Liamine Zeroual s'oppose au 4e mandat, en appelle au combat des Algériens pour un Etat de droit, exhorte à la cohésion de l'armée et préconise une transition consensuelle. Décryptage.
L'homme voulait garder le silence. Les délégations qui venaient le solliciter, comme figure symbolique de l'armée et d'une certaine idée de l'Etat, n'avaient jusque là, pas pu le décider. L'ancien Président, démissionnaire en 1998, déclarait à ses invités qu'il avait fait son temps. Qu'il fallait passer le relais aux jeunes, à la génération des enfants de chouhada. Mais aujourd'hui, il sort de son silence en choisissant une date symbolique, la fête de la Victoire, et la proximité du lancement d'une campagne électorale qui n'en est pas une, puisque la présidentielle n'est plus une élection, mais une procédure réglementaire, comme la légalisation de copie de document ou le renouvellement notarié d'un bail de location. Liamine Zeroual parle aujourd'hui et dit pourquoi il sort de sa réserve d'ancien chef d'Etat.
S'il s'était imposé le silence, ses absences systématiques depuis 1999 aux différentes cérémonies présidentielles étaient déjà un message clair au nouveau locataire d'El Mouradia qui l'aurait traité de « Président stagiaire ». Celui qui prit ses responsabilité en 1994 quand Bouteflika a refusé le poste de Président, dans sa lettre, le rappelle opportunément au Président actuel en invoquant le « devoir de mémoire ».
Le message est clair : le mythe d'Abdelaziz Bouteflika ayant pacifié le pays est un leurre : le terrorisme a été en partie vaincu grâce à la résistance de toute une société, et non pas par l'intervention providentielle d'un seul homme qui déserta le terrain quand le pays était à feu et à sang. Ce même homme est responsable, selon l'ancien Président qui instaura les deux mandats non renouvelables, d'une grave forfaiture en 2008.
Cette cassure empêche le pays d'évoluer en Etat moderne, souligne Zeroual dans sa lettre, et brise la transmission générationnelle, maintenant le monopole d'une caste d'âge et de sa clientèle obéissante, dans une logique de survie menaçant la « cohésion ». Un terme cher à Zeroual - il le répète plusieurs fois en parlant de l'armée - comme à un autre intervenant, Mouloud Hamrouche. D'ailleurs, certains ne manqueront pas de faire le rapprochement entre les deux messages : celui de l'ex-Président, figure morale pour la troupe et la société, et celui de l'ex-chef de gouvernement, qui n'a dilapidé son capital de respect, ni à l'intérieur des casernes, ni auprès de l'intelligentsia.
Zeroual parle d'un candidat de la transition (Hamrouche, lui, parle d'une transition non encore définie), qui ne sera pas Abdelaziz Bouteflika, avec une construction de consensus national et évoque aussi, comme Hamrouche, la nécessité de l'existence des contre-pouvoirs que l'actuel Président a atomisés. Et comme Hamrouche, il insiste sur la sacro-sainte unité de l'armée (perturbée par les diatribes et les manœuvres du clan présidentiel contre le DRS et l'effort anti-terroriste des années 1990, même si Zeroual ne porte pas dans son cœur le patron du DRS, Mohamed Mediène), la cohésion nationale (mise à mal par la tribalisation des institutions qui se projette en retour des atavismes régionaux) et la Constitution (bafouée durant le règne du président Bouteflika).
Les lois, l'unité du pays et la cohésion de l'armée : trois constantes rappelées également par Hamrouche dans sa déclaration et dans sa conférence de presse et malmenées par le clan présidentiel. « Le Pouvoir a l'habitude des sales coups, mais l'essentiel était de tout temps maintenu, explique un ancien ministre de Zeroual. Préserver la cohésion de l'armée et la cohésion sociale, même à minima, même formellement. Or maintenant, des militaires, à la retraites ou en fonction, expriment clairement des attitudes de mutinerie inédites contre le 4e mandat. C'est fatal pour le pays. Et pour un ancien commandant des forces terrestres, ex-général et homme de troupe comme Zeroual, c'est un cauchemar ! ».
L'homme voulait garder le silence. Les délégations qui venaient le solliciter, comme figure symbolique de l'armée et d'une certaine idée de l'Etat, n'avaient jusque là, pas pu le décider. L'ancien Président, démissionnaire en 1998, déclarait à ses invités qu'il avait fait son temps. Qu'il fallait passer le relais aux jeunes, à la génération des enfants de chouhada. Mais aujourd'hui, il sort de son silence en choisissant une date symbolique, la fête de la Victoire, et la proximité du lancement d'une campagne électorale qui n'en est pas une, puisque la présidentielle n'est plus une élection, mais une procédure réglementaire, comme la légalisation de copie de document ou le renouvellement notarié d'un bail de location. Liamine Zeroual parle aujourd'hui et dit pourquoi il sort de sa réserve d'ancien chef d'Etat.
