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Djamila Boupacha l'innoubliable heroine de la guerre d'Algerie, Khalfa Mameri

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  • Djamila Boupacha l'innoubliable heroine de la guerre d'Algerie, Khalfa Mameri

    Djamila Boupacha avait été immortalisée par le génial Pablo Picasso en personne. Le décembre 1961, le géant de l’art pictural avait réalisé le portrait de Djamila Boupacha, l’une des héroïnes de la guerre de Libération nationale.

    Pour l’éminent historien Khalfa Mameri, «voir un tel portrait, celui d’une Algérienne combattante, accroché au mur d’une galerie, d’un musée de quelque pays que ce soit, dans l’une des villes-phares du monde est un privilège historique d’une rareté exceptionnelle». Le fait d’intégrer une reproduction de ce portrait dans la partie «annexes» du livre ""Djamila Boupacha l'innoubliable heroine,de la guerre d'Algerie". qu’il consacre à Djamila Boupacha est, souligne-t-il, «une manière à la fois de rendre hommage au plus grand peintre du XXe siècle et de faire de chaque possesseur de ce livre un détenteur d’un trésor, même en copie, signé Picasso».

    Surtout, ce portrait «rappellera à chacun des détenteurs ce que chaque Algérien, chaque Algérienne doit à des patriotes femmes comme Djamila Boupacha.


    A défaut de parler, son regard touchant et souffrant nous interroge à jamais sur le prix de la liberté». Un prix que toutes ces patriotes femmes ont chèrement payé, parfois au sacrifice de leur vie. Aujourd’hui, et toutes générations confondues, l’Algérie leur doit naturellement une reconnaissance éternelle. Pourtant, ces héroïnes restent le plus souvent méconnues des Algériens.

    Par exemple, qui connaît vraiment l’histoire de Djamila Boupacha ?


    Hélas, «l’inoubliable héroïne» est depuis bien longtemps tombée dans l’oubli ! Parce que «le mal est en nous», relève Khalfa Mameri. «Sauf erreur grave de ma part, je n’ai jamais lu aucune œuvre d’un auteur algérien qui aurait consacré sa vie, même une partie, à défendre la cause des femmes», poursuit l’historien dans la conclusion de son ouvrage

    . La publication de ce livre consacré à une héroïne de la Révolution peut alors paraître comme un «événement éditorial» rarissime, et qui mérite d’être salué. Ceci est tout à l’honneur de Khalfa Mameri qui, dans l’introduction, fait lui-même son mea-culpa. Il reconnaît honnêtement que, depuis le lancement de sa collection pour écoliers et enfants, en 1998, il a réalisé six petits livrets, mais tous consacrés à des hommes (le colonel Lotfi, Larbi Ben M’hidi, Abane Ramdane, Houari Boumediene, Mohamed Boudiaf et Ferhat Abbas). Aucun personnage féminin ne figure dans cette galerie de figures illustres ! Au départ, pourtant, l’auteur avait comme noble et triple objectif de «faire aimer la lecture ; faire connaître les grandes figures nationales ; y faire figurer sans aucune discrimination hommes et femmes». Mais si l’engagement de l’historien soucieux de faire œuvre didactique destinée au large lectorat (depuis le jeune élève jusqu’aux seniors) n’a pu être rempli, c’est pour une raison très simple, a priori. «C’est parce que j’ai eu toutes les difficultés à contacter au bon moment la femme célèbre qui aurait accepté de me parler de son parcours de vie et de son action au service de l’Algérie », précise-t-il.

    L’opportunité tant attendue s’étant enfin présentée, Khalfa Mameri a eu «la chance, mais aussi l’honneur réel de rencontrer longuement Djamila Boupacha
    ».

