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Lula relance le Brésil

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    Malgré quelques difficultés au début de son mandat, Lula a réussi à remettre le Brésil sur orbite avec des baisses significatives de la pauvreté, de l'inflation et des déficits publics.

    S'il est réélu, la prochaine mission de Lula consiste à relancer la croissance économique. Franklin Martin résume ainsi le défi : « Le Brésil est en train de s'envoler. Il s'agit de voir maintenant s'il retombera lourdement comme une poule, ou s'il se transforme en aigle ».

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    Le Brésil de Lula, moins pauvre et plus stable

    ANTONIA vient de s'arrêter net devant la machine à laver. La jeune femme sort de sa poche un prospectus, compare les prix et ferme les yeux, comme pour effectuer un calcul mental. L'engin coûte 585 réis (207 euros). Elle pourrait l'emporter dès aujourd'hui et le régler en dix mensualités pour un coût total de 792 réis (280 euros), à cause des intérêts. Une machine à laver, cela lui changerait la vie. Ce serait son troisième achat effectué dans un des magasins Casas Bahia, la chaîne qui a bâti sa fortune en ciblant les ménages à petits revenus. Antonia est vendeuse, son mari, José, ouvrier en bâtiment. À eux deux, ils gagnent, les bons mois, 900 réis (318 euros). Pas suffisant pour obtenir un crédit dans une banque ou dans les magasins classiques. « Ici, ils ne demandent aucune garantie, juste un nom, et une adresse. Même si je perds mon emploi, je peux faire des achats », explique Antonia. « Le coeur de notre clientèle est constitué parce que nous appelons les classes C-D-E, les pauvres et les petits revenus, par opposition aux riches des classes A et B », précise Michael Klein directeur exécutif de l'entreprise. « Ils n'ont peut-être pas d'emploi fixe, ni de compte en banque, mais ils travaillent dur, et génèrent un revenu », poursuit-il. La stratégie paye : Casas Bahia a réalisé l'année dernière un chiffre d'affaire de 11,5 milliards de réis (4 milliards d'euros). L'entreprise familiale a connu un premier coup d'accélérateur en 1994, avec la disparition de l'inflation galopante sous le président Fernando Henrique Cardoso. Depuis cinq ans, son activité explose, avec l'ouverture de près 250 magasins supplémentaires.

    Casas Bahia bénéficie à plein des années Lula. Pour la première fois depuis les années 1960, quand les économistes ont commencé à étudier la question, l'inégalité a reculé durablement au cours du mandat du président Luiz Inacio Lula da Silva, candidat à sa propre succession dimanche. La Fondation Getulio Vargas estime que la pauvreté a diminué de 19 % depuis 2003. La proportion d'indigents est passée de 28,2 % à 22,7 %, et on estime à sept millions le nombre de personnes qui ont migré de la pauvreté à la classe moyenne.

    À l'origine de l'amélioration, il y a d'abord les politiques sociales, et notamment « Bolsa Familia », qui, en versant une allocation à 45 millions de personnes, est le plus grand programme de transfert de revenu au monde. Le salaire minimum, passé de 200 réis (70 euros), à l'arrivée au pouvoir de Lula, à 350 réis (124 euros), a connu une augmentation réelle de 25 %. Une aubaine pour les petits employés et les retraités, dont la pension est indexée sur le salaire minimal. Parallèlement, le pouvoir d'achat des classes populaires a augmenté, grâce à la baisse du prix de produits de base tels le riz ou le ciment : un salaire minimal finançait 1,4 panier de base il y a quatre ans, 2,2 aujourd'hui, une hausse de 60 %. Dopé par des exportations records (60 milliards de dollars en 2002, 132 milliards cette année) et une consommation intérieure plus solide, le marché du travail s'est enrichi de 4,8 millions d'emplois formels - six fois plus qu'au cours des deux mandats de Cardoso.

    Les classes les plus aisées de la population, en particulier celles liées au secteur financier, ne sont pas mal loties. Lorsqu'en 2002, quelques semaines avant l'élection présidentielle, Goldman Sachs invente le « Lulometro », chargé de mesurer le « risque Lula » pour les marchés, elle est loin d'imaginer que l'ex-syndicaliste épouserait l'orthodoxie financière de son prédécesseur. Le gouvernement a respecté tous les contrats, dont le remboursement de sa dette, au contraire de l'Argentine. Pour ramener l'inflation sous la barre des 5 %, il n'a pas hésité à doter le Brésil des taux d'intérêt les plus élevés du monde (ils ont culminé à 19,75 % en juin 2005). S'engageant auprès du Fonds monétaire international (FMI) à afficher un excédent budgétaire primaire équivalent à 4,25 % du PIB, Lula a fait du zèle : 4,59 % en 2004, et 4,84 % en 2005. Les chiffres après la virgule ne sont pas un détail : le surplus de 0,59 point dégagé l'an dernier, représente 11,4 milliards de réis, plus que le budget du programme Bolsa Familia. Les économistes applaudissent aussi la gestion de la dette. Elle pèse aujourd'hui 50 % du produit intérieur brut contre 58,7 % en 2003, et son profil a été profondément modifié. Les créances dépendant des devises étrangères ne représentent plus aujourd'hui que 2 % du total (30 % en 2001).

    Des taux d'intérêt encore asphyxiantsMais la potion est amère : avec une hausse du PIB de 2,3 % en moyenne au cours du mandat, le Brésil est loin du « spectacle de croissance » 8de 5 % annoncé par Lula. Les taux d'intérêt asphyxient consommation et investissement et accentuent la surévaluation du real. Avec une progression de près de 70 % depuis octobre 2002, la devise brésilienne attire la spéculation financière, et fragilise les exportations. Même le secteur de l'agro-business tire la langue. L'année dernière, la conjugaison de la sécheresse et du taux de change ont limité sa croissance à 0,8 %, sa plus mauvaise performance depuis 1997.

    Le Brésil peine à sortir du cercle vicieux de la croissance molle. Les investissements dans les infrastructures qu'exige l'expansion économique sont rendus impossibles par les taux d'intérêt prohibitifs et l'excédent budgétaire. Ce dernier est nécessaire pour financer la dette, laquelle continue de progresser du fait... de taux d'intérêt élevés. Certes, la démission en mars dernier, suite à un scandale politique, du ministre de l'Économie Antonio Palocci a entraîné une inflexion dans la politique économique. Son successeur Guido Mantega est moins sensible aux sirènes des marchés financiers. Le Brésil a mis fin à ses engagements envers le FMI en remboursant du jour au lendemain son ardoise de 15 milliards de dollars. La baisse des taux d'intérêt, lancée à la fin 2005 s'est accélérée : le taux de base est tombé à 14,25 % (10 % une fois l'inflation déduite). Lula a promis de poursuivre le mouvement et de desserrer la ceinture budgétaire. Arguant qu'il a d'abord dû se consacrer à la gestion de l'« héritage désastreux » du gouvernement antérieur, le président sortant assure qu'un éventuel second mandat serait marqué par la distribution des revenus et l'accélération de la croissance. L'analyste politique Franklin Martin résume les enjeux d'une formule : « Le Brésil est en train de s'envoler. Il s'agit de voir maintenant s'il retombera lourdement comme une poule, ou s'il se transforme en aigle ».

    source: le figaro
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