Mohamed Benchicou au Huffington Post : "Tiguentourine a servi à asseoir le pouvoir de Bouteflika"
Journaliste et écrivain, Mohamed Benchicou a publié au mois d’Avril dernier une nouvelle fiction. La mission. Une intrigue atypique. A travers ce nouveau roman l’auteur a voulu marquer de son empreinte les débats qui ont précédé le scrutin Présidentiel du 17 avril prochain. Dans cet entretien au Huffington Post Algérie, il explique son choix et ses motivations choix et souligne à l’occasion l’Algérie était la «patrie de l'imaginaire et de l'inimaginable».
Huffpost Algérie: "La Mission" est une intrigue "intriguante"? Le lecteur cherche dans sa lecture la part de la vérité et de la fiction. Est-ce une fiction du journaliste Benchicou ou une pure fiction du romancier Benchicou ?
Mohamed Benchicou: Mais qui aurait l'idée de chercher la part de la vérité et de la fiction à Donaldville chez Donald Duck, à Hyboria théâtre des aventures de Conan le Barbare ou dans la République de Guaracha, pays voisin de la Palomie, lieux des grandes aventures de Spirou et Fantasio ? Nous sommes chez nous, en Algérie, patrie de l'imaginaire et de l'inimaginable, le plus fantastique territoire qu'aucun romancier n'avait osé imaginer, qui dépasse en fantasmagorie Tlön, la terre imaginaire de Jorge Luis Borgès, Lilliput de Jonathan Swift ou même Océania, Eurasia et Estasia, les trois pays imaginés par George Orwell dans 1984 ! L'Algérie, vous connaissez ? Le seul pays de l'histoire qui soit gouverné à partir d'un lit d'hopital, dirigé par un homme handicapé, régnant en fauteuil roulant, inapte à faire sa campagne électorale mais réélu quand même à plus de 80 pour cent des voix ! C'est fascinant ! Il était pourtant en piteux état : quasi aphasie, paralysie de toute la partie gauche du corps, absence de lucidité…Le bon sens aurait voulu qu'il cède sa place. Mais, comme le fait remarquer le vieux Raïs, le bon sens est catégoriquement prohibé ici où, comme chacun le sait, et à l’image de l'île de Barrataria, ce fief imaginaire de Sancho Pança qui s’est toujours rêvé roi et qui s’auto-proclama gouverneur de l'Ile, on n’a que faire du bon sens. Qu'adviendrait-il, sinon, de la République ? Le professeur Thompson réalisera, bien tard il est vrai, que ce pays "prometteur, dynamique et à forte croissance", dont la Grande-Bretagne comptait faire le"nouvel ami", n’est qu’une chimère de diplomate, une lubie de politicien. Algérie, capitale Alger, Alger, patrie de la pantomime où l'on fait mine de jouer un rôle dans la désignation des dirigeants qui, en retour, simulent de gouverner pour le bien de tous.
D'ailleurs, dans cette partie du monde sans pareil, la question de savoir si le président peut encore gouverner ne concerne pas la population. "Le gouvernement est chez vous une nécessité, mais, il faut l’admettre, mon ami, chez nous, dans nos heureuses contrées, il pourrait être un luxe onéreux et compliqué dont, Dieu merci, nous sommes épargnés. N’étant consultés ni sur l’état de santé du chef de l’État, ni sur sa désignation ni encore moins sur sa reconduction, nous sommes dispensés des tracasseries démocratiques occidentales et, en retour, le président, élu sans notre concours, règne sans rien nous devoir. "
Non, il serait laborieux de chercher la part de la vérité et celle de la fiction dans ce pays bizarre dont, à la différence de Lilliput, l'Eldorado ou Donaldville, on a toutes les preuves qu'il existe. Je n'ai pas eu besoin de grossir les traits ou d'en exagérer la parodie. La mission s'est voulu le miroir de l'absurde, ce pouvoir absolu, pittoresque dans son archaïsme et maudit dans sa malfaisance, qui prend chez nous les dimensions les plus démesurées. Aux dernières nouvelles, le président malade, aphone, n'apparaît plus en public. Curieusement, c'est ainsi qu'il devint le président-Dieu, l’aphonie et l’invisibilité étant les prestiges et les symboles des divinités, attributs détenus jusque-là par l'ancien Dieu, le Dieu d'Alger, dont personne n’a jamais vu le visage ni entendu la voix. Dans la mythologie gréco-romaine les dieux pressentis par les poètes sont muets et, comme les dieux en Égypte, ne se donnent pas en spectacle aux paparazzis. Le soin de figurer les images et les statues des dieux en Égypte n'était pas laissé aux artistes ordinaires. Cette prestigieuse besogne était dévolue aux prêtres qui en donnaient les dessins, et, comme chacun le sait, les prêtres chez nous ne se dévoilent pas, sous peine de prison. C'est pourquoi, chez nous, plus qu’ailleurs, Dieu se prête aux fantasmes, chacun pouvait imaginer Reb Dzayer, le Dieu d’Alger, comme bon lui semble, chacun étant désormais invité à rêver d'un président-Dieu comme il l'entend et c’est tant mieux pour la mythomanie nationale.
Voilà pourquoi "La Mission" s'est perdue entre la fiction et la réalité dans cette contrée fantasmagorique qu'on aurait pu dénommer Pyjamaland, où la raison a cédé le pas à l'irrationnel, où tout finit par se concrétiser, pas seulement les fictions du journaliste Benchicou, mais même la pure fiction, j'allais dire les délires, du romancier Benchicou !
