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Déchéance de nationalité: être djihadiste n'est pas un motif suffisant

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  • Déchéance de nationalité: être djihadiste n'est pas un motif suffisant

    Par Jérémie Pham-Lê,
    Serpent de mer de la politique, la déchéance de la nationalité française revient sur le devant de la scène à la faveur de la tuerie de Bruxelles. Difficile pourtant de l'appliquer aux djihadistes binationaux tant les obstacles et critères sont nombreux.

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    Déchéance de nationalité: être djihadiste n'est pas un motif suffisant
    Se rendre en Syrie, comme les sept djihadistes présumés arrêtés le 13 mai près de Strasbourg, n'est pas un motif suffisant pour perdre la nationalité française.

    Pour Manuel Valls, "il n'y a pas de tabou". Invité de BFMTV ce mardi matin, le Premier ministre a assuré que la déchéance de nationalité était bien l'une des armes envisagées par le gouvernement pour lutter contre la montée du djihadisme et son corollaire, le terrorisme. Comme Mehdi Nemmouche, l'auteur présumé de la tuerie de Bruxelles, ils sont plus de 800 Français à s'être rendus en Syrie pour mener la guerre sainte.

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    Retirer la nationalité française aux djihadistes n'est cependant pas chose aisée. Selon l'article 25 du Code civil, cette sanction ne peut concerner que ceux qui possèdent la double nationalité. Dans le cas contraire, la personne devient apatride, ce qui est contraire à l'article 15 de la Convention européenne des Droits de l'homme. Ensuite, il faut qu'elle ait acquis la nationalité française et ce, depuis moins de dix ans. Autrement dit, il ne faut pas qu'elle soit française de sang ou de sol. Les personnes nées en France de parents français ne rentrent donc pas dans les critères. Ce qui semble être le cas de Mehdi Nemmouche, né en 1985 à Roubaix (Nord).

    Des motifs aux contours flous

    Passés ces obstacles, les méfaits du djihadiste doivent correspondre à ceux listés par le Code civil. Il y a bien sûr les crimes et les délits constituant un acte de terrorisme. Les actes barbares au Musée juif de Bruxelles rentrent dedans. Mais le "simple" fait de se rendre en Syrie pour y faire le djihad est-il un motif suffisant? Sur ce point, le Code civil est plus flou.

    Trois motifs pourraient y ressembler: les crimes et délits constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, les actes incompatibles avec la qualité de Français au profit d'un Etat étranger et ceux préjudiciables aux intérêts de la France. "L'article est suffisamment vague et vaste pour faire rentrer tout ce que l'on veut", analyse Edouard Bera, avocat spécialiste du droit des étrangers. "Ce sont des notions par ailleurs fluctuantes. Les intérêts fondamentaux de la Nation ne sont pas les mêmes en période de guerre ou en période de prospérité par exemple."

    Selon Le Figaro, plusieurs députés UMP vont déposer une proposition de loi visant à étendre l'article du Code civil à toute personne engagée "dans des mouvements djihadistes". "Quand un Français veut tuer d'autres Français, ça porte un nom: un traître", justifie le député Lionnel Luca au journal. En 2013, le député UMP Philippe Meunier avait déjà déposé une telle proposition de loi. Mais le texte n'a jamais été inscrit à l'ordre du jour et trône toujours sur le bureau de l'Assemblée nationale.

    "Une mesure plus idéologique"

    La droite avait déjà tenté de bouger le texte
    Lors de la précédente mandature, l'article avait déjà provoqué débats et crispations. En 2010, Nicolas Sarkozy avait tenté de l'étendre aux meurtriers de policiers. Son ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, avait lui proposé de l'étendre à ceux qui pratiquent la polygamie. Aucune des deux mesures n'avaient été finalement adoptées.

    Autre problème: toute déchéance de nationalité doit être validée par le Conseil d'Etat, garant des libertés individuelles. Mais même après validation de la juridiction, un dossier peut être défendable devant la Cour européenne des droits de l'homme. Car l'article 15 de la déclaration des droits de l'homme stipule bien que "tout individu a droit à une nationalité" et "nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité". Or, "dans la hiérarchie des normes, la déclaration des droits de l'homme est supérieure à la loi française", explique Edouard Bera. "La déchéance est une mesure plus idéologique. C'est l'Etat qui se protège de ses citoyens et non l'Etat qui protège ses citoyens. Il y a une dimension régalienne."

    Pour l'avocat, dans les rares fois où cette peine est prononcée, le client ne fait pas de recours. Il se souvient notamment d'un terroriste, "irrécupérable et imperméable à tout discours rationnel." Joints par L'Express, ni le ministère de la Justice ni le ministère de l'Intérieur n'ont encore répondu à notre demande de chiffrage du nombre de déchéances.


    En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/actualite/soc...r5bfWiTofoY.99
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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