La vigilance reste la clé de toute forme de prévention.
Au moment où la barbe et le “kamis” ont fait une timide réapparition dans les établissements scolaires, centres de formation et universités, où l’ENTV cède à la pression des islamistes en interrompant la diffusion du programme de divertissement “Star Académy 3” de la chaîne libanaise LBC, alors que la prière du vendredi sur la chaussée a repris dans pas mal de localités et que la récolte de dons clandestinement et les prêches virulents sont de retour dans les mosquées, les différents services de sécurité affirment paradoxalement avoir la situation sous contrôle. Le délai accordé aux terroristes pour se rendre dans le cadre de la charte pour la paix et la réconciliation nationale a expiré le 31 août dernier sur un bilan mitigé. Du côté officiel, on soutient que la réconciliation nationale a atteint le but escompté, mais les victimes que fait quotidiennement le terrorisme démentent ce discours triomphaliste. Même si la population algérienne dans les grandes villes n'est plus hantée par le terrorisme, celui-ci n'est pas mort pour autant.
La restructuration des groupes armés, leur allégeance à l'idéologie djihadiste et aux méthodes d'al-Qaïda, le développement de la précarité en Algérie, en dépit d’indices économiques positifs, la crise de confiance envers l'État constituent un terreau favorable à une résurgence des utopies islamistes. Y compris dans la capitale, les imams font de plus en plus l’objet de menaces et d’agressions visant à les faire marcher au pas.
Selon les estimations du ministère des Affaires religieuses, quatorze millions d’Algériens assisteraient en moyenne à la prière du vendredi. Autant de personnes susceptibles de verser dans l’extrémisme si elles sont bien prises en charge. Pour cette raison, les lieux de culte font l’objet d’une surveillance particulière de la part des services de sécurité, note-t-on à ce niveau, en ajoutant que la collecte des dons doit se faire sous la condition d’une autorisation préalable de la wilaya pour un vendredi précis. Cette règle n’est pas toujours respectée.
Les comités de quartier commencent également à être suivis de près par les autorités compétentes. Après qu’on eut découvert, vers la fin des années 90, que la liste rendue publique par le ministère de l’Intérieur et des collectivités locales comportait des adresses fictives et des présidents de comité de quartier, sans activité concrète. Souvent l’argent dégagé pour le fonctionnement de ces structures de proximité a servi à cette époque au financement du terrorisme.
Endoctrinement contre aide sociale.
Quant aux associations caritatives dépendant des partis islamistes agréés, on reconnaît qu’il est très difficile de cerner leur activité sans susciter un sentiment de révolte et des accusations de répression de la part desdites formations politiques. Pourtant, on sait que des femmes appartenant à cette mouvance organisent, dans des maisons de certaines familles défavorisées, des mini-rassemblements de propagande, en échange d’une aide sociale.
Un tour dans l’ancien fief de l’ex-AIS, à quelques kilomètres d’Alger, nous permet de mesurer l’ampleur qu’a pris ce phénomène.
À Raïs, Sidi Moussa et particulièrement à l’Arbaâ, un mouvement appelé Salafia Ilmia entreprend depuis quelques années un travail d’endoctrinement.
Ce groupe est actif particulièrement dans les lycées et les centres de formation. Des lieux d’apprentissage où apparaissent de nouveau les “kamis” et la tenue afghane. La mobilisation est relancée chaque semaine à la sortie de la prière du vendredi. Ses instigateurs semblent attendre un effet boule de neige comparable à 1991. Le nom d’Oussama Ben Laden est souvent évoqué pour donner de l’aura et de la puissance aux propos tenus. Aux portes des maisons de Dieu, des jeunes en jean sont accostés et sommés de revenir à la tenue traditionnelle de l’islam.
La gendarmerie : “Rester vigilant et à l’écoute de tous”
Au niveau du commandement de la gendarmerie, on rétorque que, bien entendu, il faut rester vigilant et à l’écoute de tout. Cela entre dans le cadre de l’activité de l’unité de la collecte de l’information sur des prêches virulents, de mouvements suspects et de comportements ostentatoires, par exemple. Quand on note un comportement négatif de la part d’un imam, on le signale au ministère des affaires religieuses. On ajoute néanmoins que “la situation est sous contrôle et que le plus dur est passé”.
À Larbaâ, parmi onze terroristes recherchés par les services de sécurité, six étaient des policiers. Leurs portraits en civil et en tenue sont placardés au niveau de la brigade de gendarmerie pour permettre leur identification par les citoyens. Aucun des éléments armés recherchés n’est originaire de la région. Ils sont natifs de Sétif, Constantine, Jijel, Bordj Ménaïel, Boumerdès et Béjaïa.
Dans la localité de Larbaâ, les attroupements ostentatoires des islamistes ne sont plus de mise, trop occupés par des activités commerciales. Grâce à l’intervention du chef local de l’ex-Ais, certains d’entre eux ont pu obtenir auprès des autorités locales des locaux dans le nouveau marché. Pour les autres, l’argent amassé dans le maquis leur a permis d’ouvrir des magasins de vente de cassettes de coran, de sous-vêtements…
De nouveaux responsables de la brigade de la gendarmerie ont été installés, il y a à peine un mois. Les rues de cette localité pullulent de barbus : “Mettre un kamis n’est pas une infraction, dès qu’il y a quelque chose on les interpelle”, soulignent les services de sécurité qui font part d’une rentrée scolaire “calme”.
