Histoire : Lyautey le royaliste
Un siècle après le début du protectorat au Maroc, la figure de Lyautey fascine et intrigue toujours. Le premier résident général a sauvé la dynastie alaouite, réformé l’administration et l’économie du pays et renforcé le pouvoir du Makhzen. Tranches de vie de celui qui fut le véritable fondateur du Maroc moderne.
Début juillet 1934, le maréchal Lyautey reçoit dans son château en Lorraine un invité de marque : le sultan Mohammed Ben Youssef, venu s’enquérir de la santé du vieux militaire français. Le sultan est accompagné de son fils, un enfant de cinq ans du nom de Moulay Hassan, celui qui portera, une vingtaine d’années plus tard, le titre de Hassan II, roi du Maroc. Le jeune prince, perché sur les genoux de l’ancien résident général, regarde et observe cet hôte octogénaire à la moustache impeccable, aux yeux bleus perçants et encore pétillants, et au port altier d’ancien cavalier, malgré l’hépatite qui le ronge depuis des années.
Le prince héritier ne sait sans doute pas que le patriarche avec qui il joue est l’homme qui a sauvé la dynastie alaouite et renforcé le pouvoir d’un Etat que le futur Hassan II utilisera dans sa quête de puissance et de domination. Lyautey a pu réaliser ce que les sultans marocains se sont échinés à faire pendant plus d’un siècle : unifier le Maroc sous le même pouvoir central, anéantir les foyers de sédition et régner sur un pays sans dissidence. Un seul pouvoir, un seul Etat. Soldat loyal au service de son pays, la France, mais homme de culture, respectueux des traditions et de l’histoire du Maroc, Lyautey a modernisé l’administration, l’économie et les infrastructures de l’empire chérifien sans défigurer ses institutions ancestrales. Renouveler sans jamais rompre et juxtaposer sans démolir.
Homme de paradoxes
Dans le navire qui le mène en août 1912 vers les côtes marocaines, Hubert Lyautey, fraîchement nommé résident général au Maroc, sait déjà ce qu’il doit faire, ou plus précisément, ce qu’il doit éviter : reproduire les erreurs de la France en Algérie. Pendant une dizaine d’années, Lyautey a été officier de l’armée française en Algérie, notamment à Oran, à quelques encablures du Maroc. Il a vu là-bas les dégâts irrémédiables d’une politique de colonisation arrogante, agressive, qui refuse toute dissemblance ou dissonance culturelle et entend transformer les Algériens en bons Gaulois. Il a assisté à une entreprise violente de dénaturation de l’identité arabo-berbère du pays, qui a ravagé les institutions traditionnelles et instauré une modernité bancale, perçue par les Algériens comme une agression, voire une mutilation. Lyautey connaît la hantise des Marocains de voir leur vieil empire se transformer en simple “département français” et abdiquer toute indépendance ou spécificité à l’égard de la puissance coloniale. A son arrivée au Maroc, il doit gérer cette peur, comme il le rapportera plus tard : “Je disais aux Marocains ‘nous avons le respect complet de votre foi, de vos mœurs, de vos institutions’, ils me répondaient ‘vous, peut-être, mais nous connaissons l’Algérie et ce qu’on y a fait’”.
Lyautey est lui-même un personnage complexe, pétri de paradoxes et de contradictions. L’homme est un monarchiste convaincu qui exècre et hait le régime républicain français, dont il est malgré tout le serviteur fidèle et infaillible. Imprégné de valeurs traditionnelles et religieuses, il agit en véritable conservateur mais ses penchants homosexuels n’ont jamais été un secret pour personne. Il est conscient que l’aventure coloniale est vouée, tôt ou tard, à disparaître au Maroc mais il accepte pourtant d’en être l’agent et le porte-étendard. De sa complexité personnelle et de ses paradoxes, Lyautey va tirer un style d’action, une vision du monde et des hommes, et, surtout, un projet pour le Maroc sous son autorité. L’empire chérifien est pour lui un laboratoire d’idées, un champ d’action, où il entend réussir à juxtaposer modernité et tradition, faire coexister l’administration rationnelle et froide avec les structures millénaires et foisonnantes. A-t-il réussi ? A-t-il échoué ? Le résultat est probablement à l’image de l’homme et de son style : tout en contrastes et en paradoxes.
