Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Mohamed Chafik Mesbah : Appel à la raison

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Mohamed Chafik Mesbah : Appel à la raison

    Par Mohamed Chafik Mesbah, officier supérieur de l’ANP à la retraite


    1- Dans les moments intenses qui précédèrent le déclenchement de la révolution du 1er Novembre 1954, alors que les rangs du mouvement national - en l’occurrence le PPA-MTLD, principal parti porteur du projet nationaliste - étaient gravement divisés, un Comité révolutionnaire d’unité et d’action (CRUA), composé d’éminents militants et dirigeants nationalistes - dont le regretté Mohamed Boudiaf -, avait lancé, sous la dénomination d’«Appel à la raison», une adresse pour dépasser les clivages fratricides en vue de préparer, solidairement, le passage à la lutte armée. Cet appel n’ayant pas eu le succès escompté, ce fut le conclave des «22», composé des seuls membres de l’Organisation spéciale, qui prit l’initiative historique du déclenchement de la guerre de Libération nationale.

    2- Nous sommes, à bien des égards, dans une phase comparable où, face à la grave crise qui secoue l’Algérie, une voie étroite reste encore ouverte pour un dénouement de raison. Nonobstant toutes les polémiques actuelles au caractère politicien, une menace majeure pèse sur l’Algérie avec trois risques gravissimes que sont le risque de désintégration territoriale, le risque de dislocation de la cohésion sociale et, enfin, le risque d’effritement de l’unité de l’armée.

    3- Ces trois risques forment la trame d’une véritable menace de sécurité nationale. S’agissant, tout singulièrement, de l’unité des rangs au sein de l’institution militaire, est-il besoin de rappeler que, depuis un temps déjà, des fissures ont commencé à altérer la cohésion qui existait entre corps de bataille et services de renseignement. Il est loisible de critiquer, à souhait, les défaillances qui ont pu marquer les démarches respectives des deux composantes de l’institution militaire, l’état-major de l’ANP et le Département du renseignement et de la sécurité. Il n’empêche, c’est la conjugaison des efforts de ces deux institutions, soudées contre le péril majeur guettant le pays, qui a constitué le socle sur lequel a reposé la pérennité de l’Etat-nation.

    4- S’agissant, plus particulièrement, des services de renseignement, nonobstant le rôle d’interface avec la société politique qu’ils ont eu jouer au profit des instances légales du pays, ils se sont réorientés, avec la baisse d’intensité du danger terroriste, vers deux pôles d’activité essentiels :
    - La neutralisation des atteintes à l’économie nationale, terme générique pour désigner, en particulier, la lutte contre la grande corruption. Ainsi, ces services ont eu à mener des investigations poussées qui ont mis en évidence la gravité des malversations commises au titre des affaires dénommées «concessions agricoles», «autoroute Est-Ouest» et «Sonatrach».
    - La neutralisation des menées étrangères hostiles, au sens d’actions d’intelligence ennemies. Il s’agit, en l’espèce, des tentatives d’interférence des services de renseignement étrangers sur le processus de prise de décision stratégique en vue d’influer sur la décision elle-même.

    5- En marge de ces deux pôles d’activité, les services de renseignement ont continué d’assumer la tâche afférente à la lutte contre le terrorisme, notamment en rapport avec les menaces nouvelles prévalant au niveau de nos frontières sahariennes et au-delà. Afin, cependant, de soulager les structures classiques de renseignement, un dispositif organisationnel ad hoc a été mis en place avec, à son bilan, des résultats importants salués par les partenaires étrangers. Cette structure dont les activités font l’objet de commentaires abusifs dans la presse est une entité vivante que les pays et puissances concernés par la sécurité du Sahel considèrent comme la pierre angulaire du combat mené contre l’hydre terroriste dans la région. Perturber son fonctionnement, c’est courir le risque de compromettre son action, voire de provoquer le désaveu des partenaires occidentaux de l’Algérie.

    6- Bien des prétextes ont été brandis pour justifier les attaques enflammées, actuellement lancées, sans discernement, contre les services de renseignement du pays. Dans l’ouvrage Problématique Algérie que j’ai publié en 2009, figure une présentation exhaustive de ce que pourrait être une véritable réforme des services de renseignement. Indéniablement, cette réforme reste à accomplir. Mais il faut se garder de l’attitude juvénile qui consiste à vouloir mettre aux normes de la démocratie, ici et là, l’appareil national de renseignement et de sécurité. C'est-à-dire, en faisant fi de la nature autoritariste de l’Etat algérien, laquelle exige, tout au contraire, l’usage d’appareils répressifs. Est-il besoin, à cet égard, de souligner que l’autoritarisme dans la conduite des affaires publiques ne s’est jamais aussi bien vérifié que sous le règne de M. Abdelaziz Bouteflika ?

    7- C’est dire que les propos colportés à propos de la volonté de «civilisation» du système politique algérien avec, en sous-entendu, la mise aux normes du mode d’organisation et de fonctionnement des services de renseignement sont un leurre. C’est à tort que certains leaders politiques et autres observateurs supposément avertis ont évoqué la dissolution de ce qu’ils désignent comme la «police politique». Ce qui s’est déroulé constitue une simple reconfiguration des services de renseignement avec préservation des mêmes missions, y compris celles ayant trait au contrôle du champ politique. Dans cette reconfiguration, c’est juste la tutelle qui change avec un choix de nouveaux responsables cooptés par l’environnement immédiat du chef de l’Etat. Ces nouveaux chefs ont été mes compagnons au sein de l’institution et je ne me crois pas fondé à contester leurs compétences. Ils ont effectué un parcours professionnel classique qui les prédispose à assumer des fonctions de commandement. Leur désignation, dans un contexte ordinaire, n’aurait pas soulevé de remarque. Dans les circonstances présentes, il est à espérer qu’aucune autre loyauté, vis-à-vis de coteries ou d’individus, ne se substitue, chez ces nouveaux chefs, à celle qu’ils doivent exclusivement à leur patrie.

    8- Cette reconfiguration ne va pas mettre fin à la mission de contrôle du champ politique que décrient les contradicteurs des services de renseignement. Plus que jamais, le régime de Monsieur Abdelaziz Bouteflika s’appuiera sur un appareil de renseignement encore plus dédié à la répression des libertés politiques. Encore plus grave, il ne faut pas s’étonner que les missions relatives à la lutte contre les atteintes à l’économie nationale et à la neutralisation des menées d’intelligence étrangère soient déclassées dans l’ordre des nouvelles priorités. Bref, ce qui intéresse le chef de l’Etat et le cercle environnant, c’est le contrôle de la société, pas sa protection. Répétons-nous, l’adaptation des services de renseignement aux canons de l’Etat de droit ne peut être envisagée hors contexte historique. C’est dans le cadre d’une véritable transition démocratique qu’elle est concevable et cette transition tarde à venir.

