d’autres musulmans dans le Monde arabe. Pendant quelques jours, la peur d’une guerre fratricide entre les sunnites et les chiites avait plané. Un tel cauchemar sonnerait le glas de la nation libanaise. Mais si surprenant que cela puisse paraître, au bout de quatre semaines de guerre, la «nation» libanaise dans toute sa diversité s’est soudée malgré, il faut le dire, l’absence totale d’un Etat libanais.

    Et, pour preuve, le déploiement de l’armée libanaise, trois jours après l’entrée en vigueur de la résolution 1701, n’a pas été accueilli par les youyous. Surtout dans certains villages où les citoyens n’ont pas manqué de reprocher aux militaires leur immobilisme et leur attentisme alors que le Liban était agressé. A Bent Djebeïl, la population n’a pas hésité à crier aux visages des soldats : «Qu’est-ce que vous venez faire chez nous maintenant que vous avez appris à préparer du thé ?» Les images du thé offert par Adnan Daoud, l’ancien colonel de la caserne «Anouar Othmane» de Marjaryoun aux Israéliens avant de leur remettre les armes de tous ses soldats avaient déjà fait le tour de tout le Liban. Adnan Daoud, aujourd’hui suspendu et mis en examen jusqu’à la fin d’une enquête ouverte par le ministère libanais de la Défense, avait brandi le drapeau blanc devant des soldats de l’armée sioniste qui fuyaient les hommes de la résistance après que cette dernière eut réussi à la détruire leurs tanks.

    Ce scandale, dont les images ont été diffusées en premier par la chaîne israélienne, n’a fait qu’enraciner dans l’esprit des Libanais que l’Etat était loin de pouvoir les protéger. Mais certains ont perçu dans la diffusion de la chute scandaleuse de la caserne de Maarjayoun l’objectif de créer un conflit entre les chiites et les sunnites. La remise des clés de la caserne par Adnan Daoud, un sunnite, sans qu’aucune cartouche soit tirée, au moment même où la résistance freinait l’invasion israélienne, visait sans aucun doute à créer la zizanie entre les deux communautés. Mais les Libanais ont refusé d’entrer dans ce jeu malsain. Convaincus que l’erreur incombe en premier à la fragilité de leur Etat, ils ont décidé de se solidariser autour de leurs combattants. «Nous étions plus en sécurité en présence des hommes de Hezbollah même sous les missiles israéliens. Aujourd’hui, on nous parle du déploiement de l’armée libanaise mais jusqu’à présent aucun soldat n’est arrivé jusqu’à ce village», dit, furieuse, Afifa, une native de Messeï El Djebeïl.

    Cette mère de famille a été agressée chez elle par un groupe de soldats israéliens composé de dix-sept éléments. Afifa se souviendra toute sa vie de cette nuit tourmentée qu’elle a passée avec sa famille en compagnie des soldats sionistes qui ont fait irruption chez elle au milieu de la nuit.
    Les soldats israéliens étaient à la recherche de ses deux garçons qui ont trouvé refuge dans le réservoir d’eau. Ils resteront jusqu’au petit matin, cassant l’intérieur de la maison et emportant la somme de 4 700 dollars. «Cette somme représente la totalité de nos économies avec laquelle nous allions restaurer les dégâts causés par les raids israéliens. L’Etat veut désarmer le Hezbollah mais n’est pas là pour nous porter secours. Où sont les soldats libanais ? Ils refusent de venir car ils savent que les Israéliens sont toujours là», lâche, furieuse, la fille de Afifa. A Taïba ou encore à Kafarkala, des citoyens ont renoncé à revenir chez eux, voyant leur demeure toujours occupée par des soldats. Dans ces villages, les citoyens parlent d’une nouvelle victime libanaise en cette ère de cessez-le-feu. Un citoyen aurait provoqué la colère des Israéliens qui occupaient sa maison ; alors, un simple coup de feu a mis fin à la brouille.

    Les soldats israéliens n’ont pas quitté la terre du Liban-Sud. Les combattants du Hezbollah non plus. Mais ces derniers respectent la résolution signée par leur Etat sans croire à la fin de la guerre. «Cela fait quarante jours que je n’ai pas enlever mes chaussures et je ne les enlèverai pas car je m’attends à un deuxième round de cette guerre», dit calmement un jeune combattant, rencontré à Bent Djebeïl. Il n’est pas le seul à penser qu’Israël va encore frapper. «Les sionistes vont de nouveau frapper car ils doivent sauver la face devant leur peuple après la défaite consommée face à l’aile armée du Hezbollah. Ils reviendront même si c’est pour un seul responsable de ce parti afin de démontrer qu’ils ont réussi à décimer la résistance», affirment de jeunes combattants rencontrés dans différentes régions du Liban-Sud. Ces derniers restent convaincus que, certes, le droit sans la force est impuissant mais qu’aussi la force sans le droit est toujours vaincue par la foi. Les Israéliens doivent s’en souvenir.

    Par Hasna Yacoub -envoyée spéciale au Liban-Sud , La Tribune.

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