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Le droit de la famille dans les pays de l’Afrique du nord

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  • Le droit de la famille dans les pays de l’Afrique du nord

    Le droit de la famille dans les pays de l’Afrique du Nord, à l’évolution de laquelle nous consacrons cette étude, n’a pas échappé en ce qui concerne certains de ses aspects à l’influence du droit français et à son esprit laïcisant. Cette influence s’est manifestée plus particulièrement après l’indépendance de ces pays. A l’heure où nous écrivons cette étude (1973), tous les pays de l’Afrique du Nord — Maroc, Algérie, Tunisie, Libye — imposent un âge minimum pour le mariage, ce qui rend caduque la règle relative à la contrainte matrimoniale (jabr) en vertu de laquelle le père pouvait marier ses enfants en bas âge. L’organisation de l’Etat civil dans ces pays à l’image de l’état civil en France et le fait que la transcription du mariage est rendue obligatoire aide à rendre effective, surtout dans les centres urbains, l’application de la règle de l’âge minimum du mariage et limite ainsi l’abus du pouvoir paternel.

    3Mais cette influence du droit français est restée tout de même limitée dans le domaine du droit de la famille en Afrique du Nord. Ce domaine est, en effet, le moins touché par l’acculturation juridique qu’ont connue les pays de l’Afrique Méditerranéenne à la suite de leur intégration dans la sphère du capitalisme européen.

    4La Tunisie qui a le système juridique le plus acculturé en matière de statut personnel n’a pas complètement renié le droit musulman. Certes, la Tunisie a prohibé la polygamie et a introduit l’adoption, mais son code du statut personnel conserve les concepts et les catégories traditionnels chers à l’école malékite. Ainsi la règle malékite qui fait de la dot une condition de validité du mariage est encore en vigueur en Tunisie. Il en est de même de la règle prohibant le mariage entre les parents de lait. Beaucoup plus important encore, la règle coranique accordant à la fille la moitié de la part revenant à son frère dans la succession est incorporée dans le code tunisien du statut personnel.

    5La conservation du fond traditionnel dans les pays de l’Afrique du Nord et l’acculturation limitée du droit de la famille de ces pays sont les facteurs d’unité entre les systèmes juridiques de ces pays. Leur caractéristique essentielle est maintenant leur dualisme : la partie relative à l’organisation administrative et au statut réel (obligation et propriété) est francisée ; l’autre partie relative au statut personnel, bien qu’influencée dans certains aspects par le droit français, garde encore l’empreinte de l’école malékite.

    6Un des aspects de l’influence française (et italienne) dans ces pays est l’introduction même de la distinction entre statut réel et statut personnel. Mais la notion de statut personnel a connu dans les pays de l’Afrique du Nord une signification beaucoup plus étendue qu’elle n’en avait à l’origine dans les pays européens. Si le terme statut personnel est confiné en France essentiellement aux questions relatives à l’état et à la capacité des personnes, il couvre dans les pays de l’Afrique du Nord les questions relatives à l’état et à la capacité, au mariage, au divorce, à la filiation, mais aussi aux successions, aux testaments, et même aux questions relatives à la fondation des habous religieux. A l’époque coloniale, le législateur colonial avait l’habitude d’ajouter le mot succession au terme statut personnel. Après l’indépendance et l’arabisation des termes juridiques, le terme Al Ahwal Al-Shakhsiah couvre toutes les matières relatives au droit de la famille, y compris les successions, les testaments et même dans certains cas, les donations.

    7Cette extension de la notion de statut personnel a son importance non seulement pour les nationaux de l’Afrique du Nord, mais aussi pour les étrangers se rendant dans ces pays. Le statut personnel des étrangers, pris dans le sens élargi, est régi par leurs lois nationales. Ainsi, si une affaire relative à la succession d’un allemand ou d’un français arrive devant un tribunal tunisien ou libyen, par exemple, le juge tunisien ou libyen appliquera le droit allemand ou le droit français, selon le cas, pour répartir la succession entre les héritiers.

    8Dans cette étude, nous poserons les grandes lignes de l’institution qui est à la base de la famille maghrébine, c’est-à-dire le mariage. Nous n’abordons les questions de successions et des testaments qu’en tant qu’effet du mariage et de la filiation.

    mariage et de la filiation.

    I. — LE MARIAGE
    9Le mariage dans les quatre systèmes juridiques de l’Afrique du Nord peut être défini comme étant un contact entre deux axes différents ayant pour but la fondation, à titre durable, d’une famille sur la base de la confiance et de la fidélité. Le mariage en tant qu’institution musulmane, doit être conclu à titre durable. Bien que le mariage puisse être dissout après sa conclusion par la volonté unilatérale du mari, les deux futurs conjoints ne peuvent pas au moment de la formation du mariage limiter sa durée. Une telle condition vicie le mariage et en fait un mariage temporaire que les doctrines orthodoxes en vigueur en Afrique du Nord ne valident pas, seules les doctrines chiites répandues en Iran et au Pakistan valident le mariage temporaire dit mariage de jouissance (Mut’à).

    10Pour rendre compte très succinctement des règles gouvernant le mariage, nous exposerons d’abord les règles qui gouvernent la formation du mariage. Nous aborderons, ensuite, les effets du mariage à l’égard des époux et des enfants. Enfin, nous exposerons les causes de dissolution du mariage.

    A. — La fonction du mariage
    11Le mariage, en tant que contrat ayant une importance particulière, nécessite pour sa fonction le remplissement de certaines conditions de fond et de formes.

