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Le néocolonialisme saigne les Mayas au Guatemala

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  • Le néocolonialisme saigne les Mayas au Guatemala

    Dans la même maison communale de Totonicapan où furent veillés les 6 indigènes assassinés le 4 octobre 2012, alors qu'ils protestaient contre l'augmentation des tarifs électriques et une réforme constitutionnelle qui fait disparaître les peuples et les terres communales, devrait se célébrer le lundi 4 novembre une rencontre des communeros et communeras avec la féministe étasunienne Silvia Federici, écrivaine et activiste du mouvement Occupy Wall Street.

    Devrait, parce que les comuneros de la Famille Tzul reçurent des menaces de mort, le 26 octobre, quelques jours avant une action qui suscitait l'intérêt d'une population qui souffre des agressions de la part des militaires et des grandes entreprises multinationales, minières et hydroélectriques. La famille Tzul, et en particulier les sœurs, Gladys et Jovita, sont persécutées pour être indigènes, pour être femmes et parce qu'elles contribuent à revitaliser la toile communautaire dans les 48 cantons de Totonicapán.

    Gladys a obtenu son doctorat de sociologie à Puebla, sous la direction de Raquel Gutierrez. Dans son livre « Féminisme vu d'Abyq Yala », Francesca Gargallo soutient que « sa présence est un double agent de déconstruction parce qu'elle est à la fois K'iche et féministe » (p.256). Comme cela se passe dans toute l'Amérique Latine les femmes sont au premier rang de la résistance à l'extractivisme (depuis les mères d'Ituzaingo en Argentine jusqu' aux membres de Conamuri au Pargaguay), et combinent créativité, combativité et une grande capacité de déconstruction du modèle extractiviste.

    Les indiens guatémaltèques ont démontré, au cours des dernières années, une croissante capacité de résistance au modèle de vol et de conquête établi par la mine à ciel ouvert et par des méga-travaux comme les barrages hydroélectriques. Plus de 30 municipalités expriment depuis le milieu de la décennie des 2000 leur opposition à la mine. Une de leurs actions les plus notables fut la Marche Indigène Paysanne et Populaire qui commença à Cobán le 19 mars 2012, et qui arriva 9 jours plus tard à la ville de Guatemala après avoir parcouru plus de 200 km à pieds.

    La marche a non seulement réuni des milliers de personnes de différents peuples, elle a aussi réussi à réunir les principales requêtes, parmi elles : « qu'il soit mis fin aux expulsions, aux persécutions et à la criminalisation à l'encontre des leaders indigènes et paysans, aux fausses accusations, aux agissements de juges et procureurs partiaux, aux ordres de capture et jugements truqués, à l'intimidation, et aux attaques à l'encontre des membres, communautés et organisations, ainsi que les assassinats et perquisitions ».

    En octobre 2012, les comuneros des 48 cantons de Totonicapán bloquèrent en cinq points les routes qui mènent au chef-lieu du département, en défense de leurs requêtes. La répression militaire causa 6 morts et 30 blessés graves. L'anthropologue Kajkoj Maximo Ba Tiul soutient qu'au Guatemala se produit « une nouvelle forme de contre-insurrection » impulsée par les Etats-Unis [d'Amérique] et l'alliance historique oligarchie-bourgeoisie-militaires pour « la destruction des biens naturels en territoire indigène ». (Cetri, 11 décembre 2012).

    Pour le modèle de développement extractiviste, signale Maximo, « la nouvelle insurrection, ce sont les peuples qui s'opposent à la destruction de leurs territoires ». C'est pour cela qu'il traite des peuples entiers comme des « terroristes », appliquant des méthodes similaires à celle du régime de Efrain Rios Montt (1982-1983), pendant le génocide, qui rasa 400 villages, autrement dit, pratiquant la politique de la terre brûlée.

    Dans un travail sur « la politique K'iche », Gladys Tzul soutient que les communautés indigènes sont “des systèmes de gouvernement, qui administrent et perpétuent la vie quotidienne, et s'organisent pour la gestion collective du territoire communal ». Il est donc naturel que leur politique « ne s'organise pas de la même manière que la politique néo-libérale », reproduisant de cette manière le regard de Raquel Gutiérrez sur la politique communautaire en Bolivie : elle est délibérative et non représentative, elle est ancrée dans des formes de productions familiales et dans la propriété collective de la terre.

