Qui l’eût cru ? Trainée devant la justice par un groupe de chercheurs marocains pour la publication d'un faux rapport sur le Maroc, la Banque mondiale doit répondre de certains chefs d’accusations devant le tribunal de première instance de Rabat. Après trois ans de bataille, ces scientifiques estiment que l'occasion est donnée aux autorités chérifiennes, longtemps restées muettes dans cette affaire, de rehausser la valeur du peuple marocain devant ces institutions internationales en général, et la Banque mondiale en particulier. Détails.
« Pour la première fois dans l’histoire de la Justice marocaine, la Banque mondiale est appelée à se présenter devant le Tribunal de première instance de la ville de Rabat, dans le cadre d’une affaire tout à fait emblématique, et alors que jusqu’à présent, l’idée reçue est que cette institution internationale bénéficierait de l’immunité diplomatique conformément à la Convention des Nations-Unis de 1947 », indique - dans un communiqué paru mardi - le groupe de chercheurs marocains qui a intenté ce procès à l’institution de Bretton Woods.
Pour rappel, ce groupe est constitué des Professeurs Najib Akesbi, Driss Benatya- deux enseignants et chercheurs à l’Institut Agronomique et Vétérinaire de l’Université Hassan II de Rabat – et Mohamed Mahdi - enseignant chercheur à l’ENA de Meknès. Ils poursuivent la Banque mondiale depuis trois ans dans le cadre de Rural Struc, un programme d’étude et de recherche portant sur les « implications structurelles de la libéralisation pour l’agriculture et le développement rural», mis en œuvre par la Banque mondiale (BM) en collaboration avec la Coopération française et le Fonds International pour le Développement Agricole (FIDA). Sept pays, dont le Maroc, avaient participé à ce projet qui devait se dérouler en deux phases sur la période 2006-2010.
Des fausses données sur le Maroc publiées dans le monde entier
Tout s’était bien déroulé pour la première phase (réalisée en 2006 dans le cadre d’un contrat de recherche, avec l’Institut Agronomique et Vétérinaire de Rabat) dont les résultats avaient été publiés par les trois chercheurs sous forme d’ouvrage collectif. La deuxième phase, cependant, a été un échec. Les chercheurs expliquaient en octobre dernier que « la base de données n’a jamais été assainie et fiabilisée par le bureau d’études chargé du volet opérationnel [sous contrat avec la BM] et l’équipe de coordination internationale de la BM a multiplié les fautes dans l’exercice de ses responsabilités ».
En effet, au vu de tout cela, les chercheurs marocains avaient refusé de valider scientifiquement cette deuxième phase. Mais « après avoir falsifié des données et des résultats de l’étude en question, la BM a publié et fait circuler le rapport portant de fausses données sur le Maroc » indique les scientifiques, avec de surcroît, leurs noms en tant qu’auteurs. C'est ainsi qu'en 2010, le trio d'universitaires a porté plainte contre l'institution internationale pour « faux, usage de faux, usurpation de biens et de noms ».
« Une occasion pour les autorités d’emmener les institutions internationales à accorder plus de respect au peuple marocain »
Jusqu’à présent, Najib Akesbi et ses collègues se battaient sans que les autorités marocaines ne bougent le moindre petit doigt. Pourtant, relèvent-ils, ce genre de publications émanant de la Banque mondiale a souvent des « conséquences économiques et sociales catastrophiques » pour les peuples concernés. Cela a souvent été le cas pour certains pays africains notamment.
Pour sa part, l’Institution de Bretton Woods a toujours fait valoir son « immunité diplomatique » dans cette affaire pour éviter la justice. En début d’année, l’avocat des chercheurs marocains, Me Abderrahim Jamai, avait même interpellé le président de la BM sans que celui-ci ne réponde.
Jusqu’ici, le non aboutissement du dossier en justice a été, en grande partie, imputé aux autorités marocaines. Mais ce pas que vient de franchir la justice chérifienne donne une lueur d’espoir aux chercheurs. Reste maintenant à savoir si la Banque mondiale se présentera effectivement devant les tribunaux marocains. Quoi qu’il en soit, Najib Akesbi, Driss Benatya et Mohamed Mahdi sont prêt à se battre jusqu’au bout. Pour eux, l’évolution de ce procès sera « une occasion pour que les responsables marocains agissent de manière à ce que les Institutions financières internationales se comportent avec plus d'égards et de respect pour l'opinion publique et les citoyens, et que l'intérêt du peuple marocain soit au-dessus de toute considération ».
