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La Méditerranée est une mosaïque de toutes les couleurs

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  • La Méditerranée est une mosaïque de toutes les couleurs

    LA MEDITERRANEE, ENTRE LE MYTHE ET LA REALITE, LIEU DE VIE
    Depuis longtemps, par le mot « Méditerranée », tous désignent aussi bien la mer qui en porte le nom que l’espace que cette mer constitue et les territoires qu’elle baigne.
    Ces dernières décennies, l’intérêt et la passion qu’éveille cette région ont porté son nom au rangd’idée, de concept. En effet, quand on parle de Méditerranée, à moins que l’on ne se réfère à un aspect très précis, il n’est plus automatique de penser seulement à la mer, ou encore à son territoire de façon isolée, mais c’est devenu un réflexe de convoquer – et par ce seul mot clé – l’ensemble des qualités d’un espace et non plus l’espace lui-même. Qualités qui définissent une idée, un style, un univers. Idée facile à courtiser mais pas toujours facile à définir : vaste ensemble, nourri et véhiculé par la société,alimenté par nos propres perceptions de ce Bassin méditerranéen.
    La Méditerranée, univers de sens et de sensations,siège définitivement dans l’imaginaire social
    Dès maintenant, deux remarques : la Méditerranée est un espace (1) complexe, insaisissable si on le dissocie, et c’est une réalité – constituée de matérialité mais aussi d’une immatérialité porteuse de sens– qui siège définitivement dans l’imaginaire social.
    Rentrons donc, à l’échelle où nous le permet, dans ce monde captivant et riche de toutes sortes de qualités et d’événements.
    Le paysage
    La mer Méditerranée (2) est presque une mer intérieure (3) ouverte au grand large seulement par les 15 km du détroit de Gibraltar. Au nord-est elle touche la mer Noire et au sud-est, depuis 1869, la mer Rouge par le canal de Suez. Avec une surface de 2,9 millions de km2 elle représente seulement 0,7 % de toutes les mers et tous les océans de la Terre ; elle s’étend entre les 30e et 40e parallèles nord sur une longueur de presque 4 000 km et une largeur maximale nord-sud de 850 km, avec une profondeur moyenne de 1 430 m (4).
    Elle revendique tout autant la reconnaissance de sa forte personnalité à partir de ses nombreuses particularités : mers d’Alboran, Ligure, Adriatique, Egée, de Crète... qui, bien audelà d’une dénomination géographique, représentent un bagage historique immense et un indicateur de sa diversité. Braudel dit en effet : « La Méditerranée c’est mille choses à la fois. » Mer dont les eaux bleu azur et cristallines d’une grande beauté révèlent une modeste productivité
    piscicole. La pêche n’a jamais été d’ailleurs une activité fondamentale, ni au niveau des prises ni au n niveau de la population concernée. Les lignes du 15e méridien est et du 38e parallèle nord se croisent approximativement en son centre, sur l’île stratégique de la Sicile, tels deux gigantesques cardo et décumanus, définissant respectivement des moitiés et des quartiers, non dépourvus d’une réalité dans l’histoire, et sur lesquels il nous faudra revenir.
    Ses 46 000 km de côte sont souvent rocailleux, abrupts, découpés, pas toujours faciles à pénétrer, bien que les littoraux plats et larges ne soient pas rares dans les débouchés des plaines fluviales, quelques
    Dernière modification par katiaret, 22 mars 2014, 12h50.
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    unes formant des deltas importants (Nil, Ebre, Pô, Rhône...) ou aux abords du désert (Libye, Israël...) où mer et sable se confondent sur un même plan et se perdent dans des horizons opposés. Cette chaîne montagneuse imbriquée, aux vallées dans toutes les directions, qui ceinture une bonne partie de la côte, définit un paysage particulier avec un littoral très étroit et une mer qui disparaît rapidement lorsque l’on pénètre l’arrièrepays qui, très vite aussi, atteint et dépasse les 500 m d’altitude. Il n’est pas
    exceptionnel de s’élever à plus de 1 000/1 500 m seulement à quelques dizaines de kilomètres de la côte (Corse, Monte Cinto, 2 710 m) ou même de dépasser les 3 000 m (Alpes-Maritimes francoitaliennes) ou d’atteindre les 4 138 m dans le cas du Toubkal au Maroc.
    L’insularité est un autre élément caractéristique et important de cette mer. Outre les grandes îles telles
    Chypre, la Crète, la Sicile, la Corse, la Sardaigne ou Majorque, la Grèce à elle seule compte plus de 2000 îles, dont une centaine seulement sont habitées.
    Sans doute, le climat (5) et l’orographie imposent les conditions les plus sévères au paysage méditerranéen. Là encore, plusieurs variantes bioclimatiques nuancent de façon significative le climat
    d’un Bassin aux différences très marquées sur ses périphéries géographiques: au nord la masse forestière et les grands cours d’eau continentaux – dont quelques uns contribuent fortement à lui
    assurer sa survie – et au sud la ceinture saharienne. L’est et l’ouest déclinant facilement vers le sud en dessous du 37e parallèle nord. Aux étés chauds et secs, inondés de soleil et de lumière éclatants, et aux
    hivers doux et humides, le climat méditerranéen concentre les pluies, en général discrètes, au printemps et surtout en automne. Bien que, là encore, les extrêmes ne soient pas une exception mais une composante importante de ce climat.