    Il évoque d’ailleurs avec beaucoup d’émotion cette fameuse rencontre du 30 mars 2013, chez Djamila Boupacha, en présence du mari de l’héroïne et de l'aîné de leurs trois fils. Quelques jours après ce «très long entretien à son domicile le samedi 30 mars 2013 de 15h à 18h», l’historien a pu enfin se mettre au travail pour retracer le parcours de Djamila Boupacha, «ses épreuves, son idéal le plus honnêtement possible, avec des mots simples, propres pour ne blesser personne ; ni la victime ni le lecteur et encore moins la morale». C’est là «un honneur redoutable», un exercice difficile, mais Khalfa Mameri a su puiser dans son expérience et son talent d’écrivain pour livrer au lecteur un portrait juste et saisissant de Djamila Boupacha, tout au long d’un parcours exceptionnel brossé dans une soixantaine de pages. Un portrait illuminé par les figures prestigieuses qui ont contribué à immortaliser «l’inoubliable héroïne de la guerre d’Algérie» : Picasso, Simone de Beauvoir, Gisèle Halimi, et d’autres géants comme Jean- Paul Sartre. Avant cela (c’est-à-dire avant le dernier chapitre retraçant «le procès inachevé» de Djamila Boupacha, et donc avant qu’elle soit universalisée), le lecteur la suit pas à pas, depuis sa venue au monde le 9 février 1938 dans l’actuel quartier de Bologhine (Alger), jusqu’à son arrestation, le 11 février 1960, puis son internement et les séances de torture.

    Entretemps, le lecteur découvrira avec intérêt la famille de Djamila (une famille idéale, selon l’auteur), sa scolarité écourtée, son engagement politique, son militantisme en tant qu’aidesoignante, et il en saura un plus sur l'attentat qu’elle aurait perpétré en février 1959 à la Brasserie des facultés. Après avoir subi des sévices durant plus d’un mois, elle est transférée en France pour y être jugée.

    C’est là que «l’affaire» Djamila Boupacha prend une ampleur médiatique et internationale importante.

    La jeune femme est défendue par maître Gisèle Halimi, Simone de Beauvoir rédige une tribune à son sujet dans le journal Le Monde, un comité pour Djamila Boupacha est créé (présidé par Simone de Beauvoir, il comprend notamment Jean-Paul Sartre, Louis Aragon, Elsa Triolet, Germaine Tillion, etc).

    La guerre d’Algérie touchant à sa fin, Djamila Boupacha est libérée le 21 avril 1962 et peut enfin rentrer dans son pays.

    En conclusion de son ouvrage, Djamila Boupacha l'innoubliable heroine,de la guerre d'Algerie.Khalfa Mameri se pose (pose) certaines questions quant à la leçon à tirer de cette épopée. «Et d’abord, pourquoi aucune femme combattante, à l’image de Djamila Boupacha et de combien d’autres comme elle, n’ont jamais occupé une fonction importante ou joué un rôle significatif dans le pays qu’elles ont contribué, certes pas seules, mais plus que la plupart des hommes, à rendre libre ?» s’interroge-t-il. Et de constater avec beaucoup de regret : «La cause des femmes est aujourd’hui orpheline dans notre pays. A quand d’autres Djamila Boupacha ? Telle est la leçon morale et politique de ce livre». Dans la partie iconographique en annexe, le lecteur pourra découvrir de précieux documents photographiques et deux lettres manuscrites de Djamila Boupacha lorsqu’elle était écrouée à la «prison civile d’Alger».

    Le livre de Khalfa Mameri, sans conteste un bel hommage, vient s’ajouter aux précédents hommages rendus. Parmi ceux-ci, le portrait réalisé par Pablo Picasso, le livre de Gisèle Halimi ( Djamila Boupacha, éd. Gallimard 1962), la pièce des Canti di Vita et d’Amore du musicien Luigi Nono et le téléfilm Pour Djamila (réalisé par Caroline Huppert en 2011, avec les actrices Marina Hands et Hafsia Herzi). Hocine Tamou Khalfa Mameri,
    Djamila Boupacha, l’inoubliable héroïne de la guerre d’Algérie. Collection Ecoliers d’Algérie, éditions Thala, Alger 2013, 84 pages.

    Le Soir
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