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Rahabi: "la désignation d'Ouyahia et Belkhadem veut faire croire que l'Etat est derrière le président"

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  • Rahabi: "la désignation d'Ouyahia et Belkhadem veut faire croire que l'Etat est derrière le président"

    - Six candidatures à la présidentielle du 17 avril ont été validées, ce jeudi 13 mars, par le Conseil constitutionnel, dont celle de Bouteflika, malgré son état de santé…

    Cela pose un triple problème, celui du président sortant lui-même qui n’a pas fait son examen de conscience sur sa capacité physique et mentale à poursuivre d’aussi lourdes charges à la tête de l’Etat. Le second est celui de la crédibilité du Conseil constitutionnel qui, sur cette question, a été instrumentalisé dans une mise en scène indigne d’une institution gardienne du respect de la Constitution. Enfin, le troisième problème est celui de la société civile qui n’arrive pas encore à s’organiser, à faire front contre la présidence à vie et sur les menaces que font peser sur l’Algérie les tenants de ce coup de force.

    - Quelle lecture faites-vous sur les deux nouvelles nominations d’Ouyahia et Belkhadem ?

    Elles sont dans l’ordre naturel des choses et la parfaite illustration de la confusion Etat-parti qui a dirigé l’Algérie avant l’avènement du pluralisme politique introduit par la Constitution de Chadli de 1989. Elles sont également destinées à faire accroire aux Algériens que l’Etat est avec le président sortant qui ne cache pas d’ailleurs qu’il ne croit pas au pluralisme. Dans cet ordre d’idées, ce qu’il fait est en accord avec ce qu’il pense.

    - Lors de sa sortie un an après, Ouyahia a déclaré que le DRS n’est pas contre le 4e mandat et que l’armée n’ajamaisfabriqué de présidents. Que pensez-vous?

    Je ne connais pas la position de l’armée sur le 4e mandat, je sais simplement qu’elle n’a pas dissuadé Bouteflika à violer la première Constitution dans le monde arabe qui limitait les mandats présidentiels, celle de Zeroual de 1996 et qui a été adoptée par référendum populaire après une large consultation politique et sociale. C’est l’introduction de la présidence à vie en 2008 qui est à l’origine de la crise politique que nous vivons aujourd’hui et tous ceux qui y ont contribué sont collectivement responsables.

    - A chaque fois on évoque la stabilité du pays comme argument pour voter Bouteflika. L’Algérie est-elle menacée par une instabilité si on ne vote pas pour le candidat du système ?

    C’est le message que fait transmettre le pouvoir ces six derniers mois à travers notamment les audiences accordées aux chefs d’état-major et les discours alarmistes de ses partisans de la présidence à vie. Il joue également sur le fait que le peuple est légitimement inhibé par les années de crise politique et sécuritaire et veut faire créditer l’idée que le changement produit l’instabilité. Il est exactement dans le même état d’esprit que les dirigeants des pays de l’Est quelques mois avant la chute du mur, tout comme il est en phase avec les derniers discours de Ben Ali et Moubarak.

    - Quel rôle joueront les forces occidentales pour la candidature de Bouteflika ?

    Bouteflika a toujours joué la carte occidentale parce qu’il mesure l’influence de l’Occident sur les faiseurs de décisions en Algérie, mais surtout parce qu’il est conscient qu’il ne dispose pas d’une force politique structurée et effective ou d’une opinion publique favorable en mesure de peser dans ses rapports de force avec l’armée. Il lui reste alors à faire des concessions en matière de coopération dans la lutte contre le terrorisme international, à ouvrir le marché algérien en faisant sauter les barrières tarifaires pour les produits européens, à faire jouer le gré à gré dissimulé sous la forme de contrats avec des entreprises algériennes qui, elles-mêmes, les mettent en sous-traitance, et même à organiser des concessions de domaines de chasse pour les dirigeants de pays du Golfe pour acheter la complaisance de leurs médias qui ont plus d’influence en Algérie que les médias occidentaux.

    - Benflis a déclaré qu’il fait confiance à Gaïd Salah. Cela signifie-t-il que l’armée va adopter la neutralité lors des élections du 17 avril ?

    Je pense qu’il faisait allusion à la dernière déclaration du vice-ministre de la Défense sur les missions constitutionnelles de l’armée. Il reste que l’armée devrait, à mon sens, ne pas donner le sentiment d’une implication excessive dans le débat actuel, elle y perdrait beaucoup en termes de lien armée-nation et risque d’altérer l’indispensable consensus national autour des missions de l’ANP.
    Le FCE n’arrive pas à faire l’unanimité pour soutenir un 4e mandat.

    - Pourquoi à votre avis ? Est-ce que l’organisation patronale du FCE est obligée de soutenir Bouteflika et pas Benflis ?

    Le FCE n’est pas représentatif du patronat algérien, car en marquant sa proximité avec le pouvoir, il a pris le risque de perdre son homogénéité. Il compte en sens sein de véritables capitaines de l’industrie, pourvoyeurs de richesses et d’emplois. Malheureusement, ils ne sont pas nombreux aux côtés des importateurs de biens pour la revente en l’état et qui sont d’une faible utilité économie parce qu’ils n’ont pas réinvesti dans la production, les gains considérables engrangés ces dix dernières années.
    Il compte enfin un noyau dur complètement inféodé au système Bouteflika parce qu’il a bénéficié de gros marchés de gré à gré qu’il a souvent sous-traités avec des compagnies occidentales faute d’engineering et de capacités propres de réalisation. Il s’agit de partons qui étaient à la tête d’entreprises familiales de taille petite ou moyenne et qui 10 ans après sont capitalisées à plusieurs milliards de dollars. C’est cette dernière catégorie qui a infléchi les positions du FCE, a politisé les débats et finance à coups de plusieurs centaines de milliards la campagne de Bouteflika avec l’ambition déclarée d’avoir son propre candidat en 2019.

    - Que pensez-vous du mouvement Barakat qui a pris une dimension inattendue de protestation et ne cesse de grossir ses rangs et déranger le pouvoir ?

    Je pense que c’est un mouvement citoyen, un pur produit des circonstances que nous traversons, il est appelé à croître et il fera dans la même proportion de radicalisation du pouvoir. Il est prouvé historiquement que ces mouvements se nourrissent non seulement de la justesse des causes qu’ils défendent, mais surtout des excès du pouvoir qui dénie le droit à la libre manifestation de l’expression sociale.
    En affichant une telle arrogance, les pouvoirs publics ont porté la contestation dans la rue et devraient assumer les conséquences de toutes les formes de dérapage.

    Mohamed Fawzi Gaïdi

    EL WATAN
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