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Les cheikhs du Golfe s'offrent la Sorbonne

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  • Les cheikhs du Golfe s'offrent la Sorbonne

    Bonjour, Abu dhabi décide de jouer massivement la carte de la culture, du tourisme et de l'art de vivre, après le projet du Louvre, qui comportera 5 musées en un, c'est à dire le Louvre, le Guggenheim, un musée maritime, un musée d'arts islamiques et un «centre des arts vivants», cet état se paye la Sorbonne, comme Dubaï ou le Qatar, Abou Dhabi veut attirer touristes, investisseurs et sièges d'entreprises.
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    Dans la contre-allée bordée de palmiers qui longe la bruyante avenue Sheikh Maktoum bin Rashid d'Abu Dhabi, le ballet des BMW et des Mercedes est intense. À chaque arrivée, les chauffeurs, en sueur, se précipitent pour ouvrir les portières. Vêtues de leurs plus belles abayas noires, Amina, Shahad et les autres passagères glissent à pas feutrés sur le tapis rouge qui couvre le trottoir. Le 8 octobre, l'université Paris-Sorbonne-Abu Dhabi faisait sa rentrée. « C'est notre premier jour de classe », chuchote Fatma, très fière d'être l'une des premières étudiantes inscrites.


    C'est là, à huit heures d'avion du Quartier latin, dans ce petit morceau de , au bord du golfe Persique, que la Sorbonne a ouvert un campus à l'étranger sous son label. Du jamais vu en sept cent cinquante ans ! C'est même la première fois que l'État français exporte une université. Au Moyen-Orient, ce rôle a toujours été assuré par l'Église catholique, notamment par les jésuites de la prestigieuse école Saint-Joseph, à Beyrouth. Venu de Paris, le président de la Sorbonne, Jean-Robert Pitte, traverse le hall climatisé. « Hier soir, j'ai longuement discuté avec le cheikh lors de l'iftar, le repas qui marque chaque soir la fin du jeûne du Ramadan », confie-t-il avant d'attraper le micro. Soutenu par ce prince moderniste, à la tête de l'un des pays les plus riches de la planète, le professeur de géographie ose un discours plutôt direct pour la région. « Le monde entier nous observe car vous écrivez une page de l'histoire de la relation entre le monde islamique et occidental, lance-t-il devant les étudiants. Nos professeurs vous donneront l'esprit critique. Vous exercerez votre liberté de penser. Contrairement à ce que croit George Bush, nous allons prouver qu'il n'y a pas de bonne et de mauvaise civilisation, que l'Islam n'est pas une machine de guerre. »


    Les applaudissements à peine interrompus, une étudiante demande la date des élections de délégués. « On se croirait à la Sorbonne pendant la crise du CPE », s'amuse Jean-Robert Pitte. « Pourra-t-on venir étudier en Europe ? », interroge Jinane. « Bien sûr, votre diplôme vous donnera aussi accès aux autres universités européennes », répond le président, sous le regard ravi d'Alanoud al-Sabah.


    Comme la majorité des autres étudiants, cette princesse koweïtienne a appris le français pendant ses vacances à Divonne-les-Bains (Ain), où vit un grand nombre de familles aisées du Golfe. Elle raconte : « J'aurais dû faire mes études aux États-Unis. Mais le 11 septembre 2001, puis les attentats de Londres ont tout bouleversé. Nos parents nous ont tous fait rentrer. Alors, quand j'ai vu une publicité à la télévision pour la Sorbonne d'Abu Dhabi, j'ai sauté sur l'occasion. C'est le même enseignement qu'à Paris, mais dans une ambiance familiale puisqu'au lieu d'être 26 000 étudiants, nous serons seulement 170 . »


    Pour 6 315 euros le semestre (162 euros l'année en France), l'élite du Golfe n'a pas hésité. C'est le cas de Nasser al-Zaabi, puissant homme d'affaires d'Abu Dhabi, venu accompagner sa fille Fatma, 18 ans. « Je suis tellement reconnaissant envers notre cheikh et votre gouvernement. Nous nous développons très vite ajoute-t-il, en pointant du doigt les chantiers qui s'étendent à perte de vue dans le désert. Construire des gratte-ciel est facile, faire évoluer les mentalités beaucoup moins. C'est à cela que la Sorbonne va nous aider.»


