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L'autre tragédie syrienne : un patrimoine en péril

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  • L'autre tragédie syrienne : un patrimoine en péril

    Des hommes enturbannés, kalachnikov en main, hurlent «Allah Akbar», Dieu est grand. Ils sont postés à différents emplacements du palais de justice d'Alep (Nord-Ouest). Ces combattants entament un furieux face à face avec d'autres snipers, les rafales résonnent entre les murs de pierre de l'ancien édifice. Une violente explosion achève enfin de détruire la tour du bâtiment qui s'écroule sous une épaisse fumée noire.


    Le palais de justice d'Alep, comme de nombreux bâtiments syriens, est le théâtre de la guerre civile, qui entrera ce dimanche dans sa quatrième année. Loin d'être comparable au terrifiant bilan humain, qui fait état aujourd'hui de plus 140 000 morts, et aux innombrables tortures, viols, disparitions ... La destruction du patrimoine syrien est un autre aspect de cette crise sanglante.

    Les minarets et forteresses, places «stratégiques» des snipers

    Explosions d'anciennes cités, forteresses éventrées, bataille de snipers dans les décombres... Les vidéos et images en provenance de Syrie ne manquent pas pour illustrer l'effondrement du patrimoine et des antiques merveilles de Syrie. Le pays du Proche-orient compte quelque 34 musées et 10 000 sites archéologiques. L'ancienne ville de Damas, Alep ou de Bosra (Homs), le krak des chevaliers (Homs), le site de Palmyre (Homs), le château Qal`at Salah El-Din et les villages antiques du nord de la Syrie : tous sont des sites riches, classés au patrimoine mondial. Tous ont été touchés par les pillages, les bombes ou les batailles.



    Les armées de soldats, rebelles ou loyalistes, prennent en effet fréquemment leurs quartiers dans ces sites historiques. «Les forteresses, vieilles villes, minarets...sont des endroits très stratégiques car ce sont des emplacements idéaux pour les snipers qui y ont une bonne visibilité», explique Nada Al Hassan, responsable du patrimoine culturel arabe à l'Unesco.

    Pour la salariée de l'Organisation des Nations unies «le pire est à venir, les négociations internationales continuent sans que les combats ne cessent». Et de comparer : «Les villes de Hama et Homs (à l'est) -ravagées par les bombardements- sont aujourd'hui aussi détruites que Berlin l'était pendant la seconde guerre mondiale».

    «La guerre c'est du business et l'art devient un business»

    Cibles des pillages, les musées et fouilles archéologiques ont largement été dépouillés ces trois dernières années. Des mafias spécialisées, composées de centaines d'hommes, profitent de la fragilité du pays pour tenter de revendre de précieux biens syriens. Commerce lucratif puisque les oeuvres se retrouvent sur les marchés d'art libanais, jordaniens, turcs...lorsqu'elles arrivent à passer les frontières.

    Un conflit à huis clos est aussi l'occasion pour les mafieux de fabriquer des «faux» objets d'arts pour les écouler. «La guerre c'est du business et l'art devient un business», résume tristement Nada Al Hassan.

    Pour les autorités d'un pays, ces destructions sont généralement une grande perte, comme le résume Edouard Planche, également spécialiste de la protection du patrimoine culturel à l'Unesco. «Les objets participent à la reconnaissance d'un Etat, détaille-t-il, avec l'explosion du tourisme ces dernières années, c'est une perte». Pour ce dernier, «cela explique la prise de conscience récente des Etats».




    «Nous perdons une partie de notre mémoire»

    Sur place, certains s'activent pour la protection des sites. C'est le cas de la DGAM, la Direction générale des antiquités et des musées, organisme toutefois lié au régime de Bachar Al Assad, jugé «responsable» de crimes de guerre et crimes contre l'humanité, selon l'ONU. Joint par téléphone à Damas, le directeur de la DGAM Maamoun Abdulkarim, tente, tant bien que mal, de rester hors des débats politiques pour défendre l'Histoire syrienne. «Ce que vit la Syrie est tragique, nous perdons une partie de notre mémoire».

    Quelque 2500 fonctionnaires syriens ont été dépêchés pour veiller sur les lieux précieux. «Une grande partie des musées ont été vidés et les oeuvres ont été placées en lieu sûr, qui restent secrets pour des raisons de sécurité», explique Maamoun Abdulkarim. Outre frontières, des sites internet tentent d'alerter sur la catastrophe, à l'image de l'Apsa, l'association pour la protection de l’archéologie syrienne. L'Unesco est en train de créer un «observatoire du patrimoine syrien, qui sera probablement basé au Liban dans un premier temps.

    «Nous ne voulons pas reproduire le même schéma que l'Irak», explique Maamoun Abdulkarim . Dans le pays voisin, des milliers d'objets avaient été dérobés après l'intervention américaine en 2003

    le parisien
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