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7 découvertes étonnantes sur les Iles éparses

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  • 7 découvertes étonnantes sur les Iles éparses

    Ces cinq îles confettis de l’océan Indien sont un laboratoire exceptionnel, préservé de la présence humaine.
    PRÉSERVATION. "Sanctuaires océaniques de la nature primitive", les îles Europa, Bassas da India, Juan de Nova, Glorieuses et Tromelin entourent Madagascar et ponctuent le canal de Mozambique et le bassin des Mascareignes.

    Éloignées de tout, sans sources d’eau douce, ces confettis sont quasi-indemnes de toutes perturbations anthropiques directes, ce qui attire les scientifiques de nombreuses disciplines.

    Parcours du navire de recherche au printemps 2011. Crédit : Sciences et Avenir / Sylvie Daoudal

    "POSTES D'OBSERVATION". "Voilà des postes d’observation privilégiés pour étudier les changements globaux affectant la planète et observer les dynamiques des écosystèmes hors de toute intervention humaine directe" assure Marc Troussellier, directeur de recherche au CNRS qui chapeaute le programme.

    Un colloque qui s’est déroulé cette semaine au siège du CNRS a permis de restituer les premiers résultats des études en cours. Des résultats très souvent surprenants. Exemples :

    1) Les lémuriens ont fui l'Afrique par un pont rocheux
    Le canal de Mozambique est une région à haute sismicité. Le rift est-africain qui sépare les deux plaques du continent africain, Nubie à l’ouest, Somalie à l’est, se prolonge dans ce bassin, suivant une structure sous-marine qui s’élève à 1500 mètres au-dessus des fonds voisins, la ride de Davie.

    RIDE. Les GPS installés sur les îles Europa et San Juan situées de part et d’autre de cette chaîne immergée ont permis de mieux caractériser les mouvements locaux de la croûte terrestre. Selon les premiers résultats, les déformations locales sont focalisées par la ride, cette structure étant affectée par un lent affaissement entamé il y a plusieurs dizaines de millions d’années.

    Les données bathymétriques enregistrées en 2003 lors d’une mission précédente font par ailleurs apparaître des signes d’érosion pouvant signifier que la chaîne a un jour relié le continent africain à Madagascar. Il est donc bien possible que ce «pont » ait servi aux lémuriens pour coloniser Madagascar, y proliférant tandis que leurs cousins africains disparaissaient.

    2) On peut prédire l'arrivée d'un cyclone depuis le fond de la mer
    Les enregistrements du bruit de fond microsismique effectués au fond de la mer ont aussi permis de mesurer l’ampleur et la diffusion de la houle de l’Océan Indien provenant des dépressions qui se succèdent autour de l’Antarctique, permettant ainsi l’étude de l’impact de ces vagues sur les récifs coralliens. Et ces mêmes instruments se sont révélés assez sensibles pour enregistrer à mille kilomètres de distance l’arrivée des cyclones.

    Le réseau de stations sismologiques déployé temporairement sur les cinq îles éparses avait pour principal intérêt l’étude de la structure de la croûte et du manteau supérieur sous le canal du Mozambique qui reste largement inconnue. Les nouvelles mesures récupérées seront utiles pour comprendre la structure du manteau intérieur sous l’île de la Réunion afin de reconstituer par image le cheminement de la lave du noyau jusqu’à la croûte terrestre pour alimenter le Piton de la Fournaise

    3) Les coraux des zones protégées fournissent des larves aux zones dégradées voisines
    Les îles Eparses sont des "no-take areas" (NTA) depuis 1975, soit dans le langage des spécialistes des coraux, des zones où tout prélèvement de ces animaux sont bannis. Ces NTA constituent probablement la meilleure protection des récifs coralliens à l’échelle régionale car ils fournissent des larves aux zones dégradées voisines.

    D’où l’intérêt de procéder à un inventaire des récifs des îles Eparses : nombre d’espèces et de genres présents, état sanitaire, résistance à des épisodes de blanchiment provoqués par une hausse des températures de l’eau attribuée au phénomène El Nino, tel, celui, très puissant, qui a affecté les coraux des Eparses en 1997/1998.

