Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Jérusalem: l'expulsion silencieuse

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Jérusalem: l'expulsion silencieuse

    Le déménagement forcé de la famille Joubeh :
    de Jérusalem à Ramallah, et de là en Grande-Bretagne
    En mars 2006, le visa touristique de Hayan Joubeh, 44 ans, est arrivé à expiration. Comme il en a l’habitude depuis près de dix ans, il s’est rendu à Aman pour en revenir avec un nouveau visa. « Trois ou quatre jours, et je reviendrai », a-t-il promis à ses quatre enfants. Le jour prévu de son retour, son épouse, Sawsan Kaoud, âgée de 34 ans, a emmené ses quatre enfants dans un centre commercial de El-Bireh. Les enfants ont profité des jeux. Elle les surveillait en buvant du café et en fumant une cigarette. C’est à ce moment que son mari lui a téléphoné. « On ne m’a pas laissé passer (par le point frontière du pont Allenby) », lui a-t-il dit. « Quoi ? » Elle a d’abord pensé avoir mal entendu, puis n’a pas cru ce qu’il lui disait. Mais il ne blaguait pas.

    Hayan Joubeh est né à Jérusalem, il y a vécu et étudié jusqu’à ce qu’il se rende à l’étranger pour étudier le théâtre. Il a épousé une Irlandaise (qui possédait aussi la nationalité britannique). En Grande-Bretagne sont nés Youssef, 13 ans aujourd’hui, et Sophie, 11 ans. En octobre 1995, son épouse est décédée. Hayan Joubeh a décidé de revenir à Jérusalem avec ses enfants, afin qu’ils grandissent dans sa grande famille de Jérusalem.

    L’accord d’Oslo et la perspective d’un accord de paix l’ont aussi encouragé à revenir dans sa ville natale. Il a trouvé un emploi au sein de la chaîne de télévision MBC et a travaillé dans ses bureaux de Jérusalem. Mais au milieu de l’année 1996, lorsqu’il a souhaité renouveler son laissez-passer - ce laissez-passer qui est accordé aux Palestiniens de Jérusalem pour leurs déplacements à l’étranger - on lui a dit, au ministère de l’Intérieur : « Vous n’êtes pas résident ».

    Des habitants de Jérusalem, privés de droits dans leur ville

    En décembre 1995, le ministère israélien de l’Intérieur a entamé une politique systématique de révocation du statut de résident jérusalémite pour des milliers de Palestiniens natifs de la ville pour qui, aux dires du ministère, le « centre de leur vie » n’était plus à Jérusalem et dont le permis de séjour permanent avait dès lors « expiré ». Cela s’appliquait à ceux qui avaient habité ou habitaient à l’étranger, comme aussi à ceux qui vivaient dans les quartiers jouxtant le territoire municipal de Jérusalem. Il n’y a pas eu déclaration officielle de cette politique. Elle n’est apparue clairement pour ce qu’elle était - une politique - qu’au fur et à mesure que des gens et d’autres gens encore ont découvert, au ministère de l’Intérieur et aux postes de frontière, qu’ils n’étaient plus considérés comme habitants, plus comme Jérusalémites et qu’ils étaient privés de droits dans leur propre ville. Hayan Joubeh fut l’un d’eux. Ses tentatives pour récupérer ce statut de résident pour lui-même et ses enfants ont été vaines. Il était sans « identité », sans aucun papier officiel prouvant qu’il existait bien. Dans sa détresse, il a demandé la nationalité irlandaise et l’a obtenue. Depuis lors, il quitte tous les trois mois son pays natal pour y revenir comme touriste.

  • #2
    Occupation israélienne des territoires : la pente savonneuse de l’expulsion

    Occupation israélienne des territoires : la pente savonneuse de l’expulsion...de Amira Hass
    Lorsqu’un officier de l’Administration Civile, à la base militaire de Beit El, a prolongé le visa touristique de Sam Bahour, un homme d’affaires palestinien-américain de Ramallah, et a écrit sur ce visa "dernier permis", il ne l’a pas fait de sa propre initiative.

    Lorsque cet agent a signifié à Bahour la durée qu’il lui reste avant d’être déporté de la ville dans laquelle sa famille a vécu depuis de nombreuses générations et dans laquelle il a lui-même vécu pendant 14 ans avec sa femme et ses deux filles, cet agent n’était que le messager.

    Lorsqu’un fonctionnaire des frontières au Pont Allenby a refusé l’entrée, il y a deux semaines, à une femme palestino-jordanienne, qui arrivait avec son mari, un jeune médecin de Ramallah, il appliquait les ordres.

    Comme l’ont fait les fonctionnaires des frontières qui n’ont pas autorisé la femme espagnole de R.I., de Ramallah, à rentrer avec leur fille âgée de 2 ans, et comme l’ont fait ceux qui ont empêché S.A., un Palestinien né à Ramallah doté de la citoyenneté suédoise, de rentrer avec sa femme et ses enfants (et de retrouver son travail) à Bir Zeit. Le fonctionnaire qui a, par deux fois, refusé l’entrée à P.Z., un Palestinien-américain qui a investi 300 millions de dollars [220 M€] dans les territoires et qui est directeur exécutif d’une société d’investissement palestinienne, obéissait à de nouvelles règles dictées par le ministre de l’intérieur israélien.

