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L'Algérie a un réel avenir en tant qu'acteur énergétique mondial

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  • L'Algérie a un réel avenir en tant qu'acteur énergétique mondial

    Mourad Preure, expert pétrolier international et Président du cabinet Emergy

    Pour ce spécialiste de l'énergie, Sonatrach peut devenir un grand découvreur de pétrole et de gaz.

    Liberté : Que représente pour vous le cinquantenaire de Sonatrach ?

    Mourad Preure : Le plus grand et plus déterminant acquis de l'histoire militante des pays producteurs de pétrole est incontestablement l'émergence de compagnies pétrolières nationales, telle Sonatrach, nées sur la base des ressources en hydrocarbures nationalisées et qui, par le potentiel technologique et l'expérience managériale accumulés, ont transformé en profondeur la relation producteurs-compagnies pétrolières internationales.

    Ce sont elles qui désormais incarneront l'Etat souverain dans ses relations avec les compagnies pétrolières internationales. Elles vont acquérir compétence et expertise technologique et s'imposeront comme un acteur clé dans l'industrie pétrolière mondiale. Sonatrach est un symbole fort qui s'inscrit dans la grande perspective novembriste nationale.

    La compagnie nationale incarne plus que tout une volonté d'indépendance et d'affirmation de la nation algérienne. Au même titre que la Pemex, née en 1938, incarne une symbolique zapatiste d'affirmation de la nation mexicaine. Il faut savoir que les compagnies pétrolières nationales sont toutes pétries de cette pâte.

    Comme la NIOC iranienne née du grand mouvement inspiré par Mossadegh, "le prophète des pauvres", déposé par la CIA en 1953, ou encore la PDVSA mexicaine. Et je pense Sonatrach a rempli son contrat, malgré les vents contraires.

    - Quelles ont été les réalisations saillantes ainsi que les contre-performances de Sonatrach au cours de ces cinquante ans ?

    Sonatrach est ainsi un puissant acquis de la nation. Son expertise reconnue lui permet de figurer parmi les plus éminentes compagnies pétrolières dans le monde. Elle exprime de la meilleure manière le génie algérien.

    Les femmes et les hommes qui mènent les activités de recherche et d'exploration, qui font fonctionner les installations de production, de transport, de liquéfaction du gaz naturel, les raffineries et installations pétrochimiques sont le pur produit des écoles, de l'université de notre pays. Ils opèrent des installations en tous points comparables à d'autres en fonctionnement en Europe, en Amérique, en Asie.

    Ce sont ces femmes et ces hommes, issus du peuple algérien, formés dans ses écoles, portant ses valeurs, qui font la force, la puissance de Sonatrach. Dans ce monde désormais "village global", la puissance des Etats s'établit sur la puissance de leurs entreprises.

    L'innovation, la compétitivité des entreprises, au premier rang desquelles les champions industriels nationaux, sont à la base de l'avantage concurrentiel des nations. La puissance pétrolière des pays producteurs n'est plus à rechercher dans le niveau de leurs productions et de leurs réserves.

    Il leur revient de la développer à travers la performance et la compétitivité de leurs compagnies pétrolières nationales, de leurs universités et centres de recherche. Nos jeunes, nos enfants doivent porter ces grandes ambitions. Car nos enfants ont besoin de rêver et nous devons leur dire qu'il est possible de rêver, mais surtout de réaliser ces rêves.

    Nos enfants ont le droit d'avoir leur chance de se hisser au niveau des défis relevés par leurs aînés. Comme leurs aînés, ils doivent, eux aussi, pouvoir construire par leurs réalisations au service de la nation leur propre légende et en être fiers à leur tour.

    Nous devons leur dire : "Servir la patrie, aujourd'hui, c'est innover, c'est être compétitif, c'est tendre vers l'excellence, mus par les valeurs de Novembre." Pour cela, ils doivent savoir que le 24 février 1971 fut un réel examen pour la nation algérienne, remporté avec succès par Sonatrach, incarnation du génie algérien, tout comme le fut d'ailleurs le 1er Novembre où notre peuple a défié avec des fusils de chasse une puissance de l'Otan.

    Ce qui doit en rester à notre avis, ça ne doit pas être un inventaire de réalisation d'installations pétrolières, des chiffres de production. Ce qui doit en rester, c'est cette culture du challenge, ce sens du défi qui doit devenir notre marque de fabrique, car il ne suffira plus à l'avenir de dire que l'Algérien est frondeur, qu'il est épris de liberté, soucieux de sa dignité.

    Il faudra, dans un monde de plus en plus compétitif, où seuls survivent les meilleurs, surtout dire que l'Algérien est un gagnant, un innovateur, porté par l'ambition d'atteindre l'excellence. Et, sur ce chemin, beaucoup reste à faire. En effet, nous tous avons beaucoup à faire. Les défis sont encore plus nombreux aujourd'hui, plus difficiles, et il faut impérativement les relever.

    - Quels défis majeurs doit relever Sonatrach, à court, moyen et long terme, en un mot d'ici à 50 ans ?

    Les convulsions de l'économie mondiale mettent aujourd'hui en péril les Etats, dont certains pourraient même voir leur existence remise en cause. Les Etats résilients aux chocs de la mondialisation disposent d'atouts technologiques dans des filières industrielles de pointe. Seul le secteur de l'énergie est en mesure de permettre à l'Algérie de se placer parmi les leaders mondiaux dans un secteur industriel de pointe.

