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Les billettistes ne sont pas des salauds ! Par Maâmar Farah

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  • Les billettistes ne sont pas des salauds ! Par Maâmar Farah

    «A force de taper sur la maladie et l'état de santé de ton président, tu en es à raconter des insanités, des platitudes, c'est vraiment lamentable et indigne, sous des prétextes journalistiques, d'attaquer quelqu'un qui est malade...» Ce sont, entre autres, les reproches que me fait un lecteur suite à mon billet : «Vive le président... virtuel!» Fondées ou pas, ces critiques m'ont bouleversé, justement parce que j'évite de faire de l'humour sur l'état de santé du président car cela fait partie de mes convictions morales et déontologiques.
    Dans le billet incriminé, je parle de la manipulation et de la mystification au niveau de l'audiovisuel qui s'acharne à imposer, maladroitement et en usant et en abusant d'une simple photographie, une présence qui rappelle la télé de Kim Il Sung. Ayant moi-même visité la Corée du Nord et regardé sa télé du temps du «leader respecté et bien-aimé», j'en garde un mauvais souvenir. Et c'est le JT de l'Unique qui me rappelle les errements de l'information télévisée nord-coréenne. J'ai commencé à répondre à ce lecteur, que je remercie du reste pour sa vigilance car nous avons besoin d'être secoués de temps à autre pour ne pas déraper, quand je me suis souvenu d'une chronique que j'avais écrite en pleine maladie du président de la République (2005), au moment où les plus mauvaises nouvelles, soufflées par la rumeur aux quatre coins du pays, nous arrivaient. Si je la republie aujourd'hui, c'est pour dire à ce respectable lecteur et à tous les autres que c'est cette ligne que je continue de défendre et que ce serait tomber bien bas que d'attaquer quelqu'un, et notamment la personnalité la plus haute de l'édifice institutionnel, pour sa maladie. Ceci étant, se taire aussi devant les déviations et les échecs, en utilisant cette maladie comme argument de défense, n'est pas non plus une meilleure ligne de conduite et un signe d'objectivité pour une presse libre.
    Voici cette chronique vieille de 8 années déjà :