Maintenir la tradition
Lorsque Lyautey arrive au Maroc, la tâche lui paraît exaltante. Le pays n’est pas un désert politique et culturel, il y trouve de l’épaisseur, de l’histoire et des structures qu’il suffit juste de dépoussiérer et renforcer pour qu’elles reprennent vigueur et puissance. “Au Maroc, nous nous sommes trouvés en face d’un empire historique et indépendant, jaloux à l’extrême de son indépendance, rebelle à toute servitude, qui, jusqu’à ces dernières années, faisait encore figure d’Etat constitué, malgré la défaillance récente du pouvoir central”, explique-t-il en 1916 à ses interlocuteurs en France. Lyautey ne touche pas à ces structures traditionnelles, il va au contraire les respecter, les protéger et imposer cette ligne de conduite à ses officiers et collaborateurs. Ainsi, les mosquées, les zaouïas et les sanctuaires des marabouts vont demeurer des lieux sacrés interdits aux Européens et seront administrés comme ils l’ont été depuis des siècles. Malgré les sollicitations et les invitations officielles, Lyautey ne mettra jamais les pieds dans une mosquée ou un endroit entouré de sacralité pour ne pas heurter les sentiments des musulmans. Les commerces, les souks et les bazars conservent leur mode d’organisation et de régulation d’antan afin d’être protégés de toute concurrence étrangère. Lyautey crée même le ministère des Habous pour gérer les biens religieux et mettre de l’ordre dans la gestion du patrimoine réservé à la rémunération des ouléma et l’entretien des lieux de culte.
Mais c’est dans le domaine politique que le choix de maintenir les institutions traditionnelles sera le plus décisif et déterminant pour l’histoire du Maroc. Au lieu de rabaisser le sultan et le traiter comme le chef vaincu d’un Etat sous tutelle, Lyautey cherche à l’entourer de prestige, de majesté et de “hiba”. Le résident général, avec un grand sens de la mise en scène, s’évertue à montrer son respect et sa déférence à l’égard du souverain chérifien, notamment lors des cérémonies publiques et populaires. Ainsi, les journalistes européens de l’époque rapportent souvent ce spectacle pittoresque où Lyautey tient l’étrier du cheval au sultan et reste immobile, au garde-à-vous, jusqu’à ce que le convoi royal ait quitté les lieux. “Le premier serviteur de Sidna”, comme il se définit lui-même, tient à le faire savoir aux Français, mais surtout aux Marocains. L’homme retrouve dans ces rites et pratiques antiques son paradis perdu, son eden disparu en France avec la révolution de 1789 : le prestige de la monarchie, ses codes et sa symbolique. Le culte de la légitimité monarchique, la fascination pour la profondeur historique des dynasties et des rois incite Lyautey à refuser la proposition de balayer le règne des Alaouites, en remplaçant Moulay Abdelhafid par le chérif idrisside d’Ouezzane. Mais le choix de maintenir le sultan dans son apparat traditionnel et sa dignité de souverain n’empêche pas la mise en place d’une administration moderne, répressive et dominante, contrôlée par les Français et dirigée par Lyautey lui-même.
Créer un Etat
Au début du XXème siècle, le Maroc est un archipel de pouvoirs, une dentelle où l’autorité du sultan s’exerce à certains endroits mais pas à d’autres. Le sultan est légitime parce qu’il est le chrif, descendant du prophète et détenteur de la baraka, mais devient l’adversaire quand il se transforme en collecteur d’impôt et chef militaire. On cite souvent l’histoire des combattants d’une tribu des environs de Marrakech qui, après avoir défait et battu le sultan dans une bataille, se sont tournés vers lui, l’ont remis en selle et lui ont demandé de prier pour eux, afin que sa baraka recouvre leur tribu de ses bienfaits. Lyautey contribue à mettre fin à cette donne, en dotant le Maroc des instruments d’un pouvoir central puissant et capable de gouverner tout le territoire national, sous une autorité unique. La division du pays entre Blad Siba et Blad Makhzen doit alors disparaître et de ses décombres naîtra une seule entité forte et homogène : l’Etat.
