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Intelligence, Musique, Wikipédia... Parlez-vous le Genette?

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  • Intelligence, Musique, Wikipédia... Parlez-vous le Genette?

    Aux trois volumes de notes, brèves ou longues, savantes ou savoureuses, que constitue la trilogie «Bardadrac», «Codicille» et «Apostille», Gérard Genette ajoute un «Epilogue». Manière de la clore sans la clore, mais en beauté: un happylogue.

    A ce héros (héraut ?) de la sémiologie et de la théorie de la littérature, dont l'enseignement marqua, par la subtilité, l'intelligence, la précision et la nouveauté, deux générations d'étudiants à la fois admiratifs et affectueux, à l'auteur des cinq volumes des mythiques «Figures», nous avons proposé de commenter quelques mots, sur le modèle de sa suite «bardadraque», comme il dit.

    Etudiants

    « Il y a longtemps que je n'ai pas fréquenté cette espèce, que je n'ai connue que pendant quatre ans, lorsque j'étais assistant à la Sorbonne, poste sans grand intérêt. Auparavant, j'avais enseigné en hypokhâgne à des élèves, c'était très agréable, et j'y ai appris la nuit tout ce que j'étais censé y "transmettre" le jour, tout en me "dépolitiquant", occupation presque à plein temps. Par la suite, j'ai eu un séminaire à l'Ecole des Hautes Etudes, auquel assistaient des "participants", non exactement des étudiants. Moi-même, j'ai été élève jusqu'au bac, élève en khâgne, à Lakanal, le lycée de notre cher Péguy, puis élève à Normale, donc jamais vraiment étudiant.»

    Matière

    « Celle que j'ai enseignée à l'Ecole des Hautes Etudes ? A mon époque, chacun y faisait ce qu'il voulait, dirigeait des travaux, ou non (dans mon cas, c'était le moins possible), et livrait pendant deux heures hebdomadaires le fruit du travail de recherche qu'il avait effectué pendant la semaine. Je proposais donc oralement ce qui allait être l'objet de mon prochain livre. Ce séminaire a dû s'appeler au début "Sémiologie des formes littéraires". Puis l'intitulé a évolué, et son dernier état a dû (ou aurait dû) être "Poétique et esthétique".»

    Sport

    « Heu... Je ne vous cite pas Churchill. J'ai dû regarder des matchs de foot à la télévision autrefois, avec mes enfants, mais le goût m'en est passé, au profit du tennis, toujours comme spectateur. Plus activement, aujourd'hui, je fais mes courses à vélo. J'ai un panier sur mon porte-bagages, célèbre dans tout le Marais. Je suis l'Homme au panier.»

    Obscurité

    « Au sens de l'obscurité de Mallarmé ? Je ne cours pas après... Il est vrai que l'obscurité a régné pendant bien trente ans, et que les auteurs que je jugeais, et juge encore, obscurs, tenaient le haut du pavé. Enfin, je n'ai pas suivi le séminaire de Lacan, si c'est l'arrière-texte de votre question. Si l'on veut être aimable, on dit d'un auteur non qu'il est obscur, mais difficile: on avoue ainsi sa propre incapacité. Derrida, par exemple, m'a toujours semblé dire quelque chose, et mériter quelques efforts ; mais il m'est arrivé de penser, in petto mais assez vite, que la difficulté de quelques autres auteurs relevait de ce que Valéry, je crois, appelait la "foutaise".»

    Intelligence

    « Dans mon enfance, j'entendais dire que j'étais intelligent, et je me demandais ce que cela voulait dire. Par la suite, c'est une question qu'on se posait rituellement en province: "Qu'est-ce que l'intelligence ?" Disons que j'ai parfois l'impression d'avoir affaire à de l'intelligence. En lisant, en écoutant des paroles, mais aussi et peut-être, surtout, en contemplant un visage. J'applique ce terme à des manifestations involontaires, mais frappantes, hors du champ officiel, "administratif", comme disait Debussy, de son exercice. Donc hors du champ habituellement tenu pour "intellectuel": ce qui me plaît le plus, c'est l'intelligence pratique, manuelle, celle que j'admirais jadis chez certains artisans: c'est encore mon côté Péguy.»




    Wikipédia

    « Je ne peux pas m'en passer, bien sûr. Il paraît qu'il y a des erreurs, l'article qui m'est consacré est assez nunuche, mais je n'aurais pas l'idée de le corriger moi-même.»

    François Hollande

    « Je n'aime pas dire du mal.»

    "Socialisme ou Barbarie"

    « C'est un mouvement qui m'a accompagné, éclairé, dans ma sortie du communisme, provoquée par les événements de 1956. J'avais quitté le Parti, mais je pensais encore qu'il existait un avenir pour le socialisme. Je suis tombé presque par hasard sur cette revue, j'ai assisté à des réunions du groupe qui l'animait autour de Lefort et Castoriadis. Malgré la part de naïveté que j'y ai découverte peu à peu, je conserve un certain respect pour ce courant de pensée qui m'a décrassé politiquement, et m'a montré une manière de sortir "par la gauche" du stalinisme. Aujourd'hui, je ne cherche plus mon chemin à gauche, pensant plutôt, comme mon maître Tocqueville, qu'il faut viser des buts de gauche, et les atteindre avec des moyens de droite. Mais c'est sans doute une autre forme de naïveté...»



    Philippe Sollers

    « Voir "Hollande". Je lui ai tout de même une certaine dette. J'ai d'abord publié à sa demande des articles dans "Tel Quel", et il m'a très vite accueilli dans sa collection. Il m'a donc fait entrer au Seuil, où je suis toujours. Cela s'est gâté par la suite, en partie à cause de ses foucades politiques successives, et aussi parce qu'il a très mal pris la création de "Poétique", d'où une sorte d'éloignement réciproque. Mais tout compte fait, il a joué un rôle positif dans ma vie. Sans lui, je serais peut-être chez Gallimard...»

    Jugement des pairs

    « J'ai plutôt été jugé, et encouragé, et surtout inspiré par des pères, des maîtres, au temps de feu la "nouvelle critique" : Roland Barthes, Georges Poulet, Jean-Pierre Richard, Jean Starobinski, Jean Rousset.»



    Musique

    « Oh putain ! Faites monter de la bière et des sandwichs, comme dit Maigret! Le certain, c'est que l'art dans lequel je vis de façon perpétuelle, c'est la musique, puisque mon "art préféré", si l'on veut un palmarès, n'est pas la littérature. Celui pour lequel j'aurais le plus d'admiration formelle serait l'architecture ; mais on ne vit pas dans l'architecture. Et bien sûr, la musique n'est pas pour moi un pis-aller ! J'y suis plongé depuis l'âge de 6 ou 7 ans, et faute de la pratiquer j'en écoute constamment, du matin... au matin, puisqu'elle me poursuit encore souvent la nuit. Une revanche sur la sémiologie? Je n'y avais pas pensé, c'est un peu réducteur, mais oui, peut-être [rires] ! En tout cas, elle est une manière d'échapper à la tyrannie du sens, et donc elle "ne ment pas", comme Pétain disait de la terre ! Tout simplement, j'aime la musique, je ne saurais dire pourquoi, c'est le cas pour tout amour, et je ne cherche pas à le savoir.»

    Propos recueillis par Jacques Drillon
    le nouvel obs
    Dernière modification par haddou, 22 avril 2014, 08h57.
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