    À l'écouter, les cheikhs ne se sont pas offert la Sorbonne comme ils se payent une franchise Mc Donald's. Profitant du déclin de Beyrouth et de l'avenir incertain du Caire, Abu Dhabi, ville provinciale du Golfe, veut basculer dans le XXIe siècle en devenant le nouveau pôle régional de la francophonie. Peu importe si les matières enseignées par la Sorbonne ne donnent pas de travail. L'or noir rapporte des milliards de dollars, et le cheikh peut se permettre de miser sur la culture, les musées et l'éducation. Jaloux de Dubai, qui s'est offert une notoriété mondiale avec ses pistes de ski en plein désert, il s'est associé à des noms célèbres comme le Louvre et la Sorbonne. Il a aussi demandé au lycée Louis-le-Grand, à Normale Sup et à Centrale de l'aider à monter une filière d'ingénieurs. Pour attirer les professeurs du Quartier latin, il a mis les moyens. Par l'intermédiaire de Pascal Renouard de Vallière, un lobbyiste français proche des familles royales du Golfe, son ambassadeur à Paris a rencontré pour la première fois Jean-Robert Pitte lors d'une conférence de Suzanne Moubarak, l'épouse du président égyptien. C'était à la Sorbonne, en juin 2004. Six mois plus tard, Jean-Robert Pitte était invité à Abu Dhabi.


    En septembre 2005, ce dernier présente le projet à son conseil d'administration : « Il a fallu argumenter. Les uns étaient réticents à l'idée d'aller dans un pays musulman, d'autres pensaient que cela allait nous coûter une fortune alors qu'à Paris, nous n'avons pas de gommes ! Quand j'ai dit que le cheikh payait tout, y compris le salaire des remplaçants des professeurs expatriés et que les cours seraient laïques et identiques à ceux de Paris, le oui l'a emporté. »


    Gilles de Robien, le ministre de l'Éducation, a ensuite accéléré le montage juridique de l'opération. Avec la promesse d'être mieux payés qu'en France - le montant exact des salaires est secret - sept professeurs ont accepté de s'expatrier. Quant aux grands pontes, comme Pierre Brunel, spécialiste d'Arthur Rimbaud, ils feront le voyage pour quelques jours.


    D'ici à 2007-2008, ces volontaires seront moins dépaysés : une réplique de la Sorbonne, avec une interprétation locale du dôme de la chapelle, sortira du sable, près de l'aéroport. Coût de l'opération : 25 millions d'euros. Jean-Robert Pitte sait qu'à la Sorbonne certains espèrent que son pari échoue. Les obstacles sont nombreux. Habitués à vivre séparément, les élèves vont expérimenter la mixité. Les filles sont motivées, car elles veulent s'émanciper, les garçons moins. Les enseignants vont aussi devoir faire un effort. À la sortie du premier cours de philosophie, certains étaient déjà découragés par leur professeur : il avait présenté son cours en français sans s'arrêter. « Le plus difficile sera de durer, reconnaît Jean-Robert Pitte. Abu Dhabi est un laboratoire pour que la Sorbonne s'implante par la suite en Grèce, en Corée, au Japon, en Chine... »


    Dehors, la nuit tombe. Le chant des muezzins s'échappe des mosquées. Jean-Robert Pitte regagne la France. Il reviendra ici pour l'inauguration officielle, le 18 novembre.

    LÉNA LUTAUD (AVEC CAROLINE BEYER).
    25 octobre 2006 Le Figaro
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin

  • #2
    à 6000 euros le semestre,l'accée à cette université
    n'est pas donné à tout le monde.disons,que cette
    soi-disante sorbonne est réservée à une certaine
    classe de petro-dollars.

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