Pour cela, Lyautey met en place une administration moderne, composée principalement de fonctionnaires français, qu’il feint d’associer au vieux Makhzen. Ce dernier est maintenu dans son décor et son cérémonial antique, mais a subi quelques réformes pour le rendre plus rationnel et moins soumis aux passions et aux intérêts des hommes qui le forment. Ainsi, Lyautey transforme les agents du Makhzen en fonctionnaires, qui se plient à une hiérarchie bien définie et perçoivent un salaire et un traitement déterminé par la loi. Il abolit le système corrompu du “fabor”, c’est-à-dire les commissions perçues obligatoirement par les agents de l’administration makhzénienne pour les services rendus à leurs visiteurs ou solliciteurs. Il soumet l’intégration du Makhzen au concours, rompant ainsi avec la transmission héréditaire des fonctions publiques ou leurs achats, comme c’était l’usage avant.
Mais le vrai pouvoir est entre les mains de l’administration française, dont les structures et le fonctionnement, et parfois même les hommes, seront récupérés et utilisés par l’Etat marocain après l’indépendance. La résidence générale devient le cœur du système administratif et politique, avec ses multiples directions et services qui touchent à tout, ne laissant au vieux Makhzen que la gestion religieuse et les cérémonies traditionnelles. Sous l’impulsion de Lyautey, les services de l’administration coloniale produisent avec frénésie des lois et des règlements qui constituent l’ossature du système juridique marocain. Ils seront utilisés dans les tribunaux et les administrations du royaume jusqu’à nos jours. Mais c’est dans un autre domaine que l’œuvre de Lyautey et son empreinte seront les plus visibles et durables : l’urbanisme et l’aménagement des villes au Maroc.
Un siècle après le début du protectorat au Maroc, la figure de Lyautey fascine et intrigue toujours. Le premier résident général a sauvé la dynastie alaouite, réformé l’administration et l’économie du pays et renforcé le pouvoir du Makhzen. Tranches de vie de celui qui fut le véritable fondateur du Maroc moderne.
Début juillet 1934, le maréchal Lyautey reçoit dans son château en Lorraine un invité de marque : le sultan Mohammed Ben Youssef, venu s’enquérir de la santé du vieux militaire français. Le sultan est accompagné de son fils, un enfant de cinq ans du nom de Moulay Hassan, celui qui portera, une vingtaine d’années plus tard, le titre de Hassan II, roi du Maroc. Le jeune prince, perché sur les genoux de l’ancien résident général, regarde et observe cet hôte octogénaire à la moustache impeccable, aux yeux bleus perçants et encore pétillants, et au port altier d’ancien cavalier, malgré l’hépatite qui le ronge depuis des années.
Le prince héritier ne sait sans doute pas que le patriarche avec qui il joue est l’homme qui a sauvé la dynastie alaouite et renforcé le pouvoir d’un Etat que le futur Hassan II utilisera dans sa quête de puissance et de domination. Lyautey a pu réaliser ce que les sultans marocains se sont échinés à faire pendant plus d’un siècle : unifier le Maroc sous le même pouvoir central, anéantir les foyers de sédition et régner sur un pays sans dissidence. Un seul pouvoir, un seul Etat. Soldat loyal au service de son pays, la France, mais homme de culture, respectueux des traditions et de l’histoire du Maroc, Lyautey a modernisé l’administration, l’économie et les infrastructures de l’empire chérifien sans défigurer ses institutions ancestrales. Renouveler sans jamais rompre et juxtaposer sans démolir.