    9- Laissons donc de côté l’objectif fallacieux de la campagne actuelle contre les services de renseignement algériens. Derrière la prétendue volonté de réforme de ces services, dans le sens de l’instauration d’un Etat «civil», n’est-ce pas le souci de conservation du pouvoir qui se cache, puisque là réside la préoccupation du chef de l’Etat et de ceux qui forment le cercle présidentiel ? Le mobile de la manœuvre n’est pas tant de «moraliser» l’action des services de renseignement mais de les déposséder de leurs capacités d’action contre la grande corruption et contre l’instauration de liens d’intelligence entre corrupteurs étrangers et corrompus nationaux. C’est sous cet angle qu’il faut interpréter la démarche de ceux qui agissent dans le sens d’une paralysie préjudiciable des appareils de renseignement et de sécurité.

    10- Les pays communistes eux-mêmes, lorsqu’ils sont passés au système libéral, ont réformé leurs services de renseignement dans la discrétion, avec le souci d’une économie maximale en matière de ressources humaines. Markus Wolf, maitre-espion de la Stasi, ne peut, sans doute pas, constituer une référence morale. Même si, au terme de sa carrière, convaincu des limites du système autoritariste est-allemand, il a participé aux manifestations de contestation du régime Honecker. Tenons-en nous à son comportement professionnel. Au lendemain de la chute du mur de Berlin, le maître espion allemand a résisté à la tentation de se réfugier en Israël qui lui avait ouvert ses portes à condition de révéler l’écheveau des réseaux d’agents qu’il avait tissé tout le long de sa carrière. Il a préféré terminer paisiblement ses jours dans son pays natal, l’Allemagne, pays où, dans le respect de ses exploits passés, il n’eut même pas à purger sa peine de prison toute symbolique. Cette digression peut paraître étrangère au sujet.
    Elle vise à interpeller ceux qui sonnent l’hallali contre les services de renseignement de leur pays. Qu’ils s’efforcent, donc, d’accéder à l’intelligence sublime du jugement du chancelier prussien Otto Bismarck : «Le renseignement est un métier de seigneurs.»


    .../...
    كلّ إناءٍ بما فيه يَنضَح

  • #2
    .../...


    11- La manière dont est menée cette charge à la hussarde contre le chef des services de renseignement, en réalité contre l’institution sécuritaire elle-même, soulève bien des interrogations. Habituellement, le président Abdelaziz Bouteflika dont le sens tactique est reconnu, ne procède pas, à propos de questions aussi sensibles, de manière intempestive. Il a pour méthode d’agir à travers une démarche graduelle tenant compte à la fois des équilibres internes et de la donne étrangère. A l’œuvre, depuis son arrivée à la tête de l’Etat depuis 1999, pour bouter hors l’armée ses contradicteurs militaires «janvieristes», il s’est acquitté de la tâche sans trop en faire étalage public. C’est pourquoi il n’est pas sans à propos de s’interroger s’il est, vraiment, à la barre. Du moins seul à la barre. Je n’ai jamais cru, personnellement, à cette thèse prévalant dans certains microcosmes algérois selon laquelle M. Abdelaziz Bouteflika ne s’en prendrait jamais au général Mediene Mohamed car il lui était, moralement, redevable. D’abord parce qu’il lui a permis de franchir, sans grande difficulté, toutes les consultations électorales depuis 1999, mais, surtout, parce qu’il a joué un rôle essentiel dans son évacuation salutaire vers la France, lors de son premier accident de santé. Outre que la gratitude est, en politique, un sentiment aléatoire, M. Abdelaziz Bouteflika ne semble pas homme à devoir déterminer ses décisions politiques majeures sous le coup de l’émotion.

    12- Ici n’est guère le lieu de s’étaler sur cette réforme des services de renseignement. Il n’est pas question de prêter main- forte à ceux qui pourraient s’en saisir comme prétexte pour tenter de mettre à terre d’anciens chefs ou compagnons auxquels me lie une proximité affective que je ne renie point. Indéniablement, au gré de la lutte contre le terrorisme, les services de renseignement algériens ont drainé des brebis galeuses, sinon une piétaille de «mokhaznis» qui sont loin d’être représentatifs des états de services de la communauté historique du renseignement. Guidés par l’amour de la patrie et le souci de l’intérêt public, mes compagnons, dans leur immense majorité, se sont acquittés, honorablement, de leur devoir.

    13- Il me faut me prononcer sur l’appréciation que je retiens du chef de services de renseignement, le général Mediene Mohamed, puisque j’ai, longtemps, exercé sous son commandement. Durant ma présence au sein de l’institution et même après, je n’ai jamais eu à le prendre en défaut par rapport à son patriotisme ou à son intégrité. Jusqu’à plus ample informé, je m’en tiens à ce constat. Je souhaite, néanmoins, illustrer par un témoignage direct l’appréciation que je livre à ce propos. Bien des divergences de vues m’ont opposé au général Mediene Mohamed en ce temps-là. Je contestais, notamment, au sens stratégique du terme, la conception prévalant quant au mode de fonctionnement des services de renseignement ainsi que la finalité de leur mission. J’apportais au général Mediene Mohamed la contradiction avec une impertinence qui confinait à l’indiscipline. Jamais, pourtant, il ne prit de sanction disciplinaire à mon égard, faisant preuve, au contraire, d’une exceptionnelle faculté d’absorption des chocs. C’est à ma seule insistance, d’ailleurs, qu’il fut accédé à ma demande de mise à la retraite. Cet épisode est rapporté pour souligner combien, à l’instar de ceux qui connaissent de près le général Mediene Mohamed, je me suis gaussé en lisant l’adresse que Hocine Malti - probablement de bonne foi – avait publiée sous le titre tapageur de «Rab Dzaïr !» (Le Dieu de l’Algérie !»). Un statut dont l’officier général en question se serait prévalu. L’actuel chef des services de renseignement, au comportement sobre, est d’un tempérament réservé qui ne le prédispose pas à de tels extrêmes.
    Il est presque pudique avec, comme défense, un abord distant. Personnellement, durant toutes les décennies où je l’ai côtoyé, jamais je ne l’ai entendu élever la voix ou proférer quelque insanité.

    14- Pour illustrer, par ailleurs, l’intégrité dont je crédite cet officier général, je garde en mémoire le comportement rigide qui est le sien vis-à-vis de sa famille qu’il tient à l’écart, absolument, des affaires publiques. Sur ce registre, il me revient à l’esprit l’hostilité farouche qu’il avait manifesté vis-à-vis de Khalifa Abdelmoumen, lorsque celui-ci, enivré par son épopée aventureuse, se livrait à des approches à l’endroit de cadres des services de renseignement et même du propre fils du chef de cesdits services. Convoqué à deux reprises par les services du DRS, Khalifa Abdelmoumen fut, dans un cadre réglementaire, auditionné non sans se voir signifier une sévère mise en garde.