    Lorsque les porte-parole du Ministère de l’Intérieur soutiennent régulièrement que ce ne sont pas les nouvelles règles d’entrée, mais plutôt un "toilettage" des procédures existantes, ils ne jouent pas les imbéciles de leur propre initiative. Pas plus que le responsable de l’Administration Civile qui a expliqué à Zahi Khouri - un homme d’affaires palestinien-américain proéminent, qui a échappé, jusqu’à présent, au tampon "dernier permis" - qu’il s’agissait d’un "malentendu administratif". Cette phrase bien aseptisée, et qui n’a pas été inventée par ce fonctionnaire, signifie, ne serait-ce que jusqu’à maintenant, que Khouri et les autres, qui sont dans la même situation que lui, ont reçu des visas touristiques tous les trois mois et que ce n’était qu’un "malentendu".

    Un "malentendu administratif ?" Cette pratique a permis à des milliers de Palestiniens et à leurs épouses de vivre en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza dans une sorte de zone d’ombre : ne recevant pas d’Israël le droit de résidence, mais allant et venant comme des touristes afin de pouvoir vivre comme des Palestiniens dans leur pays d’origine, avec leurs familles, pendant de nombreuses années - 10, 15, voire 30 ans. Et tout d’un coup, quelqu’un d’énergique au Ministère de l’Intérieur a découvert le malentendu et dit à ces gens de partir ?

    En 2000, des règlements "toilettés" de la même veine, concernant les Palestiniens dont les épouses avaient une citoyenneté arabe, c’est à dire non-occidentale, furent émis. Ceux-ci n’étaient pas autorisés à retourner dans leurs foyers. Entre 1994 et 2000, pendant les années d’Oslo [entre la signature des Accords d’Oslo et la première Intifada], des instructions furent données qui ralentirent le processus de "regroupement familial", pour lequel attendent dans les territoires occupés des dizaines de milliers de familles, au minimum. Ces familles ne vivent pas à Haïfa ou à Ashkelon, mais en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza. Et malgré cela, en 2000, même ce processus minimal de regroupement familial, que seul Israël a l’autorité d’accorder, a été gelé. En conséquence, des milliers de familles furent condamnées à une séparation cruelle - entre pères et enfants, femmes et maris, grands-parents et petits-enfants.

    En 1996, ces mêmes décideurs - le gouvernement Travailliste et le gouvernement Likoud-Shas - émirent un ordre similaire : retirer le droit de résider à Jérusalem aux Palestiniens nés à Jérusalem et qui étudient ou travaillent à l’étranger ou qui ont construit leurs maisons en proche banlieue de Jérusalem parce que les politiques discriminatoires de longue date les ont empêchés de construire à Jérusalem-Est. Dans ce même esprit de manipulation démographique, Israël interdit aux Palestiniens de déménager de Gaza vers la Cisjordanie et, les habitants de Gaza vivant en Cisjordanie sont considérés comme des "étrangers illégaux" et sont déportés vers Gaza.

    Derrière les fonctionnaires et les porte-parole, dont les noms sont connus, derrière ces "procédures" qu’ils citent, se cachent ceux qui donnent les ordres. Qui sont-ils ? Les Premiers ministres (du Likoud, de la coalition Travailliste-Shas et Kadima) ou "seulement" leurs ministres de l’intérieur ? Peut-être sont-ils des directeurs-généraux du ministère, accompagnés de conseillers juridiques qui les soutiennent, qui savent de quel côté le vent tourne. On ne le sait pas. Après tout, ils ne publient pas ces décisions en y apposant leurs signatures. Dans 50 ans, les archives d’Etat qui contiennent les documents d’aujourd’hui seront rendues publiques et, alors, nous saurons !

    Aujourd’hui, la chose importante est qu’une ligne directe relie diverses décisions similaires faites séparément, comme si elles n’étaient pas reliées entre elles. Les décideurs n’attendent que le bon moment pour les étendre, pour les durcir, pour y inclure plus de catégories de déportés. Et tout ceci se passe sans que personne ne s’y oppose - ni les organisations israéliennes, individuelles ou politiques, qui parlent avec hauteur de la paix, ni les pays occidentaux qui ne savent qu’exiger des gouvernements palestiniens, mais qui prétendent qu’ils ne peuvent pas intervenir lorsqu’il s’agit des décisions souveraines d’Israël. Les décisions souveraines de l’Etat occupant [ !!!]

    Si les décideurs anonymes ne se heurtent pas à une opposition courageuse, ils continueront d’inventer de nouvelles règles qui nous entraîneront de plus en plus loin vers la pente de l’expulsion.
    bellaciao.org
    ?

    Commentaire

    Chargement...
    X