A moins d'un miracle venant de la rue et dont l'amplitude serait suffisamment grande pour les en dissuader, l'on ne voit pas comment sera endiguée la spirale du chaos. Le paraphe tremblotant d'un Président fourbu, presque impotent, n'a-t-il pas été, également, le sceau au bas d'un scénario-catastrophe ? A moins de ne pas faire cas des conséquences futures de la déraisonnable réélection d'un grand malade, l'on peut effectivement imaginer que prochainement la République sera tout à fait contrôlée par une camarilla de l'ombre qui agirait par prête-nom interposé. Celui évidemment de Bouteflika.
Depuis bientôt une année, un semblable subterfuge a justement permis de neutraliser toutes les possibilités de débattre, de quelques manières que ce soit, sur la probabilité d'une vacance institutionnelle. Or, cet agrégat d'hommes du palais, dont il était supposé qu'ils n'avaient pour unique souci que de gérer une situation inédite, se révélèrent, au terme d'un intérim qu'ils s'étaient octroyé, comme de véritables putschistes ? Le qualificatif n'est certes pas exact mais sûrement pas suffisant. Car l'opération de validation de la candidature de Bouteflika avec tous les artifices médiatiques qu'elle a pu mobiliser mériterait bien de s'appeler im-pos-tu-re ! Le Saïd de la fratrie ainsi que Sellal sergent-chef des exécutants sans oublier la supposée neutralité trop bienveillante de la haute hiérarchie militaire, sont à l'évidence à l'origine de ce deal. Celui qui consiste à s'entendre contre la probabilité d'un changement, synonyme, selon eux, du germe de l'épuration ou tout au moins de certaines remises en question. Nous sommes donc en face d'un accord contractuel qui échappe à l'esprit des lois du pays et à la lettre de la Constitution. Autrement ceci ne dit rien de moins que de la cuisine quasi-maffieuse où l'intérêt clanique vient de supplanter la glorieuse servitude de l'Etat.
L'acharnement qui a été mis pour convaincre le vieil homme du palais à ne pas abdiquer tant qu'il lui est possible de servir de contre-feux ne peut s'expliquer autrement que par leurs propres turpitudes. Aussi, « ils péfèrent que tout demeure en place et s'ils doivent tomber que la maison entière croule avec eux. L'ampleur de la catastrophe peut alors les protéger…» (1), écrivait en son temps et pour les mêmes raisons un homme politique français. C'est exactement à l'idée de l'effondrement de l'Etat que ces hommes d'influence et de prédation s'accrocheront en cas de ...malheur. Maintenir coûte que coûte un régime chancelant a pourtant un autre coût plus exorbitant celui-là, pour le pays. Et c'est de cela qu'il s'agit lorsque les réseaux actifs de la société civile protestent avec un simple mot d'ordre : «ça suffit». Face aux appétits des fondés de pouvoir d'El-Mouradia qu'aucune éthique d'ailleurs n'est plus en mesure de contenir dans les limites de la respectabilité, il faut d'ores et déjà parier sur le pire d'ici au soir du 17 avril et peut-être même dans les périodes postélectorales.
Que faire en face sinon manifester sur les places publiques et mobiliser à travers les réseaux afin de parvenir à illustrer la dissidence électorale comme acte fondateur de sa chute. Quand bien même le chantage par la répression policière et l'intimidation par la justice sont des facteurs psychologiques bloquants, pour le citoyen lambda il reste tout de même à lui expliquer qu'en réalité la répression et les rafles sont paradoxalement le signe de leur peur - panique. Car contrairement au juridisme tatillon, de ceux qui définissent d'une manière restrictive l'acte civique, l'appel au boycott n'est pas la négation de la liberté des urnes. Il serait même son complément, voire sa réalité en creux. Autrement dit, il est l'arme fatale de la dé-légitimation de tout mandat dont le mode opératoire est faussé au préalable. Bouteflika et la coterie qui l'entoure ne l'ont jamais ignoré et cela depuis la mésaventure de la présidentielle de 1999. Une élection historiquement biaisée par le retrait de l'ensemble des challengers et qui lui a fait obligation de s'inventer un référendum sur la «concorde» pour se remettre en selle. De même que, lors des législatives de 2002 quand il a été question de valider des mandats en Kabylie avec une abstention record frisant les 95%, ne fut-il pas contraint deux ans plus tard d'en reconnaître l'illégalité de ces votes ?
Oui, dira-t-on, l'abstentionnisme est effectivement un parfait indicateur mais puisque la haute administration a le monopole des chiffres et des taux quelle peut être la fiabilité et l'impact d'une mobilisation dans ce sens ? Mais tout simplement dans la déstabilisation psychologique et morale de l'establishment qui l'accompagne. Dans ces moments-là, ce n'est pas la peur qui doit changer de camp, selon la formule consacrée, mais le doute !
La suffisance dont font preuve les caciques de la claque sera alors insuffisante pour pavoiser. A l'image du préposé au perchoir du Sénat qui avait manqué de retenue dans le propos et des pitoyables députés qui s'adonnèrent à la danse du ventre au sein de l'hémicycle, la victoire promise leur apparaîtra alors honteuse. Reste évidemment à évoquer le sort de ceux et celle qui, «malgré tout» (sic), s'apprêtent à aller au-devant de l'illusion électorale. Dans l'ensemble, ce ne sont que des tâcherons de la politique qui gagnent leur vie en y jouant les intermittents du spectacle. Sauf sûrement un seul. Cette respectable personnalité, malmenée en 2004 et qui dix années plus tard risque de s'apercevoir, hélas, qu'elle n'a été qu'un vieux lièvre qui aurait confondu son pelage avec la couleur sombre du système.
