il ya de cela plusieurs années, et alors que nous étions réunis moi et les miens dans un quartier de la capital, entrain d'énumérer les qualités d'un homme qui venait de nous quitter, je m'éloigna du groupe pour en griller une, le soleil cognait fort pendant que je me tenais sous un arbre qui m'offrait généreusement quelques centimètres d'ombre quand un vieillard qui venait de sortir de l'immeuble qui me faisait face et autour duquel les présents étaient amassés vint me rejoindre.
l'Algérois typique, vieux Shanghai retapé dont le bleu blanchi témoignait du nombre de passage à la machine...enfin entre les mains et la planche, des lunettes ornaient son visage ridé, une touffe de cheveux gris était suspendue à son menton tremblant, un crane reluisant qui renvoyait les rayons brûlants du soleil impitoyable, et tendis qu'il avançait vers moi, un petit être en plumes s'agitait dans la cage qu'il tenait avec la main alors que l'autre lui servait à s'appuyer sur sa canne.
le monsieur s'assis au pied de l'arbre, un rocher couvert d'un bout de carton se trouvait là, il faisait mine de ne pas m'avoir aperçu, je me suis un peu écarté pour lui épargner de respirer le poison que mes narines lâchaient, je le regardais déposer sa canne, et la cage du ma9nine qui n'avait pas arrêté de chiwchiwer, puis il se retourna vers moi en remettant ses lunettes:
- salam alikoum mon fils
- salam wa rahmatou allah
- pourquoi tu ne ramènerais pas un rocher, tiens celui là - en me désignant la direction avec son menton- aller, assieds toi on va discuter.
je vis le rocher qu'il venait de m'indiquer, il me semblait trop lourd et trop poussiéreux, je choisis de me baisser en pliant les jambes pour arriver à son niveau après avoir jeté ma cigarette et je lui dis:
- je suis trop fatigué, si je vais chercher le rocher sous cette chaleur je mourrai
- oh, vous les jeunes, toujours à vous plaindre ... de mon temps - j'étais parti ailleurs, dès qu'on commence à me bassiner de la sorte, mon esprit s'évade, j'y peux rien, je suis comme ca depuis la fac- n'est-ce pas?
il venait de me poser une question, visiblement, la réponse était oui
- oui l'hadj
- tu sais fiston, je connaissais bien Mohamed, me dit t-il après avoir marqué une pause
- je me doute bien, c'était votre voisin, moi je connais son fils, lui je lui parlais rarement.
- moi je le connais depuis que nous étions jeunes, nous avons grandi ensemble dans les ruelles de la casbah - un long silence puis- allah iérahmou
il se tourna vers son oiseau coloré, l'observa un moment puis reprit:
- tout les deux, nous avons rencontré les plus grands chyoukh du cha3bi, si je te montrais les cassettes de cha3bi que j'ai tu n'en croiras pas tes yeux, des centaines, avec 3ammek mouh on sillonnait le port à longueur de journée, on assistait aux ka3date, on faisait des grillades à la plage, la nuit ont jouait de la guitare et on la faisait parler.
- vous avez bien vécu 3ammi
- c'est du passé maintenant hein?! - toussotement - regarde comment nous sommes entrain de tomber -toux-
- je vous apporte de l'eau si vous voulez
- nan reste - sa main retenait mon bras - aya a93od!, tu sais fiston ... tu t'appel comment dejà?
- risk
- risk, je t'aime bien
- lah ikhallik 3ammi
- yaaa risk ya risk, le monde est devenu fou... les gens ne savent plus distinguer ce qui est bien de ce qui est mal
- que voulez vous tonton ...
- tu vois ce quartier? il y a à peine 5 ans, un arbre se tenait à chaque coin, il y'en avait des dizaines comme celui sous lequel tu t'appuie, puis je ne sais pas ce qui s'est passé dans la tête des gens, on s'est mis à les couper tous!, tout les jeunes se sont réunis, des hommes et même les petits et c'était comme l'3ide, les gens riaient les femmes avaient préparé à manger pour tout le monde, chacun a apporté quelque chose pour aider, une hache, une scie, un marteau, de l'eau, des chaises, tous unis pour couper les arbres.
je guettais désormais le moindre mot qui sortait de sa bouche, l'incitais à continuer en faisant oui de la tête.
