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Caravane médicale dans les régions isolées de l'Algérie

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  • Caravane médicale dans les régions isolées de l'Algérie

    Docteurs en campagne

    Nous sommes en 1990. Jeune chirurgien urologue à l’hôpital de Bougie, le docteur Bouchefa parcourt la campagne d’Imaranen avec un confrère et deux infirmiers. L’intention n’est pas de faire de la randonnée, mais plutôt de soigner des malades trop éloignés des centres médicaux. «Nous avons fait trois villages en une semaine», se rappelle-t-il.


    Ce sont là ses premiers pas dans le bénévolat, ce sacerdoce qui deviendra l’axe majeur de sa vie sociale et professionnelle. Vingt-quatre ans après cette virée en campagne, l’association qu’il dirige depuis sa création en 2008 organise sa septième caravane médicale. Vingt-quatre ans, c’est également l’âge moyen des dizaines d’étudiants en médecine qui participent à cette caravane. L’association Les Amis de la Faculté de Médecine de Béjaïa est née avec le lancement de la faculté de médecine de la ville millénaire, dont le nom renvoie tant aux lumières de ses sciences qu’à celle de ses bougies.

    Aujourd’hui, l’association s’est lancée dans un défi qui relève d’une vraie gageure : transformer un lycée de campagne en hôpital d’un jour. Ausculter, soigner, soulager par le geste et la parole pour redonner espoir à des centaines de malades qui accourent de ces villages où, souvent, on ne compte qu’un dispensaire décoré de toiles d’araignée. Pour ce faire, il faut une volonté qui soulève les montagnes, une organisation d’armée en campagne, ainsi qu’une logistique pour un bataillon en marche. «Il faut deux mois à temps plein pour organiser une caravane médicale», souligne Tirache Mohand Cherif, secrétaire général de l’association.

    Des premiers contacts au jour J, il faut déployer une formidable débauche d’énergie afin que nul grain de sable ne vienne enrayer les mécanismes de la machine. «Une caravane médicale, c’est une sortie humanitaire et pédagogique», souligne le Dr Bouchefa.
    Les malades sont soignés et les étudiants en médecine se frottent à la réalité du terrain, sous l’œil vigilant de leurs aînés.

    Joindre l’humanitaire au pédagogique

    Le principe cardinal de la caravane médicale est de couvrir des régions enclavées, isolées et sous-médicalisées. L’humanitaire d’abord, le pédagogique ensuite. Dans une société qui s’individualise de plus en plus, qui tourne le dos à ses valeurs ancestrales d’entraide et de solidarité, soigner gratuitement des malades, leur offrir conseils, orientation et médicaments est un geste noble. Plus encore, à l’heure où la médecine est devenue l’apanage des charlatans et des commerçants sans scrupules. «Certains médecins ne considèrent plus leurs malades comme des patients mais comme des clients, à tel point qu’un néologisme a fait son apparition : la patientèle», souligne avec un trait d’humour Nadia, infirmière.

    Vendredi 20 juin. Une équipe d’une trentaine de membres de l’association débarque à Ighil Ali, la commune la plus au sud de la wilaya de Béjaïa. Sa mission est de transformer le lycée dont elle a pris possession en hôpital, où une trentaine de médecins, toutes spécialités confondues, se chargent d’ausculter des centaines de malades. Alors, il faut transformer les classes en cabinets de consultation, installer l’infirmerie, le centre de dépistage du cancer du col de l’utérus, prévoir des stands pour les associations qui accompagnent les activités périphériques, etc.

    Immense, la tâche occupera l’équipe jusqu’à la fin de cette journée très chaude. Le soir, aux alentours de 18 heures, quand l’équipe reprend la route vers Béjaïa, l’établissement est prêt à changer de vocation pour se muer en hôptal.
    Il faut dire que plusieurs réunions préparatoires avaient eu lieu avant ce jour. Des prises de contact avec les autorités locales et la société civile pour coordonner les efforts. Il faut que chacun y mette du sien pour que la caravane soit une totale réussite.

    Se sacrifier pour aider les autres

    Samedi 21 juin. Solstice d’été. Une caravane de véhicules et de bus s’ébranle vers 6 heures du matin du centre-ville de Béjaïa vers Ighil Ali. Il faut près de trois heures de route pour rallier ce village distant de 90 kilomètres du chef-lieu de wilaya. Plus de 200 personnes participent à cette septième édition. Tout le corps médical et paramédical est représenté.