    Sur les sols du Bassin, aux deux tiers calcaires – trop souvent blessés par de graves secousses sismiques et volcaniques (6) –, une couverture végétale, adaptée minutieusement aux diverses
    situations climatiques et orographiques évoquées auparavant, génère par conséquent des variantes prononcées, aussi bien au niveau des espèces végétales (7) que de la densité de son recouvrement, ce
    qui définit des unités de paysage différentes. Les sols souvent rocailleux, avec leurs affleurements rocheux habituels, vont fournir le matériau de construction le plus répandu et utilisé : la pierre.
    Mais sous ce climat exigeant et sur ces sols fragiles, des espèces bien adaptées à la discrétion des pluies ou d’autres bénéficiant d’une irrigation ingénieuse auréolent d’un parfum (8) intense cet espace : thym, romarin, lavande, basilic, cumin, fenouil, menthe, jasmin, rosier, figuier, oranger, abricotier, oliviers en fleur, ou l’arôme pénétrant des olives au pressoir... fabriquent une dimension particulière et réelle, bien que immatérielle, dans l’espace méditerranéen et y renforcent certainement le plaisir de
    vivre.
    Climat contraignant, paysage fragile, mais exubérance vitale. La Méditerranée est marquée par ce dualisme (9) omniprésent qui balance parfois entre mythe et réalité. Telle l’olive, amère comme le fiel, douce comme le miel.
    Le Bassin méditerranéen est habité de nos jours par environ 400 millions de personnes. Ce sont ces
    habitants d’aujourd’hui, ceux qui les ont précédés depuis quelques millénaires et ceux, nombreux et plus ou moins agités, voisins ou venant de loin, qui ont traversé et parcouru, de plein gré ou de force, ce Bassin dans tous les sens qui constituent les protagonistes majeurs de la production de l’espace méditerranéen.Espace capillaire s’il en est, il est un exemple d’intégration, d’adaptation, de métissage (10).
    Les hommes et les femmes
    Espace souvent raconté en écho aux faits d’empereurs, de sultans, de héros, de masculinité, ne dévoilant pas toujours l’importance des femmes et de la féminité méditerranéennes. Espace attirant, à la fois puissant et délicat, toujours sensuel. Les paysages, qu’elles ont tant contribué à modeler et à
    entretenir par leurs efforts, les murs ou les terrasses, les revêtements ou les décors des abris et des maisons gardent toujours trace et témoignent des contributions de la fille, de l’épouse, de la mère à la production de cet espace unique.
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    • #3
      Attirant, à la fois puissant et délicat, toujours sensuel,
      l’espace méditerranéen témoigne des contributions de la femme à sa production
      Dans cet espace méditerranéen, sur lui-même, sont gravés tous les gestes et pensées des civilisations et des sociétés qui nous ont précédés ; parce que « l’espace est la résultante et le produit des activités
      sociales (11) ». Couplée avec le paysage – celui ébauché auparavant –, la société devient concrète et, de ce fait, particulière et distincte.
      La population méditerranéenne a été traditionnellement rattachée à la terre (la terra
      patria des anciens), aux activités agroforestières et à l’élevage, surtout de petit bétail. Et cela également pour les populations vivant très près du littoral, ou sur le littoral même. Les pêcheurs étaient une minorité qui combinait toujours son activité avec une petite agriculture domestique sur des parcelles modestes. En revanche dès les premières civilisations, le commerce et la transformation de matières premières ont constitué une activité fébrile des villes du littoral méditerranéen. Si l’important réseau de ces villes a été crucial – depuis l’Antiquité (12) – pour l’essor et le développement du Bassin, l’arrière-pays aussi bien que les plaines littorales agricoles ont été indispensables pour alimenter ce fourmillement. L’eau, la fertilité de terres à moindre peine et bien sûr les croyances religieuses ont été les paramètres de base
      guidant le choix des populations pour s’installer. L’emplacement précis de la maison ou du village, toujours sagement orientés, tenait compte aussi de la sécurité (13).
      L’occupation de chaque terre signifiait des travaux importants d’adaptation pour la rendre cultivable. Ces travaux au long des siècles, par des millions de paysans, ont modelé un paysage typiquement méditerranéen. La culture en terrasses, la mosaïque de petites parcelles cultivables, les bois en sont des caractéristiques. Pour le Méditerranéen, aussi importante que l’adaptation des sols a été la maîtrise de l’eau. Elément essentiel et précieux, faisant souvent défaut et toujours irrégulier. Les civilisations
      méditerranéennes ont été des maîtres dans ce domaine et ont laissé un héritage énorme, aussi bien pour ce qui est des constructions que du savoir-faire.
      La propriété du sol et sa transmission émanent de deux pensées juridiques différentes : le droit romain et le droit musulman (14). Sans oublier toutes les diverses pratiques coutumières locales. Les différentes situations de propriété et de la transmission qui en découle vont conditionner sérieusement la gestion du bâti traditionnel.