    1. — Les conditions de fond
    12L’existence d’un consentement libre des deux époux, un âge minimum et l’absence des empêchements perpétuels ou temporaires et la fixation d’une dot, sont les conditions de fond nécessaires à la fonction du mariage.
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    a) Consentement
    13La règle générale dans les quatre systèmes est que les deux futurs époux doivent donner leur consentement au mariage. D’autre part, les quatre systèmes exigent que ce consentement soit complété par celui du tuteur si l’un des futurs époux, bien qu’ayant satisfait l’exigence de l’âge minimum du mariage, n’a pas atteint l’âge de la majorité.
    14Par la suite, chacun des systèmes diverge en ce qui concerne la manière d’émettre le consentement et la suffisance du consentement de la future épouse.
    15L’ordonnance du 4 février 1959, en vigueur en Algérie, stipule expressément que sous peine de nullité, le consentement des deux époux doit être exprimé verbalement, publiquement et en personne. L’exigence que le consentement soit exprimé en personne est importante, puisque contraire à la pratique suivie en droit musulman, qui permet la représentation et la procuration en matière de mariage. Et, effectivement la Tunisie, le Maroc et la Libye permettent qu’un des futurs époux donne mandat à une tierce personne pour le représenter dans la cérémonie du mariage.
    16Les législations marocaine et libyenne vont un peu plus loin et exigent que le consentement de l’épouse soit complété par celui de son tuteur matrimonial. La législation marocaine stipule même que la femme ne peut conclure elle-même le mariage, mais s’y fait représenter par son tuteur matrimonial. Ce dernier, fut-il le père, ne peut la marier sans son autorisation et son consentement. Mais il est à remarquer que si le tuteur matrimonial refuse abusivement et sans justification de consentir au mariage de la fille, celle-ci peut demander au juge l’autorisation du mariage, et l’autorisation du juge remplacera le consentement du tuteur.
    17Il est à remarquer que le consentement au mariage se compose de l’offre et de l’acceptation. Pour être valable, il faut que le consentement soit prononcé en vue de la conclusion immédiate du mariage. Ainsi, les fiançailles ne constituent pas mariage et chacun des fiancés peut, sans donner des raisons, refuser de conclure le mariage.
    b) Age minimum
    18Les quatre pays exigent un âge minimum pour la conclusion du mariage. C’est la Tunisie qui exige l’âge le plus élevé. Depuis la réforme de 1964, la femme doit avoir au moins 17 ans et l’homme au moins 20 ans. Le Maroc exige que la femme ait atteint 15 ans et l’homme 18 ans, l’Algérie et la Libye exigent 16 ans pour la femme et 18 ans pour le garçon. Des dispenses d’âges pour des motifs graves peuvent être accordées par le juge. La sanction en cas de non respect de l’âge minimum diffère dans les quatre pays. Au Maroc et en Tunisie, c’est une cause de nullité. En Libye, c’est uniquement l’irrecevabilité de toute action en justice relative au mariage tant que les époux n’ont pas atteint l’âge minimum. L’Algérie adopte un système plus complexe. Le mariage conclu en violation de l’âge minimum est nul, de nullité absolue avant sa consommation. Une fois consommé, le mariage est simplement nul de nullité relative; seul l’un des deux époux peut demander l’annulation du mariage. Cette demande est refusée si la femme qui n’avait pas l’âge légal a conçu, ou lorsque les deux époux ont atteint l’âge requis.
    c) L’absence d’empêchement
    19Les quatre systèmes s’accordent en ce qui concerne les empêchements du mariage, avec cette exception que la Tunisie a aboli la permission polygamique. Certains empêchement sont des empêchements perpétuels, d’autres sont des empêchements temporaires.
    20(i) Les empêchements perpétuels trouvent leur source dans le Coran et tendent à prohiber le mariage entre l’homme et la femme, liés par un degré de parenté très proche. Trois genres de parenté constituent des empêchements perpétuels au mariage. En ce qui concerne la parenté par le sang, les personnes suivantes sont interdites à l’homme : sa mère et ses ascendantes, sa fille et ses ascendantes directes, les descendantes des grand-parents au premier degré, c’est-à-dire, les tantes maternelles et paternelles, mais les filles de la tante maternelle ou paternelle ne sont pas interdites à l’homme. De même, les filles de l’oncle maternel ou paternel ne sont pas interdites.
    21En ce qui concerne la parenté par alliance, les personnes suivantes sont interdites à l’homme : les épouses des ascendants à l’infini, les épouses des descendants, les ascendantes de sa femme s’il y a eu consommation du mariage avec sa femme.
    22La parenté de lait consécutive à l’allaitement est propre au droit musulman. Les codes tunisien et marocain disposent expressément, que la parenté de lait constitue un empêchement au mariage au même titre que la parenté de sang et de l’alliance, tant que l’allaitement a lieu au cours des deux premières années des nourrissons. La source de cet empêchement se trouve dans le Coran, mais la prohibition coranique ne concerne que la nourrice et la sœur de lait, ces deux personnes étant interdites à l’homme. Par la suite, la doctrine a étendu le domaine de la prohibition, et les codes modernes l’ont suivie.
    23A ces empêchements perpétuels s’ajoute al-li‘an, les serments d’anathème, comme nous allons le voir plus loin dans la dissolution du mariage.
    24(ii) Le nombre des empêchements temporaires est lié à la structure du mariage musulman, et surtout à l’institution de la répudiation et de la permission polygamique. A cela s’ajoute la différence de religions des futurs époux. Les empêchements temporaires liés à l’institution de la répudiation, et qui jouent comme un frein à la répudiation, est celui qui interdit à l’homme d’épouser son ancienne épouse qu’il avait répudié trois fois successivement, avant qu’elle n’ait conclu et consommé un mariage avec un autre époux.