Homme de paradoxes
Dans le navire qui le mène en août 1912 vers les côtes marocaines, Hubert Lyautey, fraîchement nommé résident général au Maroc, sait déjà ce qu’il doit faire, ou plus précisément, ce qu’il doit éviter : reproduire les erreurs de la France en Algérie. Pendant une dizaine d’années, Lyautey a été officier de l’armée française en Algérie, notamment à Oran, à quelques encablures du Maroc. Il a vu là-bas les dégâts irrémédiables d’une politique de colonisation arrogante, agressive, qui refuse toute dissemblance ou dissonance culturelle et entend transformer les Algériens en bons Gaulois. Il a assisté à une entreprise violente de dénaturation de l’identité arabo-berbère du pays, qui a ravagé les institutions traditionnelles et instauré une modernité bancale, perçue par les Algériens comme une agression, voire une mutilation. Lyautey connaît la hantise des Marocains de voir leur vieil empire se transformer en simple “département français” et abdiquer toute indépendance ou spécificité à l’égard de la puissance coloniale. A son arrivée au Maroc, il doit gérer cette peur, comme il le rapportera plus tard : “Je disais aux Marocains ‘nous avons le respect complet de votre foi, de vos mœurs, de vos institutions’, ils me répondaient ‘vous, peut-être, mais nous connaissons l’Algérie et ce qu’on y a fait’”.
Lyautey est lui-même un personnage complexe, pétri de paradoxes et de contradictions. L’homme est un monarchiste convaincu qui exècre et hait le régime républicain français, dont il est malgré tout le serviteur fidèle et infaillible. Imprégné de valeurs traditionnelles et religieuses, il agit en véritable conservateur mais ses penchants homosexuels n’ont jamais été un secret pour personne. Il est conscient que l’aventure coloniale est vouée, tôt ou tard, à disparaître au Maroc mais il accepte pourtant d’en être l’agent et le porte-étendard. De sa complexité personnelle et de ses paradoxes, Lyautey va tirer un style d’action, une vision du monde et des hommes, et, surtout, un projet pour le Maroc sous son autorité. L’empire chérifien est pour lui un laboratoire d’idées, un champ d’action, où il entend réussir à juxtaposer modernité et tradition, faire coexister l’administration rationnelle et froide avec les structures millénaires et foisonnantes. A-t-il réussi ? A-t-il échoué ? Le résultat est probablement à l’image de l’homme et de son style : tout en contrastes et en paradoxes.
Maintenir la tradition
Lorsque Lyautey arrive au Maroc, la tâche lui paraît exaltante. Le pays n’est pas un désert politique et culturel, il y trouve de l’épaisseur, de l’histoire et des structures qu’il suffit juste de dépoussiérer et renforcer pour qu’elles reprennent vigueur et puissance. “Au Maroc, nous nous sommes trouvés en face d’un empire historique et indépendant, jaloux à l’extrême de son indépendance, rebelle à toute servitude, qui, jusqu’à ces dernières années, faisait encore figure d’Etat constitué, malgré la défaillance récente du pouvoir central”, explique-t-il en 1916 à ses interlocuteurs en France. Lyautey ne touche pas à ces structures traditionnelles, il va au contraire les respecter, les protéger et imposer cette ligne de conduite à ses officiers et collaborateurs. Ainsi, les mosquées, les zaouïas et les sanctuaires des marabouts vont demeurer des lieux sacrés interdits aux Européens et seront administrés comme ils l’ont été depuis des siècles. Malgré les sollicitations et les invitations officielles, Lyautey ne mettra jamais les pieds dans une mosquée ou un endroit entouré de sacralité pour ne pas heurter les sentiments des musulmans. Les commerces, les souks et les bazars conservent leur mode d’organisation et de régulation d’antan afin d’être protégés de toute concurrence étrangère. Lyautey crée même le ministère des Habous pour gérer les biens religieux et mettre de l’ordre dans la gestion du patrimoine réservé à la rémunération des ouléma et l’entretien des lieux de culte.