    L'acteur national en mesure de réaliser cette ambition patriotique c'est Sonatrach, qui drainera derrière elle entreprises publiques et privées nationales, universités et recherche. Car, forte de son expérience et de son expertise, l'Algérie a un réel avenir en tant qu'acteur énergétique mondial.

    La puissance pétrolière des pays producteurs ne réside plus dans le niveau de leurs productions et de leurs réserves mais dans la performance, dans la compétitivité de leurs acteurs énergétiques nationaux, de leurs universités et centres de recherche. L'Algérie a un réel avenir en tant qu'acteur énergétique.

    L'humanité opère sa transition énergétique depuis un modèle de consommation fondé à 80% sur les énergies fossiles, pétrole, gaz, charbon, vers un modèle non carboné, non fossile. Nous ne devons pas rester sur le bord de la route alors que nous disposons de deux ressources clé, l'ensoleillement exceptionnel de notre pays et un potentiel gazier très fort, deux caractéristiques qui nous rendent éligibles à la qualité de leader dans les centrales hybrides solaire-gaz.

    Le potentiel énergétique de notre pays est considérable et encore insuffisamment exploité. L'ensoleillement de notre pays nous autorise à postuler à un rang de leader dans l'énergie solaire. Mais plus encore, comme par le passé, nos avantages comparatifs naturels doivent être le levier pour donner à notre expertise incarnée par Sonatrach la chance de s'épanouir et s'imposer parmi les acteurs qui façonneront la scène énergétique mondiale de demain.

    Sonatrach est l'outil qui permettra à notre pays d'opérer un véritable renversement de perspective stratégique et nous imposer en tant qu'acteur énergétique et non plus en tant que source, qu'exportateur d'hydrocarbures. Pour cela Sonatrach doit se développer en tant que compagnie pétrolière, se renforcer sur le plan technologique et managérial sur ses métiers en amont et aussi dans l'aval gazier et la génération électrique.

    Rentrer dans le top ten, en figurant parmi les dix premières compagnies pétrolières dans le monde. Pour cela, elle doit renforcer l'exploration pour découvrir de nouvelles réserves en Algérie, produire dans les meilleures conditions les réserves nationales en veillant à les préserver pour les générations futures.

    La priorité et le problème essentiel sont dans l'exploration et la découverte de nouvelles réserves, la conservation des réserves connues, le management des réservoirs, la gestion optimale des capacités d'exploitation des réserves. Elle doit devenir un grand découvreur d'hydrocarbures dans le monde et élargir sa base de réserves en international.

    Sonatrach, qui a pour mission stratégique d'assurer la sécurité énergétique de notre pays sur le long terme, doit être ainsi le vecteur par lequel notre pays engage avec succès sa transition énergétique depuis un modèle de consommation énergétique fondé sur les énergies fossiles vers un modèle non carboné non fossile.

    Pour cela elle doit jouer un rôle actif dans le développement industriel et technologique dans les énergies renouvelables dans le monde et développer son partenariat international dans ce cadre. Sonatrach doit encourager la sous-traitance nationale et le partenariat public-privé.

    Elle doit entraîner derrière elle l'industrie nationale publique et privée ainsi que les universités, l'ingénierie et la recherche pour les porter aux niveaux d'excellence technologique internationaux. Le rôle social que Sonatrach se voit souvent obligée de jouer (car les besoins sont dans certains cas impératifs et urgents alors même qu'aucun autre moyen national n'est en mesure de les prendre en charge efficacement) ne doit pas empiéter sur son organisation et son fonctionnement qui doivent, dans l'intérêt supérieur du pays, respecter les standards propres aux compagnies pétrolières les plus performantes dans le monde.

    Sonatrach doit veiller à se renforcer sur le plan humain par l'encouragement de l'excellence et de l'innovation, par la formation. Elle doit assurer la relève de l'expertise en mettant en place une articulation organique avec les universités, cela en impliquant ses propres structures de formation. Sonatrach doit mobiliser son partenariat international pour enclencher un cercle vertueux de développement scientifique et technologique en mesure de renforcer ses processus opérationnels, soutenir son développement et entraîner nos universités et centres de recherches dans les dynamiques structurantes de la science et de la technologie touchant aux hydrocarbures et à la transition énergétique.

    Les plus hauts potentiels algériens, quel que soit le lieu où ils résident ou opèrent, doivent pouvoir se mettre au service de Sonatrach et par là même servir leur pays au mieux de leurs possibilités et selon les formules les plus adaptées. Ils en ont le devoir moral, ils en ont aussi le droit le plus absolu. Rien ne doit empêcher leur mobilisation par Sonatrach.

    Elle doit être vigilante et préserver son expertise qui est convoitée par la concurrence. Elle doit veiller à la renforcer, élever sans cesse son niveau. Sans grande ambition il n'est pas de grande réussite. Osons, nous Algériens, une grande ambition : porter notre pays au rang de pays émergent, où la création de richesses est surtout le fait de notre génie que des ressources de notre sous-sol. Nous en avons les moyens.

    Mourad Preure

    Kamel. R. 04.12.2013

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    Dernière modification par MEK, 04 décembre 2013, 22h31.
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