- je n'ai jamais vu ca dans ce quartier, tu leur demande de se rassembler pour nettoyer le quartier, tout le monde te dit qu'il est d'accord pour aider mais quand le moment arrive personne n'est là... mais quand il s'agissait de couper les arbres, ahhh la tout le monde a tenu sa promesse - il toussait, il toussait tellement fort que je crus un moment qu'il allait tomber, ses yeux brillaient de larmes et la peau tombante de son visage devenait rouge, je me sentis mal à l'aise -
- tonton, je vais vous apporter une bouteille d'eau -j'accompagnais la parole au geste car j'étais déjà parti vers un épicier, je lui tendis la bouteille à mon retour, il la déposa à coté de sa canne en me remerciant, et il reprit -
ils sont venus découper cet arbre là, je suis sorti les acceuillir avec une hache, les pauvres, ils ont cru que j'étais venu les aider, mais je leur ai dit: c'est pour vous découper vous bande de cons.
à ce moment là il lâcha un rire moqueur qui me fit rire à mon tour, il répétait la même phrase "bandes de cons" en l'accompagnant du même rire énérgique ...sacré vieillard.
il finit par s'arrêter de rire, puis il me dit:
- si tu reviens ici à la tombé de la nuit, tu trouveras une bande de petits cons assis au pied de l'arbre, ils accrochent une guirlande à ses branches et ils jouent aux dominos
- c'est peut être pour ca que les habitants ont décidé de couper les arbres - j'ai lâché ca sans trop y croire -
- non, ils disaient que les arbres les empêchaient de garder un oeil sur leur voitures stationnées en bas des immeubles, et que le bruits des oiseux qui y nichaient les dérangeait trop, j'ai compté les arbres, 21 au total, plus anciens que les résidents eux même... et maintenant, leur gosses viennent s'asseoir sous cet l'arbres pour jouer, quand il pleut ils se réfugient sous ses feuilles, y'en a qui prennent leur photos de l'3ide sous ses branches... ah ils me font rire ces idiots.
je suis passé l'été dernier devant la maison de ce vieillard, l'arbre n'y est plus.
l'Algérois typique, vieux Shanghai retapé dont le bleu blanchi témoignait du nombre de passage à la machine...enfin entre les mains et la planche, des lunettes ornaient son visage ridé, une touffe de cheveux gris était suspendue à son menton tremblant, un crane reluisant qui renvoyait les rayons brûlants du soleil impitoyable, et tendis qu'il avançait vers moi, un petit être en plumes s'agitait dans la cage qu'il tenait avec la main alors que l'autre lui servait à s'appuyer sur sa canne.
le monsieur s'assis au pied de l'arbre, un rocher couvert d'un bout de carton se trouvait là, il faisait mine de ne pas m'avoir aperçu, je me suis un peu écarté pour lui épargner de respirer le poison que mes narines lâchaient, je le regardais déposer sa canne, et la cage du ma9nine qui n'avait pas arrêté de chiwchiwer, puis il se retourna vers moi en remettant ses lunettes:
- salam alikoum mon fils
- salam wa rahmatou allah
- pourquoi tu ne ramènerais pas un rocher, tiens celui là - en me désignant la direction avec son menton- aller, assieds toi on va discuter.
je vis le rocher qu'il venait de m'indiquer, il me semblait trop lourd et trop poussiéreux, je choisis de me baisser en pliant les jambes pour arriver à son niveau après avoir jeté ma cigarette et je lui dis:
- je suis trop fatigué, si je vais chercher le rocher sous cette chaleur je mourrai
- oh, vous les jeunes, toujours à vous plaindre ... de mon temps - j'étais parti ailleurs, dès qu'on commence à me bassiner de la sorte, mon esprit s'évade, j'y peux rien, je suis comme ca depuis la fac- n'est-ce pas?
il venait de me poser une question, visiblement, la réponse était oui
- oui l'hadj
- tu sais fiston, je connaissais bien Mohamed, me dit t-il après avoir marqué une pause
- je me doute bien, c'était votre voisin, moi je connais son fils, lui je lui parlais rarement.