    25L’existence d’un lien de mariage liant la femme à un homme, interdit à cette femme de conclure un autre mariage avec un autre homme. Il n’en est pas de même pour l’homme marié. A part la Tunisie qui a prohibé la polygamie, les trois autres pays d’Afrique du Nord ne l’ont pas encore prohibée. Dans ces derniers pays, certaines limitations à la polygamie sont proclamées. Ainsi, il est interdit à l’homme d’épouser en même temps deux sœurs, ou une femme et sa tante. De même, il lui est interdit d’épouser plus de quatre femmes à la fois. Ainsi avoir quatre épouses constitue donc un empêchement temporaire d’en épouser une cinquième. Il faut que le lien du mariage avec l’une des quatre femmes soit dissout pour que le mari puisse prendre une autre épouse. Ces prohibitions n’existent pas en Tunisie où la polygamie a été interdite. Le législateur tunisien a utilisé toute une gamme de sanctions pour rendre la prohibition effective. Une peine d’emprisonnement d’un an et une amende de 240 dinars sont prévues pour celui qui s’étant engagé dans les liens d’un mariage, aurait contracté un autre avant la dissolution du précédent, « et cela même si le nouveau mariage n’a pas été contracté conformément à la loi ». La même peine est prévue pour le conjoint qui sciemment contracte un mariage avec une personne tombant sous les coups des dispositions relatives à l’interdiction de la polygamie.
    26En plus de la sanction pénale, le mariage conclu contrairement à la prohibition de la polygamie est frappé de nullité. Le juge pénal statuera « par un seul et même jugement sur l’infraction et la nullité du mariage ».
    27La Tunisie est le premier pays arabe à complètement interdire la polygamie. Cette prohibition peut trouver des arguments dans les textes du Coran. Le Maroc a codifié, par contre, l’opinion des jurisconsultes traditionnels, hostiles à l’interdiction de la polygamie. Le code marocain du statut personnel, permet simplement à la femme de stipuler dans l’acte de mariage que son mari ne prendra pas d’autre épouse, et qu’elle aura la faculté de demander la dissolution du mariage en cas de cet engagement. De même, le code prévoit que « le mariage de la seconde épouse ne sera conclu qu’après que celle-ci aurait été avisée de ce que son prétendant est déjà marié ». De telles dispositions n’existent encore ni en Algérie ni en Libye.
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    • #3
      28Un autre empêchement temporaire est la différence de religion. A base d’un verset coranique interdisant le mariage entre le musulman et le païen, les jurisconsultes musulmans ont bâti tout un système : il est loisible à l’homme musulman d’épouser une chrétienne ou une juive, mais pas une païenne. Par contre, il est interdit à la femme musulmane d’épouser un non-musulman sans distinction. Cette interdiction existe dans le code marocain. La jurisprudence tunisienne en interprétant le code tunisien du statut personnel, est arrivée à la même conclusion, et a comparé le mariage d’une musulmane à un non-musulman à l’apostasie. En Libye et en Algérie, la règle est appliquée par la jurisprudence. En plus, le ministre algérien de la justice a récemment rappelé par circulaire aux notaires et aux officiers de l’Etat civil, qu’il leur est interdit de célébrer le mariage d’une musulmane avec un non-musulman.
      d) La constitution de la dot
      29Le droit musulman a hérité la pratique hébraïque de mahr, qui est une somme d’argent à payer à l’épouse avant le mariage. Bien que la majorité des rites orthodoxes considère que le paiement du mahr ou Saday est un effet légal du mariage qui se produit même malgré la volonté des deux conjoints; les juristes de l’école malékite considèrent que le paiement du mahr ou de la dot de la femme est une condition de validité du mariage. Les codes du statut personnel en Tunisie et au Maroc exigent expressément la constitution de la dot au profit de l’épouse et disposent : « n’est pas permis l’accord qui la supprimerait ». Cette attitude conforme à la doctrine malékite traditionnelle est en vigueur en Libye et en Algérie. Généralement, les époux doivent déclarer le montant de la dot. Cependant, des questions d’ordre de prestige, et aussi de prix, jouent un rôle très grand sans qu’on puisse connaître le montant exact de la dot. Mais l’impression qui prévoit actuellement, surtout en Algérie et en Libye, est qu’il vaut mieux fixer un maximum pour la dot, pour éviter les abus et les exagérations susceptibles de ruiner les prétendants au mariage. Il est à remarquer que si la doctrine malékite rend le mariage sans dot nul, cette nullité est couverte par la consommation du mariage, et la femme aura le droit à une dot d’équivalence.
      2. — Les conditions de forme
      30Le mariage est un contrat solennel en droit musulman classique. Il l’est encore dans les législations des pays de l’Afrique du Nord qui, sous l’influence de l’Occident ont organisé un système d’état civil, qui nécessite l’inscription aux registres de l’état civil du mariage, de la naissance et des décès.
      31Dans les quatre pays de l’Afrique du Nord, deux témoins doivent assister à l’échange des consentements. A cela s’ajoute la nécessité de la présence d’un représentant de l’Etat, officier de l’état civil, ou un notaire, ou un fonctionnaire nommément désigné à célébrer le mariage. L’usage courant dans les quatre pays est la célébration du mariage par un cadinotaire certifié, qui se charge de la transmission à l’officier de l’état civil d’une copie de l’acte du mariage.
      32Pour contraindre les citoyens à transcrire leur mariage à l’état civil, les législateurs algériens et tunisiens ont décidé qu’il était impossible de se prévaloir du titre d’époux sans production d’une attestation de l’état civil prouvant le mariage. Le législateur marocain permet dans certaines circonstances particulières, de prouver le mariage sans la production d’une telle attestation. La Libye n’a pas encore légiféré dans la matière, et un mariage prouvé uniquement par témoignage produira sans difficulté ses effets devant les tribunaux. Mais avec la proclamation de la loi sur l’état civil en Libye en 1968, et l’organisation en 1970 de la profession de Ma’zoun, délégué du cadi pour la célébration du mariage, la législation libyenne ne tardera pas à introduire la solution égyptienne consistant à déclarer irrecevable toute action relative au mariage, tant qu’un certificat de l’état civil n’est pas produit.
