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Le suicide économique de l’Egypte

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  • Le suicide économique de l’Egypte

    Comment sauver une économie proche de la faillite ? En Egypte, la réponse semble passer par un plan de relance. Le ministre égyptien des Finances, Ahmed Galal, a annoncé que début janvier le gouvernement augmentera le plan de relance planifié. Tout cela alors même que le déficit budgétaire du pays atteint 14 % du produit intérieur brut (PIB) et que la dette publique croissante -87.5 % du PIB- est hors de contrôle.

    Le nouveau plan de relance doit être financé en grande partie par un emprunt à court terme aux pays du Golf - l’Arabie Saoudite, le Koweït et les Emirats arabes unis – qui avaient tous apporté leur soutien au gouvernement égyptien après l’évincement de Président Mohamed Morsi en juillet 2013. La dépendance au système de l’aide est précaire non seulement à cause de sa nature provisoire, mais aussi parce que les pays de Golf ont du mal à se forger une réputation de donateurs fiables.

    Un peu perplexe, Galal ne peux occulter l’ampleur du problème budgétaire dans le pays. Diplômé de l’Université de Boston, il a travaillé à la Banque mondiale pendant 18 ans et a fait plusieurs publications universitaires sur les problèmes des économies émergentes, et plus spécifiquement sur le monde arabe. Il est ainsi la dernière personne en Egypte que l’on pourrait voir comme ignorant les dangers de la dette. Il a d’ailleurs déclaré récemment que - «le déficit budgétaire l’inquiétait vivement » - et pour une bonne raison.

    Le pari de Galal est que l’augmentation des dépenses - la plupart étant consacrées à l’investissement public, avec une partie mineure allouée à des augmentations de salaires du secteur public - aiderait l’économie égyptienne à sortir des problèmes actuels. Avec le fort taux de croissance avoisinant les 7% que l’Egypte connaissait avant la chute de Moubarak, l’explosion de la dette aurait pu être soutenable - De plus, ce qui est plus important est qu’une croissance économique plus forte permettrait de créer des emplois pour la grande masse de jeunes chômeurs qui ont soutenu le printemps arabe.

    Pourtant le pari a peu de chance de réussir. Augmenter les dépenses publiques alors que le ratio du déficit-du PIB a presque triplé, la stratégie choisie est terriblement risquée même si le pays est victime d’une récession économique temporaire. En 2009 ou 2010, alors que la crise de la dette faisait rage dans la zone euro, personne - pas même Paul Krugman - n’a suggéré d’augmenter les dépenses publiques.

    Les taux de croissance économique de l’Egypte avant 2011 étaient liés à des réformes libérales entreprises dans les dernières années du règne de Moubarak, une période marquée par le clientélisme et la corruption endémique. La privatisation des entreprises publiques, par exemple, a été largement considérée comme injuste, réalisée dans le but d’enrichir une poignée d’amis de Moubarak. En même temps les subventions inutiles à la consommation ont été réduites, le déficit budgétaire est progressivement passé sous contrôle, et il y a eu des améliorations importantes de l’environnement institutionnel du pays. Entre 2006 et 2011, le pays est passé de la 141ème place à la 94éme au classement Doing Business réalisé par la Banque mondiale.

    Malgré tous leurs défauts, il est regrettable que, après le printemps arabe, nombre de ces réformes soient au point mort ou dans l’oubli total. Les dirigeants militaires actuels du pays affiche nt peu d’intérêt dans la poursuite d’un programme de libéralisation économique.

    Sans ces réformes, il est illusoire de s’attendre à une croissance économique plus forte. Les problèmes économiques de l’Egypte ne sont pas cycliques et ne peuvent être résolus par une augmentation des dépenses ou par une politique monétaire plus souple. Ils sont une combinaison de nombreux problèmes structurels - les dépenses inutiles, la réglementation populiste excessive, la faiblesse de l’état de droit - et l’incertitude généralisée sur l’orientation future de la politique économique et même du système politique du pays.

    Galal a certainement conscience de tout cela et pourtant, il est prêt à prendre le risque d’augmenter le poids d’une dette publique qui repose sur les épaules d’une nation qui s’avère être insolvable. Cela prouve à quel point il était erroné de penser que le gouvernement technocratique de Hazem El-Beblawi (également docteur en économie) apporterait une amélioration au désordre qui caractérisait l’équipe de Morsi. Mais ce qui est plus important, le grand pari de Galal précipite l’Egypte sur la voie de ruine économique, avec les répercussions qui se ressentiront dans toute la région.

    * Analyste au Cato Institute à Washington DC.

    libé
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