Boubakeur Hamidechi
(1) L'interpellation est de Michel Debré, ancien Premier ministre de De Gaulle et auteur du pamphlet intitulé : Ces princes qui nous gouvernent .
Depuis bientôt une année, un semblable subterfuge a justement permis de neutraliser toutes les possibilités de débattre, de quelques manières que ce soit, sur la probabilité d'une vacance institutionnelle. Or, cet agrégat d'hommes du palais, dont il était supposé qu'ils n'avaient pour unique souci que de gérer une situation inédite, se révélèrent, au terme d'un intérim qu'ils s'étaient octroyé, comme de véritables putschistes ? Le qualificatif n'est certes pas exact mais sûrement pas suffisant. Car l'opération de validation de la candidature de Bouteflika avec tous les artifices médiatiques qu'elle a pu mobiliser mériterait bien de s'appeler im-pos-tu-re ! Le Saïd de la fratrie ainsi que Sellal sergent-chef des exécutants sans oublier la supposée neutralité trop bienveillante de la haute hiérarchie militaire, sont à l'évidence à l'origine de ce deal. Celui qui consiste à s'entendre contre la probabilité d'un changement, synonyme, selon eux, du germe de l'épuration ou tout au moins de certaines remises en question. Nous sommes donc en face d'un accord contractuel qui échappe à l'esprit des lois du pays et à la lettre de la Constitution. Autrement ceci ne dit rien de moins que de la cuisine quasi-maffieuse où l'intérêt clanique vient de supplanter la glorieuse servitude de l'Etat.
L'acharnement qui a été mis pour convaincre le vieil homme du palais à ne pas abdiquer tant qu'il lui est possible de servir de contre-feux ne peut s'expliquer autrement que par leurs propres turpitudes. Aussi, « ils péfèrent que tout demeure en place et s'ils doivent tomber que la maison entière croule avec eux. L'ampleur de la catastrophe peut alors les protéger…» (1), écrivait en son temps et pour les mêmes raisons un homme politique français. C'est exactement à l'idée de l'effondrement de l'Etat que ces hommes d'influence et de prédation s'accrocheront en cas de ...malheur. Maintenir coûte que coûte un régime chancelant a pourtant un autre coût plus exorbitant celui-là, pour le pays. Et c'est de cela qu'il s'agit lorsque les réseaux actifs de la société civile protestent avec un simple mot d'ordre : «ça suffit». Face aux appétits des fondés de pouvoir d'El-Mouradia qu'aucune éthique d'ailleurs n'est plus en mesure de contenir dans les limites de la respectabilité, il faut d'ores et déjà parier sur le pire d'ici au soir du 17 avril et peut-être même dans les périodes postélectorales.
Que faire en face sinon manifester sur les places publiques et mobiliser à travers les réseaux afin de parvenir à illustrer la dissidence électorale comme acte fondateur de sa chute. Quand bien même le chantage par la répression policière et l'intimidation par la justice sont des facteurs psychologiques bloquants, pour le citoyen lambda il reste tout de même à lui expliquer qu'en réalité la répression et les rafles sont paradoxalement le signe de leur peur - panique. Car contrairement au juridisme tatillon, de ceux qui définissent d'une manière restrictive l'acte civique, l'appel au boycott n'est pas la négation de la liberté des urnes. Il serait même son complément, voire sa réalité en creux. Autrement dit, il est l'arme fatale de la dé-légitimation de tout mandat dont le mode opératoire est faussé au préalable. Bouteflika et la coterie qui l'entoure ne l'ont jamais ignoré et cela depuis la mésaventure de la présidentielle de 1999. Une élection historiquement biaisée par le retrait de l'ensemble des challengers et qui lui a fait obligation de s'inventer un référendum sur la «concorde» pour se remettre en selle. De même que, lors des législatives de 2002 quand il a été question de valider des mandats en Kabylie avec une abstention record frisant les 95%, ne fut-il pas contraint deux ans plus tard d'en reconnaître l'illégalité de ces votes ?
Oui, dira-t-on, l'abstentionnisme est effectivement un parfait indicateur mais puisque la haute administration a le monopole des chiffres et des taux quelle peut être la fiabilité et l'impact d'une mobilisation dans ce sens ? Mais tout simplement dans la déstabilisation psychologique et morale de l'establishment qui l'accompagne. Dans ces moments-là, ce n'est pas la peur qui doit changer de camp, selon la formule consacrée, mais le doute !
La suffisance dont font preuve les caciques de la claque sera alors insuffisante pour pavoiser. A l'image du préposé au perchoir du Sénat qui avait manqué de retenue dans le propos et des pitoyables députés qui s'adonnèrent à la danse du ventre au sein de l'hémicycle, la victoire promise leur apparaîtra alors honteuse. Reste évidemment à évoquer le sort de ceux et celle qui, «malgré tout» (sic), s'apprêtent à aller au-devant de l'illusion électorale. Dans l'ensemble, ce ne sont que des tâcherons de la politique qui gagnent leur vie en y jouant les intermittents du spectacle. Sauf sûrement un seul. Cette respectable personnalité, malmenée en 2004 et qui dix années plus tard risque de s'apercevoir, hélas, qu'elle n'a été qu'un vieux lièvre qui aurait confondu son pelage avec la couleur sombre du système.
Boubakeur Hamidechi
(1) L'interpellation est de Michel Debré, ancien Premier ministre de De Gaulle et auteur du pamphlet intitulé : Ces princes qui nous gouvernent .