      33Pour terminer avec les conditions de formes, il faut ajouter que la Tunisie a introduit l’examen médical pré-nuptial.
      B. — Effets du mariage
      34Les règles qui déterminent les effets du mariage sont les mêmes dans les quatre pays de l’Afrique du Nord. Les quatre pays ont conservé l’enseignement malékite, la Tunisie se distinguant toujours par une nouveauté en faisant participer la femme aux frais de mariage.
      35Le mariage produit des effets à l’égard des époux et à l’égard des tiers, essentiellement des enfants.
      1. — Effets à l’égard des époux
      36Les effets du mariage à l’égard des époux sont multiples. Les uns sont communs aux deux conjoints, les autres se produisent uniquement à l’égard ou du mari ou de l’épouse.
      a) Les effets communs aux époux
      37La cohabitation, la vocation successorale, la parenté d’alliance, sont les effets que produit le mariage à l’égard de deux conjoints simultanément et réciproquement.
      38(i) La cohabitation. L’effet principal du mariage est de rendre licites les relations sexuelles et la cohabitation dans le domicile conjugal. Cet effet a son importance vu que l’Islam réprime sévèrement les relations sexuelles hors mariage et considère de tels actes comme des péchés majeurs, et c’est dans ce contexte qu’il faut placer le devoir de fidélité, de chacun des époux. Et c’est dans ce contexte qu’il faut apprécier l’importance de l’annulation du mariage. Bien que l’absence de virginité de l’épouse ne soit pas une cause de nullité, elle est souvent l’occasion d’une répudiation irrévocable. De même, l’impuissance du mari n’est pas une cause de nullité, mais la femme peut demander le divorce dans ce cas, et le juge accordera au mari un an pour prouver sa puissance.
      39Le refus injustifié de l’un des époux d’avoir des relations sexuelles avec l’autre époux peut entraîner la dissolution du mariage. La doctrine traditionnelle accorde à la femme le droit de refuser la consommation du mariage jusqu’à ce que la dot soit payée par le mari. Mais s’il y a consommation du mariage, la femme ne peut refuser les relations sexuelles avec son mari, même si la dot en totalité ou en partie n’est pas payée. La femme peut aussi refuser d’avoir des relations sexuelles avec son mari durant sa menstruation et durant les périodes de jeûne du mois de Ramadan.
      40La consommation du mariage joue un rôle extrêmement important dans la détermination des effets du mariage et commande toute la théorie de la nullité du mariage. Le mariage nul, s’il est consommé, produit tout de même certains effets relatifs à la filiation de l’enfant : le droit de la femme à la totalité de la dot, la nécessité d’observer la période de continence, et l’existence d’un empêchement au mariage similaire à l’empêchement au mariage pour cause de parenté par alliance.
      41(ii) La vocation successorale. Le mariage crée une vocation successorale entre le mari et son épouse. Le conjoint survivant aura une part dans la succession du prémourrant en pleine propriété. Le mari survivant aura le quart dans la succession de sa femme si elle a laissé des descendants. Dans le cas où la femme n’a pas de descendant, le mari aura droit à la moitié de la succession. L’épouse a le quart de la succession de son mari s’il ne laisse pas de descendant. Elle aura uniquement le huitième de la succession en présence des descendants du mari. Si la femme n’est pas de la même confession que le mari, il n’y a pas de vocation successorale. Bien qu’on étudie actuellement en Algérie la possibilité de codifier l’enseignement de certains rites chiites qui permettent aux musulmans d’hériter de non-musulmans. De toute façon, le mari peut toujours léguer à sa femme non-musulmane, le tiers de la succession. Il est à remarquer que si la femme est musulmane, le mari ne pourrait faire un pareil testament parce que la règle malékite reçue dans les pays de l’Afrique du Nord interdit de disposer par testament en faveur d’un héritier au dépens des autres.
      42(iii) Parenté d’alliance. Le mariage crée entre chacun des époux et les parents de l’autre un lien de parenté. Ce lien existe uniquement entre le conjoint et la famille de l’autre. L’effet majeur de cette parenté d’alliance est celui relatif aux empêchements du mariage. Le mari ne peut se marier avec les descendantes de son épouse si elle a eu des enfants d’un autre mariage. Mais ici, pour qu’il y ait empêchement, il faut qu’il y ait eu consommation du mariage avec l’ascendante.
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      • #4
        b) Les effets du mariage à l’égard du mari
        43Le mariage musulman pose au mari le devoir d’entretenir son épouse même si elle est fortunée. L’entretien légal consiste dans la fourniture de la nourriture, l’habillement et le logement, et cela dans la mesure de la fortune du mari et des besoins de la femme.
        44Durant le mariage et quand les deux conjoints cohabitent, le mari s’acquitte normalement de son obligation d’entretien à l’égard de son épouse, en fournissant les nécessités de la vie courante. Si l’épouse quitte le domicile conjugal, elle perd son droit à l’entretien tant qu’elle n’a pas de juste motif. Si elle à un juste motif de quitter le domicile conjugal par ce que insalubre par exemple, l’obligation d’entretien qui incombe au mari se convertit en une obligation de payer une somme d’argent. Il est à remarquer aussi que le mari doit toujours payer les aliments à sa femme durant sa grossesse, même si elle abandonne le domicile conjugal sans juste motif. Le délit d’abandon de famille existe dans les législations des quatre pays de l’Afrique du Nord. La législation s’est singularisée en décidant que la femme contribue aux charges du ménage si elle a des biens. Le projet de code de la famille en Algérie prévoit une disposition de même inspiration.
        c) Les effets du mariage à l’égard de l’épouse
        45L’épouse a droit à la protection de son mari. Elle doit respect et déférence à son mari et à ses parents, comme le prescrit le code marocain, la femme doit aussi l’obéissance et l’exécution de ses devoirs conjugaux conformément aux convenances. La femme, par contre, a le droit d’être traitée avec justice et avec égalité, en cas de polygamie. Elle a d’autre part, le droit de rendre visite à ses parents et de les recevoir dans les limites tolérées par les coutumes.