      Habiter la Méditerranée
      L’habitat groupé rassemble la plupart de la population. Le Méditerranéen aime la vie en communauté et en partenariat, l’entraide. Sans doute l’héritage gréco-romain, autant que l’arabo- et le turcomusulman,
      y contribue-t-il. Les villes et les villages méditerranéens sont des lieux de voisinage, de convivialité, d’hospitalité (15). Là encore, la Méditerranée se montre diverse sur les solutions matérielles adoptées. L’esprit évoqué ci-dessus étant commun à toutes. Cependant deux cas de figure
      sont représentatifs : les villages compacts, plus ou moins denses et avec des variantes morphologiques, les villages diffus et se présentant en apparence comme quelques maisons éparses. Deux situations rattachées surtout à deux modèles d’organisation sociale. Ce deuxième modèle, très fréquent au nord de l’Afrique, correspond à des sociétés tribales (16), tandis que le premier modèle correspond à des sociétés plus organisées, complexes et citadines (17).
      Les villages compacts sont organisés par rapport à un espace public accueillant les bâtiments/symboles religieux et politiques, mais aussi le marché, les célébrations, la fête, les rencontres… L’orographie, la nécessité de libérer les terres de culture, souvent aussi la sécurité conditionnent leur morphologie et leur emplacement.
      Les villages diffus sont « cousus » par la même force d’organisation sociale, mais les régimes de production et de propriété génèrent une forme différente d’étalement dans le paysage (17).
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      • #4
        C’est aussi le cas de l’habitat épars (qu’il n’est pas possible – pensons-nous – en Méditerranée d’appeler isolé, pour les raisons dont nous venons de parler) qui se trouve toujours relié à un tissu immatériel, mais solide et efficace, de relations qui impliquent autant d’obligations et de devoirs
        auprès de ses voisins, plus ou moins lointains. En fait, en Méditerranée, si la tendance est à grouper les maisons dans les villages, elle l’est aussi à «grouper» ces villages dans le paysage (18).
        Habitat épars et villages, rivetés entre eux par une multitude de cabanes, constructions saisonnières, abris de bergers... ou par de grands bâtiments servant à la mobilité et aux grands déplacements, tels les caravansérails, ou encore par la toile d’araignée de chemins et de sentiers. Cette dentelle de civilisation confère toujours au paysage méditerranéen une échelle humaine, rassurante et jamais orpheline de références.
        Si le groupement des populations est majoritaire, l’habitat épars est une situation fréquente, en général sur les zones moins accidentées et moins montagneuses, bien que les exceptions soient possibles.
        Aussi, si l’enracinement (19), le bâti en dur, la fondation et la transmission de lieu sont des caractéristiques des peuples méditerranéens, il est aussi vrai que des sociétés nomades – aujourd’hui très minoritaires et en train de se sédentariser définitivement – ont été nombreuses auparavant en
        Méditerranée sud et orientale (20). Une forme de vie se référant à toute une échelle de conception bien différente de l’espace, du temps, de la liberté. Elle serait une étape antérieure à la transhumance.
        Encore présente – bien que défaillante –, la transhumance (21), compromis entre le déplacement saisonnier et le sédentarisme nécessaire des peuples agricoles, peut dans certaines régions signifier le déplacement temporel de tous les habitants d’un village ; par exemple dans la région des Aurès en Algérie. Cette forme de vie, empruntant souvent des voies romaines, a contribué depuis des siècles à nouer des relations et ouvrir des régions parfois enclavées, dans les régions montagneuses
        méditerranéennes.
        L’enracinement, le bâti, la fondation et la transmission de lieu sont des caractéristiques des peuples méditerranéens
        Le Méditerranéen habite en plein air, au moins autant que dans la maison. Les conditions climatiques
        lui permettant la plupart du temps de rechercher le soleil, la lumière, l’air. Si intime soit-il, comme dans le cas des maisons à patio – même dans un tissu aussi dense que celui d’une médina –, le plein air, le non-couvert est un besoin profond.
        Cet espace méditerranéen, ouvert aux échanges, à la pensée, aux peuples, a été une des sources de civilisation les plus importantes de notre monde. Sûrement est-ce elle qui a influencé de la manière la
        plus déterminante l'organisation et l'évolution des sociétés modernes. Elle a été une source inépuisable, jaillissant toujours avec force, jamais tarie, d'idées innovatrices, de création, de ténacité, d'imagination, de spiritualité, mais aussi de convoitises, d'affrontements et de destructions. Ceci a produit une histoire d'une grande densité, entassée, se rebâtissant sur elle-même avec les savoirs empruntés ou les matériaux récupérés, tels les
        magulas de Tesalia, les tells de Mésopotamie ou les höyük de Turquie.
        Les civilisations de la Méditerranée n’ont pas toujours fait sentir leur influence sur la totalité du Bassin, ni dans toutes les régions avec la même intensité, ni toutes pendant la même durée. Les distances, la circulation à travers des civilisations tiers, les résistances, les interprétations... ont établi inévitablement un paysage culturel et historique rempli de couleurs et de tonalités. Ce sont les grands courants de civilisation qui ont cependant façonné les traits essentiels de cet espace. Si l’on reprend
        notre carte de la Méditerranée avec nos deux grands
        cardo et decumanus imaginaires, en plaçant notre point de vue à une certaine distance, on aura une vision pratique et simple des principales vagues civilisatrices dans le temps et dans l’espace.