La population se demande, toutefois, pourquoi les hommes de l’ex-Ais gardent leurs armes.
Pourquoi ne se décident-ils pas à les rendre aux autorités ? Même si les tueries ont cessé, la pression des islamistes persiste. Aux plus forts moments du terrorisme, Amina, militante pour les droits des familles des victimes du terrorisme, a tenu tête au chef de l’Ais Mustapha Kartali et refusé de porter le voile. Même l’assassinat de sa jeune sœur de 12 ans, sortie de force de l’école et égorgée sur la chaussée publique, n’a pas entamé sa détermination.
Aujourd’hui, elle s’est résignée à mettre un foulard sous la pression d’un terrorisme psychique.
“Ma mère est très malade. Les gens ne l’ont pas laissée tranquille, et j’ai eu peur qu’elle perde la vie à cause de moi. J’ai noté un retour en force des barbus comme en 1991. À l’époque j’étais lycéenne. Cette fois-ci, ils sont revenus avec l’habit des salafistes. Mon entourage dit que tout va bien. Je n’y crois pas”. Dans le centre de formation où travaille Amina, beaucoup de stagiaires portent le “kamis” et la barbe et ne parlent pas aux filles. Pendant les séances de travail, le directeur les oblige à mettre une blouse.
Dehors, ils sont libres de s’habiller comme ils veulent. Comme chaque année, la rentrée dans ce centre s’est faite en présence des autorités locales et sous surveillance des services de sécurité. le directeur de ce centre de formation précise que beaucoup a été fait pour améliorer la situation sociale des repentis, de leurs femmes et leurs enfants. “Nous leur offrons toutes sortes de formations allant de la céramique, de la menuiserie, mécanique, à la gestion. Jusqu'à maintenant, c’est assez calme”. Il y a quelques semaines, un stagiaire, qui a traité d’apostat au sein de l’établissement une jeune fille qui portait un jean, a été rappelé à l’ordre par la direction.
Mais force est de constater que dans un lieu où parfois un simple mur sépare des familles de victimes du terrorisme et celles des repentis, le danger est omniprésent. Même les responsables des services de sécurité les plus optimistes reconnaissent que l’épée de Damoclès reste toujours suspendue.
Par Liberté
Au moment où la barbe et le “kamis” ont fait une timide réapparition dans les établissements scolaires, centres de formation et universités, où l’ENTV cède à la pression des islamistes en interrompant la diffusion du programme de divertissement “Star Académy 3” de la chaîne libanaise LBC, alors que la prière du vendredi sur la chaussée a repris dans pas mal de localités et que la récolte de dons clandestinement et les prêches virulents sont de retour dans les mosquées, les différents services de sécurité affirment paradoxalement avoir la situation sous contrôle. Le délai accordé aux terroristes pour se rendre dans le cadre de la charte pour la paix et la réconciliation nationale a expiré le 31 août dernier sur un bilan mitigé. Du côté officiel, on soutient que la réconciliation nationale a atteint le but escompté, mais les victimes que fait quotidiennement le terrorisme démentent ce discours triomphaliste. Même si la population algérienne dans les grandes villes n'est plus hantée par le terrorisme, celui-ci n'est pas mort pour autant.
La restructuration des groupes armés, leur allégeance à l'idéologie djihadiste et aux méthodes d'al-Qaïda, le développement de la précarité en Algérie, en dépit d’indices économiques positifs, la crise de confiance envers l'État constituent un terreau favorable à une résurgence des utopies islamistes. Y compris dans la capitale, les imams font de plus en plus l’objet de menaces et d’agressions visant à les faire marcher au pas.
Selon les estimations du ministère des Affaires religieuses, quatorze millions d’Algériens assisteraient en moyenne à la prière du vendredi. Autant de personnes susceptibles de verser dans l’extrémisme si elles sont bien prises en charge. Pour cette raison, les lieux de culte font l’objet d’une surveillance particulière de la part des services de sécurité, note-t-on à ce niveau, en ajoutant que la collecte des dons doit se faire sous la condition d’une autorisation préalable de la wilaya pour un vendredi précis. Cette règle n’est pas toujours respectée.
Les comités de quartier commencent également à être suivis de près par les autorités compétentes. Après qu’on eut découvert, vers la fin des années 90, que la liste rendue publique par le ministère de l’Intérieur et des collectivités locales comportait des adresses fictives et des présidents de comité de quartier, sans activité concrète. Souvent l’argent dégagé pour le fonctionnement de ces structures de proximité a servi à cette époque au financement du terrorisme.
Endoctrinement contre aide sociale.
