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Une leçon de fraude électorale

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  • Une leçon de fraude électorale

    Abdelaziz Bouteflika, 77 ans, au pouvoir depuis 1999, affaibli par les séquelles d’un AVC, candidat absent de la campagne électorale, a emporté le scrutin présidentiel du 17 avril avec 81,53 % des voix. Comment peut-on truquer les résultats d’un vote ? La réponse en dix points.
    1 - Utiliser un fichier électoral opaque
    Le fichier électoral regroupe par commune le nom de chaque inscrit avec son numéro d’identification. Mais les listes ne sont pas toujours transparentes. "C’est à cause de ce fichier électoral que les observateurs de l’Union européenne ne seront pas présents", explique un juriste. "Officiellement, l’invitation de l’Algérie est arrivée trop tard, mais c’était voulu. Il est impossible pour les observateurs de travailler avec l’actuel fichier électoral, car les autorités ne les laissent accéder qu’aux listes des wilayas dans lesquelles ils se rendent, sans leur donner la totalité du fichier." En 2012, l’Algérie avait refusé de mettre à disposition des observateurs de l’Union européenne l’intégralité du fichier électoral national, prétextant la "protection des données".

    2 - Utiliser l’intimidation
    Avant le vote, "certains usent de leur position pour influencer et menacer les votants. Il nous a été rapporté de nombreuses pressions exercées sur les inscrits et les agents qui contrôlent les bureaux de vote", rapporte une source proche d’un des candidats. Pendant la campagne, lors d’une visite d’inspection dans des bidonvilles, le wali d’Alger avait prévenu : "Pas de relogement pour ceux qui ne votent pas." Les anecdotes ne manquent pas : plusieurs témoignages ont révélé que lors de la collecte des signatures pour le candidat Bouteflika, certains membres du personnel de l’administration avaient fait l’objet de chantage à l’emploi.

    3 - Créer des bureaux de vote fictifs

    Les cas de fraude sont aussi multiples dans les bureaux de vote itinérants – qui ouvrent avant les autres et qui, souvent, se trouvent dans des zones d’accès difficiles aux observateurs. Sur les 35 bureaux de vote itinérants de la wilaya d’Adrar, 19 sont fictifs, rapportent les observateurs d’Ali Benflis [candidat malheureux, il a obtenu 12,18 %]. "Ces bureaux ne devraient plus exister, ils devaient être supprimés après la révision du fichier électoral, pourtant, ils sont encore notifiés sur les documents", dénonce un militant pro-Benflis.

    4 - Faire voter les morts

    Il n’est pas rare que les noms de personnes décédées soient portés sur les listes électorales. "A Sidi Bel Abbès, une vingtaine de noms de morts se sont retrouvés sur la liste électorale de la commune de Boukhanefis [à l’ouest du pays dans la région d’Oran", dénonce le représentant d’Ali Benflis. Un recours a été déposé auprès de la commission de la wilaya.

    5-Voter plusieurs fois
    Par choix, ou malgré lui, un citoyen peut voter à plusieurs reprises. Avec de fausses procurations, un électeur peut aussi voter à la place d’un autre.

    6 - Acheter les votes
    Un proche de Moussa Touati [candidat malheureux, il a obtenu 0,56 %] relate que lors de l’élection présidentielle de 2009, dans la direction locale où il avait été nommé contrôleur, des personnes venaient voter parce qu’elles avaient reçu entre 200 et 1 000 DA [2 à 10 euros].

    7 - Bourrer les urnes
    Avant, pendant et après le vote, le bourrage des urnes est un classique de la fraude. On y insère discrètement les bulletins de son candidat qui seront comptabilisés au dépouillement.

    8 - Bénéficier du soutien des walis
    Le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Tayeb Belaïz, aurait demandé aux walis de lui transmettre les résultats des élections le jeudi 17 avril avant 23h, alors qu’une telle procédure est illégale. D’après la loi électorale, le wali n’est pas le destinataire des procès-verbaux des commissions de wilaya. De coutume, l’annonce des résultats se fait le lendemain du vote vers 12h. "L’espace de temps laissé entre le dépouillement et l’annonce des résultats permet de les trafiquer", explique un proche de Moussa Touati. Bachir Frik, l’ancien wali d’Oran, a dénoncé à la télé le 12 avril "la fraude institutionnelle". Il témoigne avoir assisté, lorsqu’il était en fonction, au détournement des voix.
    9 - Optimiser le vote des "corps constitués"
    Les "corps constitués", à savoir l’armée, la Gendarmerie, la Protection civile, la police, la garde communale et les Douanes représentent environ 930 000 électeurs. "Ils bénéficient d’un régime exceptionnel et peuvent voter dans quatre communes différentes : celle de leur naissance, de leur dernière résidence ou de naissance de leurs ascendants, mère ou père. Si aucune commission indépendante ne contrôle, rien ne peut les empêcher d’utiliser les quatre cartes en main", précise le juriste. Des électeurs sont déjà sortis mécontents des bureaux de vote itinérants à Tamanrasset [dans le sud du pays] le 16 avril, parce que les bureaux étaient envahis par les soldats de l’ANP [armée nationale populaire], rapporte le journal Liberté. Pourtant, les "corps constitués n’ont plus le droit de voter dans les bureaux itinérants", précise le juriste. Et d’ajouter : "Ils ont conservé cette habitude qui était un des points noirs de l’ancienne loi électorale."

    10 - Proclamer de faux résultats
    Une partie de la fraude s’organise entre le moment où les calculs sont faits, par logiciels, dans les locaux du ministère de l’Intérieur. Ce sont surtout les chiffres de la participation qui subissent de grandes "reconsidérations". Alors que les chiffres officiels annonçaient un taux de participation de 75 % à l’élection présidentielle de 2009, les observateurs et universitaires évoquaient a contrario un taux d’abstention de 75 %.

    • El-Watan
    • | Salsabil Chellal
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