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        • #5
          L’ESPACE MEDITERRANEEN OBJET DE L’ETUDE
          Les pays ayant intégré le projet CORPUS en 1998 ont déterminé l’étendue des territoires nationaux sur lesquels des équipes de partenaires locaux ont travaillé, et des travaux d'enquête sur le terrain ont été menés. Le nombre important de ces pays a permis de boucler – malgré une étendue non exhaustive du Bassin – une approche globale de l'architecture traditionnelle dans l'espace méditerranéen.
          De toute évidence, il existe de très bonnes études et monographies sur des régions, des typologies ou des matériaux de construction méditerranéens qui constituent déjà un apport précieux à la connaissance du patrimoine bâti de notre Bassin. Cependant, dans ces travaux, une échelle très détaillée et adaptée à une étude locale rend difficile la perspective nécessaire à une vision d'ensemble, qui n'est d'ailleurs pas forcément recherchée dans ce type d'étude.
          En outre, certains ouvrages publiés cherchant à faire un parcours complet de l'architecture méditerranéenne, limitent leur analyse aux modèles « les plus méditerranéens » ou en tout cas à ceux que l'imaginaire social, dont nous parlions ci-dessus, détecte comme tels. Ces ouvrages, qui représentent aussi un apport supplémentaire par leur nature même, ne peuvent pas aborder tous les aspects concernant les processus de transformation, les potentialités, les défaillances ou les stratégies pour la protection du bâti traditionnel, qui s’éloignent évidemment de leurs approches.
          Si l'espace méditerranéen est déjà considérable – et si l'on raisonne, comme c'est notre cas, en termes d'action et d'efficacité, et non pas d'embaumement –, la dimension de l'ensemble du bâti traditionnel
          est extraordinaire. En effet, si l'on ne veut pas faire l'erreur de la décontextualisation, en regardant le patrimoine bâti comme une série d'objets inanimés, aculturels, voire atemporels, en pierre, brique ou bois, il faut admettre que la prise en considération de cette architecture traditionnelle implique la prise en compte d'un contexte matériel et de son contexte immatériel. Cela peut paraître ambitieux, irréel, voire utopique. Et ce d'autant plus que l'on est en train de parler d'un patrimoine « sans papiers », méconnu/non reconnu qui n'a bénéficié en chiffres absolus que de petits moyens trop dispersés, souvent trop marginaux pour être efficaces.
          Quant à l'espace physique étudié, il se circonscrit à l'espace méditerranéen évident. Cette ambiguïté pose la question des limites géographiques. Certes, d'un point de vue climatique, biologique ou culturel, les limites de cet espace pourraient faire l’objet d’un débat. Portées jusqu'au bout, elles nous
          amèneraient sur des étendues territoriales et des latitudes qui dépasseraient les capacités de la présente étude.
          Il est évident qu’une grande capillarité est présente sur toutes les rives de cette mer. Jusqu’où pénètre-t-elle en Espagne, sur le Moyen-Orient, jusqu’où descend-elle à partir du Maghreb, ce sont des questions qui toucheraient possiblement encore de grands territoires.
          Dans une démarche et une attitude raisonnables, et dans un souci d'efficacité, l'espace traité correspond à une large ceinture de territoires autour de la Méditerranée, « saturée de méditerranéité » au-delà de laquelle, et pour nombre de régions, les indicateurs méditerranéens deviennent moins perceptibles et donc la méditerranéité chaque fois un petit peu plus diffuse et diluée dans d’autres cultures, paysages et histoires dominants. Cela laisse d’ailleurs ouverte la possibilité d’élargir lors d’études futures la bande considérée, et notre choix n’exclut pas du tout la reconnaissance de composantes méditerranéennes dans certaines régions n’ayant pas été retenues dans l’étude. Toutefois, bien que importantes pour compléter et nuancer ce travail, de nouvelles approches territoriales ne viendront que renforcer et enrichir l'édifice commun de l'espace méditerrannéen que tous les partenaires du projet CORPUS ont choisi de circonscrire pour cette étude.
          Au-delà de ces aspects apparaît avec force la question fondamentale et l'objectif essentiel que nous pensons avoir atteints, la constitution d'une approche globale et surtout commune, partagée. Approche qui ne revendique plus une conservation plus ou moins harmonieuse, mais la protection du droit du bâti traditionnel à siéger dans le discours et dans les gestes du développement durable de notre société.
          Droit aussi à être considéré comme une richesse essentielle du paysage culturel et non plus comme un parc d'habitations insalubres en attente de démolition. Une solution beaucoup plus qu’un problème.