        46Ce qui est plus important de souligner ici c’est l’absence de tout effet restrictif du mariage sur la capacité de la femme musulmane. Dès l’origine de l’Islam et jusqu’à maintenant, l’épouse a l’entière liberté d’administrer et de disposer de ses biens personnels. Le droit musulman, en effet, ne reconnaît pas les régimes matrimoniaux et, par conséquent, le mariage n’a pas d’effet sur les patrimoines des époux ni sur leur capacité juridique, et chacun garde l’autonomie de la personnalité juridique. Les codes tunisiens et marocains et le projet algérien du code de la famille, proclament avec ostentation cette indépendance de la femme en matière patrimoniale. La femme musulmane peut exercer une profession ne mettant pas sa santé ou sa moralité en danger. En cas de contestation entre le mari et son épouse sur cette question, le juge statuera dans l’intérêt de la famille. Le code marocain prend soin, aussi, d’affirmer que la femme mariée conserve son nom de famille et s’en sert pour signer. Le mari ne peut lui imposer son nom ni sa parenté, cette règle s’applique sans texte dans les autres pays de l’Afrique du Nord.
        2. — Effets à l’égard des enfants
        47L’effet principal du mariage vis-à-vis des enfants qui naîtront de ce mariage, est la création d’un lien juridique entre les enfants et leurs parents. Ce lien est la filiation. Il faut observer que trois des pays de l’Afrique du Nord, ne reconnaissent qu’une seule catégorie de filiation, qui est la filiation légitime. La Tunisie reconnaît à côté de la filiation légitime le régime de l’adoption, institution déconseillée par le Coran. Mais les quatre pays ont cela en commun; ils ne reconnaissent ni la filiation naturelle ni la filiation adultérine. L’enfant naturel est rattaché à la famille de sa mère.
        a) Les modes de l’établissement de la filiation légitime
        48Si la maternité est un fait qui s’établit par tous moyens de preuve, la paternité ne peut s’établir que par deux modes ; la présomption similaire à la présomption pater is est… ou la reconnaissance de la paternité.
        49(i) La présomption pater is est… le droit musulman connaît une présomption similaire à la présomption latine attribuant l’enfant né dans le mariage au mari de la mère de l’enfant. Cette présomption est tirée du Hadith proclamant al-walad lil-firach (l’enfant est rattaché au lit du mariage). Pour que cette présomption s’applique, les 4 pays de l’Afrique du Nord s’accordent pour exiger que l’enfant soit né six mois au moins après la conclusion du mariage. La divergence se trouve dans le délai maximum dans lequel l’enfant doit être né après la dissolution du mariage, pour qu’il soit attribué à son père. L’école malékite défendant la fiction de l’enfant endormi soutenait que le délai maximum de la grossesse est de quatre ou de cinq ans. Les législateurs modernes dans les pays arabes ont suivi l’idée soutenue par un juriste malékite isolé, Ibn Abdel Hakem, qui affirmait que ce délai ne peut excéder un an. Les codes marocains et Tunisiens ont adopté ce délai en permettant toujours l’examen médical en cas de doute. Il semble aussi que c’est une attitude vers laquelle s’orientent les législateurs libyens et algériens.
        50Une fois établie, en vertu de la présomption précitée, la filiation légitime ne peut être combattue que par l’exercice du serment d’anathème, al-li‘an, qui aura pour résultat le désaveu de l’enfant et la dissolution du mariage, et l’interdiction à perpétuité de se remarier. La prononciation d’anathème doit suivre immédiatement le moment où le mari aurait appris l’adultère ou la grossesse de sa femme, ou le moment qui suit la naissance de l’enfant.
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          51(ii) La reconnaissance de l’enfant : il est loisible à un homme de reconnaître un autre enfant en tant que sien, sans que cela puisse créer ou suggérer un lien entre le reconnaissant et la mère de l’enfant.
          52Il y a des conditions très précises pour la validité de la reconnaissance. Il faut que l’auteur de l’aveu de la paternité soit doué de discernement, que l’enfant reconnu soit de filiation inconnue, que le rapport d’âge entre les deux rende vraisemblable la filiation reconnue. Il faut surtout que cet aveu de paternité ne soulève aucune suspicion d’adultère, c’est-à-dire, il faut que la reconnaissance de la filiation ne divulgue pas des rapports sexuels illicites entre le reconnaissant et la mère de l’enfant Si de tels rapports sont apparus, la reconnaissance ne produira aucun effet. Le code marocain exige en plus que l’aveu de paternité ne soit pas démenti par la raison ou les faits.
          b) Les effets de la filiation
          53La filiation crée entre les parents, père et mère et leurs enfants des effets importants. D’une part, les parents sont obligés d’élever, d’éduquer, de prendre soin de leurs enfants et de les représenter légalement. D’autre part, il y a des droits et des obligations réciproques; la vocation successorale et l’obligation alimentaire.
          54(i) Les obligations des parents : la garde des enfants. Le père et la mère ont le devoir de prendre soin de leurs enfants, de gérer leur patrimoine et de les représenter légalement. Le droit musulman connaît à cet égard trois notions qu’il faut se garder de confondre. D’abord la notion de Hadhana, souvent traduite par le terme « garde ». Ensuite il y a la notion de la tutelle matrimoniale qui traduit le terme al-walaya ‘ala al-nafs, et enfin il y a la notion de la tutelle patrimoniale, al-walaya ‘ala al-mal.
          55La garde concerne le soin et les conforts matériels et physiques nécessaires au bien-être de l’enfant.
          56La tutelle matrimoniale se rapproche de la notion de la puissance paternelle et concerne le choix de la religion de l’enfant, son éducation et le soin nécessaire à son épanouissement intellectuel. Inclue aussi dans la notion de la tutelle matrimoniale, la fonction de consentir au mariage de ses enfants.

