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Si aucune réforme, l’Algérie pourrait être un facteur de déstabilisation de la région sahélo-saharienne

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  • Si aucune réforme, l’Algérie pourrait être un facteur de déstabilisation de la région sahélo-saharienne

    M. Laurent Fabius se rend en visite officielle en Algérie du 8 au 9 juin 2014. Il rencontrera le Président Bouteflika et le Premier ministre Abdelmalek Sellal, entre autres responsables algériens. Cette visite s’inscrit d’abord dans le cadre du renforcement de la coopération économique. Les échanges bilatéraux sont loin des immenses potentialités que recèlent les deux pays, la France perdant de plus en plus de parts de marché en Algérie, notamment au profit de la Chine. En 2013, la Chine, avec 6,82 mds USD, a devancé pour la première fois la France qui avait occupé la tête du classement des principaux fournisseurs du pays pendant des années. Elle est arrivée en deuxième position, avec (6,25 mds), suivie de l’Italie (5,64 mds), de l’Espagne (5,07 mds) et de l’Allemagne (2,86 mds). Elle reste, en revanche, le premier investisseur hors hydrocarbures.

    Dans la pratique des affaires n’existe pas les sentiments, ce qui attire tant la Chine que la France ce sont les 194 milliards de dollars des réserves de change algériennes, sans compter les 173 tonnes d’or. Irons-nous vers des co-partenariats et des co-localisations profitables aux deux pays ? Tel est le problème central. Face aux nouvelles mutations mondiales, la ressource humaine est stratégique à tout développement. L’Algérie, confrontée à la transition vers une économie productive intimement liée à la transition énergétique, a besoin surtout d’une accumulation technologique et managériale.



    La cruciale question sécuritaire


    Cette visite fait suite à celle effectuée à Alger par le ministre de la Défense français courant mai 2014. Elle permettra d’aborder le problème de la sécurité dans la région sahélo-saharienne. Les tensions actuelles au niveau dans cette région, notamment en Libye et au Mali, risquent de déstabiliser tant l’Europe, via la France, que le reste du monde. Cela nécessite des stratégies d’adaptation qui interpellent les deux pays et, plus globalement, le Maghreb, les USA et l’Europe.

    La plupart des dirigeants du Maghreb, de l’Afrique, de l’Europe et des Etats Unis d’Amérique s’accordent sur la nécessité de coopérer d’avantage face à la menace de l’insécurité et du crime organisé. Ils mettent l’accent sur la nécessité d’une coopération étroite des pays du Maghreb et du Sahel et sur l’obligation de mettre en application une stratégie interrégionale qui associe l’ensemble des pays de la zone en plus des partenaires euro-américains car la région est devenue un espace ouvert pour divers mouvements terroristes et autres, qui prospèrent encore via le trafic d'armes ou de la drogue, et menacent la sécurité régionale et par ricochet l’Europe et les USA. Pour le directeur du Centre américain du contre-terrorisme, Matthew Olsen, dont les services dépendent du directeur du Renseignement national des Etats-Unis (DNI), si l’intervention militaire conduite par la France au Mali a permis de chasser AQMI et ses alliés des villes qu’ils contrôlaient auparavant, ces groupes arrivent à trouver refuge dans les zones les moins peuplées du nord du Mali et continuent à commettre des attaques de représailles.

    Il est nécessaire de lever les contraintes qui, du fait de la corruptibilité générale des institutions, pèsent lourdement sur les systèmes chargés de l'application des lois ; la justice pénale en général a, en effet, des difficultés à s’adapter aux nouveaux défis posés par la sophistication des réseaux du crime organisé. La collaboration inter-juridictionnelle est ralentie par l’hétérogénéité des systèmes juridiques notamment en Afrique du Nord et en Afrique noire. De plus, la porosité des frontières, aussi bien que la coordination entre un grand nombre d’agences chargées de la sécurité aux frontières, posent de grands problèmes. A terme, la stratégie vise à attirer graduellement les utilisateurs du système informel vers le réseau formel et ainsi isoler les éléments criminels pour mieux les cibler tout en diminuant les dommages collatéraux pour les utilisateurs légitimes.

    Des solutions profondes sont nécessaires



    Cependant, la résolution de ce mal, le terrorisme transfrontalier, implique de s’attaquer à l’essence, par le co-développement, et non aux apparences. Une étude du Forum économique mondial (WEF) du 14 novembre 2013, révèle que fortement secoués depuis deux ans par des crises politiques à répétition, les pays d'Afrique du Nord sont à l'aube d'une crise majeure et sont eux aussi une source d'inquiétude. Selon cette étude, ils traversent une crise morale du fait du manque de valeurs au niveau du leadership et du fossé entre les riches et les pauvres, de plus en plus grand, et de l’écart de revenus qui renforce les inégalités en matière d’’éducation, de santé et de mobilité sociale. L’étude met en garde contre les conséquences pernicieuses du chômage : « Une génération qui commence sa carrière dans un désespoir complet sera plus enclin aux politiques populistes alors que l’ampleur de la récession mondiale et le rythme du rétablissement ont laissé des cicatrices profondes, spécialement parmi la jeunesse. » Elle considère que « la fracture la plus visible est celle entre ceux qui veulent qu’un Islam politique joue un rôle public et ceux qui veulent une séparation de la religion et du gouvernement ». La laïcité, que certains veulent assimiler faussement à « athéisme», reste un sujet qui divise les sociétés arabes et nord-africaines, malgré les déconvenues politiques qu'ont connues les islamistes dans les pays ayant vécu ce que l’on appelle improprement le « Printemps arabe ».

    En résumé l’Algérie reste un acteur incontournable pour la stabilité de la région, sous réserve qu’elle approfondisse l’Etat de droit et la démocratisation de la société afin de réaliser un développement durable. Autrement, elle risque d’être elle-même un facteur de déstabilisation de la région.



    (*) Professeur des Universités, expert international en management stratégique.

    MaghrebEmergent.
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