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          • #6
            La contribution de cette démarche solidaire du partenariat méditerranéen ne fait que renforcer la notion de son espace dont le bâti traditionnel constitue une part très importante, part de son paysage,autant que de sa culture.
            MOSAÏQUE HISTORIQUE
            L’histoire de la Méditerranée peut nous faire remonter facilement à plus de huit mille ans. Histoire d’une densité et d’une complexité si considérables que la tâche d’en présenter une synthèse se révèle être une mission raisonnablement impossible. C’est pourquoi notre volonté d’accompagner, ne fût-ce que de manière très schématique, les analyses sur l’architecture traditionnelle d’un fonds historique où peuvent être visualisées les grandes vagues des civilisations méditerranéennes nous a amenés à retenir une option graphique simple et synthétique, sous la forme de cartes historiques et de repères chronologiques.
            Si les cartes sélectionnées peuvent représenter de grands moments des civilisations, elles resteront toujours incapables d’exprimer les imbrications et nombreux détails historiques souvent décisifs des périodes concernées. Néanmoins, elles permettent un repérage utile des territoires à certaines époques.
            Bien qu’il soit toujours risqué de tenter des exercices de réduction, retenant les grands événements au détriment des moins importants – combien d’événements supposés mineurs ont-ils déterminé de changements historiques de premier ordre ? – on peut quand même convenir que la Méditerranée a été secouée par trois grandes vagues de civilisations qui, depuis, continuent d’imprégner notre Bassin. Sur le quartier nord-occidental de nos
            cardo et decumanus imaginaires, c’est Rome, l’univers latin, la chrétienté ; au-dessous du decumanus, sur toute la moitié sud, c’est l’univers arabo-musulman, c’est l’islam ; sur le quartier nord-oriental, c’est l’univers grec, c’est le monde orthodoxe.
            Étalement très schématique que les cartes aident à nuancer et à préciser, poussant par exemple l’influence islamique sur le quartier nord-oriental ou l’univers latin vers le quartier sud-occidental, en faisant apparaître des périodes d’une importance majeure – byzantine, turco-ottomane –, pour ne citer que deux exemples. On pourrait multiplier les étapes et leurs territoires : judaïsme, peuples germaniques, États, royaumes et nations, présence anglaise et hollandaise... et tant d’autres moments, peuples ou organisations significatifs de la Méditerranée.
            Car, évidemment, les couleurs qui ont teinté la Méditerranée ne se limitent pas à trois, si importantes soient-elles, ayant pris elles-mêmes différentes tonalités selon l’implantation et l’époque. D’autres les ont précédées, les ont accompagnées ou en ont pris le relais, contribuant à la coloration historique exceptionnelle et fascinante de notre Bassin. Comme disait Fernand Braudel : « La Méditerranée est une mosaïque de toutes les couleurs. »

