Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Égypte-Tunisie, les islamistes ne jurent que par le Coran… mais !

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Égypte-Tunisie, les islamistes ne jurent que par le Coran… mais !

    Il faut lire l’entretien accordé par Kamel Jendoubi à Ouest France, le plus gros tirage de la presse française. L’ancien président de l’ISIE (l’Instance supérieure indépendante pour les élections), qui a organisé et supervisé le scrutin constitutionnel du 23 octobre 2011 qui a vu la victoire d’Ennahdha, jette un regard lucide sur l’évolution de ce parti où, affirme-t-il, avant la chute de Ben Ali, deux lignes s’affrontaient.

    «L’une, disant notre salut est de nous réconcilier avec le pouvoir et de nous consacrer à notre mission initiale qui est le prosélytisme islamique, la propagation de la religion et des valeurs de la religion, la société évoluera et viendra le temps de prendre le pouvoir.»

    Face à elle, «une autre ligne» qui «voulait accélérer la chute du pouvoir» en alliance avec «la gauche ou les libéraux (…) et défendue par Rached Ghannouchi».

    C’est cette dernière, selon Jendoubi, qui a triomphé. En 2005, lors du sommet mondial sur les sociétés de l’information à Tunis, à l’issue d’une grève de la faim impliquant plusieurs personnalités, elle a donné naissance au «collectif du 18 octobre pour les libertés», mouvement rassemblant des islamistes, des marxistes, des libéraux. Suite à cela, les islamistes ont adopté trois textes dans lesquels «ils adhéraient à l’Etat civil, à l’égalité hommes-femmes, aux droits de l’Homme».

    Mais depuis leur arrivée au pouvoir, poursuit encore Jendoubi, «ils ont remis en débat ces questions. Ils se sont présentés comme des gens qui ont fait des concessions» alors «qu’ils n’en ont jamais fait».

    Ajoutant : «Leur idée, il ne faut jamais l’oublier, c’est qu’il faut que la société s’islamise.» Leur «intention n’est pas d’avancer vers la démocratie, mais d’instrumentaliser ce compromis pour pouvoir encore réaliser autre chose» en réussissant «à convaincre de leur bonne volonté. Avec la complicité de M. Marzouki (le président de la République)». En fait, explique-t-il, «ce sont des gens (les islamistes) qui n’ont pas de parole. Ils peuvent renoncer du jour au lendemain à leur position d’hier. Sans aucun problème». Quant aux alliés d’Ennahdha au pouvoir, le Congrès pour la république (CPR) du président Marzouki et Etakatol (social-démocrate) de Mustapha Benjaafar l’actuel président de l’Assemblée constituante, ce sont, dit-il, des partis «alibis» qui «n’ont strictement aucun poids. M. Benjaafar pèse parce qu’il est à l’Internationale socialiste et que M. Hollande le soutient (…) M. Marzouki pèse parce qu’il sait parler aux étrangers, à l’Occident. Il sait faire pleurer les députés européens, en parlant de modernité».

    Ces propos sévères sont révélateurs d’un fait : les islamistes, qui ont fait mine de tirer les leçons de la situation algérienne, sans toutefois renoncer à leurs fondamentaux, sans renoncer à ce qui est leur raison d’être (autrement, ils ne seraient pas islamistes), n’acceptent de jouer le jeu de la démocratie et du pluralisme qu’à la condition de soumettre ces deux principes à leur stratégie.

    C’est vrai pour la Tunisie où c’est plus compliqué pour les amis de Ghanouchi de parvenir à leurs fins. C’est surtout vrai pour l’Égypte où les Frères musulmans fonctionnent comme une secte, en circuit fermé, une sorte de gouvernement secret où se prenaient les vraies décisions, et où le gouvernement présidé par Mohamed Morsi, sorte de façade destinée à rassurer leurs alliés occidentaux, n’était là que pour le décor. Aujourd’hui, les médias occidentaux se focalisent sur les islamistes égyptiens, les présentant comme des victimes. Ils ont vite oublié que c’est un mouvement populaire animé par Tamarod qui a été à l’origine de l’éviction de Morsi.

    Ils ont vite oublié la multiplication des appels à la haine du conseiller de Mohamed Morsi, le salafiste Safaouat Hegazi, dont l’un prononcé en sa présence, contre les chiites, les chrétiens coptes. Avec pour résultat le lynchage de quatre chiites le 23 juin par une foule fanatisée. Ou encore ces appels de Mohamed al-Baltagui, dirigeant des Frères musulmans, affirmant que «celui qui nous lancera de l’eau, on lui lancera du sang» !

    Enfin, lors de son investiture, Mohamed Morsi, le musulman croyant, n’avait-il pas juré sur le Coran qu’il serait le président de tous les Égyptiens et pas seulement des 13 millions (sur les 54 millions d’inscrits) qui ont voté pour lui
    ? Et par conséquent, qu’il avait été élu sur un programme d’amélioration des conditions d’existence du plus grand nombre, de renforcement des libertés et de leur respect et non pour en finir avec la démocratie pluraliste comme il avait l’intention de le faire en islamisant au pas
    de charge l’Égypte !

    Hassane Zerrouky- Le Soir
Chargement...
X