    15- Dans mon esprit, patriotisme et souci de préserver la souveraineté nationale sont indissociables. A ce sujet, j’avais été frappé par la vigilance, poussée à son extrême, dont le général Mediene Mohamed faisait preuve s’agissant des contacts tissés par des cadres du DRS avec leurs homologues étrangers. Il admettait les impératifs d’une coopération axée sur le volet sécuritaire et la lutte contre le terrorisme. Il se souciait, au plus haut point, en contrepartie que la coopération ne débouche pas sur une imbrication de caractère stratégique, pouvant comporter une altération de la souveraineté nationale. Ce souci d’autonomie dans la décision nationale visait à préserver, en dernier ressort, les intérêts de l’Algérie. Cet état d’esprit l’avait conduit - alors qu’il était seulement en charge de la sécurité de l’armée - à s’opposer résolument à une tentative de collaboration entre services de renseignement algériens et américains ayant pour cible le régime du colonel El Kadhafi. Plus près de nous, les observateurs attentifs devraient pouvoir déduire que ce sont les services de renseignement - plus que toute autre partie - qui ont convaincu le président de la République d’abroger, de pousser à l’abrogation de cette fameuse loi sur les hydrocarbures conçue par Chakib Khelil dans l’intention d’entraîner, à terme rapproché, la privatisation de Sonatrach.

    16- Par-delà ce portrait élogieux, des divergences de vues essentielles continuent de m’opposer à cet officier général s’agissant de l’appréciation des situations et des hommes. A contre-courant des idées reçues, je suis convaincu que le général Mediene Mohamed n’est pas opposé à une candidature de Abdelaziz Bouteflika pour un quatrième mandat. Ce n’est ni dans sa nature ni dans son tempérament de nourrir des états d’âme pouvant le pousser à contrevenir aux règles de la discipline militaire.
    Ses charges de chef des services de renseignement pourraient, cependant, l’avoir conduit, par esprit de loyauté et non de confrontation, à recommander au président de la République un assainissement de son entourage, voire un aménagement indispensable des règles de gouvernance publique.
    Indépendamment de l’étendue des malversations commises à titre individuel, il est vraisemblable que les enquêtes sur la grande corruption ont permis la mise en évidence de graves dysfonctionnements du système, notamment, l’absence de mécanismes adéquats de contrôle politique et administratif. Ne disposant pas de preuves irréfragables sur le sujet, je suis enclin, néanmoins, à imaginer que le général Mediene Mohamed a pu émettre, à l’intention du chef de l’Etat, des recommandations en ce sens. Il n’est pas improbable qu’une telle initiative soit à l’origine des difficultés que connaît, actuellement, le général Mediene Mohamed.


    .../...
    كلّ إناءٍ بما فيه يَنضَح

    Commentaire


    • #3
      .../...


      17- Revenons au quatrième mandat. Je suis, évidemment, aux antipodes du positionnement du chef des services de renseignement sur la question. Je dresse, en effet, un diagnostic sombre, sans concession, du règne de Abdelaziz Bouteflika. J’affirme cependant ne pas nourrir d’animosité personnelle à son égard, je lui souhaite, au contraire, une sortie honorable qui lui permette de se consacrer à sa guérison. S’agissant, toutefois, de l’entourage du chef de l’Etat, je ne suis pas du tout animé par le même état d’esprit. Les membres de cet entourage, responsables prévaricateurs ou «baltaguia» de l’économie, sont comptables de l’état des lieux : délitement de l’Etat, dégradation des mœurs et gaspillage des ressources nationales.
      Le prochain scrutin présidentiel, à l’issue évidente, ne me parait pas constituer un véritable enjeu. C’est le système, dans sa globalité, qui est en cause. Gageons que ce système sera mis à rude épreuve après l’élection présidentielle.

      18- N’occultons pas, pour autant, le poids de l’influence étrangère sur le cours des évènements en Algérie. Surtout lorsqu’il s’agit du thème spécifique des services de renseignement. Nonobstant l’intérêt à bénéficier du concours de l’Algérie dans la lutte contre le terrorisme au Sahel et dans la région maghrébine, des parties étrangères peuvent-elles avoir à gagner dans la déstabilisation des services des renseignements algériens ? Oui, si l’intérêt stratégique consiste à s’infiltrer au cœur du processus de prise de décision pour infléchir les axes de la politique économique, sécuritaire et diplomatique de l’Algérie. Pour atteindre cet objectif, il faut, évidemment priver l’Algérie de son immunité de défense. La France – du moins des cercles de décision et d’influence français, le Maroc – pour des considérations évidentes de rivalité régionale – et Israël – dans le sillage des néoconservateurs américains lorsqu’ils étaient au pouvoir veut mettre en pratique la théorie du «chaos constructeur» – ont intérêt à l’affaiblissement de l’Algérie, en affaiblissant son dispositif d’intelligence et de contre-intelligence. Je ne disculpe pas, pour autant, les Etats-Unis d’Amérique dont l’intérêt pour l’Algérie se manifeste sur un autre registre. L’intérêt de cette superpuissance est focalisé, certes, sur le rôle que notre pays peut jouer au profit de la stabilité du Sahel et de la région maghrébine. L’objectif stratégique que visent les Etats-Unis d’Amérique consiste à impliquer l’Algérie dans un mécanisme de sécurité régional soumis à leur contrôle. Une telle démarche s’inscrit, forcément, dans la durée. Dans l’intervalle, les Etats-Unis d’Amérique accepteront-ils de s’accommoder d’une démarche aventureuse consistant à «jeter le bébé avec l’eau du bain». Ce n’est pas de la paranoïa, tout juste une déduction empirique qui reste à valider. Il est difficile de s’étendre sur cette question dans le cadre limité de cette réflexion. Il n’est pas sans pertinence, néanmoins, de s’interroger, sans complexe, sur les attaches à l’étranger de ceux qui, attaquant sans discernement les services de renseignement, s’appliquent à priver le pays de son immunité de défense.

      19- Cet appel serait incomplet si, pour affiner le témoignage, il n’était pas fait état de l’attachement viscéral du chef des services de renseignement au parti du FLN, sans doute un attachement sentimental plus que politique. Sur le registre politique, justement, à l’initiative des instances politiques légales du pays, il a combattu le principe de l’alliance stratégique du FLN avec le Front islamique du salut que défendait le regretté Abdelhamid Mehri. Mais l’équation de l’alliance avec le FIS n’étant plus d’actualité - du moins pas avec la même acuité -, la tâche de l’heure aurait dû consister en la régénération du FLN pour qu’il se réconcilie avec le temps et la société. Le tour des événements pris au sein du FLN s’oriente vers une autre issue, sombre en tout état de cause.
      Le général Mediene Mohamed doit souffrir, secrètement, de cette descente aux enfers d’un parti qui lui est proche. Est-il besoin de souligner que sa peine doit être encore plus grande de savoir que les coups qui lui sont assénés proviennent de la direction du FLN, peu importe qu’elle soit légitime ou pas.