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            • #7

              Notes :

              (1) « Espace » est utilisé dans ce document avec le sens que lui attribuent Milton Jones et nombre d’autres auteurs : « L’espace est le résultat du mariage entre la société et le paysage. » L’espace prend alors tout son caractère de mouvement, de dynamisme et de temps. En fait, le pay sage est un mot relativement récent (apparaît en France au XVIe siècle). Plusieurs auteurs utilisent toujours le mot « pay s » qui contient
              hommes et territoire dans un espace.
              (2) « La mer. Il faut tenter de l'imaginer avec le regard de l'homme d'autrefois : comme une limite, une frontière, étalée jusqu'à l'horizon, comme une immensité obsédante, omniprésente, merveilleuse et énigmatique! Avant de devenir un lien, la mer fut pendant longtemps un obstacle. Une navigation digne d'un tel nom ne démarra pas avant la deuxième moitié du troisième millénaire, avec les navigations égyptiennes vers Biblos ou, mieux encore, avec l’essor, au deuxième millénaire, des voiliers des Cyclades... » La Méditerranée, Fernand Braudel.

              (3) Méditerranée, du latin
              mediterraneum, équivaudrait à internum, intérieur, dans le sens de « entre » , « au milieu de » . La Méditerranée est donc la mer au milieu des terres.
              (4) Source :
              Atles ambiental de la Mediterrània. L’estructura del territori i del paisatge, ouvrage collectif, Portic, Barcelone, 1999.



              (5) Le climat méditerranéen prête son nom au climat de quelques zones des cinq continents (Californie, Chili, Afrique australe, Asie occidentale et Australie méridionale), où se reproduisent des pay sages semblables.
              (6) Les catastrophes ont été nombreuses en Méditerranée : Pompéi, Santorin, Messina, Alger,...
              (7) Si le pin est peut-être aujourd’hui l’arbre le plus répandu dans les bois méditerranéens, le cy près reste toujours l’arbre le plus symbolique et un élément lié à certaines ty pologies (cimetières ou monastères en tant que symbole de spiritualité, ou dans la
              masia catalane comme symbole