          57Par contre, la tutelle patrimoniale concerne la gestion et l’administration du patrimoine de l’enfant. Il faut ici remarquer que la tutelle prend fin automatiquement par l’arrivée à l’âge de la majorité fixé à 20 ans en Tunisie, et à 21 ans dans les autres pays.
          58Du vivant des parents et pendant leur mariage, la garde des enfants est exercée conjointement par les parents. Le père est, en plus, le tuteur matrimonial et le tuteur patrimonial de l’enfant. Le père est l’administrateur légal du patrimoine de l’enfant, à moins qu’il n’encourt une déchéance quelconque.
          59A la mort du père, la mère devient gardienne des enfants. Elle peut devenir la tutrice patrimoniale si le père l’a désignée avant sa mort comme tutrice testamentaire, ou si le juge la nomme tutrice dative. Selon la loi algérienne du 11 juillet 1957, la mère devient automatiquement tutrice légale si le père, avant sa mort, n’a pas choisi de tuteur testamentaire.
          60Quant à la tutelle matrimoniale, elle est attribuée au parent mâle, le plus proche par le sang selon une hiérarchie déterminée par le degré de parenté : le fils, le père, le frère, l’oncle paternel…
          61Si le mariage est dissout par le divorce, alors le père garde ses fonctions de tuteur matrimonial et de tuteur patrimonial. Quant à la garde, le droit musulman cultive une présomption en faveur de la mère, supposant que la mère est plus apte à donner aux enfants les soins nécessaires à leur bien-être. Il y a aussi toute une hiérarchie à respecter, et ici, les femmes apparentées de la mère ont la priorité. La mère ou la parente maternelle qui se chargera de la garde des enfants conservera sa fonction, tant qu’elle n’est pas déclarée déchue, jusqu’à ce que le garçon ait atteint l’âge de la puberté, et jusqu’au mariage de la fille. Seul le législateur tunisien a posé, dans une réforme récente, une règle générale selon laquelle le juge déterminera la personne qui aura la charge de la garde, en fonction de l’intérêt de l’enfant et sans limitation de durée.
          62Il est à remarquer que durant le mariage, la mère n’a pas le droit à une rémunération particulière pour la garde de ses enfants, ni pour leur allaitement. Mais une fois le mariage dissout et la période de la viduité passée, elle a le droit de réclamer une rémunération pour la hadhana, la garde. Elle a, d’autre part, droit à une autre rémunération si elle allaite l’enfant. En plus, les frais de l’entretien de l’enfant doivent lui être remboursés.
          63Les rémunérations de la hadhana, de l’allaitement, et de l’entretien des enfants, incombent au père de l’enfant. Ces sommes payées par le père jouent un rôle important puisque la mère divorcée n’a pas, en général, droit à une pension. L’obligation d’entretien du mari à son égard cesse avec la fin du délai de viduité. Ainsi, la femme divorcée ayant des enfants dont la garde lui a été confiée pourrait, par la rémunération de la garde, assurer une part de sa subsistance. Cependant, si la mère choisit de résider loin du domicile du père de l’enfant de telle sorte que le père ou tuteur ne peut exercer ses attributions de contrôle et s’enquérir facilement de l’état de l’enfant, la gardienne perd son droit à la garde. L’école malékite détermine la distance possible, de 126 km approximativement. Certaines codifications, comme le code marocain, n’ont pas pris cette distance à la lettre et tout en laissant persister le principe, le juge a un pouvoir d’appréciation.
          64(ii) Les droits et les obligations réciproques : l’obligation alimentaire. La filiation crée entre le père et la mère et leurs enfants une obligation alimentaire réciproque. Cette obligation, il faut le rappeler, n’existe pas entre les frères et sœurs dans le rite malékite dominant dans les quatre pays d’Afrique du Nord.
          65En ce qui concerne l’obligation alimentaire des parents, c’est en général le père qui doit subvenir aux besoins de ses enfants en bas âge ou dans l’impuissance de gagner leur vie. Cette obligation incombe à la mère si elle est fortunée lorsque le père est dans l’impossibilité de pourvoir à l’entretien de ses enfants.
          66Quant à l’obligation des enfants à l’égard de leurs parents, elle pèse sur tous les enfants de parents dans le besoin. En règle générale, la dette alimentaire se répartit, en cas de pluralité d’enfants, entre les enfants en fonction de leurs facultés respectives, et non en proportion de leurs droits successoraux.
          67— La vocation successorale. La vocation successorale entre le père et la mère et leurs enfants a été réglementée d’une manière détaillée et précise par le Coran. Les codifications modernes n’ont fait que reproduire cette réglementation coranique. Sans entrer dans de la dévolution successorale, voici quelques hypothèses :
          68— Si le défunt laisse une fille, elle aura la moitié de la succession; s’il laisse deux ou plusieurs filles, elles auront ensemble les deux tiers de la succession. Si le défunt laisse avec la fille ou les filles, un garçon, alors la succession sera partagée entre le garçon et les filles selon une règle traditionnelle conservée même par le code tunisien, et selon laquelle le garçon aura la part de deux filles. Ainsi, dans l’hypothèse d’une fille avec un garçon, la fille aura le tiers et le garçon deux tiers; s’il y a deux filles et un garçon, ce dernier aura la moitié et les filles auront chacune le quart.
          69Quant à la part des parents dans la succession de leurs enfants décédés, il faut distinguer entre la mère et le père.
          70La mère a le sixième de la succession si son enfant décédé laisse lui-même des enfants ou s’il avait au moins deux frères ou soeurs. Si l’enfant décédé ne laisse pas de postérité et n’a ni frère ni sœur, la mère a droit au tiers de la succession.
          71Dans le cas où l’enfant décédé laisse son conjoint ainsi que son père et sa mère, la mère ne prend que le tiers de ce qui reste après prélèvement de la part du conjoint.
