Cette année, l’Algérie commémore le 52e anniversaire de la journée du 19 mars 1962 dans un contexte très particulier, marqué par la conjoncture électorale, bien sûr, où les questions d’Histoire et de mémoire, sauf erreur, devront être abondamment convoquées et sollicitées.
L’élection présidentielle, en effet, a toujours été une période propice pour les candidats de faire des retours sur le mouvement national et la guerre de libération. Le rituel consiste à solliciter les grands mythes fondateurs de la Nation. Mais pas seulement. Il consiste aussi, pour les personnalités politiques en course pour la magistrature suprême, à chasser, électoralement parlant, dans le terrain des associations et groupes politiques et associatifs dépositaires ou présumés de l’héritage nationaliste de l’Algérie. Cette fois, encore, et même si cela se passe dans le climat qu’on connait, des associations comme l’Organisation des anciens moudjahidine (ONM), l’Organisation des enfants de chouhada (ONEC), ainsi que d’autres opérant à leurs périphéries sont ainsi courtisées. Pour leur poids électoral supposé et surtout pour le gage de crédibilité qu’elles continuent d’apporter malgré tout au candidat qui fait appel à elles dans un champ politique où les anciens résistants – cela se passe ainsi dans tous les pays du monde – ont toujours leur mot à dire en période de grand enjeu politico-électoral. Cela se traduit alors par la réapparition, voire la saturation du discours électoral et de l’espace public à l’intérieur de thèmes et motifs « héroïsants » en relation avec la lutte contre le colonialisme français et la séquence capitale de 1954-1962. Cela se traduit aussi par une prise en charge – peu importe le sens qu’on pourrait donner à cette expression – par les candidats et leurs QG électoraux des pratiques et valeurs militantes incarnées ou véhiculées par la révolution… L’autre particularité, nouvelle, même si son apparition date déjà de plusieurs années, réside de manière symptomatique et fort intéressante – pour celui qui étudie les évolutions du discours historique et mémoriel dans notre pays – dans la prolifération d’écrits autobiographiques signés par des acteurs ayant connu la guerre de libération et joué un rôle durant son déroulement. Ce phénomène associant la mémoire à l’édition, ainsi qu’au discours politique s’accompagne de polémiques sur « qui dit la vérité et qui ne la dit pas » parmi ceux qui écrivent leurs mémoires ou deviennent témoins publics des situations historiques qu’ils ont vécues. La plus récente, il y a quelques semaines, a été celle déclenchée par les médias sur la base de propos attribués à Yacef Saadi sur Zohra Drif et les interprétations qu’elles ont suscitées auprès de ces mêmes médias. Elle augure ou confirme plutôt ce que le sociologue et chercheur en histoire appellerait une « privatisation de la mémoire historique ».
reporters.dz
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