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Le décret présidentiel, ultime arme de Bouteflika

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  • Le décret présidentiel, ultime arme de Bouteflika

    Après avoir longtemps légiféré par ordonnance, Abdelaziz Bouteflika achève son troisième mandat par une rafale de décrets présidentiels.
    Tarek Hafid - Alger (Le Soir)
    Depuis le 27 avril 2013, jour où il a été victime d’un accident vasculaire cérébral, Abdelaziz Bouteflika a signé et fait publier au Journal officiel vingt-huit décrets présidentiels.
    Ces textes réglementaires peuvent être divisés en deux catégories : ceux signés en France et ceux pris en Algérie. Lors de son hospitalisation à l’hôpital du Val-de-Grâce et à l’institution des Invalides — deux établissements sanitaires relevant de l’armée française — le chef de l’Etat a, contre toute attente, continué à prendre des textes réglementaires.
    Les premiers datent du 19 mai (soit une vingtaine de jours après son départ pour la France) concernaient la consécration du 22 octobre comme «Journée nationale de la presse» et des décisions de transfert de crédit au profit du ministère des Travaux publics et du ministère du Commerce.
    La parution de ces décrets au Journal officiel étonne. Car comment expliquer que le président de la République ait pu parapher des textes réglementaires en dehors du territoire algérien ? Le Sceau de la République n’aurait jamais dû quitter l’Algérie. Mais la situation ne semble gêner personne. Surtout pas les officiels.
    C’est le cas de Abdelkader Bensalah, président du Conseil de la nation et second personnage de l’Etat qui lançait, au début du mois de juin : «L’absence de Abdelaziz Bouteflika n’a pas entravé la bonne marche de l’Etat. Toutes les institutions fonctionnent le plus normalement du monde.»
    Le 11 juin, des images diffusées par la télévision d’Etat montrent Abdelaziz Bouteflika recevoir son Premier ministre ainsi que le chef d’état-major de l’armée à l’institution des Invalides.
    Les Algériens découvrent un homme fatigué par la maladie. Il ne parle pas, ses gestes sont lents et peine à saisir une tasse de café. Ce qui est perçu comme étant une mise en scène maladroite s’avère être une opération de communication d’une efficacité redoutable. Les initiés comprennent que le chef de l’Etat a encore la capacité de tenir une plume. Ils ne tarderont pas à le confirmer.
    Le 18 juin, une information fait état du limogeage de l’ambassadeur d’Algérie à Paris et son remplacement par son collègue en poste à Bruxelles. Les raisons officielles de la mise de fin de fonction de Missoum Sbih ne sont pas connues. Mais cette décision a bien été prise par Abdelaziz Bouteflika via un décret présidentiel signé dans la capitale française.
    Un décret qui n’a cependant pas été publié. Et c’est dans le même esprit que le Président signe, début juillet, un décret portant promotion aux grades supérieurs d’officiers de l’Armée nationale populaire.
    L’histoire retiendra qu’en 2013, des militaires algériens ont été promus par le président de la République à partir d’une institution militaire française. Dans la catégorie des textes réglementaires «parisiens», on peut également citer celui portant mesures de grâce à l’occasion de la commémoration du cinquante-et-unième anniversaire de la fête de l’Indépendance et de la Jeunesse au profit des détenus ayant obtenu des diplômes d’enseignement ou de formation. Au total, 15 décrets présidentiels signés en France par Abdelaziz Bouteflika ont été publiés au Journal officiel.
    Le 16 juillet, le président de la République rentre à Alger. Nouveau choc télévisuel : Bouteflika est sur une chaise roulante. Durant la période estivale, les activités présidentielles se sont limitées à la signature de deux lois (activités sportives et activités commerciales) adoptées durant la session parlementaire de printemps ainsi que trois décrets.
    Début septembre, le chef de l’Etat multiplie les apparitions. Il reçoit en sa résidence le chef d’état-major, son Premier ministre et son ministre des Affaires étrangères. On évoque avec insistance un changement important au sein du gouvernement.
    Le 11 septembre, un communiqué de la présidence de la République annonce le remaniement. Une dizaine de ministres sont évincés, certains n’ayant qu’une année d’activité. Au même moment, le chef de l’Etat opère un changement à la tête du Conseil constitutionnel : nommé ministre de l’Intérieur, Tayeb Belaïz laisse sa place à Mourad Medelci qui venait de quitter le département des Affaires étrangères.
    Le raccourcissement du mandat de Belaïz *— nommé pour 6 années — est considéré comme une entorse à la Constitution. La magie du décret présidentiel va encore opérer. Abdelaziz Bouteflika met fin au mandat du président du Conseil constitutionnel «admis à la retraite à sa demande». Les apparences sont sauves. Mais les changements ne concernent pas uniquement l’Exécutif.
    La presse fait également d’une profonde restructuration au sein des services spéciaux algériens, le département du renseignement et de la sécurité. Trois structures relevant du DRS (sécurité de l’armée, presse et service de police judiciaire) auraient été placées sous le commandement de l’état-major de l’ANP. On annonce également le départ d’officiers supérieurs des services spéciaux : Mhenna, Attafi et Tartag.
    En fait, ces informations sont impossibles à confirmer officiellement. Si elles ont été prises, ces décisions sont à mettre sur le compte du Président qui, une nouvelle fois, a pris des décrets non publiables. Car le seul texte réglementaire concernant l’armée publié au Journal officiel est celui faisant état de la de l’abrogation du décret instituant le service central de police judiciaire des services militaires de sécurité du ministère de la Défense nationale.
    Créé en 2008, ce service était chargé d’enquêter sur les plus importantes affaires de corruption. D’autres décrets de différentes «intensités» sont à prévoir dans les prochaines semaines. L’avenir de l’Algérie tient sur la pointe d’une plume.
    T. H.
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