Journaliste et écrivain, Mohamed Benchicou a publié au mois d’Avril dernier une nouvelle fiction. La mission. Une intrigue atypique. A travers ce nouveau roman l’auteur a voulu marquer de son empreinte les débats qui ont précédé le scrutin Présidentiel du 17 avril prochain. Dans cet entretien au Huffington Post Algérie, il explique son choix et ses motivations choix et souligne à l’occasion l’Algérie était la «patrie de l'imaginaire et de l'inimaginable».
Huffpost Algérie: "La Mission" est une intrigue "intriguante"? Le lecteur cherche dans sa lecture la part de la vérité et de la fiction. Est-ce une fiction du journaliste Benchicou ou une pure fiction du romancier Benchicou ?
Mohamed Benchicou: Mais qui aurait l'idée de chercher la part de la vérité et de la fiction à Donaldville chez Donald Duck, à Hyboria théâtre des aventures de Conan le Barbare ou dans la République de Guaracha, pays voisin de la Palomie, lieux des grandes aventures de Spirou et Fantasio ? Nous sommes chez nous, en Algérie, patrie de l'imaginaire et de l'inimaginable, le plus fantastique territoire qu'aucun romancier n'avait osé imaginer, qui dépasse en fantasmagorie Tlön, la terre imaginaire de Jorge Luis Borgès, Lilliput de Jonathan Swift ou même Océania, Eurasia et Estasia, les trois pays imaginés par George Orwell dans 1984 ! L'Algérie, vous connaissez ? Le seul pays de l'histoire qui soit gouverné à partir d'un lit d'hopital, dirigé par un homme handicapé, régnant en fauteuil roulant, inapte à faire sa campagne électorale mais réélu quand même à plus de 80 pour cent des voix ! C'est fascinant ! Il était pourtant en piteux état : quasi aphasie, paralysie de toute la partie gauche du corps, absence de lucidité…Le bon sens aurait voulu qu'il cède sa place. Mais, comme le fait remarquer le vieux Raïs, le bon sens est catégoriquement prohibé ici où, comme chacun le sait, et à l’image de l'île de Barrataria, ce fief imaginaire de Sancho Pança qui s’est toujours rêvé roi et qui s’auto-proclama gouverneur de l'Ile, on n’a que faire du bon sens. Qu'adviendrait-il, sinon, de la République ? Le professeur Thompson réalisera, bien tard il est vrai, que ce pays "prometteur, dynamique et à forte croissance", dont la Grande-Bretagne comptait faire le"nouvel ami", n’est qu’une chimère de diplomate, une lubie de politicien. Algérie, capitale Alger, Alger, patrie de la pantomime où l'on fait mine de jouer un rôle dans la désignation des dirigeants qui, en retour, simulent de gouverner pour le bien de tous.
D'ailleurs, dans cette partie du monde sans pareil, la question de savoir si le président peut encore gouverner ne concerne pas la population. "Le gouvernement est chez vous une nécessité, mais, il faut l’admettre, mon ami, chez nous, dans nos heureuses contrées, il pourrait être un luxe onéreux et compliqué dont, Dieu merci, nous sommes épargnés. N’étant consultés ni sur l’état de santé du chef de l’État, ni sur sa désignation ni encore moins sur sa reconduction, nous sommes dispensés des tracasseries démocratiques occidentales et, en retour, le président, élu sans notre concours, règne sans rien nous devoir. "
Non, il serait laborieux de chercher la part de la vérité et celle de la fiction dans ce pays bizarre dont, à la différence de Lilliput, l'Eldorado ou Donaldville, on a toutes les preuves qu'il existe. Je n'ai pas eu besoin de grossir les traits ou d'en exagérer la parodie. La mission s'est voulu le miroir de l'absurde, ce pouvoir absolu, pittoresque dans son archaïsme et maudit dans sa malfaisance, qui prend chez nous les dimensions les plus démesurées. Aux dernières nouvelles, le président malade, aphone, n'apparaît plus en public. Curieusement, c'est ainsi qu'il devint le président-Dieu, l’aphonie et l’invisibilité étant les prestiges et les symboles des divinités, attributs détenus jusque-là par l'ancien Dieu, le Dieu d'Alger, dont personne n’a jamais vu le visage ni entendu la voix. Dans la mythologie gréco-romaine les dieux pressentis par les poètes sont muets et, comme les dieux en Égypte, ne se donnent pas en spectacle aux paparazzis. Le soin de figurer les images et les statues des dieux en Égypte n'était pas laissé aux artistes ordinaires. Cette prestigieuse besogne était dévolue aux prêtres qui en donnaient les dessins, et, comme chacun le sait, les prêtres chez nous ne se dévoilent pas, sous peine de prison. C'est pourquoi, chez nous, plus qu’ailleurs, Dieu se prête aux fantasmes, chacun pouvait imaginer Reb Dzayer, le Dieu d’Alger, comme bon lui semble, chacun étant désormais invité à rêver d'un président-Dieu comme il l'entend et c’est tant mieux pour la mythomanie nationale.
Voilà pourquoi "La Mission" s'est perdue entre la fiction et la réalité dans cette contrée fantasmagorique qu'on aurait pu dénommer Pyjamaland, où la raison a cédé le pas à l'irrationnel, où tout finit par se concrétiser, pas seulement les fictions du journaliste Benchicou, mais même la pure fiction, j'allais dire les délires, du romancier Benchicou !
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