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Le Maroc rappelle son ambassadeur à Alger : Rabat et le bouc-émissaire algérien

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  • Le Maroc rappelle son ambassadeur à Alger : Rabat et le bouc-émissaire algérien

    Écrit par Halim Midouni et Mariam Ali Marina


    Rabat a décidé, dans la soirée de mercredi dernier, de rappeler son ambassadeur à Alger «pour consultation». Selon le communiqué du ministère des Affaires étrangères marocain, les représentations diplomatiques et consulaires du royaume continueront à fonctionner sous l’autorité d’un chargé d’affaires. Alger, de son côté, a pris note avec «regret» de la décision «injustifiée» du Palais royal de rappeler son grand représentant en Algérie.

    Sa diplomatie considère, dans un communiqué publié jeudi, que celle-ci n’a d’autre effet qu’une «escalade malencontreuse» s’appuyant sur des «motifs fallacieux et attentatoires à la souveraineté de l'Algérie». Elle précise qu’il y a « maintien en place » de l'ensemble des missions diplomatiques et consulaires algériennes au Maroc. Pas de réciprocité, donc, et un appel à la retenue suivant le principe inchangé défendu par l’Algérie selon lequel la question sahraouie reste une affaire de décolonisation et que le discours du chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, prononcé à Abuja par le ministre de la Justice, garde des Sceaux, ne fait que rappeler la constance de cette position connue et soutenue par l’Union africaine, le Parlement européen, ainsi que par de nombreux autres acteurs internationaux.

    Contraste
    Dans cette affaire, la position algérienne contraste avec la crispation des autorités et d’une grande partie de la classe politique marocaines. Cette réaction s’est manifestée régulièrement depuis le début de l’année par des critiques sur l’obstination algérienne à fermer l’horizon maghrébin en continuant à fermer ses frontières - ce qui a valu à la diplomatie algérienne de réagir à ce discours sur des points précis tel que celui de la sécurité sur la ligne de séparation géographique entre l’Algérie et le Maroc, sans compter celui relatif à la coopération franche dans la lutte antiterroriste dans la région, ainsi que, principalement, dans le septentrion sahélien. Elle s’est accentuée à chaque relance auprès des parties internationales concernées par le Sahara occidental du débat sur les violations des droits de l’Homme dans les territoires sous domination marocaine pour atteindre, cette fois, un point d’orgue avec les déclarations du président de la République - des rappels en fait pour ceux qui suivent les «sorties» des instances onusiennes, à commencer par celles de la Minurso et de son chef Christopher Ross, ou des groupes non gouvernementaux, à l’exemple de la Fondation Kennedy (présidée par Kerry Kennedy, fille de Robert Kennedy) qui a publié en 2013 un communiqué-brûlot dans lequel elle constate que le «peuple sahraoui souffre de la torture, de la détention arbitraire, de disparitions forcées et d'autres violations des droits de l'Homme perpétrées par le gouvernement marocain».

    Crispation et difficultés marocaines internes

    C’était le 13 avril 2013 et le texte était le résultat d’un séjour d’enquête menée pendant trois jours en août 2012 par Mme Kerry Kennedy dans les territoires sahraouis sous domination marocaine. Les propos tenus par la fondation qu’elle préside sont naturellement plus sévères que ceux, diplomatiques et de convenance propre à un discours de chef d’Etat. Ils décrivent les «provinces sahariennes», selon la terminologie politique marocaine, comme un immense goulag ou presque. Ils ont contribué à l’amorce d’un débat à Washington sur la mise en place d’un mécanisme américain de suivi de la question des droits de l’Homme au Sahara occidental – un sujet toujours à l’ordre du jour même s’il a cessé depuis quelques semaines d’être évoqué dans l’agenda de la Maison-Blanche. Mais, c’est le discours de M. Bouteflika qui a enflammé les milieux d’autorités et de politique chez le voisin marocain. Lors d’un point de presse, jeudi dernier à Rabat, le ministre marocain de la Communication Mustapha Khelfi a accusé le président algérien de «s’être écarté de la neutralité» en qualifiant le Maroc de «pays occupant». La décision de son gouvernement de rappeler son ambassadeur à Alger pour «consultation est donc justifiée», a-t-il ajouté. Le sens politique à donner au rappel de l’ambassadeur marocain chez lui, explique le ministère des Affaires étrangères algérien, vise à la «bilatéralisation d’une question qui relève de la responsabilité des Nations unies».

    Une thèse algérienne d’autant plus soutenable que Rabat a toujours défendu l’idée que la question sahraouie, inscrite à l’ONU depuis bientôt quarante ans comme l’un des derniers dossiers de décolonisation à traiter, est une «création algérienne», selon un éditorial récent du journal proche du Palais royal et considéré comme un ultra de la «marocanité des provinces sahraouies», Le Matin du Sahara. Au-delà de l’obstination du Maroc à chercher à «bilatéraliser» un dossier relevant des Nations unies, il y a aussi le vieux réflexe à Rabat d’occulter les difficultés internes au gouvernement en créant, comme aujourd’hui, un foyer de tension avec Alger. Le gouvernement Benkirane, qui a été remanié en octobre dernier, fait face à d’importantes difficultés : d’abord diplomatiques par des revers jamais recensés auparavant comme l’indignation provoquée par le rapport de la Fondation Kennedy aux Etats-Unis, un pays présenté par le Maroc comme son grand allié au point où l’agence de presse gouvernementale de ce pays, MAP, a multiplié les dépêches présentant Washington comme le partenaire-parrain qui ne «lâchera» pas Rabat sur le dossier sahraoui et sa thèse d’une autonomie partielle et sous le contrôle du palais royal. Ensuite politiques, dont le marqueur a été l’arrestation surprenante et injuste du journaliste Ali Anouzla du site Lakome, poursuivi pour avoir pointé le danger terroriste d’Al Qaida sur la sécurité du Maroc. Puis, politiques et économiques dans la mesure où, sans compter la pitoyable affaire du pédophile espagnol d’origine irakienne, Daniel Galvan, relâché après d’obscures tractations avec Madrid, le Maroc connait une situation politique où
    M. Benkirane parait avoir de moins en moins de marge de manœuvre face à une opposition de plus en plus critique et inquiète et face à un contexte économique de chômage et de hausse du coût de la vie.
    Selon le gouverneur de la banque centrale du Maroc Abdellatif Jouahri, le déficit budgétaire a atteint 7,6% durant l’année dernière, une situation en partie due à l'augmentation du coût des subventions, qui atteignaient 54 milliards de dirhams (4,8 milliards d'euros) fin 2012. Bien que le chômage se soit stabilisé à 9%, selon le gouverneur de la banque centrale, le niveau de création d’emplois au royaume est en train de se dégrader d’après les chiffres du Haut commissariat au Plan : en 2012, 127 000 emplois salariés ont été créés, mais que 126 000 emplois non rémunérés, notamment 111 000 en milieu rural, ont été perdus. Le chômage dans les régions urbaines, selon la même source, s'est, quant à lui, établi à 13,4 %.

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    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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