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Fermetures récurrentes des routes à Béjaïa : Un fléau dévastateur

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  • Fermetures récurrentes des routes à Béjaïa : Un fléau dévastateur

    Décidément, le phénomène de fermeture de routes ne cesse de prendre de l’ampleur ces dernières années dans la wilaya de Béjaïa. En effet, cette action radicale à laquelle recourent souvent les citoyens en détresse devient quasi quotidienne face à la dégradation du cadre de vie de la population de la région, notamment dans les zones rurales.



    Le recours à cette action de blocage de la voie publique, bien qu’elle soit pénalisante à plus d’un titre, devient parfois nécessaire aux yeux des citoyens qui se trouvent livrés à eux-mêmes. Nécessaire, parce qu’elle constitue la seule voie salutaire, du moins le seul moyen qui leur permet de faire entendre leurs doléances. Mais pourquoi alors cette pratique est-elle devenue si récurrente à Béjaïa ?
    Selon certains observateurs de la scène politique régionale, il y a deux principales raisons qui poussent les citoyens de la région à recourir constamment à la fermeture de routes. Et dans les deux cas, ce sont les autorités locales qui sont pointées du doigt. La première raison invoquée réside dans la mauvaise gestion des affaires publiques par les responsables concernés. En plus, de l’incompétence et de l’incurie dont font preuve certains responsables, explique-t-on, ces derniers affichent souvent une indifférence totale à l’égard des préoccupations des administrés. Secundo, l’avènement de cette nouvelle forme de protestation en Kabylie n’a pu être maitrisé dès le début par les pouvoirs publics qui se sont distingués par un étonnant laisser-aller doublé d’une impunité déconcertante. Une telle attitude, estime-t-on, n’a fait qu’encourager davantage les couches populaires désabusées à recourir à cette action radicale afin d’arracher leurs droits. Ainsi, ce nouveau procédé qui s’est imposé comme ultime recours, voire une pratique « obligatoire », n’a pas manqué de faire des émules à travers d’autres régions.

    Les RN-26, RN-9, RN-12 et RN-75, cibles privilégiées des protestataires
    À Béjaïa, où ce phénomène de fermeture de routes fait rage, ce sont les routes nationales les plus fréquentées, telles que les RN-26, RN-9, RN-12 et RN-75, qui sont les cibles privilégiées des citoyens protestataires. Au-delà de la légitimité des revendications socioéconomiques mises en avant par des populations complètement désabusées, le blocage récurrent de ces routes nationales est synonyme de fermeture de toutes les portes d’accès à cette région à forte activité économique. Une telle situation est perçue par les gens avertis comme un véritable hara-kiri, dès lors qu’elle induit la paralysie totale de l’activité économique de la wilaya. Le secteur économique de cette région, qui possède, en plus d’un port très performant et d’un aéroport international, un pôle industriel spécialisé en agroalimentaire, est touché de plein fouet par ce phénomène de coupure de routes. Une réalité que nul ne peut, d’ailleurs, réfuter aujourd’hui. Le wali de Béjaïa, Hamou Ahmed Touhami, est le premier à se plaindre à travers les ondes de la radio Soummam, à chaque fois que la population locale procède à la fermeture d’une route nationale quelconque. Appuyé par le président de l’APW qui, lui aussi, condamne ce genre de procédés, tout en reconnaissant la légitimité des revendications portées par ses concitoyens, le wali Touhami intervient souvent pour appeler les notables et les élus locaux à jouer leur rôle d’intermédiaires en vue d’apaiser les tensions. Ce qui intrigue le plus, c’est cette attitude des pouvoirs publics qui assistent impuissants à cette forme de protestation aux conséquences désastreuses. « On ne peut pas faire appel à la force publique, au risque de provoquer une situation d’embrasement dans la région », laisse entendre, en substance, un responsable en charge des affaires publiques à Béjaïa. C’est dire que les pouvoirs publics, au lieu de faire valoir l’autorité de l’Etat pour instaurer l’ordre public, préfèrent adopter une politique de l’impunité afin de s’assurer la paix sociale.