      20- Pour qu’il accède à la sortie honorable que je lui recommande, le chef de l’Etat doit marquer son retrait volontaire de la scène politique par des mesures courageuses qui garantissent la cohésion de l’institution militaire. Cette cohésion semble devoir être mise à rude épreuve. Le président de la République favoriserait cette cohésion s’il revenait à une répartition plus équilibrée des pouvoirs au sein du ministère de la Défense nationale. L’exercice des responsabilités politiques doit être, en particulier, dissocié des charges opérationnelles. La tutelle des services de renseignement devrait relever du chef de l’Etat, puisque nous sommes, quasiment, dans le régime présidentiel.

      A l’évidence, Abdelaziz Bouteflika et le cercle environnant entendent disposer, dans la conjoncture présente d’un bras armé. Qu’ils aient donc à l’esprit ce principe de bonne gouvernance qui dispose que la concentration excessive de pouvoir est toujours nuisible. Si Abdelaziz Bouteflika, soucieux de son empreinte sur l’histoire, ne souhaite pas assumer l’issue fatale d’une perte de cohésion de l’armée, j’en appelle à sa raison pour qu’il rétablisse une gestion conforme de ses deux composantes, l’institution militaire et l’institution sécuritaire. J’en formule le vœu, sans nourrir trop d’illusion.


      M. C. M.
      كلّ إناءٍ بما فيه يَنضَح

      Commentaire


      • #4
        L’intellectuel organique Chafik Mesbah parle-t-il au nom de Toufik ?
        Par Mohamed Sifaoui



        Pour ceux qui ne connaissent pas le personnage, le colonel à la retraite Mohamed Chafik Mesbah a servi au sein du DRS. Il s’agit d’un ancien officier radié des effectifs et reversé dans la société civile. C’est ce qu’on pourrait appeler un intellectuel organique.

        « Intellectuel organique » car ses connaissances théoriques, son savoir universitaire et son expérience personnelle sont mis entre les mains d’un système de gouvernance, en tout cas, à la disposition d’une branche de ce pouvoir à laquelle il reste intimement lié.

        Proche et admirateur du patron du DRS, dont il est un exécutant (mandaté ou autoproclamé ?), Mohamed Chafik Mesbah, se permet, comme toute matière grise produite par le régime et façonnée par lui, de proposer, de temps à autre, quelques « critiques » pour mieux entretenir l’illusion d’un « pays qui avance » et d’essayer de faire passer des vues et des messages, réclamant par-ci, liftings ou « changements » susceptibles de satisfaire une vision personnelle et, par-là, « réformes » ou « évolutions » qui lui permettraient de se remettre en selle au sein de la boîte qu’il a quittée avec quelque peu d’amertume, dit-on. Ses « contributions médiatiques », y compris quand il se permet quelques libertés, s’inscrivent toujours dans la logique voulue et décidée par le tout-puissant patron du DRS, lui-même continuateur d’une vieille tradition, et jamais en contradiction totale avec une vision hégémonique qui de facto place la police politique au centre du pouvoir algérien afin de ne pas rompre avec cette tradition – dont on connaît les limites – qui a décidé, bien avant l’indépendance, que le système politique, car illégitime, devait reposer sur un puissant outil répressif, capable d’assurer le maillage de la société, de contrôler tous les pans du pays et de décider, sinon à tout le moins de participer à la décision, de presque tout. Une démarche qui vise à assurer la pérennité d’un système de gouvernance et, surtout, à capter la rente et à veiller à sa répartition, le plus souvent, selon un principe clientéliste. C’est ainsi que les « services » algériens ont gagné leur pompeux statut de « colonne vertébrale » de l’État, alors qu’en vérité, cet outil constitue, les yeux, les oreilles et le bras armé et, parfois manipulateur, d’un pouvoir. La confusion est entretenue car, comme tout régime autocratique et illégitime, le pouvoir algérien laisse entendre qu’il serait à la fois l’État, le pays et les institutions, n’acceptant au passage aucune critique de fond, car tout ce qui pourrait pointer le caractère illégitime du pouvoir est présenté comme un « ennemi de la nation, du peuple et de l’État ».

        Mais revenons à notre sujet. D’une part, Mesbah, de l’avis de certains de ses anciens collègues, n’a pas une piètre opinion de sa personne ni un égo totalement maîtrisé et encore moins une démarche vraiment désintéressée. L’intellectuel n’a jamais réussi à prendre le dessus sur le colonel et le personnage aurait, à maintes reprises, répété, à certains de ses proches, qu’il se verrait volontiers, un jour, en haut de l’affiche de la maison DRS.

        Dans l’absolu, pourquoi pas ! Il n’est pas question de commenter, ici, les ambitions d’un homme qui doit s’ennuyer terriblement, car parti à la retraite un peu trop tôt. De plus, il n’est pas tant question des hommes que du système de gouvernance même s’il ne faut pas oublier que ce sont avant tout des hommes qui façonnent et modèlent le système qui continue de régir l’Algérie. Avant de prétendre au sacre, l’ambitieux devrait toutefois lever toutes les ambigüités le concernant et notamment cette petite réputation qu’il traîne, tel un boulet, et qui le décrit comme étant quelque peu perméable à l’affairisme, aux belles voitures allemandes qui transitent par l’Ouest du pays et aux terres agricoles. Il doit nécessairement clarifier cette question d’autant qu’il semble admirer le général Toufik pour son « intégrité », dit-il. Et il est vrai, à ce titre, que tous les témoignages sérieux décrivent le patron du DRS comme un « cadre honnête ne touchant pas aux affaires ». Mesbah ne doit pas avoir trop de chance, car il ne semble pas jouir de la même réputation que son idole auprès de plusieurs cadres du système. Les mêmes qui louent l’honnêteté de Toufik disent pis que pendre de Mesbah. Évidemment, cela fait tache !

