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Le messager.

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  • Le messager.

    Le jour s'exilant au ventre de la nuit - tel un oiseau qui rejoint son nid - laissait toute la ville inerte. Le ciel étoilé figeait toute les formes d'expressions… son charme angélique poussait à la tristesse ! Pensais-je cette nuit là.
    Cette fameuse nuit, j'étais debout devant la fenêtre que j'ai largement ouverte. Dans la chambre, l'air pénétrait, comme une tendre caresse printanière. La nuit était douce et calme … Son calme ferait vomir toute la violence qu’il y a dans l’univers. Pas très loin de l’endroit où je me trouvais, sur une petite table, il y avait une pile de journaux, un crayon brisé en deux et par terre gisaient quelques feuilles blanches.
    Mes yeux fixaient étrangement le vaste ténébreux, comme cherchant de miraculeuses réponses à mes folles interrogations. Je réfléchissais à tous les événements du jour. Le pourquoi, le pour qui et le comment assommaient et cahotaient en mon esprit toute tentative d’assimilation. Je devenais dépourvue de raisonnement. Et la colère que je portais en moi, pareil à un enfant indésirable, ne faisait qu'augmenter mon désarroi. Malgré la douceur magique de la nuit, je ne pouvais m'empêcher de haïr… haïr de toutes mes forces. En côtoyant le malheur au quotidien, on ne peut qu'oublier le visage de l‘amour ! C‘est pourquoi, mes regards s'évadèrent aussi loin que possible de la haine et le désarroi, qui telle de mauvaises herbes me dévastaient. En fait, ce soir là je pensais à tout et à rien jusqu'à ce que mes regards tremblèrent d'émotion, sous le charme d'une scène étrange!
    Tout mon être fut émouvante ce soir là.
    Sur une branche d'arbre se posa un magnifique pigeon d'une blancheur peu ordinaire, si beau telle l'innocence. Et pendant quelques secondes, il se tenait là immobile, avec une grâce indescriptible !
    Le pigeon avait autour du cou un superbe médaillant, dégageant une lueur puissante qui se reflétait dans ses yeux, émeraudes vertes. A cette instant, les yeux du fameux pigeon qui auparavant observaient l‘horizon, se retournèrent vers moi. Je sentais ses regards pesaient sur ma personne.
    Une immense peur m'envahit. Les regards du oiseau étaient voilés de mots que je ne pouvais déchiffrer. Puis un désir curieux s'empara de moi. Malgré moi

    Je voulais être devant le pigeon. Et à l`instant même ou mon voeu fut prononcé, dans le tréfonds de mon âme, je fus comme transportée de ma chambre vers l'arbre sur laquelle se tenait l'oiseau. Ebranlée par ce qui vient de m'arriver, j'ai failli m'évanouir devant le bel oiseau. <<c'est étrange, mon apparition soudaine ne semble point l'effrayer >>. pensais-je secrètement. Je suis restée quelques minutes devant le pigeon, sans oser prononcer le moindre mot. Celui-ci me dévisagea, puis s'adressa à moi d'une voix humaine :
    - Ne soyez plus surprise, ni effrayée… je viens en ami d'un pays qui vous est connu.
    J'avais le coeur palpitant vue ma stupéfaction et difficilement je prononçais ces mots :
    -Mais ... de quel pays me parlez-vous ? et pourquoi ? … en quoi ma pauvre personne vous intéresse-t-elle?
    - Je viens d'un pays sans limite, conçu par une bien belle liaison entre les mots et les sentiments ... j'arrive d'un pays ou le Mot est roi … je viens vous remettre une lettre.
    - C'est beau tout cela ! mais je ne vois aucune lettre avec vous.
    Délicatement, j`ouvre le médaillant, que le pigeon fit tomber par terre, et là j'y découvre la fameuse lettre cachée. Une fois celle-ci ouverte, il y avait écrit ceci :

    << Chère amie,
    Tel un glissement vers le néant, deviennent tes heures de survie. Tu respires la terreur tout en blasphémant sur ce qui se tisse autour de toi. Devant le malheur qui frappe partout, tu t'agenouilles pour te recueillir sur la tombe de ceux qui avaient vécus honnêtement. Te revoilà faible et toute ta faiblesse te rend aveugle. La flamme qui embellissait ton âme, soudain s'éteint !! Toutes les larmes se rencontrent dans tes yeux et nul sourire ne brille de ton visage. Face aux maux, le silence t'habite. Chose étrange que de rester muet, devant les injures et les injustices d'un frère humain !
    Tu tombes de plus en plus vers le bas et le cri s'étouffe chaque fois en toi ; car le SILENCE hante tes contours. Ton coeur devient silencieux, calme et insouciant. La haine te devance et le rêve te trahit. Tu vis la désillusion du siècle.Tes discours s'éparpillent comme les feuilles d'automne. Leur écho s'affaiblit en même temps que ta vie. Lâchement, tu te condamnes avant d'être condamnée et te voila descendant la toute dernière marche. Mais avant de livrer ton âme, souviens-toi que pour figer ton chagrin, il te faudra bien forger ton esprit. Lui imprégner pourquoi pas, la sagesse de nos aïeux. Aviver ta force d`antan, la force d`un mot. Fais trêve a tes pleurs il te va falloir exister autrement. >>.

    Ebranlée par les mots de cette lettre, je levai mes yeux vers le bel oiseau sur l'arbre perché et lui dis-je :
    - Tout est vrai dans ce que je viens de lire. Mais toi, qui es- tu, oh! Etrange oiseau qui parle si bien ? Es-tu un vieux rêve oublié ou un remord éveillé ?
    L'oiseau rétorqua :
    - Non ! Ma mie, je suis ton esprit, qui du gouffre force s'éveille pareil à un chant libèré. Je suis ta pensée barbelée… Amie, je suis ton mot ... m'aurais-tu renié?

    Et soudain, le pigeon s’évanouit dans l'air sans trace aucune !

    Par Benmerikhi Halima. Juin 1994
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