La survenance d'une série d'évènements et de déclarations, autant multiples qu'inhabituels, notamment à la veille d'une importante échéance électorale, m'a mis dans l'obligation morale de m'exprimer et de partager mes sentiments et mes craintes avec mes concitoyens algériens.
S'il s'était imposé le silence, ses absences systématiques depuis 1999 aux différentes cérémonies présidentielles étaient déjà un message clair au nouveau locataire d'El Mouradia qui l'aurait traité de « Président stagiaire ». Celui qui prit ses responsabilité en 1994 quand Bouteflika a refusé le poste de Président, dans sa lettre, le rappelle opportunément au Président actuel en invoquant le « devoir de mémoire ».
Au titre de ce devoir de mémoire, je voudrai, ici et de nouveau, rendre hommage à toutes ces forces vives de la nation et saluer le rôle éminemment salutaire qu'elles ont joué, notamment celui assumé par l'Armée Nationale Populaire et les Forces de Sécurité dans le dénouement de la grave tragédie nationale qu'a vécu l'Algérie.
Le message est clair : le mythe d'Abdelaziz Bouteflika ayant pacifié le pays est un leurre : le terrorisme a été en partie vaincu grâce à la résistance de toute une société, et non pas par l'intervention providentielle d'un seul homme qui déserta le terrain quand le pays était à feu et à sang. Ce même homme est responsable, selon l'ancien Président qui instaura les deux mandats non renouvelables, d'une grave forfaiture en 2008.
La révision de la Constitution algérienne en 2008, notamment l'amendement de son article 74, relatif à la limitation des mandats présidentiels à deux, a profondément altéré le saut qualitatif qu'exigeait l'alternance au pouvoir et a privé le processus de redressement national de conquérir de nouveaux acquis sur le chemin de la démocratie. Il est éminemment important de rappeler que l'alternance au pouvoir a pour vocation de consolider la solidarité intergénérationnelle, de conforter la cohésion nationale et d'instituer les bases structurantes d'une stabilité durable.
Cette cassure empêche le pays d'évoluer en Etat moderne, souligne Zeroual dans sa lettre, et brise la transmission générationnelle, maintenant le monopole d'une caste d'âge et de sa clientèle obéissante, dans une logique de survie menaçant la « cohésion ». Un terme cher à Zeroual - il le répète plusieurs fois en parlant de l'armée - comme à un autre intervenant, Mouloud Hamrouche. D'ailleurs, certains ne manqueront pas de faire le rapprochement entre les deux messages : celui de l'ex-Président, figure morale pour la troupe et la société, et celui de l'ex-chef de gouvernement, qui n'a dilapidé son capital de respect, ni à l'intérieur des casernes, ni auprès de l'intelligentsia.
Zeroual parle d'un candidat de la transition (Hamrouche, lui, parle d'une transition non encore définie), qui ne sera pas Abdelaziz Bouteflika, avec une construction de consensus national et évoque aussi, comme Hamrouche, la nécessité de l'existence des contre-pouvoirs que l'actuel Président a atomisés. Et comme Hamrouche, il insiste sur la sacro-sainte unité de l'armée (perturbée par les diatribes et les manœuvres du clan présidentiel contre le DRS et l'effort anti-terroriste des années 1990, même si Zeroual ne porte pas dans son cœur le patron du DRS, Mohamed Mediène), la cohésion nationale (mise à mal par la tribalisation des institutions qui se projette en retour des atavismes régionaux) et la Constitution (bafouée durant le règne du président Bouteflika).
Les lois, l'unité du pays et la cohésion de l'armée : trois constantes rappelées également par Hamrouche dans sa déclaration et dans sa conférence de presse et malmenées par le clan présidentiel. « Le Pouvoir a l'habitude des sales coups, mais l'essentiel était de tout temps maintenu, explique un ancien ministre de Zeroual. Préserver la cohésion de l'armée et la cohésion sociale, même à minima, même formellement. Or maintenant, des militaires, à la retraites ou en fonction, expriment clairement des attitudes de mutinerie inédites contre le 4e mandat. C'est fatal pour le pays. Et pour un ancien commandant des forces terrestres, ex-général et homme de troupe comme Zeroual, c'est un cauchemar ! ».
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