          72La part du père de l’enfant décédé diffère selon que l’enfant décédé a laissé des enfants ou non. Si l’enfant décédé a laissé des enfants de l’un ou de l’autre sexe, le père a droit au sixième de la succession. Si l’enfant décédé ne laisse que des filles, le père vient à la succession en deux qualités. Il aura le sixième ainsi que ce qui reste après le prélèvement de la part de la fille. Si l’enfant décédé n’a pas laissé d’autres héritiers que le père, ce dernier héritera le tout en tant qu’héritier mâle le plus proche, ’asab.
          C. — La dissolution du mariage
          73Le mariage est dissout par deux événements majeurs : la mort de l’un des conjoints et le divorce.
          1. — La mort de l’un des conjoints
          74Le décès de l’un des conjoints dissout le lien de mariage et libère le conjoint survivant, surtout la femme, de ce lien de telle sorte qu’il peut contracter un nouveau mariage. Mais cette libération est conditionnée pour la femme par l’observation du délai de viduité. Ce délai de viduité consécutif à la mort du mari est invariable dans les quatre systèmes de l’Afrique du Nord. Il est de quatre mois et dix jours si la femme n’est pas enceinte. S’il y a grossesse, le délai de viduité prend fin avec l’accouchement. Il est à remarquer que la veuve dont le mariage n’a pas été consommé doit aussi observer le délai de viduité de quatre mois et dix jours.
          75Si la mort rompt le lien de mariage, elle est aussi l’occasion de la production de l’un des effets du mariage, à savoir la vocation successorale. Nous avons vu que le mari aura la moitié ou le quart de la succession de sa femme décédée avant lui, et la femme n’aura que le quart ou le huitième dans la succession de son mari décédé, et cela dans les deux cas, selon l’existence des enfants de l’un ou de l’autre époux. Le jugement déclarant la mort de l’absent produira les mêmes effets que la mort naturelle.
          2. — Le divorce
          76Le deuxième événement qui rompt le lien du mariage est le divorce, les règles relatives à la dissolution du mariage ne sont pas les mêmes dans les quatre pays de l’Afrique du Nord. On peut les diviser en deux groupes. Les systèmes algérien et tunisien ne connaissent que le divorce judiciaire. Le Maroc et la Libye, bien qu’ayant permis aux femmes de demander le divorce devant les tribunaux, maintiennent la répudiation par la volonté unilatérale du mari. Les quatre systèmes reconnaissent une autre forme traditionnelle du divorce par consentement mutuel dans lequel la femme avance une somme d’argent ou une valeur quelconque pour que son mari accepte de la répudier irrévocablement.
          77Nous décrirons ci-dessous brièvement chacune des formes du divorce, ensuite nous montrerons leurs effets.
          a) Les formes du divorce
          78Il y a trois variétés : la répudiation, le divorce judiciaire et le divorce par compensation.
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          • #6
            79(i) La répudiation, talaq, est la rupture du lien matrimonial par la simple manifestation de la volonté du mari. Cette forme est la plus courante dans le système marocain et libyen. Le mari peut prononcer lui-même le serment de divorce ou peut déléguer un autre à le faire. Il peut même le déléguer à la femme au moment de la conclusion du mariage. Dans cette hypothèse, le mari ou la femme peut prononcer le divorce par l’extériorisation de sa volonté de rompre le lien du mariage. Le droit du mari de répudier sa femme est encore absolu en Libye. Le récent texte nommé « loi relative à la protection de certains droits de la femme » n’a pas limité le droit du mari au divorce, se contentant de réglementer le droit de la femme à demander le divorce judiciaire.
            80Le code marocain du statut personnel a apporté certaines restrictions inspirées en partie du droit égyptien pour éviter l’usage abusif de la répudiation. Ainsi, le code marocain exige que la répudiation soit enregistrée par deux témoins honorables. Le code dispose aussi que lorsque le mari est en complet état d’ivresse, sous l’emprise d’une contrainte ou d’une colère telle qu’il perd le contrôle de lui-même, la répudiation est sans effet. De même, la répudiation multiple ne compte que comme répudiation simple et la répudiation conditionnée à l’accomplissement d’un acte ou son omission n’aura pas lieu. Enfin, « lorsque la répudiation intervient au cours d’une période menstruelle, le juge oblige le mari à reprendre la vie commune ». En dehors de ces restrictions, le droit du mari à répudier sa femme est total et la femme n’a, en général, aucun droit aux dommages et intérêts.
            81(ii) Le divorce judiciaire. La Tunisie et l’Algérie ne reconnaissent plus la répudiation et dans ces deux pays le mariage ne peut être dissout, en dehors du décès de l’un des époux, que par une décision de la justice. Cela n’empêche que les tribunaux ont tendance à prononcer le divorce, tatliq, à la seule demande du mari. Mais ici, le mari serait sujet à la condamnation de payer des dommages et intérêts. Les causes du divorce sont assez extensives et vont de l’adultère à la condamnation à une peine dégradante, aux injures graves et au mauvais traitement rendant impossible le maintien de la vie conjugale.
            82En Tunisie et en Algérie un jugement déclarant le divorce est nécessaire aussi en cas de consentement mutuel des époux à dissoudre le mariage.
            83La Libye et le Maroc reconnaissent le divorce judiciaire, mais dans ces pays c’est généralement la femme qui en use puisque le mari peut user de son droit de répudiation. La femme peut surtout demander le divorce non seulement en cas d’injures graves mais pour défaut d’entretien ou délaissements, pour l’existence d’un vice rédhibitoire ou pour l’absence du mari même s’il laisse des subsides.
            84Dans les quatre pays, la procédure de divorce doit comporter une phase préliminaire consistant en une tentative sérieuse de conciliation entre les deux époux.