    4) L'éloignement d'une île de toute civilisation ne suffit pas à la protéger des influences humaines
    Une cinquantaine de genres ont été ainsi répertoriées dans les îles les plus riches en récifs, ce qui ne trahit pas une très grande biodiversité. Il s’avère en effet que ces espaces ont des écosystèmes peu différenciés et l’un des enseignements de l’expédition, c’est que la biodiversité ne dépend pas d’un éloignement qui protégerait des influences anthropiques, mais du nombre d’habitats différents. L’inventaire effectué va permettre de mieux évaluer l’effet des perturbations sur les îles voisines habitées par l’homme comme Mayotte.

    5) Il existe encore des bactéries presque vierges de pollution humaine
    Il faut bien aller jusqu’aux Eparses pour trouver des bactéries qui n’aient pas été impactées par l’homme. Celui-ci a en effet largement diffusé dans l’environnement les polluants chimiques, les résidus antibiotiques et ses propres bactéries via ses déjections. L’intérêt est donc de dénicher des populations vierges afin de voir comment elles interagissent naturellement entre elles.

    PRÉLÈVEMENTS. C’est ainsi qu’à Juan de Nova, une équipe de chercheurs a procédé à des prélèvements de bactéries, d’archées, de zooplanctons et de phytoplanctons. Des prélèvements ont également été effectués dans le lagon de Mayotte afin de faire des comparaisons avec des populations impactées par la présence humaine.

    L’un des premiers enseignements montre la très grande sensibilité des micro-organismes à la présence de nutriments, certaines îles s’étant révélées être très pauvres en phosphate et nitrate.

    6) Certaines populations d'oiseau y ont été divisées par 4 en une décennie
    Du fait de leur éloignement, les îles Eparses sont des havres de paix et de très bonnes zones de reproduction pour les oiseaux marins. Les possessions françaises abritaient ainsi plus de 40% des oiseaux marins de l’Océan Indien occidental. D’où l’intérêt de suivre les populations locales, d’étudier l’impact du réchauffement climatique sur les effectifs, de considérer ces prédateurs comme des indicateurs de la chaîne alimentaire marine locale, le nombre des oiseaux et leur succès reproductif étant étroitement corrélé avec la disponibilité en poissons.

    Baguage d'un oiseau "paille en queue" sur les Iles éparses. Crédit : Zoe Glenard

    CHUTE. Le suivi des sternes fuligineuses montre une première mauvaise nouvelle. Alors qu’on dénombrait sur Juan de Nova, le principal site nidificateur, 1,9 millions de couples en 2003, on n’en dénombrait plus que 446.000 dix ans plus tard !

    Les explications sont difficiles à donner. Les chercheurs constatent un retard dans les dates de nidification en juillet et font le lien avec un réchauffement plus fréquent des eaux provoqué par un «El Nino » propre à l’Océan Indien. Mais il est probable aussi que la présence de chats et de rats, espèces invasives, explique cette chute.

    7) Les frégates dorment en volant, face au vent à 1500 m d'altitude, cœur arrêté
    C’est pour comprendre les stratégies de recherche de nourriture des frégates que l’équipe d’Henri Weimerskirch a instrumenté ces oiseaux d’accéléromètres et de systèmes de mesure d’activité cardiaque pour mieux comprendre leur fonctionnement. Les frégates sont des oiseaux marins qui se nourrissent sans jamais toucher l’eau (leur nourriture est composée à 90% de poissons volants) et elles ne se posent jamais sur l’océan.

    FACE AU VENT. Comment font-elles quand elles partent plusieurs jours à la recherche de nourriture? Les chercheurs sont aujourd’hui capables de décrire d’incroyables stratégies d’économie d’énergie. Ainsi, ces oiseaux se mettent-ils la nuit face au vent, à 1500 m d’altitude pour pouvoir dormir ailes déployées, immobiles, cœur à l’arrêt.

    "Cet apport de connaissance scientifique devait permettre de renforcer les mesures de préservation de cette biodiversité unique et d’établir les premières orientations de gestion" explique, Cédric Marteau, le Directeur de la Conservation du Patrimoine Naturel des Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF ) et chef de mission lors de l’expédition en 2011.

    Un projet pas simple à mettre sur pied ainsi que nous le relations dans le numéro de Sciences et avenir de juillet 2011. Le voyage principal, en avril 2011, a mobilisé 72 chercheurs français en charge de 17 programmes d’études. Ils ont pu mettre le pied sur ces atolls coralliens reculés et y installer leurs instruments de mesure grâce au soutien logistique apporté par les TAAF, notamment à travers la mise à disposition du Marion Dufresne, le navire amiral de cette collectivité.

    Par Loïc Chauveau

    sciences et avenir
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