    Un manque à gagner de 200 millions de centimes par heure à l’EPB
    À noter qu’une simple manifestation de rue peut provoquer la paralysie de toute une région. À titre d’exemple, le port de Béjaïa accuse chaque heure un manque à gagner de pas moins de 200 millions de centimes. C’est ce qu’a affirmé, récemment, le P-DG de l’Entreprise portuaire de Béjaïa (EPB), M. Djelloul Achour. Selon lui, sur 1500 camions chargés habituellement, moins de la moitié y est traitée, à cause de cette situation de blocage de routes.
    Pour sa part, le directeur de la communication et de l’exportation de Général Emballage, une entreprise privée spécialisée dans la fabrication et la transformation du carton ondulé, et dont le siège social est situé dans la zone d’activités (ZAC) d’Akbou, nous a fait savoir que la société qu’il représente subit sérieusement les conséquences de ce phénomène de fermeture de routes. Évoquant le cas de blocage ces derniers jours de la RN-26 par les habitants du village Colonel Amirouche (ex-Riquet), relevant de la commune d’Akbou, Mohamed Bessa affirme que « notre entreprise accuse un manque à gagner immense et certains de nos clients commencent déjà à se plaindre de la rupture de stock. Car, nous n’avons pas pu leur livrer la marchandise commandée ». M. Bessa estime, en outre, que « nos camionneurs sont contraints de faire de longs et dangereux détours pour acheminer nos produits, du fait que l’axe principal reliant Akbou à d’autres régions du pays se trouve constamment fermé à la circulation. C’est anormal ! »
    Par ailleurs, il faut préciser qu’il n’y a pas que les entreprises publiques et les opérateurs économiques de la région qui sont pénalisés par ces coupures de routes. En fait, il y a aussi les simples citoyens, notamment les étudiants, les travailleurs, les routiers, etc., qui font certainement les frais de cette situation.

    Paralysie et conséquences

    Le diktat de ces coupeurs de routes cause tellement de désagréments aux citoyens qu’on a vu des véhicules transportant des malades, parfois en urgence, inviter à rebrousser chemin. Une telle attitude ne peut pas bien sûr laisser indifférents les parents de ces malades pénalisés. La réaction de ces derniers, quand bien même légitime, se termine souvent par une violente dispute.
    « À chaque fermeture de route, on assiste à ce genre de scènes de violence. Face à l’absence des services de sécurité sur ces lieux de la protestation, généralement ce sont des personnes sages qui s’entremettent pour calmer les esprits et éviter l’irréparable », déplore un transporteur de voyageurs qui assure la desserte Tazmalt – Béjaïa.

    Notre interlocuteur qui dispose d’un minibus, acquis dans le cadre du dispositif de l’ANSEJ, se plaint de la fermeture récurrente de la RN-26, notamment ces derniers jours, au niveau du village Amirouche. « Je suis souvent confronté à ce problème de coupure de routes. Cela fait cinq jours que je suis contraint au chômage. Comment dois-je faire pour nourrir mes enfants et rembourser mon crédit bancaire ? Si cette situation perdure encore davantage, je me verrais dans l’obligation de vendre mon minibus », s’est-il indigné. Même appréhension chez un autre père de famille qui exerce l’activité de chauffeur-livreur de produits laitiers, assurant la liaison Akbou – Oran.
    Devant l’ampleur de ce phénomène, les représentants de la société civile ne sont pas restés en marge d’une telle situation. Plusieurs associations et autres organisations se sont déjà exprimées sur ce sujet qui tient à cœur plus d’un. La Chambre de commerce et d’industrie (CCI) Soummam avait réagi, à travers une déclaration, interpellant les pouvoirs publics et les citoyens sur les conséquences « graves » qu’engendre le recours récurrent à la fermeture des routes, tout en les invitant à « plus de sagesse, de patience et d’organisation ».
    De son côté, l’Assemblée populaire de wilaya de Béjaïa (APW) a eu à débattre, plusieurs fois, de cette question qui semble inextricable, eu égard à l’incapacité des autorités locales à trouver une solution idoine à ce phénomène qui ronge l’économie nationale et prend en otage l’avenir de toute une région.



    Auteur: CHAFIK AÏT M’BAREK
    reporters.dz
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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