            85(iii) Le divorce par compensation. Il s’agit ici de rachat, par la femme qui veut se libérer, du lien du mariage. Elle accepte de payer une somme d’argent ou une valeur économique quelconque pour que son mari accepte de la répudier. Si le mari et la femme se mettent d’accord le procédé s’apparente à un divorce par consentement mutuel qui produit son effet irrévocable de dissoudre le mariage. Dans les pays où le divorce n’est que judiciaire, les parties saisissent le tribunal compétent pour prononcer le divorce qui sera irrévocable.
            86Si la femme offre la compensation pour que le mari la répudie et si celui-ci refuse, normalement la femme n’a d’autres possibilités que de chercher un autre moyen de saisir le tribunal. Le législateur libyen, dans un texte récent, permet à la femme qui veut obtenir un divorce par compensation d’un mari récalcitrant qui refuse abusivement son offre, de saisir le tribunal qui se chargera, après l’échec de toute tentative de conciliation, de mettre un terme au mariage en prononçant le divorce et en fixant le montant de la compensation que la femme doit payer à son mari.
            ]
            b) Les effets du divorce
            87Le divorce rompt le lien du mariage. En Algérie et en Tunisie cet effet ne se produit qu’après que le jugement prononçant le divorce soit devenu définitif. En Libye et au Maroc, la dissolution du mariage se produit généralement après la fin de la période de viduité si la répudiation est révocable. La femme doit, en effet, observer une période de viduité dont la durée dépend de l’état physiologique de la femme. Si la femme est enceinte, le délai de viduité prend fin avec l’accouchement. Si la femme n’a pas atteint l’âge de la ménopause et n’est pas enceinte, le délai de viduité pour elle, au Maroc et en Libye, est d’être soumise à une ’idda, délai de viduité de trois périodes menstruelles. Si la femme est parvenue à l’âge de la ménopause, le délai de viduité est de trois mois. Le législateur tunisien a fixé le délai de viduité dans tous les cas, sauf en cas de grossesse, à trois mois. La jurisprudence de la Cour Suprême algérienne semble s’orienter vers cette solution sans texte.
            88Il est à remarquer que la femme répudiée ou divorcée avant la consommation du mariage n’est pas astreinte à observer le délai de viduité. Elle a le droit à la motié de la dot. Le divorce avant la consommation du mariage est irrévocable.
            89La femme doit rester dans la maison conjugale pendant le délai de viduité pour pouvoir obtenir les aliments et les entretiens pendant cette période. A la fin de ce délai, elle n’a le droit à des indemnités que si le tribunal prononçant le divorce lui a accordé des dommages et intérêts et cela est uniquement possible en Tunisie et en Algérie quand le mari demande le divorce par sa volonté unilatérale.
            90Il faut observer que si le mari ou la femme meurt pendant ce délai de viduité, le survivant ne perd pas son droit dans l’héritage de l’autre.
            91En mettant fin au mariage, le divorce ou la répudiation soulève plusieurs problèmes relatifs à la garde des enfants et à la propriété des meubles se trouvant dans le domicile conjugal. En ce qui concerne la garde des enfants, nous avons déjà vu qu’il y a une présomption en faveur de la mère pour l’obtention de la garde des enfants. Le fait que la femme divorcée conserve la garde des enfants a, en plus de l’aspect affectif, une importance économique puisque le père des enfants doit payer une rémunération à la gardienne. Cette rémunération est indispensable puisque la femme divorcée n’a pas, en règle générale, des indemnités à réclamer en son nom du fait même du divorce.
            92En ce qui concerne les contestations entre les époux divorcés au sujet de la propriété des biens se trouvant au domicile conjugal, les règles applicables dans les quatre pays de l’Afrique du Nord se résument de la manière suivante : à défaut de preuve, la femme aura le droit de réclamer, avec succès, les biens appartenant d’ordinaire aux femmes. Le mari aura droit aux biens appartenant habituellement aux hommes. Quant aux biens qui appartiennent indifféremment aux hommes et aux femmes, ils seront partagés entre le mari et la femme. Dans toutes ces hypothèses, chacun des époux, doit prêter le serment que de tels biens lui appartenaient.
            ***
            93Après ce survol du droit de la famille dans les pays de l’Afrique du Nord, nous pouvons conclure que la similitude des solutions et de la technique est manifeste dans la plupart des cas. Le fond du droit musulman dans sa version malékite reste encore en vigueur et un minimum d’acculturation juridique est observé.
            94Les règles régissant le statut personnel en Algérie, Libye, Maroc et Tunisie ont subi une certaine transformation après leur intégration dans la sphère d’influence de l’Europe. En imposant un âge minimum au mariage, les quatre pays ont balayé l’institution de contrainte matrimoniale qui permettait au père de marier son enfant en bas âge. L’organisation de l’état civil est de nature à permettre à l’Etat d’exercer un certain contrôle en exigeant un minimum de solennité au mariage, dépassant la simple exigence classique de la présence de deux témoins. Il est remarquable aussi que les quatre pays sont intervenus pour réglementer l’accès de la femme à la justice pour obtenir le divorce. Mais le chemin est encore long à parcourir pour abolir la suprématie de l’homme et deux des quatre pays étudiés consacrent encore le droit au mari de répudier par volonté unilatérale sa femme.
            95La Tunisie fait cavalier seul dans le domaine de l’interdiction de la polygamie et par l’introduction de l’adoption, mais son système est aussi traditionnel que ceux de ses voisins et la femme ne peut encore avoir que la moitié de ce que son frère héritera, comme le prescrit le texte coranique.
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            • #7
              par Borham Atallah.
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              BIBLIOGRAPHIE

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