    «Tout au long de cette longue semaine ponctuée tantôt de silences confus, tantôt de communiqués rassurants, le pays aura été suspendu aux nouvelles sur la santé du chef de l’Etat, hospitalisé à Paris. Il est tout à fait normal que l’opinion publique s’intéresse de très près à un événement inhabituel et lourd de sens pour la vie de la nation. Et déceler dans la soif des médias de collecter des nouvelles en vue de les communiquer à leurs lecteurs une quelconque manipulation politicienne ou même une dérive éthique nous semble excessif. En effet, tout le monde est d’accord pour dire que le système de communication aura été déficient, voire totalement absent parfois, laissant le champ libre à la rumeur, mère de toutes les exagérations (...) La maladie est une épreuve qui peut s’abattre sur n’importe qui. Grand ou petit, femme ou homme, riche ou pauvre. Elle fait partie de ces événements qui peuvent survenir n’importe où et à n’importe quel âge. Face à ce drame humain, il est assez inhabituel que l’on éprouve de la joie, ou que l’on exulte dans un esprit de revanche mal à propos.
    Quel que soit le malade et quels qu’aient été nos ressentiments vis-à-vis de ses actions passées et nos difficultés avec lui, nous devons d’abord et avant tout être solidaires face à l’épreuve qu’il traverse. Nous devons lui exprimer notre sympathie, dans un geste de fraternel soutien, en lui souhaitant un prompt rétablissement et un retour rapide à la vie normale. Toute autre attitude relèverait d’une grave déviation mentale qu’aucune cause ne saurait justifier. Rien ne doit nous empêcher de nous tenir aux côtés de la personne qui se trouve amoindrie sur le plan physique et qui a besoin de toutes nos prières pour se relever de cette pénible épreuve. Cette chose épouvantable que l’on nomme la politique a malheureusement agréé des démarches contraires à cette noble éthique imposée par toutes les religions et encouragée par les humanistes de tout bord. En son nom, certains s’autorisent des échappées sur les voies innommables de la haine et de la rancune, allant jusqu’à tirer sur une ambulance, comme on dit dans notre jargon. Il n’y a rien de plus pénible que d’écouter ou lire des commentaires qui diminuent le malade ou le raillent au moment même où il lutte contre la mort. Cela est peut-être de l’art, mais il doit être d’un niveau supérieur à mon entendement et j’avoue humblement que je suis d’une autre culture, d’une autre civilisation.
    Nous avons été formés à l’école de l’humilité, avec des armes toutes simples pour faire face à l’adversité : nous unir pour affronter le danger, présenter un front commun face à l’ennemi, nous soutenir les uns les autres pour aller de l’avant et dépasser les épreuves. Nous avons été éduqués à l’ancienne : pas de signe extérieur de joie lorsqu’il y a un grand malade dans la rue ou un deuil dans le quartier. Et il n’y a rien de plus pénible à voir de nos jours que ces excès de déploiement festif à l’occasion des mariages qui se tiennent dans des immeubles où se déroule, simultanément, une cérémonie funèbre ! Non, nous ne sommes pas de cette culture de l'individualisme et de l’indifférence qui pousse comme une plante sauvage dans nos cités pour couvrir, de sa hideuse progression, les belles fleurs de jadis. Les adversaires politiques auront tout le temps d’affûter leurs armes et de préparer leurs coups pour les joutes à venir. En ces moments pénibles pour les familles des malades (Bouteflika et Zerhouni) et au-delà de toute autre considération et notamment du fait qu’il s’agit de deux hommes d’Etat en exercice, sachons taire nos différences, nos rancœurs et notre amertume, pour leur souhaiter de s’en sortir et de revenir aux leurs en bonne santé. Rien, absolument rien, ni la politique, ni le pouvoir, ni les affaires, ni les milliards, ne peuvent justifier qu’on leur souhaite le pire et tous ceux qui le font sont sortis définitivement de nos rangs. S’ils jubilent du malheur des autres, s’ils éprouvent la moindre satisfaction à voir les autres souffrir, c’est qu’ils sont à soigner d’une maladie bien plus grave : l’inhumanité qui bouffe leurs entrailles. Cette chose horrible qui chasse les sentiments pour installer, au cœur du cerveau, une machine impitoyable mue par des intérêts toujours sordides. Cette chose qui pousse l’homme aux limites de la bassesse et de l’animalité. Il faut s’y opposer. L’occasion nous est donnée aujourd’hui de tester notre humilité et quiconque se croit investi de la mission de régler ses comptes à un opéré dans un lit d’hôpital est un être malsain qui ne mérite que mépris de notre part. La haine peut pousser les gens au pire. Elle peut les bousculer vers des excès dont on ne tire rien de bon. On peut être un farouche opposant à la politique ultralibérale du Président Bouteflika, dénoncer les mesures que l’on ne juge pas adéquates avec les intérêts du peuple et du pays et garder, au fond de son cœur, cette part d’humanité qui nous différencie des animaux. On peut ne pas aimer Bouteflika le Président, mais cela n’autorise nullement les tonnes d'insolence qui s’abattent depuis quelques jours sur Bouteflika l’homme, comme un abominable cyclone de mesquineries (...) Bien plus tard, nous pourrons alors revenir à nos combats politiques. Même pas ! Simplement à nos convictions morales que le monde ne sera jamais plus beau avec l’injustice et l’arbitraire et qu’il faudra continuer la lutte contre les castes et les clans qui érigent en Algérie une véritable autocratie en contradiction flagrante avec l’esprit de Novembre. Mais cela sera pour un autre jour. Aujourd’hui est un jour de prières et de vœux pour tous les malades d’ici et de là-bas. Face à l’adversité, vous pouvez compter sur nous ! Et même si nous n’avons ni avions médicalisés, ni euros pour les prises en charge à l’étranger, même si nos yeux sont encore gonflés d’avoir pleuré nos malades morts dans les hôpitaux de la misère, au milieu des cafards et des rats, il nous reste notre cœur pour abriter les sentiments les plus sincères et nos mains fraternelles tendues pour serrer les vôtres quand cette épreuve sera terminée.»
    M. F.
    Dernière modification par nacer-eddine06, 24 octobre 2013, 12h15.
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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