Par Ristel Tchounand
« Pour la première fois dans l’histoire de la Justice marocaine, la Banque mondiale est appelée à se présenter devant le Tribunal de première instance de la ville de Rabat, dans le cadre d’une affaire tout à fait emblématique, et alors que jusqu’à présent, l’idée reçue est que cette institution internationale bénéficierait de l’immunité diplomatique conformément à la Convention des Nations-Unis de 1947 », indique - dans un communiqué paru mardi - le groupe de chercheurs marocains qui a intenté ce procès à l’institution de Bretton Woods.
Pour rappel, ce groupe est constitué des Professeurs Najib Akesbi, Driss Benatya- deux enseignants et chercheurs à l’Institut Agronomique et Vétérinaire de l’Université Hassan II de Rabat – et Mohamed Mahdi - enseignant chercheur à l’ENA de Meknès. Ils poursuivent la Banque mondiale depuis trois ans dans le cadre de Rural Struc, un programme d’étude et de recherche portant sur les « implications structurelles de la libéralisation pour l’agriculture et le développement rural», mis en œuvre par la Banque mondiale (BM) en collaboration avec la Coopération française et le Fonds International pour le Développement Agricole (FIDA). Sept pays, dont le Maroc, avaient participé à ce projet qui devait se dérouler en deux phases sur la période 2006-2010.
Des fausses données sur le Maroc publiées dans le monde entier
Tout s’était bien déroulé pour la première phase (réalisée en 2006 dans le cadre d’un contrat de recherche, avec l’Institut Agronomique et Vétérinaire de Rabat) dont les résultats avaient été publiés par les trois chercheurs sous forme d’ouvrage collectif. La deuxième phase, cependant, a été un échec. Les chercheurs expliquaient en octobre dernier que « la base de données n’a jamais été assainie et fiabilisée par le bureau d’études chargé du volet opérationnel [sous contrat avec la BM] et l’équipe de coordination internationale de la BM a multiplié les fautes dans l’exercice de ses responsabilités ».
En effet, au vu de tout cela, les chercheurs marocains avaient refusé de valider scientifiquement cette deuxième phase. Mais « après avoir falsifié des données et des résultats de l’étude en question, la BM a publié et fait circuler le rapport portant de fausses données sur le Maroc » indique les scientifiques, avec de surcroît, leurs noms en tant qu’auteurs. C'est ainsi qu'en 2010, le trio d'universitaires a porté plainte contre l'institution internationale pour « faux, usage de faux, usurpation de biens et de noms ».
« Une occasion pour les autorités d’emmener les institutions internationales à accorder plus de respect au peuple marocain »
Jusqu’à présent, Najib Akesbi et ses collègues se battaient sans que les autorités marocaines ne bougent le moindre petit doigt. Pourtant, relèvent-ils, ce genre de publications émanant de la Banque mondiale a souvent des « conséquences économiques et sociales catastrophiques » pour les peuples concernés. Cela a souvent été le cas pour certains pays africains notamment.
Pour sa part, l’Institution de Bretton Woods a toujours fait valoir son « immunité diplomatique » dans cette affaire pour éviter la justice. En début d’année, l’avocat des chercheurs marocains, Me Abderrahim Jamai, avait même interpellé le président de la BM sans que celui-ci ne réponde.
Jusqu’ici, le non aboutissement du dossier en justice a été, en grande partie, imputé aux autorités marocaines. Mais ce pas que vient de franchir la justice chérifienne donne une lueur d’espoir aux chercheurs. Reste maintenant à savoir si la Banque mondiale se présentera effectivement devant les tribunaux marocains. Quoi qu’il en soit, Najib Akesbi, Driss Benatya et Mohamed Mahdi sont prêt à se battre jusqu’au bout. Pour eux, l’évolution de ce procès sera « une occasion pour que les responsables marocains agissent de manière à ce que les Institutions financières internationales se comportent avec plus d'égards et de respect pour l'opinion publique et les citoyens, et que l'intérêt du peuple marocain soit au-dessus de toute considération ».
Par Ristel Tchounand
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