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L'extraordinaire mission des trois Amar

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    L'extraordinaire mission des trois Amar



    Ils sont trois A, comme autrefois les trois B. Les trois B, les anciens s'en souviennent : Belkacem Krim, Ben Tobbal et Boussouf. Les trois A ? Ils sont là, chacun de son côté, dans sa wilaya historique, chargé de sa mission et d'une partie du peuple, avec un discours personnalisé et des jeux de rôles dans les médias : Amar Benyounès, Amar Ghoul et Amar Saïdani.

    Amar Ghoul est chargé d'acheter des avions, des Chinois, des Américains, des Français, des islamistes mous et sans vertèbres, des Turcs et des députés. Des députés ? Oui : souvenez-vous : le Parti Taj se retrouve représenté au parlement alors qu'il n'a pas participé aux élections législatives. Comment ? Des élus avec d'autres sigles se déclareront vite du Taj après élections. Simple comme un tracé d'Autoroute : de l'Est vers l'Ouest. Et donc des autres, vers TAJ. Amar est à mi-chemin : moustaches mais pas de barbe. Entre la barbe et l'imberbe. Pas islamiste mais pas républicain. Juste contremaitre. Nationalité ? Chinoise ou celle du vent ou du debout. C'est le seul islamiste au monde «arabe» qui n'a pas de religion. S'en passe par appels d'offres et intention d'achat. Intouchable aussi mais de la dernière génération. Mystérieusement épargné par tous, un moment pressenti comme palliatif au régime en manque de formule face au printemps «arabe». Il sera reconduit, après le scandale de l'autoroute, vers le futur scandale des avions. Un spécialiste des grands chèques en votre nom. Sa mission dans le clan ? Convaincre, blanchir l'idéologie, faire le contremaitre des grands chantiers et recruter chez les autres pour les affaiblir. C'est le symbole de l'islamité post-moderne, version de service. C'est le second pied du trépied. Ce Amar est une religion à lui tout seul, mais il la cache sous la votre. Le second Amar est Benyounès. Là, c'est l'avatar domestiqué du RCD. Le Kabyle qui a rejoint la plaine pour nier la montagne. L'homme qui est chargé de représenter le troisième pied du trépied : la kabylité du régime. Il est chargé de recruter chez les classes moyennes, les hommes d'affaire moyens, les élites moyennes et les classes traumatisées par les années 90. Il travaille avec Ghoul mais dos à dos, n'étant pas islamiste et jouant justement sur la peur de l'islamiste.

    Le troisième Amar ? Saïdani le magnifique. Désormais l'Inexplicable. Le seul à danser sur une musique qu'il est le seul à ouïr. Lui, c'est le premier pied du trépied : la FLNité du régime. L'électorat conservateur ruralo-peureux. Sa mission dans le clan ? Faire face aux adversaires par des attaques dures et frontales. Il est chargé de rameuter les gens de son genre, d'affaiblir les autres clans, de faire peur comme un homme de main et de paralyser le débat à la hauteur de ses frasques. Sa mission est d'isoler les ennemis, de pousser au ralliement, de jouer la musique et d'incarner la voix d'un homme qui ne peut, désormais, que murmurer derrière le dos du monde. Ce Amar est le plus terrible mais sa mission est la plus importante : faire croire que le FLN est à lui et que le pays est au FLN.

    Les trois A sont en mission depuis des mois : l'un attaque, l'autre joue, le dernier exprime. L'un danse, l'autre dit, le dernier explique. L'un récolte les signatures, l'autre les entretiens, le dernier les «Rabbi Kbir», version laïque du Allahou-Akbar islamiste. Ils nous encerclent, nous murmurent à l'oreille, nous harassent, nous harcèlent et nous occupent. Leur mission est grandiose : vendre un homme qui achète un pays. Faire élire un homme qui ne parle plus et bouge à peine. Faire oublier l'âge en perdant notre temps. Nous faire croire qu'ils font la révolution alors qu'ils ne font que du rabattage de gibier. Nous vendre la stabilité alors qu'il ne s'agit que d'un homme assis. Des rois mages qui promettent une immaculée élection.

    Les trois Amar sont donc là. Un intellectuel chargé de faire peur, un militant chargé de faire mal et un islamiste chargé de faire des affaires. L'un vise la tête, l'autre le ventre, le dernier tire désormais encore plus bas.

    par Kamel Daoud


    Le Quotidien d'Oran
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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