Mais c’est dans le domaine politique que le choix de maintenir les institutions traditionnelles sera le plus décisif et déterminant pour l’histoire du Maroc. Au lieu de rabaisser le sultan et le traiter comme le chef vaincu d’un Etat sous tutelle, Lyautey cherche à l’entourer de prestige, de majesté et de “hiba”. Le résident général, avec un grand sens de la mise en scène, s’évertue à montrer son respect et sa déférence à l’égard du souverain chérifien, notamment lors des cérémonies publiques et populaires. Ainsi, les journalistes européens de l’époque rapportent souvent ce spectacle pittoresque où Lyautey tient l’étrier du cheval au sultan et reste immobile, au garde-à-vous, jusqu’à ce que le convoi royal ait quitté les lieux. “Le premier serviteur de Sidna”, comme il se définit lui-même, tient à le faire savoir aux Français, mais surtout aux Marocains. L’homme retrouve dans ces rites et pratiques antiques son paradis perdu, son eden disparu en France avec la révolution de 1789 : le prestige de la monarchie, ses codes et sa symbolique. Le culte de la légitimité monarchique, la fascination pour la profondeur historique des dynasties et des rois incite Lyautey à refuser la proposition de balayer le règne des Alaouites, en remplaçant Moulay Abdelhafid par le chérif idrisside d’Ouezzane. Mais le choix de maintenir le sultan dans son apparat traditionnel et sa dignité de souverain n’empêche pas la mise en place d’une administration moderne, répressive et dominante, contrôlée par les Français et dirigée par Lyautey lui-même.
Créer un Etat
Au début du XXème siècle, le Maroc est un archipel de pouvoirs, une dentelle où l’autorité du sultan s’exerce à certains endroits mais pas à d’autres. Le sultan est légitime parce qu’il est le chrif, descendant du prophète et détenteur de la baraka, mais devient l’adversaire quand il se transforme en collecteur d’impôt et chef militaire. On cite souvent l’histoire des combattants d’une tribu des environs de Marrakech qui, après avoir défait et battu le sultan dans une bataille, se sont tournés vers lui, l’ont remis en selle et lui ont demandé de prier pour eux, afin que sa baraka recouvre leur tribu de ses bienfaits. Lyautey contribue à mettre fin à cette donne, en dotant le Maroc des instruments d’un pouvoir central puissant et capable de gouverner tout le territoire national, sous une autorité unique. La division du pays entre Blad Siba et Blad Makhzen doit alors disparaître et de ses décombres naîtra une seule entité forte et homogène : l’Etat.
Pour cela, Lyautey met en place une administration moderne, composée principalement de fonctionnaires français, qu’il feint d’associer au vieux Makhzen. Ce dernier est maintenu dans son décor et son cérémonial antique, mais a subi quelques réformes pour le rendre plus rationnel et moins soumis aux passions et aux intérêts des hommes qui le forment. Ainsi, Lyautey transforme les agents du Makhzen en fonctionnaires, qui se plient à une hiérarchie bien définie et perçoivent un salaire et un traitement déterminé par la loi. Il abolit le système corrompu du “fabor”, c’est-à-dire les commissions perçues obligatoirement par les agents de l’administration makhzénienne pour les services rendus à leurs visiteurs ou solliciteurs. Il soumet l’intégration du Makhzen au concours, rompant ainsi avec la transmission héréditaire des fonctions publiques ou leurs achats, comme c’était l’usage avant.
Mais le vrai pouvoir est entre les mains de l’administration française, dont les structures et le fonctionnement, et parfois même les hommes, seront récupérés et utilisés par l’Etat marocain après l’indépendance. La résidence générale devient le cœur du système administratif et politique, avec ses multiples directions et services qui touchent à tout, ne laissant au vieux Makhzen que la gestion religieuse et les cérémonies traditionnelles. Sous l’impulsion de Lyautey, les services de l’administration coloniale produisent avec frénésie des lois et des règlements qui constituent l’ossature du système juridique marocain. Ils seront utilisés dans les tribunaux et les administrations du royaume jusqu’à nos jours. Mais c’est dans un autre domaine que l’œuvre de Lyautey et son empreinte seront les plus visibles et durables : l’urbanisme et l’aménagement des villes au Maroc.
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