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Le spleen des Japonais à Paris

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  • Le spleen des Japonais à Paris

    à notre amie Nina qui a été frapée par un choc culturel à Oran
    [QUOTE]Frappés du «syndrome de Paris», certains touristes ou expatriés nippons subissent une sévère déprime, souvent liée au décalage culturel.



    Dans la nouvelle de Philippe Adam (1), l'héroïne vit seule dans un minuscule studio de la rue des Martyrs et passe son temps à l'ambassade du Japon. Elle est jeune, ne connaît personne, souffre atrocement du climat, pleure beaucoup, se fait envoyer «des médicaments du pays natal» et vit avec «la honte d'être celle qui ne s'en sort pas». Le narrateur trouve qu'elle «pense trop». «Arrêtez de croire que tout le monde vous regarde. Arrêtez de croire que tout le monde vous juge et que tout le monde vous en veut», lit-on. Pour se mettre dans la peau d'une Japonaise victime du «syndrome de «Paris», l'auteur s'est inspiré de son séjour de six mois à Tokyo. «Les jeunes filles sont les premières touchées, rapporte Philippe Adam. Elles ont entre 20 et 25 ans, étudient l'histoire de l'art plutôt que les sciences, et s'imaginent un Paris plein d'esthètes et de garçons délicats.»

    L'imagination. Une machine que met en route chaque Japonais en partance pour la capitale française, au point d'idéaliser dangereusement la vie parisienne. Identifié il y a une dizaine d'années par le professeur Hiroaki Ota, psychiatre, le «syndrome de Paris» naît en effet de ce grand écart entre le Paris rêvé et le Paris réel. «Ils voient le Montparnasse des Années folles, Manet, Renoir, et des Parisiennes habillées comme des gravures de mode, explique Mario Renoux, président de la Société franco-japonaise de médecine.
    Une fois sur place, le décor est là, en partie, mais tout fonctionne à la française !»

    L'harmonie face au désordre

    Pour certains, le mythe s'effondre. «A la télévision, tout est lisse, harmonieux, à l'image de l'alignement parfait des immeubles haussmanniens, analyse Yoshikatsu Aoyagi, premier secrétaire du service consulaire à l'ambassade du Japon à Paris. Mais l'on oublie trop souvent de filmer le trottoir... !» Dans le bureau de M. Aoyagi, une attention toute particulière est accordée aux résidents permanents : «Certains expatriés éprouvent de réelles difficultés à s'adapter au mode de vie des Français et ont tendance à culpabiliser.»

    Un problème qui reposerait essentiellement sur la différence des rapports humains entretenus dans chaque pays. De fait, dans le match Japon-France, tout s'oppose : la discrétion naturelle au franc-parler légendaire, le respect poussé à l'extrême à l'humour second degré, la constance aux humeurs changeantes, la célérité des services à la lenteur de l'administration ou encore l'esprit de groupe à l'individualisme exacerbé. Bref, l'harmonie au désordre.

    «J'ai mis un temps fou à comprendre le fonctionnement de ma fac et de la préfecture de Paris, témoigne Keiko, 26 ans, étudiante en littérature. Quant aux agents immobiliers, ils m'arnaquaient ou se moquaient ouvertement de mon accent.» Gourmande invétérée, convertie aux plaisirs de la cuisine française, Eri, 31 ans, évoque elle aussi des débuts difficiles dans la capitale. «Si vous ne parlez pas la langue, les gens font comme si vous n'existiez pas. On part avec l'idée d'un Paris idéal et l'on se retrouve dans un trou noir, face au regard glacial des Parisiens.»

    «Pyjama en coton japonais»

    Conscients de ces différences, d'aucuns s'efforcent d'adoucir la pente. Atsushi Sugiyama, manager des ventes pour le Japon et l'Asie à l'hôtel George V, en a fait son métier. Ancien employé de l'hôtel Nikko et du Ritz, il enseigne au personnel du palace quelques astuces indispensables destinées à mieux accueillir la clientèle japonaise : «Sourire à la réception, mais pas trop longtemps pour ne pas susciter de gêne ; faire en sorte que leur note soit prête le plus rapidement possible.» Pour leur être agréable, l'hôtel met également à leur disposition «un pyjama en coton japonais» et un «service thé vert» dans leur chambre...

    Mais même au prix d'efforts intenses, d'aucuns ne résistent pas. Chaque année, cinq Japonais au bord de la crise de nerfs sont rapatriés chez eux. «On rend assez mal aux Japonais l'affection qu'ils portent à la France», écrit encore Philippe Adam.

    (1) Le Syndrome de Paris, éd. Inventaire-Invention.

    le figaro
    Dernière modification par ballZ, 12 septembre 2006, 00h44.
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