        D’autre part, j’ai eu l’occasion de raconter dans mon livre « Histoire secrète de l’Algérie indépendante, l’État-DRS », grâce à de précieux témoignages, jamais contredits, le rôle manipulateur joué par Mohamed Chafik Mesbah, à la demande de sa maison mère, lors de précédentes « élections présidentielles » auprès de candidats rivaux de Bouteflika. Une première fois, son poulain et néanmoins victime était Ahmed Taleb Ibrahimi (en 1999) et une seconde fois, sa proie fut Ali Benflis (en 2004). C’est dire qu’à la vérité, il n’est guère troublant de le voir réapparaître, aujourd’hui, alors qu’une lutte acharnée oppose les différents clans et révèle au grand jour les fissures et les contradictions qui minent le système. À l’évidence, Mesbah aime beaucoup les périodes électorales. Comme le DRS d’ailleurs. C’est un peu leur bac à sable.
        Il n’est pas étonnant en effet d’apprendre, à travers des « gorges profondes » au sein du système algérien, que Mesbah, le « chargé de mission », serait habilité, sinon par le patron du DRS lui-même, par une frange des « services », pour transmettre quelques messages clairs au président Bouteflika et aux membres de son clan. À force d’agir tantôt publiquement tantôt dans l’ombre, jouant à l’intellectuel par-ci et au fixer pour journalistes étrangers par-là, il se démasque comme un acteur missionné pour jouer une partition dans ce poker menteur interminable qui oppose les différents clans.

        Quoi qu’il en soit, il ne fait aucun doute que ce que dit Mesbah, avec ses mots, Toufik le pense avec sa logique de garant de la pérennité de ce système de gouvernance auquel il tient tant. Il convient dès lors de décortiquer le contenu de la dernière tribune publiée ce jeudi par Mohamed Chafik Mesbah sur les colonnes du Soir d’Algérie, car, ce n’est pas une « voix libre » qui s’exprime ni un franc-tireur, mais bel et bien un intellectuel organique intimement lié au DRS qui nous parle de l’Algérie comme s’il s’agissait de la Norvège. Ses liens avec la police politique nous invitent donc à essayer de saisir les messages subliminaux. Et il faut d’autant plus décrypter une telle tribune que derrière des propos policés, les menaces sont réelles. Qui parle ? Mesbah ? Toufik ? Ou alors quelques officiers tapis dans l’ombre ?

        Quoi qu’il en soit, il devient évident que le clan de Toufik ne compte pas relâcher la pression sur l’équipe opposée. Est-ce un hasard si après chaque « communiqué présidentiel », un messager louant Toufik et le DRS sort le clairon, comme pour mieux relancer la machine ? Serions-nous en train d’assister à la mise en place, de la part du DRS, d’une stratégie de la tension ? Une première fois, par la voix du général Hocine Benhadid et, cette fois-ci, par l’intermédiaire du colonel Chafik Mesbah, cherche-t-on volontairement à entretenir ce climat dangereux ? Car, il n’y a qu’à lire attentivement les phrases utilisées par Mesbah et son ton crispant pour s’en rendre compte :

        - Sa sortie intitulée « appel à la raison » débute par un drôle de parallèle historique qui compare la situation actuelle à celle qui avait prévalu à la veille du déclenchement de la guerre de libération. C’est dire que le colonel Mesbah a dû se sentir colonisé durant quinze ans pour oser la comparaison. Il précise d’emblée que « l’appel à la raison » du CRUA « n’ayant pas eu le succès escompté, ce fut le conclave des « 22 », composé des seuls membres de l’Organisation Spéciale, qui prit l’initiative historique du déclenchement de la guerre de libération nationale » pour enchaîner immédiatement en affirmant : « Nous sommes, à bien des égards, dans une phase comparable où, face à la grave crise qui secoue l’Algérie, une voie étroite reste encore ouverte pour un dénouement de raison ». D’aucuns pourront remarquer que la nuance réside dans « une voie étroite reste encore ouverte ». En d’autres termes, si c’est bien le cabinet du général Toufik qui a amendé le texte de Mesbah, comme le certifient certaines sources algéroises, le patron du DRS, épaulé très probablement par d’autres officiers supérieurs actifs ou à la retraite, lancerait une sorte de dernier ultimatum au clan de Bouteflika. De plus, le texte de Mesbah lie ce nécessaire « dénouement de raison » aux « risques gravissimes » qui guetteraient l’Algérie, notamment « le risque d’effritement de l’unité de l’armée », un élément de langage que l’on retrouve curieusement dans la bouche et sous la plume de tous les adeptes du DRS qui répètent inlassablement qu’un 4e mandat de Bouteflika pourrait attenter à l’unité de l’armée. Aveu d’une lutte féroce entre clans au sein de l’ANP, ce qui tranche évidemment avec le discours officiel et la langue de bois qui n’ont de cesse de rappeler « l’unité de l’armée ». D’ailleurs le Colonel Mesbah le reconnaît lui-même. « Est-il besoin de rappeler que, depuis un temps déjà, des fissures ont commencé à altérer la cohésion qui existait entre corps de bataille et services de renseignements », écrit-il.


        .../...
        كلّ إناءٍ بما فيه يَنضَح

        Commentaire


        • #5
          .../...


          - Dans un deuxième point, Chafik Mesbah, en intellectuel organique bien dressé s’insurge contre ceux qui cherchent à « mettre aux normes de la démocratie », la police politique. Pour lui, l’État algérien étant de « nature autoritariste », il devient normal que celui-ci veuille disposer « d’appareils répressifs ». Évidemment, le carnivore ne peut pas se passer de ses canines, tout comme Dracula d’ailleurs, mais tout de même, Mesbah qui connaît bien l’histoire de son pays et celle de sa structure génitrice, n’ignore pas que la police politique est, avant d’être historiquement parlant, l’outil répressif de l’État, la « colonne vertébrale » d’un régime usurpateur qui, dès l’indépendance, sous l’impulsion de Boumediène et de son armée des frontières, n’a pas hésité à verser le sang des Algériens pour capter le pouvoir et le remettre à Ben Bella, l’agent de Nasser et des Égyptiens, avant de le reprendre trois années plus tard pour continuer d’asseoir avec l’aide des « services » le régime autoritaire que nous connaissons et dont les errances et les approximations répétées ont fait naître le régionalisme, l’islamisme et la corruption. En maître de l’apologie déguisée en critiques, l’oiseau Mesbah infantilise ses lecteurs comme le font ses maîtres à penser à l’intérieur du régime avec le peuple algérien, pousse sa ritournelle et dédouane le DRS de toute responsabilité dans la gabegie. Bouteflika serait une sorte d’extra-terrestre qui aurait, par sa seule puissance, mis au pas l’armée et le DRS pour mieux s’approprier l’État, ses biens et banaliser l’affairisme et la corruption.

          Mais pourquoi ne pose-t-il pas la question à son chef. Qui a permis à Bouteflika d’arriver au pouvoir et d’effectuer trois mandats successifs en se jouant de tous ceux qui pouvaient, à tout le moins, représenter un contre-pouvoir ou une opposition crédible ? N’est-ce pas le DRS qui est à l’origine de ce vide politique abyssal ? Et n’est-ce pas le même DRS qui, en usant et en abusant de la signature des habilitations, a permis à la médiocrité de devenir l’élite du pays ? Car, le colonel Mesbah critique, également, ceux qui ont appelé à la dissolution de la police politique. D’abord, il y a une malhonnêteté intellectuelle de vouloir confondre, comme le fait volontairement l’intellectuel organique, l’outil de renseignement, nécessaire pour tout État et vital pour toute démocratie avec une police politique qui, elle, ne fait qu’ankyloser la société, humilier les élites, abrutir le peuple, entraver les médias, gêner la justice, aliéner les énergies avec toutes les dérives que nous connaissons en Algérie où il arrive de retrouver certains des sous-officiers ou des officiers du DRS, mêlant travail de renseignement et petites affaires à la petite semaine ou, pour d’autres, gros business et affaires scabreuses.