    Présents en grand nombre, les étudiants en médecine apportent fraîcheur, enthousiasme et dynamisme. Tels des soldats en campagne, ils portent des casquettes et des t-shirts floqués du sigle de l’association ou des sponsors. En dépit de la concurrence rude de la Coupe du monde de football et l’appel irrésistible de la plage, ils sont nombreux à sacrifier leur week-end pour aider.

    Dr Bouchefa met tout de même un bémol à cet enthousiasme débordant. Certains médecins sont inscrits aux abonnés absents malgré leur engagement. Il se dit très peiné par ce manquement à la rigueur. Qu’à cela ne tienne, des confrères sont venus d’Alger pour participer. Kahina, elle, est venue d’Oran. Spécialisée en chirurgie infantile, elle a tenu à être présente dans son village pour aider les siens.

    La caravane arrive vers 9 heures du matin comme prévu. Petit mot de bienvenue du maire et du proviseur dans la cours du lycée et dernières recommandations du docteur Bouchefa à ses troupes sur le pied de guerre. Faire vite. Tout le monde doit prendre sa place et s’acquitter de sa tâche : les malades sont déjà là depuis les premières heures de la matinée.

    En peu de temps, le lycée est devenu une ruche bourdonnante. Il y règne une atmosphère particulière, à mi-chemin entre l’ambiance d’hôpital, le centre de vote et la joyeuse kermesse. Le Dr Boucheffa rassure : «Ne vous inquiétez pas, c’est toujours comme ça au départ. Après quelques moments de flottement, tout se met en place.»

    Des médicaments gratuits pour tous

    Effectivement, la machine se met très vite à tourner. Les malades passent d’abord par le centre de tri, où des étudiants en médecine en fin de cycle les interrogent avant de les orienter vers une salle où officie un médecin généraliste ou un spécialiste. Munis d’une feuille d’orientation, ils sont dirigés par des membres d’autres associations vers la classe où ils doivent être auscultés. Des chaises et des bancs sont disposés devant les salles de classe, où les malades peuvent patienter avant la consultation. Une fois celle-ci achevée, ils passent à la pharmacie récupérer les médicaments qui leur ont été prescrits. Trois pharmaciens gèrent la petite officine improvisée. Tout le stock de médicaments a été offert à titre gracieux par des pharmaciens.

    Les visites s’effectuent à un rythme soutenu. Un stand est prévu pour remettre des cadeaux offerts par des sponsors aux enfants présents. Il faut dire que l’association fonctionne avec l’aide d’une subvention de l’APW et des aides de ses principaux sponsors qui sont le Port de Béjaïa, Candia, Cevital et Simafe. Un clown se charge de l’animation. Des associations de malades exposent dans le hall du lycée. Pour faire connaître les complications du diabète, le calvaire des parents dont les enfants sont atteints de la redoutable maladie de la Spina Bifida, les droits des consommateurs ou sensibiliser à la protection de l’environnement.

    A une heure de l’après-midi, les médecins s’accordent une petite pause pour une petite collation. Parallèlement, la salle de cinéma du lycée ne chôme pas. Elle accueille un cycle de conférences avec des thèmes aussi diversifiés que la médecine traditionnelle évoquée longuement par l’écrivain et journaliste, Rachid Oulebsir. Le restaurant est dévolu au dépistage du diabète et du HTA. En fin de journée, on fait le bilan de l’opération : sur les 356 personnes dépistées, 13 entre hommes et femmes étaient des diabétiques qui s’ignoraient. Des chiffres effarants quand on calque ces chiffres sur le niveau de la population locale. Cela voudrait dire que 3 à 4% de celle-ci est touchée par le diabète sans même le savoir. Aussi, 78 lecteurs de glycémie ont été offerts pour permettre aux habitants de surveiller régulièrement leur taux de sucre dans le sang.

    17h, fin des consultations. Tout le monde est réuni dans la cour pour un exercice de simulation d’un tremblement de terre et une leçon de secourisme. Vient ensuite l’heure de faire le bilan général avant de plier bagages. Un peu plus de 700 consultations ont été effectuées, score plutôt honnête, même si le chiffre de 1000 a été atteint ailleurs. La satisfaction réside surtout dans le travail accompli. Pauses souvenirs et photos de groupe dans la cour.

