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Alger, la mangeuse de ses poètes !

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  • Alger, la mangeuse de ses poètes !

    On aime une ville, celle dans laquelle on a été volé, aimé ou tombé malade. C’était en mai 1977, la première fois où je suis rentré dans cette ville appelée, je ne sais pas par qui ni pour quelle raison, “Alger la Blanche”.

    J’avais une peur et une réticence envers cette cité sans traits ! Je débarquais d’Oran, une ville ouverte, fêtarde et noctambule ! À Oran, tout le monde se sent chez lui. Il n’y a pas d’étranger à Oran. En arrivant à Alger, tout ce que j’avais sur moi, c’était mes trois cents dinars et ma carte d’étudiant.

    J’ai passé la journée entre le siège de l’union des écrivains situé au 88 rue Didouche Mourad, et Lotus, jadis le café des intellectuels et des artistes. Je ne connaissais que quelques jeunes écrivains : Tahar Djaout, Salah Harzallah, Youcef Sebti, Mostefa Faci, Abdellaâli Rezagui, Ladrae Cherif, Ahmed Hamdi, Cherif Ghebalou…

    Le soir, j’ai décidé de rentrer à Boumerdès pour passer la nuit chez mon frère ainé, alors étudiant à l’INH. À la gare routière, et avant de monter dans le bus, ma fortune m’a été volée : mes trois cents dinars! Et j’ai aimé Alger.

    Dès que je médite sur Alger, je découvre en elle une ville qui tue et emprisonne les poètes.

    Elle ressemble à une belle femme masochiste ! Elle a commencé par Cervantès, maître de Don Quichotte de la Mancha ! C’était le premier résident de ses geôles ! Cela c’est passé en 1575. Violence ou amour dévorateur ! Le 30 août 1973, dans une aveugle cave, Alger a tué son grand poète Jean Sénac, celui qui signait d’un soleil. Auteur du fameux poème : “Tu es belle comme un comité d'autogestion.” Au suivant ! Le 29 janvier 1986, l’ogresse n’a pas hésité à tuer la poétesse Safia Kettou, de son vrai nom Zahra Rabhi, en la lâchant du haut du pont sourd du boulevard Télemly.

    Au suivant ! Alger a tué le fils d’Azzefoun, auteur des Chercheurs d’os, le poète Tahar Djaout. C’était le 26 mai 1993. La folie ! Alger, avec un sang-froid, a également abattu Youssef Sebti, c’était le 28 décembre 1993. Absurdité ! Alger n’a pas pu défendre l’écrivain Laâdi Flici, il est tombé sous une pluie de balles enragées, le 17 mars 1993… Cynisme !

    Quand les villes tuent leurs poètes, cela révèle un cataclysme ! Et dans cette violence, dans ce rêve-réel cauchemardesque, je contemple Alger, et je la trouve féroce mais séduisante ! Je déteste les cages. Ainsi je n’aime pas cette tradition algéroise envers le chardonneret el maqnine. L’oiseau, depuis mon enfance, dans mon imaginaire, fut le symbole de la liberté. Les cieux sans bord sont faits pour les oiseaux. Et je hais les cages.

    Algérois que vous êtes, Algérois que nous sommes, libérons les oiseaux de leurs prisons ! Rendez-leur leurs cieux, leurs chants et leurs joies ! Remettez les ailes à leur places ! Remettez les cordes vocales à leur places ! Le chant d’un oiseau dans une cage me torture, me blesse !

    Pour qu’Alger retrouve sa partition et son éclat, il faut me rendre mes trois cents dinars, rendre le sourire, la vie et le verbe aux poètes et libérer tous les chardonnerets de leurs cages.


    Par : Amine ZAOUI- Liberté

  • #2
    Un bibiothécaire algérois m'a dit (avec un sourire malin et un hochement de tête qui en dit long) à propos d'Amine Zaoui : "yettektek w'argaz-nni !" (Ce monsieur est toqué !")
    "Tout ce que je sais, c'est que je ne sais rien."
    Socrate.

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