          Mesbah connaît parfaitement les noms de ses anciens collègues qui se sont égarés grâce à leur grade et à leur statut, nécessitant parfois des rappels à l’ordre de la part de Toufik lui-même qui, s’il n’est probablement pas mêlé à des affaires de corruption, a su fermer les yeux sur des civils et des militaires qui barbotent dans la mare de la petite et de la grande corruption. Car avec lui, la sanction ne doit viser que le « petit », le « grand », lorsqu’il est pris la main dans le pot de confiture est, au pire, invité à faire valoir ses droits à la retraite. Une autre raison pour laquelle beaucoup de cadres, y compris les plus malhonnêtes, lui sont reconnaissants.

          N’est-ce pas colonel, que Toufik ne sanctionne, judiciairement parlant, que très rarement ! Alors certes, le DRS a mené de brillantes enquêtes mettant en cause des pontes du régime. Mais alors ! Ce DRS n’est conçu, sur le plan intérieur, que pour protéger le régime contre son propre peuple. Qu’en est-il de la « judiciarisation » de ces affaires ? Alors qu’une justice expéditive est mise en branle à chaque fois qu’il faut sanctionner un citoyen ou un lampiste, celle-ci devient étrangement absente, lente et laxiste dès qu’il s’agit de « hautes personnalités » civiles ou militaires ? Faut-il conclure que la présidence et ses satellites entravent le travail des services de renseignement ? Si tel est le cas, le colonel gagnerait à dire les choses beaucoup plus clairement.

          Mais attention ! L’intellectuel organique nous le répète : « l’adaptation des services de renseignement aux canons de l’État de droit ne peut être envisagée, hors contexte historique. C’est dans le cadre d’une véritable transition démocratique qu’elle est concevable et cette transition tarde à venir ». Mais évidemment, le même Mesbah semble oublieux, là aussi, que c’est le même DRS, dont il dresse un portrait apologétique, qui n’a eu de cesse, bien avant l’arrivée de Bouteflika d’entraver tous les processus de démocratisation du pays. Et je ne parle évidemment pas de l’arrêt du processus électoral de janvier 1992 qui a empêché des fanatiques de récupérer le pouvoir. Je parle de toutes les périodes suivantes, volontairement gâchées par une volonté manifeste d’entretenir le statu quo et cette pseudo « légitimité historique ».

          En vérité, les tenants du système nous ont prouvé, depuis janvier 1992, qu’ils avaient stoppé le FIS non pas par convictions républicaines et/ou laïques, mais parce qu’ils ont perçu, à juste titre, que le FIS allait détruire le système autoritaire et illégitime, pour installer un système théocratique et illégitime. Depuis, le même DRS s’est employé à cliver la société, à démoraliser les énergies et à brimer les plus déterminés, y compris cette partie de la société qui avait, en 1992, approuvé l’arrêt du processus électoral et soutenu l’État dans sa lutte implacable contre le terrorisme islamiste. Tout ceci pour mieux trahir, par la suite, les victimes du terrorisme, les laïques et les démocrates, en allant tripatouiller un arrangement avec les égorgeurs et les fanatiques, les réhabilitant au moment où les démocrates, après avoir senti le poignard effleurer leur gorge, ressentaient le couteau que leur plantaient l’armée et le DRS dans le dos.

          Cette même police politique qui a légitimé le projet islamiste dit « non violent » en dénigrant les démocrates les traitant parfois, à travers les relais médiatiques habituels, de « parti de la France », tantôt de « traîtres » tantôt « d’agents de l’étranger », usant ainsi de resucées d’un temps où toute contradiction, y compris la plus légitime, opposée au pouvoir en place, était désignée comme l’expression manifeste d’un « complot ourdi contre la Nation ». Qui parmi les démocrates, aujourd’hui, serait suffisamment fou et naïf pour croire en la parole de Mesbah ou pour faire confiance au général Toufik ? Il est curieux tout de même de constater qu’à chaque fois que la police politique est à l’agonie, à la fin d’un cycle ou en raison de la manifestation d’une contradiction grave au sein du régime, elle cherche à s’appuyer sur les démocrates et les énergies progressistes.

          Faut-il encore que les sbires de Toufik prouvent aux Algériens et au monde qu’ils ont un quelconque attachement aux valeurs consacrant la démocratie ? Après, il sera plus facile pour Mesbah d’user de ces « principes », totalement étrangers à sa maison mère. Et quasiment toute son intervention est trempée dans cette logique hypocrite où l’on prend à témoin l’opinion publique nationale et les chancelleries étrangères en se faisant passer pour un intellectuel froid et distancié, soucieux de l’avenir démocratique de l’Algérie, alors que le colonel avait largement fait tourner sa tribune, comme s’il s’agissait d’un tract subversif, une semaine avant sa parution auprès de quelques dizaines de colonels et de généraux en activité et à la retraite comme pour mieux se faire le porte-voix d’un groupe d’officiers cherchant à déstabiliser encore davantage le pays au profit du général Toufik qui devient de fait, une sorte de marionnettiste national, conscient ou dépassé.

          - Cela étant dit, il faut observer, avec attention, la conclusion de son texte : Mesbah fait du Benhadid en plus élaboré en usant des mêmes propos quasiment que ceux que le général avait utilisés lors de sa sortie de la semaine dernière tout en reprenant l’esprit de l’introduction de l’article dont il est question. Aussi, écrit-il : « Si M. Abdelaziz Bouteflika, soucieux de son empreinte sur l’Histoire, ne souhaite pas assumer l’issue fatale d’une perte de cohésion de l’armée, j’en appelle à sa raison pour qu’il rétablisse une gestion conforme de ses deux composantes, l’institution militaire et l’institution sécuritaire » et ce, après avoir bien évidemment invité Bouteflika à renoncer au 4e mandat. Par la voix de Mesbah, l’on veut nous faire admettre que Bouteflika – et son frère – seuls seraient l’incarnation du Diable et que l’Algérie rencontrerait le bonheur avec le renoncement au 4e mandat. Mais quid de l’après Bouteflika ? Le DRS cherche-t-il à reprendre la main ? Cette question est d’autant plus légitime, et le colonel politologue ne l’ignore guère, que les stratégies de la tension ont pour finalité l’instauration ou la consolidation de régimes autoritaires, voire dictatoriaux.