              d’hospitalité). L’olivier, recouvrant une importante partie des terres non irriguées, reste l’arbre le plus emblématique de l’espace méditerranéen – qu’il définit presque précisément – autant par son importance dans l’économie traditionnelle et actuelle que par la beauté de son vert argenté pérenne, sa grande longévité ou son symbolisme. Modèle de sobriété, tenacement enraciné à la terre et surtout généreux, l’olivier résume beaucoup de traits de l’espace méditerranéen et de ses populations. Et encore le palmier-dattier, « la merveille des merveilles » selon F. Braudel, qui prête une silhouette symbolique à toute la Méditerranée et permet les plus beaux et riches jardins sur les zones les plus arides.
              (8) Pline parlait de « l’arôme enivrant, en Campanie, des oliviers en fleur et des roses sauvages » . En Turquie on dit que, « pour le parfum d’une rose, le jardinier supporte – le sourire aux lèvres – mille épines » .
              (9) terre/mer, soleil/ombre, extérieur/intérieur, sécheresse/inondation,...
              (10) Sa situation, en plein carrefour de trois continents fondamentaux pour l’histoire de l’homme et des civilisations, ne fait que renforcer ces qualités. Depuis l’Afrique profonde, à l’Orient lointain, jusqu’au Grand Nord européen, sans oublier la vague du Nouveau Monde à partir du XVIe siècle, tous ont pris rendez-vous sur la Méditerranée, sillonnant la mer, traversant les villes, imprégnant son espace.
              (11) La Production de l’espace, Henri Lefebvre, Anthropos, 1981.
              (12) « Les villes sont le texte de l’histoire… » « Les villes constituent en elles-mêmes un monde… » « Athènes est la première idée claire de la
              science des faits urbains ; c’est le passage de la nature à la culture » , A. Rossi,

              L’Archittetura della città, Marsilio Editori, S.P.A., Padova, 1966.
              (13) Les Grecs croy aient que l’emplacement d’une ville devait être choisi et révélé par les divinités. Hérodote signale comme un acte d’impiété ou de folie que le Spartiate Doriée ait osé bâtir une ville « sans consulter l’oracle et sans pratiquer aucune des cérémonies prescrites» . La Cité antique, Fustel de Coulanges, Flammarion, 1984.
              (14) « L’histoire juridique de la Méditerranée contient donc les deux manières possibles de répondre à la question relative à l’origine du droit. Le droit musulman et le droit romain – à un moment de leur histoire – ont donné forme aux tentations permanentes du juriste : que l’ordre juridique soit le reflet de la création divine et que la relation des hommes entre eux soit imprégnée de l’idée d’un vouloir de Dieu, ou alors que l’ordre juridique naisse plutôt de la vie quotidienne et des aspirations autonomes des hommes. » Histoire juridique de la Méditerranée, Jeanne Ladjili-Mouchette, Publications scientifiques tunisiennes, 1990.
              (15) C’est peut-être là une tradition héritée des ancêtres nomades méditerranéens. Traditionnellement, les familles nomades destinaient une de leurs tentes à l’attention du
              dhaif (passager, visiteur ou invité). « Joie cachée, chandelle éteinte » , dit-on à l’autre extrême sur les côtes occidentales.


              (16) Dans le sens anthropologique du mot : groupe social rassemblant de nombreuses familles ou clans unis par des liens linguistiques, ethniques et culturels, et en général administrant un sy stème juridique propre.
              (17) Structure sociale de la Méditerranée, Paul-Henri Stahl.
              (18) « ...du haut d’un clocher on peut toujours voir le clocher voisin… » chantait, en Catalogne, Lluís Llach.
              (19) Enracinement qui retourne à la matrice dans le cas de l’habitat troglody tique. Bien que peu nombreux en termes absolus, il est présent un peu partout et avec des exemples spectaculaires, comme c’est le cas de Matmata en Tunisie. Comme écrivait Moustafa Lacheral dans la préface du livre d’André Ravereau : « ... une société [...] une civilisation [...] du site aménagé pour la longue durée... »
              (20) « ...dans les steppes riches en herbages, on estime qu’il faut trois hectares de parcours par an et par mouton. Il est évident que cette unité de pacage doit être plus importante dans l’Erg... » « ... pour des raisons très diverses, pertes des troupeaux, diminution importante de l’effectif familial ou du groupe, les nomades descendent au rang des sédentaires » . Le Souf des oasis, Ahmed Najah, Editions de la Maison
              des livres, 1970.
              (21) Dans son sens anthropologique : ensemble de migrations saisonnières, propres surtout aux sociétés d’éleveurs, qui, pour profiter au mieux de l’échelonnement des pâturages, parcourent de grands territoires, de la plaine à la montagne et vice - versa.

              par Fernand Braudel

              Dernière modification par katiaret, 22 mars 2014, 15h50.
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