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Gaz de schiste: l'eldorado va-t-il faire pschitt?

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  • Gaz de schiste: l'eldorado va-t-il faire pschitt?

    Exploiter cette ressource ferait, dit-on, baisser le prix de l'énergie, rendrait notre industrie plus compétitive et créerait des dizaines de milliers d'emplois... Ne rêvons pas: cette technique serait en fait aussi complexe que coûteuse à mettre en oeuvre. Démonstration

    Il y a des blagues qui tournent à la mauvaise farce. Le 1er avril, les Verts avaient à peine annoncé qu'ils ne monteraient pas dans le train du gouvernement Valls qu'Arnaud Montebourg relançait l'idée des gaz de schiste. Quelques heures avant sa nomination au ministère de l'Economie, le " sauveur " de l'industrie s'enflammait au micro de France Inter : " La France est en train de subir une nouvelle vague de délocalisations [...]. Un nouveau pays low cost est en train de naître, et il s'appelle l'Amérique. La révolution des gaz de schiste y a fait chuter dramatiquement les prix de l'énergie, et nous allons droit à la catastrophe. "
    Et si le bouillant patron de Bercy avait trouvé la martingale pour doper une industrie en mal de compétitivité ? Mieux que le CICE et le pacte de responsabilité, la baisse des prix de l'énergie due à l'exploitation des gaz de schiste permettrait aux industriels, et notamment à ceux de la chimie, de relever le défi de la compétition mondiale. En créant au passage des milliers d'emplois.
    Sur le papier, les atouts de la France sont considérables. Selon l'Agence internationale de l'énergie, le sous-sol français regorgerait de ce précieux gaz, puisque ses réserves récupérables seraient de 5 100 milliards de mètres cubes, soit près d'un siècle de consommation au rythme actuel. Problème, en juillet 2011, le gouvernement Sarkozy a abrogé les trois seuls permis accordés qui représentaient près de 10% de ce trésor. Et, jusqu'à présent, les anti-gaz de schiste ont tenu la dragée haute aux lobbys industriels.




    our autant, le débat n'a jamais dépassé le stade des dégâts environnementaux, et l'épineuse question des bénéfices économiques en est restée au niveau des supputations. " J'ai obtenu, lors du débat national sur la transition énergétique, à l'automne dernier, la réalisation d'une étude comparant les coûts sur l'environnement et les gains en termes de croissance. Je l'attends toujours ", commente, désabusé, Thomas Porcher, spécialiste des marchés de l'énergie et professeur à l'ESG Management School. " Chiche, posons le débat économique, il n'a jamais été mis sur la table ", tempête l'avocate Corinne Lepage.
    Pour créer des emplois, il faut forer massivement
    Une étude confidentielle réalisée par le cabinet Sia Conseil pour le compte du lobby pétrolier tente de défricher le terrain. L'exploitation des trois premières concessions produiraient 2 milliards de mètres cubes de gaz d'ici à 2035, soit à peine 5% des besoins annuels, et entraînerait la création de 10 000 à 20 000 emplois directs et indirects. En extrapolant ces estimations sur la totalité des réserves françaises, "entre 30 et 70% de notre consommation pourrait être couverte, tandis qu'à l'horizon 2020 la filière pourrait créer 100 000 emplois", affirment les auteurs.
    Des projections mirobolantes qui font s'esclaffer certains économistes. "Dans le meilleur des cas, l'exploitation des gaz de schiste permettra de créer quelques milliers de postes, guère plus", rétorque Philippe Chalmin, pourtant ardent défenseur de cette technique. Car, pour créer beaucoup de jobs, il faut forer massivement et en permanence, comme aux Etats-Unis, alors que le rendement des puits chute rapidement.
    "En 2013, 45 000 puits de pétrole et de gaz ont été forés aux Etats-Unis, davantage que l'ensemble des forages dans le reste du monde. La France ne pourra jamais avoir une telle approche productiviste, ne serait-ce que parce que la densité de population y est nettement plus élevée", explique Thomas Porcher. On compte en effet 130 habitants par kilomètre carré dans le Gard, là où est enfouie une bonne partie des réserves françaises, contre 4 habitants par kilomètre carré dans le Dakota, l'eldorado du gaz de schiste.
    Reste l'effet sur les prix. "En raison de la géologie et de la réglementation, il est peu probable que les coûts de production soient inférieurs à 8 dollars le million de BTU (British thermal units), soit deux fois plus qu'aux Etats-Unis", poursuit Philippe Chalmin. Au Royaume-Uni, les premiers mètres cubes de gaz de schiste exploités dans le bassin de Bowland, dans le nord du pays, coûteraient entre 8 et 12 dollars le million de BTU. Alors que les cours du gaz au comptant sur le marché européen avoisinent les 11 dollars, le potentiel de baisse des prix pour le consommateur est donc limité et nettement plus faible qu'outre-Atlantique. D'autant qu'une exploitation intensive ne permettra pas à l'Europe d'être autosuffisante.
    Une récente étude de l'Iddri révèle que les gaz de schiste ne devraient couvrir que 3 à 10% de la demande de gaz sur l'ensemble du Vieux Continent. Les distributeurs européens resteront donc dépendants des contrats à long terme avec les géants gaziers russe ou algérien. " L'exploitation permettra juste de renforcer notre pouvoir de négociation avec Gazprom ", conclut Thomas Porcher. Pour certains, ce n'est déjà pas si mal

    l'express fr
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