          - Il y a probablement une seule chose que je peux partager avec Mohamed Chafik Mesbah. Comme lui, je considère que Bouteflika doit quitter le pouvoir. Tout comme son clan et notamment son frère Saïd Bouteflika qui doit être relégué très vite aux oubliettes de l’histoire à défaut de devoir rendre des comptes. Mais tout de même, s’il est question d’user de menaces et d’emmener le pays vers le chaos aux fins de garantir la pérennité du même système, voire d’engendrer pire que lui et que celui qui a permis à Bouteflika de s’accaparer l’État, à Saâdani de faire main basse sur le FLN et à Gaïd Salah de devenir chef de l’armée, franchement ce n’est vraiment pas la peine. Le jeu n’en vaudrait pas la chandelle et je ne pense pas que beaucoup d’Algériens sensés et de militaires responsables soient prêts à accepter de vivre un chaos et d’aller vers l’aventure pour sauver, en définitive, le système du soldat Toufik. Je ne crois pas dans les « changements » imaginés dans les laboratoires des polices politiques ni dans les changements qui assurent la continuité.

          À bon entendeur !

          M. S.
          كلّ إناءٍ بما فيه يَنضَح

          Commentaire


          • #6
            En résumé, et avec cette réponse de Sifaoui sur l'article de Mesbah, il confirme ce que beaucoup le savent depuis plusieurs mois déjà:

            "l'affaire du 4ème mandat n'est qu'un leurre pour nous détourner du véritable problème de l’Algérie"

            Commentaire


            • #7
              J'avais prédit une autre onction de l'expert en expertologie après la sortie du berrah, un autre berrah qui s'exprime avec un vocabulaire scientiste, à défaut de savoir chanter...
              Othmane BENZAGHOU

              Commentaire


              • #8
                khouk khouk laa ghourek sahbek !!!
                " C’est la rivière qui apporte dans son cours l’espoir aux chercheurs d’or…Elle n’attends jamais de ces derniers qu’ils en remettent dans le sien" (r.b)

                Commentaire


                • #9
                  Mohamed Chafik Mesbah, politologue, auteur de «Problématique Algérie»
                  Christophe Boisbouvier

                  Mohamed Chafik Mesbah, politologue, auteur de «Problématique Algérie»
                  «Jusqu'à preuve du contraire, oui, monsieur Bouteflika se présentera. En plus de sa propre volonté, le cercle qui l'entoure veut imposer ce quatrième mandat pour des raisons liées à des intérêts personnels ».


                  Abdelaziz Bouteflika sera-t-il candidat à un quatrième mandat, le 17 avril 2014 ? Et aura-t-il le soutien du très puissant général Mediène, alias Toufik, le chef des services secrets ? En Algérie, à deux mois de la présidentielle, la parole se libère et la polémique bat son plein. L'officier supérieur algérien Mohamed Chafik Mesbah a travaillé avec le général Mediène. Aujourd'hui, il est à la retraite et se consacre aux sciences politiques. En ligne d'Alger, il répond aux questions de Christophe Boisbouvier.

                  ***En 2009, Mohamed Chafik Mesbah a publié Problématique Algérie, aux éditions le soir d'Algérie.

                  RFI : Pensez-vous comme le secrétaire général du FLN, Amar Saïdani, que le général Mohamed Mediène, dit le général Toufik, s’oppose à un quatrième mandat du président Bouteflika ?

                  Chafik Mesbah : Non, absolument pas. A propos du secrétaire général du FLN la cause est entendue. Depuis longtemps, il ne cesse de battre campagne pour le quatrième mandat. Je ne crois pas qu’il ait des convictions. Il est instrumentalisé.

                  Par contre dans le cas du général Mediène, j’ai eu à le connaître, c’est un officier général discipliné. Je ne le vois vraiment pas porter la contradiction au chef de l’Etat. Depuis d’ailleurs qu’il exerce [cette fonction], je ne l’ai jamais vu porter la contradiction au chef de l’Etat de l’heure, et à plus forte raison au président Bouteflika. Tout au plus à la suite des enquêtes sur la grande corruption a-t-il pu déterminer qu’il y avait de graves problèmes de dysfonctionnement dans le système et dans la cour qui entoure monsieur Bouteflika. Et je suis persuadé qu’il a dû en informer le président. Malheureusement, le groupe mis en cause a réagi violemment en demandant à Amar Saïdani de monter au créneau.



                  Vous pensez que dans son combat contre la corruption le général Mediène s’est fait beaucoup d’ennemis dans l’entourage du chef de l’Etat ?

                  Absolument ! Parce que, malheureusement, l’entourage est concerné que ce soit sur les enquêtes sur l’autoroute est-ouest, sur la Sonatrach ou sur les concessions agricoles.

                  Sur Sonatrach, la société pétrolière ?

                  Oui, sur Sonatrach, c’est clair, c’est monsieur Chakib Khelil, l’ancien ministre de l’Energie qui est en cause. Sonatrach c’est un peu la vache à traire de l’Algérie et le peuple algérien n’accepte pas qu’on puisse y toucher à des fins inavouables.

                  Vous avez travaillé avec le général Mediène, vous le connaissez très bien. Il est en poste depuis plus de vingt ans. Est-ce que de fait, il n’est pas devenu l’un des hommes les plus puissants du pays et donc un « faiseur de rois » ?

                  Si vous me parlez de société virtuelle, c'est-à-dire de la classe politique qui existe actuellement, des partis, des institutions, je vous dirais : oui, les services de renseignement disposent d’une influence certaine. Si vous me parlez de la société réelle, c’est-à-dire la population dans sa globalité, les laissés-pour-compte, je vous dirais : non. « Faiseur de rois », je crois que c’est un peu exagéré. Parce que jusqu’à présent, le système algérien a fonctionné sur la base du consensus. A partir de l’interruption du processus électoral en 1992, il y avait un conclave en bonne et due forme de la hiérarchie militaire qui décidait de la conduite à tenir. Il y avait l’état-major, les régions militaires, les grandes unités de feu, et de l’autre côté les services de renseignement qui jouaient le rôle d’interface avec l’entité politique. Mais les décisions se prenaient dans le cadre du consensus.

                  Dans la lutte contre le terrorisme, le général Mediène travaille beaucoup avec les services occidentaux. Jusqu’où accepte-t-il de collaborer avec les Français et les Américains ?

                  A ma connaissance, la préoccupation du général Mediène Mohamed a toujours consisté à ne pas laisser la coopération technique déboucher sur une soumission sur le plan stratégique où l’Algérie jouerait un rôle de simple auxiliaire. Alors que, par rapport à la politique sahélienne, il est clair que les Français ont voulu que l’Algérie joue un rôle d’auxiliaire.

                  Est-ce que certains décideurs français ou américains ont essayé de faire du général Mediène leur pion dans l’appareil algérien ?

