Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Kamal Amzal, une figure de la jeunesse militante

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Kamal Amzal, une figure de la jeunesse militante

    ASSASSINÉ LE 2 NOVEMBRE 1982 À LA CITÉ UNIVERSITAIRE DE BEN AKNOUN

    Réduire la taille du texte Augmenter la taille du texte Ajouter aux Favoris Version imprimable Envoyer par email à un ami


    Il y a 31 ans, jour pour jour, Kamal Amzal tomba, à l’âge de 20 ans, sous les coups de poignards des islamistes à la Cité universitaire de Ben Aknoun. Étudiant en langue espagnole, Kamal, appelé Madjid, était originaire du village de Tiferdoud, commune Ath Bouyoucef, dans la daïra de Aïn El Hammam. Il est né le 13 octobre 1962. La jeunesse kabyle d’aujourd’hui, en quête de repères pour accéder à la citoyenneté et à la vraie démocratie, est en droit d’être informée du parcours et des actes de ses aînés qui ont ouvert la voie vers la revendication et la lutte pour l’identité amazighe, les libertés démocratiques et le progrès. A la génération de 1980, qui a fait le Printemps berbère, avait succédé la génération qui a commencé à fréquenter l’université juste après les événements. Kamal Amzal fait partie de ceux qui vécurent le Printemps berbère en adolescents en classe de 2e année secondaire. C’était au lycée Mustapha Ben Boulaïd de Aïn El Hammam. Le rôle des lycéens dans le Mouvement de 1980 était surtout la liaison avec l’université, principale initiatrice de la grève générale et des manifestations, la distribution des tracts et la permanence au sein du lycée pour parer à toute attaque des forces de sécurité, en donnant l’alerte, de jour comme de nuit. Kamal Amzal obtint son bac, section Lettres, en juin 1981. Il s’inscrit alors au département d’espagnol de l’université d’Alger. Au soir du 2 novembre 1982, Kamal sera tué d’un coup de sabre par le chef d’un groupe islamiste. « Toute l’histoire de l’Algérie qui suivra est presque contenue dans cet acte de malédiction », écrit El Kadi Ihsane C’était un mardi. Kamal, appelé Madjid par ses amis, s’apprêtait à coller une affiche sur le mur du foyer de la cité universitaire qui appelait à renouveler le comité de la dite cité. Son copain tenait un rouleau de scotch à ses côtés. Et c’est à ce moment-là que l’irréparable se produisit, aux cris de «Allah Akbar». Madjid s’affala par terre et rendit son dernier souffle. Idir Benyounès écrivait, à l’occasion du dixième anniversaire de l’assassinat de Kamal Amzal : « Il est indéniable que le fantastique boum du Printemps Amazigh constitue le pic dans le mouvement estudiantin. A Alger, sous l’impulsion du mouvement démocratique, et notamment du collectif culturel de l’université d’Alger, des comités d’étudiants démocrates ont vu le jour à travers les campus et les cités universitaires. Néanmoins, la répression, qui s’est abattue sur les démocrates en 1980-81, et la volonté du pouvoir de faire émerger une tendance pouvant les contrecarrer, ont vite fait de renverser la vapeur. En effet, constatant la montée des revendications démocratiques (tamazight, liberté d’expression,…), le pouvoir a très vite trouvé en les intégristes islamistes des alliés à même de stopper, net, ces velléités. Le 19 mai 1981 est à ce titre édifiant et constitue la date de naissance officielle du mariage pouvoir/intégrisme » (journal ‘’Le Pays’’ du 2 au 8 nov. 1994). Pour commémorer l’anniversaire du 19 mai 1956, où des lycéens et des étudiants ont quitté les bancs des établissements pour monter au maquis, les collectifs des universités d’Alger ont organisé des activités culturelles qui seront perturbées par les barbus, en s’attaquant aux étudiants avec des haches, des chaînes et de couteaux. Au lieu de s’en prendre aux agresseurs, les services de sécurité arrêteront Mustapha Bacha, devant l’université, trois jours après les événements. Suivra l’arrestation de vingt-trois autres étudiants. « Le comité de la cité universitaire de Ben Aknoun, la plus importante à l’époque dans la capitale, avait été, tout au long des années 70, un haut lieu symbolique des luttes estudiantines. Un étalon de mesure des rapports de force, non seulement entre le mouvement étudiant et le pouvoir, mais aussi entre les différents courants politiques au sein de la cité. Au plus fort de la révolution agraire, il était contrôlé par les Pagsistes puis, à partir de la saison 1976-77, il était devenu le premier laboratoire du Comité autonome dominé par une autre gauche plus radicale, berbérisante et surtout favorable aux libertés démocratiques », notait El Kadi Ihsane (Le Quotidien d’Oran du 31-10-2002). Dix jours après l’assassinat ignoble de Kamal Amzal, un gigantesque rassemblement des islamistes, auquel participait Abassi Madani, eut lieu à la faculté centrale. Outre une plate-forme de revendications en quatorze points, les islamistes tenaient à prévenir toute forme de répression qui les frapperait suite à la mort de Kamal Amzal. Abassi Madani, Cheikh Sahnoun et Cheikh Soltani seront arrêtés juste après ce rassemblement. Kamal Amzal sera enterré dans son village natal, Tiferdoud, à 4 Km de Aïn ElHammam. L’affaire Amzal sera jugée au pied levé, en septembre 1984. La salle d’audience fut investie par des islamistes au point de noyer le reste de l’assistance et la partie civile. « L’assassin direct de Kamal, le chef de commando islamiste, s’avéra être le fils d’un grand ponte de la DGSN. Il n’était même pas étudiant ! En revanche, il ne fut condamné qu’à huit années de prison et bénéficiera de largesses tout au long de sa détention, laquelle fut finalement écourtée de plusieurs années. L’islamisme radical était déjà un phénomène de société complexe, qui s’imbriquait jusqu’aux sphères des décisions de l’Etat, presque obligées d’être complaisantes, comme l’illustra si bien le sort si clément réservé à l’assassin d’Amzal », ajoutait El Kadi Ihsane. Ce dernier témoigne de cette macabre soirée en ces termes : « Le soir du mardi 2 novembre 1982, je faisais partie de la vingtaine d’étudiants qui étaient entrés afficher l’appel à l’AG au foyer de la CUBA (Cité universitaire de Ben Aknoun). J’étais à côté d’Amzal au moment de l’assaut. Nous étions plusieurs à avoir pu échapper miraculeusement à la mort. Mon témoignage ne figure chez aucun juge d’instruction, mon double statut de clandestin et de militant d’extrême gauche à l’époque faisait peser sur moi des menaces de détention et de mauvais traitements chez les services de sécurité. Je venais de finir une peine de prison l’année même. Je dois à cette terrible soirée du 2 novembre une clairvoyance, je crois instinctive, sur tout ce qui touche à la parabole de l’islamisme radical en Algérie (…) De l’assassinat d’Amzal, d’autres amis, présents ce soir-là, se sont bâtis une autre sensibilité, une autre manière de réagir aux événements. Libre à chacun…Une chose nous rassemblera toujours, tout de même : Madjid est mort pour les libertés d’expression, d’organisation. Pour la liberté. Dans un pays tuméfié par la malédiction, son nom sonnera toujours comme un rappel à l’idéal de justice de nos vingt ans, à chaque fois que la traîtrise des temps le compromettra un peu plus ».



    Amar Naït Messaoud
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
Chargement...
X