Quant aux associations caritatives dépendant des partis islamistes agréés, on reconnaît qu’il est très difficile de cerner leur activité sans susciter un sentiment de révolte et des accusations de répression de la part desdites formations politiques. Pourtant, on sait que des femmes appartenant à cette mouvance organisent, dans des maisons de certaines familles défavorisées, des mini-rassemblements de propagande, en échange d’une aide sociale.
Un tour dans l’ancien fief de l’ex-AIS, à quelques kilomètres d’Alger, nous permet de mesurer l’ampleur qu’a pris ce phénomène.
À Raïs, Sidi Moussa et particulièrement à l’Arbaâ, un mouvement appelé Salafia Ilmia entreprend depuis quelques années un travail d’endoctrinement.
Ce groupe est actif particulièrement dans les lycées et les centres de formation. Des lieux d’apprentissage où apparaissent de nouveau les “kamis” et la tenue afghane. La mobilisation est relancée chaque semaine à la sortie de la prière du vendredi. Ses instigateurs semblent attendre un effet boule de neige comparable à 1991. Le nom d’Oussama Ben Laden est souvent évoqué pour donner de l’aura et de la puissance aux propos tenus. Aux portes des maisons de Dieu, des jeunes en jean sont accostés et sommés de revenir à la tenue traditionnelle de l’islam.
La gendarmerie : “Rester vigilant et à l’écoute de tous”
Au niveau du commandement de la gendarmerie, on rétorque que, bien entendu, il faut rester vigilant et à l’écoute de tout. Cela entre dans le cadre de l’activité de l’unité de la collecte de l’information sur des prêches virulents, de mouvements suspects et de comportements ostentatoires, par exemple. Quand on note un comportement négatif de la part d’un imam, on le signale au ministère des affaires religieuses. On ajoute néanmoins que “la situation est sous contrôle et que le plus dur est passé”.
À Larbaâ, parmi onze terroristes recherchés par les services de sécurité, six étaient des policiers. Leurs portraits en civil et en tenue sont placardés au niveau de la brigade de gendarmerie pour permettre leur identification par les citoyens. Aucun des éléments armés recherchés n’est originaire de la région. Ils sont natifs de Sétif, Constantine, Jijel, Bordj Ménaïel, Boumerdès et Béjaïa.
Dans la localité de Larbaâ, les attroupements ostentatoires des islamistes ne sont plus de mise, trop occupés par des activités commerciales. Grâce à l’intervention du chef local de l’ex-Ais, certains d’entre eux ont pu obtenir auprès des autorités locales des locaux dans le nouveau marché. Pour les autres, l’argent amassé dans le maquis leur a permis d’ouvrir des magasins de vente de cassettes de coran, de sous-vêtements…
De nouveaux responsables de la brigade de la gendarmerie ont été installés, il y a à peine un mois. Les rues de cette localité pullulent de barbus : “Mettre un kamis n’est pas une infraction, dès qu’il y a quelque chose on les interpelle”, soulignent les services de sécurité qui font part d’une rentrée scolaire “calme”.
La population se demande, toutefois, pourquoi les hommes de l’ex-Ais gardent leurs armes.
Pourquoi ne se décident-ils pas à les rendre aux autorités ? Même si les tueries ont cessé, la pression des islamistes persiste. Aux plus forts moments du terrorisme, Amina, militante pour les droits des familles des victimes du terrorisme, a tenu tête au chef de l’Ais Mustapha Kartali et refusé de porter le voile. Même l’assassinat de sa jeune sœur de 12 ans, sortie de force de l’école et égorgée sur la chaussée publique, n’a pas entamé sa détermination.
Aujourd’hui, elle s’est résignée à mettre un foulard sous la pression d’un terrorisme psychique.
“Ma mère est très malade. Les gens ne l’ont pas laissée tranquille, et j’ai eu peur qu’elle perde la vie à cause de moi. J’ai noté un retour en force des barbus comme en 1991. À l’époque j’étais lycéenne. Cette fois-ci, ils sont revenus avec l’habit des salafistes. Mon entourage dit que tout va bien. Je n’y crois pas”. Dans le centre de formation où travaille Amina, beaucoup de stagiaires portent le “kamis” et la barbe et ne parlent pas aux filles. Pendant les séances de travail, le directeur les oblige à mettre une blouse.
Dehors, ils sont libres de s’habiller comme ils veulent. Comme chaque année, la rentrée dans ce centre s’est faite en présence des autorités locales et sous surveillance des services de sécurité. le directeur de ce centre de formation précise que beaucoup a été fait pour améliorer la situation sociale des repentis, de leurs femmes et leurs enfants. “Nous leur offrons toutes sortes de formations allant de la céramique, de la menuiserie, mécanique, à la gestion. Jusqu'à maintenant, c’est assez calme”. Il y a quelques semaines, un stagiaire, qui a traité d’apostat au sein de l’établissement une jeune fille qui portait un jean, a été rappelé à l’ordre par la direction.
Mais force est de constater que dans un lieu où parfois un simple mur sépare des familles de victimes du terrorisme et celles des repentis, le danger est omniprésent. Même les responsables des services de sécurité les plus optimistes reconnaissent que l’épée de Damoclès reste toujours suspendue.
Par Liberté
Commentaire