- moi je le connais depuis que nous étions jeunes, nous avons grandi ensemble dans les ruelles de la casbah - un long silence puis- allah iérahmou
il se tourna vers son oiseau coloré, l'observa un moment puis reprit:
- tout les deux, nous avons rencontré les plus grands chyoukh du cha3bi, si je te montrais les cassettes de cha3bi que j'ai tu n'en croiras pas tes yeux, des centaines, avec 3ammek mouh on sillonnait le port à longueur de journée, on assistait aux ka3date, on faisait des grillades à la plage, la nuit ont jouait de la guitare et on la faisait parler.
- vous avez bien vécu 3ammi
- c'est du passé maintenant hein?! - toussotement - regarde comment nous sommes entrain de tomber -toux-
- je vous apporte de l'eau si vous voulez
- nan reste - sa main retenait mon bras - aya a93od!, tu sais fiston ... tu t'appel comment dejà?
- risk
- risk, je t'aime bien
- lah ikhallik 3ammi
- yaaa risk ya risk, le monde est devenu fou... les gens ne savent plus distinguer ce qui est bien de ce qui est mal
- que voulez vous tonton ...
- tu vois ce quartier? il y a à peine 5 ans, un arbre se tenait à chaque coin, il y'en avait des dizaines comme celui sous lequel tu t'appuie, puis je ne sais pas ce qui s'est passé dans la tête des gens, on s'est mis à les couper tous!, tout les jeunes se sont réunis, des hommes et même les petits et c'était comme l'3ide, les gens riaient les femmes avaient préparé à manger pour tout le monde, chacun a apporté quelque chose pour aider, une hache, une scie, un marteau, de l'eau, des chaises, tous unis pour couper les arbres.
je guettais désormais le moindre mot qui sortait de sa bouche, l'incitais à continuer en faisant oui de la tête.
- je n'ai jamais vu ca dans ce quartier, tu leur demande de se rassembler pour nettoyer le quartier, tout le monde te dit qu'il est d'accord pour aider mais quand le moment arrive personne n'est là... mais quand il s'agissait de couper les arbres, ahhh la tout le monde a tenu sa promesse - il toussait, il toussait tellement fort que je crus un moment qu'il allait tomber, ses yeux brillaient de larmes et la peau tombante de son visage devenait rouge, je me sentis mal à l'aise -
- tonton, je vais vous apporter une bouteille d'eau -j'accompagnais la parole au geste car j'étais déjà parti vers un épicier, je lui tendis la bouteille à mon retour, il la déposa à coté de sa canne en me remerciant, et il reprit -
ils sont venus découper cet arbre là, je suis sorti les acceuillir avec une hache, les pauvres, ils ont cru que j'étais venu les aider, mais je leur ai dit: c'est pour vous découper vous bande de cons.
à ce moment là il lâcha un rire moqueur qui me fit rire à mon tour, il répétait la même phrase "bandes de cons" en l'accompagnant du même rire énérgique ...sacré vieillard.
il finit par s'arrêter de rire, puis il me dit:
- si tu reviens ici à la tombé de la nuit, tu trouveras une bande de petits cons assis au pied de l'arbre, ils accrochent une guirlande à ses branches et ils jouent aux dominos
- c'est peut être pour ca que les habitants ont décidé de couper les arbres - j'ai lâché ca sans trop y croire -
- non, ils disaient que les arbres les empêchaient de garder un oeil sur leur voitures stationnées en bas des immeubles, et que le bruits des oiseux qui y nichaient les dérangeait trop, j'ai compté les arbres, 21 au total, plus anciens que les résidents eux même... et maintenant, leur gosses viennent s'asseoir sous cet l'arbres pour jouer, quand il pleut ils se réfugient sous ses feuilles, y'en a qui prennent leur photos de l'3ide sous ses branches... ah ils me font rire ces idiots.
je suis passé l'été dernier devant la maison de ce vieillard, l'arbre n'y est plus.
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