                  Du côté français, je vais être un peu brutal. Je crois que les Français sont contents de la coopération sécuritaire qui existe avec les services de renseignement algériens. Mais ils considèrent que le général Mediène Mohamed est un peu le dernier rempart. Il représente un peu la ligne nationaliste dure. Et les Français se réfèrent au président Boumediène. Je crois que ça ne leur déplairait pas qu’il y ait un changement à la tête des services de renseignement algériens.



                  C’est-à-dire que pour les Français le général Mediène est un peu le Houari Boumediène d’aujourd’hui ?

                  Je crois, oui. C’est ma conviction. Ils aimeraient bien qu’il y ait en face quelqu’un qui ne soit pas tributaire du dogme nationaliste.

                  A l’heure qu’il est on ne sait toujours pas si Abdelaziz Bouteflika sera candidat à la présidentielle du 17 avril pour un quatrième mandat. A votre avis, il va y aller ou pas ?

                  Jusqu’à preuve du contraire, oui. Monsieur Bouteflika se présentera parce qu’en plus de sa propre volonté, le cercle qui l’entoure veut imposer ce quatrième mandat pour des raisons liées à des intérêts personnels.

                  Et qui sont les hommes-clés dans ce clan présidentiel ?

                  Je me demande jusqu’à présent quelle est la part de monsieur Abdelaziz Bouteflika et de son frère monsieur Saïd Bouteflika, sur le processus de décision politique. Ce sont les deux seules personnes qui comptent. Je crois qu’il y a un « go between » entre les deux qui pourrait éventuellement être élargi au général Gaïd Salah, vice-ministre et chef d’état-major.

                  Voulez-vous dire que depuis qu’Abdelaziz Bouteflika est malade, son frère Saïd Bouteflika et le vice-ministre de la Défense, le général Ahmed Gaïd Salah ont pris un véritable ascendant ?

                  Pas sur le président Bouteflika, mais sur le processus de décision, c’est certain. Vous savez, il n’y a pas de vie politique en Algérie, il n’y a pas de vie associative. C’est uniquement des appareils qui dirigent le pays. Je ne crois pas que monsieur Saïd Bouteflika soit porteur de stratégie, mais en tous les cas il est mû par un instinct de conservation du pouvoir.

                  Pour ce 17 avril, on annonce la candidature de plusieurs dizaines de personnes. Quelles figures voyez-vous pour assurer la relève ?

                  A mon avis, la seule personne qui actuellement pourrait recueillir l’adhésion populaire de manière massive, c’est le président Liamine Zéroual.



                  L’ancien président Liamine Zéroual ?

                  Liamine Zéroual qui jouit d’une image positive dans l’opinion publique, en raison de son intégrité, de son patriotisme. Actuellement, il faut absolument que le candidat du consensus puisse imposer son autorité à l’armée et aux services de renseignement. En toute honnêteté, je ne vois pas d’autre personnalité capable d’avoir cette capacité à l’heure actuelle.

                  Et l’ancien Premier ministre, Ali Benflis ?

                  Ce que je sais c’est que l’entourage de monsieur Bouteflika mettra l’Algérie – je m’excuse du terme, même s’il est un peu excessif – à feu et à sang pour empêcher son élection.

                  rfi

                  http://www.rfi.fr/emission/20140221-...tique-algerie/
                  Dernière modification par nacer-eddine06, 21 février 2014, 14h36.
                  The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

                  Commentaire


                  • #10
                    L'expert en expertologie fait la promotion du nouveau slogan à la mode, après la sortie de Benyounes à la suite du feu d'artifice médiatique assourdissant, Benyounes nous expliquait que rab Edzair avait un dieu plus puissant que lui, qu'il était finalement qu'un des anges du tout nouveau médiatisé RAB EDZAIR et des doms toms, l'excellentissime, l'unique, le briant, le plus beau, le plus sage, notre président bien aimé et respecte de tous, Monsieur Bouteflika...

                    Une semaine après, c'est l'expert en expertologie qui nous l'explique...

                    Quelle bande de farceurs gorges profondes...
                    Othmane BENZAGHOU

                    Commentaire


                    • #11
                      Dans la lutte contre le terrorisme, le général Mediène travaille beaucoup avec les services occidentaux. Jusqu’où accepte-t-il de collaborer avec les Français et les Américains ?

                      A ma connaissance, la préoccupation du général Mediène Mohamed a toujours consisté à ne pas laisser la coopération technique déboucher sur une soumission sur le plan stratégique où l’Algérie jouerait un rôle de simple auxiliaire. Alors que, par rapport à la politique sahélienne, il est clair que les Français ont voulu que l’Algérie joue un rôle d’auxiliaire.

                      Est-ce que certains décideurs français ou américains ont essayé de faire du général Mediène leur pion dans l’appareil algérien ?

                      Du côté français, je vais être un peu brutal. Je crois que les Français sont contents de la coopération sécuritaire qui existe avec les services de renseignement algériens. Mais ils considèrent que le général Mediène Mohamed est un peu le dernier rempart. Il représente un peu la ligne nationaliste dure. Et les Français se réfèrent au président Boumediène. Je crois que ça ne leur déplairait pas qu’il y ait un changement à la tête des services de renseignement algériens.



                      C’est-à-dire que pour les Français le général Mediène est un peu le Houari Boumediène d’aujourd’hui ?

                      Je crois, oui. C’est ma conviction. Ils aimeraient bien qu’il y ait en face quelqu’un qui ne soit pas tributaire du dogme nationaliste.
                      C'est la où il faut chercher, le reste c'est pour amuser la galerie.....

                      Si vous voulez faire des commentaires, c'est là qu'il faut se poser les bonnes questions !

                      Pourquoi Mesbah (et le journaliste de connivence) répond à des questions bien préparées.

                      la lutte anti terroriste et les relations avec la france ne sont pas, en principe, au coeur du conflit actuel !

                      On dirait que le journaliste qui pose les questions c'est Chafik Mesbah lui même .

                      >>>Et qui sont les hommes-clés dans ce clan présidentiel ?

                      Je me demande jusqu’à présent quelle est la part de monsieur Abdelaziz Bouteflika et de son frère monsieur Saïd Bouteflika, sur le processus de décision politique. Ce sont les deux seules personnes qui comptent. Je crois qu’il y a un « go between » entre les deux qui pourrait éventuellement être élargi au général Gaïd Salah, vice-ministre et chef d’état-major.

                      La c'est Goulamallah qui a posé la question !

                      C'est çà le DRS, le fameux rempart, on est bien protégé en algérie.

                      Commentaire


                      • #12
                        La vérité est connu, ce président est dangereux, il s'est assit sur la constitution, quand à son entourage no comment, alors soit bye bye soit on se prépare à une décennie des plus noires ou tous les vautours seront invités au festin

                        Commentaire

                        Chargement...
                        X