    Il ne s'agit donc pas de mouvements sociaux, ou de mouvements indigènes, mais bien de sociétés autres, différentes de la société hégémonique. Et ce sont également des sociétés en mouvement. Après le massacre d'octobre 2012, des jeunes femmes et des jeunes hommes de Totonicapán, parmi eux, Gladys et sa sœur Jovita, ont analysé collectivement la réforme constitutionnelle que promeut le gouvernement de Otto Perez Molina) (Kaibil [forces militaires d'opérations spéciales du Guatemala NdT] pendant la guerre), concluant que sous le manteau de « la nation guatémaltèque » on trouve « la dépossession des terres communales » et la disparition des peuples indigènes relégués au statut de reliques culturelles.

    Les comuneros de Totonicapán ont réalisé, comme le fait remarquer Gladys, « un puissant travail analytico-pratique d'investigation », ils l'ont rendu public et l'ont diffusé à travers les assemblées communautaires. Ensuite ils ont commencé à négocier, avec les entreprises l'usage de leurs terres, « une négociation de propriétaires communaux qui se sont présenté pour négocier collectivement », quelque chose que les multinationales ne sont pas disposées à tolérer. C'est ce qui est, dans ce cas concret, le scénario qui fonde la violence et les menaces.

    L'histoire des opprimés, écrit Walter Benjamin, dans une Thèse sur l'histoire, nous enseigne que « l'état d'exception » est la règle. Giorgio Agamben dans « Homo Sacer » ajoute quelque chose d'encore plus perturbant : « Le camp de concentration et non la ville est aujourd'hui le paradigme biopolitique de l'Occident ». Il ajoute que depuis les camps de concentration, « il n'y a pas de retour possible à la politique classique » et que c'est depuis « ces terrains incertains » que nous devons penser les formes d'une politique nouvelle.

    Les peuples mayas, d'un côté et l'autre de la frontière ont repoussé les limites du camp, éprouvant la solidité de clôtures et des casemates. C'est cela leur histoire longue de 5 siècles, et en particulier, celle des ultimes quarante, cinquante dernières années. Le défi est double et nous englobe parce que les murailles du camp ne peuvent être renversée qu'en faisant pression des deux côtés, de l'intérieur et du dehors.

    Raúl Zibechi pour La Jornada.

    La Jornada. México, le 1er novembre 2013.

    Traduction pour « Les états d’Anne » de : Anne Wolff

    Note de la traductrice :

    Les Kaibils eux-mêmes aiment se vanter d'être « des machines à tuer, des machines de destruction », fiers d'un entraînement qui « réveille la cruauté et les instincts sadiques » assimilés à l'instinct de survie d'un « bon soldat ».
    Hormis une formation de terrain des plus dures, les Kaibils, par exemple, doivent élever un petit chien, qu'ils devront égorger et manger par la suite, ils doivent mordre dans des poules vivantes et autres animaux...

    Les meilleurs voient leur entraînement parachevé dans les meilleures écoles d'Opérations Spéciales des Etats-Unis d’Amérique où ils se perfectionnent en techniques de tortures entre autres.

    Ils se vivent eux-mêmes comme une élite parmi les élites, serviteurs de Dieu, de la Patrie, de la Justice et de la Paix, remplis d'orgueil d'être d'entre les meilleurs parmi les meilleurs. Beaucoup d'entre eux deviendront d'excellentes recrues pour les bandes de narcotrafiquants qui sévissent dans la région, mais cela est une autre histoire.

    Leurs glorieuses auto-éloges, ce sentiment d'être des hommes hors du commun, d'honneur et de devoir, d'un courage à toute épreuve, capable de tuer sans éprouver aucun sentiment, évoque ce même langage que tenaient d'autres soldats appartenant à l'élite de l'élite, ceux de la Waffen-SS nazie. Etudier la genèse des fanatismes élitistes en général et, militaire en particulier, est très certainement à l'ordre du jour pour qui veut les combattre.

    Anne Wolff

    El Correo. Paris, le 6 novembre 2013.

  • #2
    Partout les peuples sont considérés comme des moutons ou moins que ça, bons à charcuter, à torturer, à martyriser .... au nom de théories fallacieuses de libre-échange, de bourses, de marchés, de lois fabriquées au FMI pour l'intéret du plus fort les multinationales, etc...

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