    A 18 heures, tout le monde est invité au restaurant pour le premier repas de la journée. Après l’effort, le réconfort. Les esprits sont déjà tournés vers la prochaine caravane.Médecins, infirmiers et étudiants auront donné un peu d’espoir aux gens et sa noblesse à leur profession.

  • #2
    Dr Mokhtar Bouchefa : Le moteur

    Il est le président, le fondateur et le principal moteur de l’Association des amis de la faculté de médecine de Béjaïa (Aafmb). Chirurgien urologue de profession libérale, le docteur Bouchefa donne beaucoup de son temps et de sa personne. «Notre objectif est de donner», dit-il. «Mais ne donne pas qui veut. Pour cela, il faut avoir du cœur.» Une profession de foi qui résume toute la philosophie de cet homme de 54 ans, qui non seulement se dévoue pour les autres mais essaie d’inculquer cet esprit aux jeunes médecins dont il accompagne le parcours. Aujourd’hui que l’image du médecin est écornée par des pratiques commerciales indignes de cette noble profession, des médecins de Béjaïa ont réhabilité le serment d’Hippocrate cette année. Ceux de la première promotion de la faculté de médecine de Béjaïa viennent de faire publiquement le fameux serment. Si le docteur Bouchefa avait un souhait à exprimer, ce serait de voir ce genre de caravane et d’initiative se généraliser aussi bien à Béjaïa que partout ailleurs dans le pays.


    Sihem et Daniza, étudiantes en 6e année médecine

    lles s’appellent Bekka Siham et Ali Amar Daniza, même âge, 24 ans, même promo. Ces jolies demoiselles sont en 6e année à la fac de médecine de Béjaïa et elles participent à leur deuxième caravane. Si les motivations humanitaires viennent en premier dans la décision de Siham d’intégrer l’association, il y aussi une motivation sociale : «En tant que personne, cela me permet de mieux m’intégrer dans le groupe et de m’inscrire dans une dynamique», dit-elle. Son amie Daniza partage les points de vue et les mêmes motivations. Une expérience telle que cette caravane médicale est quelque chose de «magnifique», estiment-elles. Toutes les deux font partie de ces dizaines d’étudiants bénévoles qui apprennent le noble métier de médecin et celui, plus noble encore, de l’humanitaire.

    Kouceila et Salem. Tout nouveaux médecins

    Kouceila Soualah et Ourari Salem, qui totalisent à eux deux un demi-siècle d’âge, viennent d’être fraîchement assermentés. Moment émouvant pour ces sortants de la première promotion de médecine de la faculté de Béjaïa. Ils sont en quelque sorte le fruit vivant de ce long combat pour avoir une faculté qui forme des médecins à Béjaïa, ville de science et de savoir depuis mille ans. Ils ont été formés depuis six ans ; aujourd’hui, pour la première fois, ils font leurs premières consultations. Leur travail au sein de l’association ? «On conseille, on dépiste, on oriente, on aide de notre mieux», dit Kouceila qui est adhérent à l’association depuis sa création. «Le fait d’être avec nos aînés nous permet d’apprendre. C’est une formation continue. On nous a formés, maintenant on les aide», ajoute Salem.


    Nadia Kichou. 25 ans. Infirmière

    Si l’association était une ruche, Nadia Kichou serait l’une des principales abeilles. Mince et élancée, cette jeune infirmière qui travaille au CHU Khellil Amrane de Béjaïa est membre actif de l’association depuis deux ans. Toute la journée du samedi, elle a fait d’incessants allers-retours entre tous les services sans montrer le moindre signe de fatigue. Ayant pour crédo de toujours se dévouer au service des malades, Nadia fait partie de ces petites mains au grand cœur qui apportent leur part d’eau pour que le moulin de la solidarité ne s’arrête jamais de tourner.

    Tirache Mohand Cherif. La cheville ouvrière

    A 64 ans, ce membre fondateur de l’AAFMB est un ingénieur des télécoms à la retraite. Plutôt que d’aller à la pêche, M. Tirache se consacre aux autres. Véritable cheville ouvrière de l’association dont il coordonne toutes les actions, il est le numéro deux dans la hiérarchie en tant que secrétaire général de l’association. «Ce que je fais, je le fais de bon cœur et cela m’occupe», dit cet homme posé, ordonné et réfléchi. «Ce qui est important pour nous, c’est que si nous arrivons à sauver une seule vie, nous considérons que notre objectif est atteint, que la caravane est une réussite. Si nous arrivons à révéler un seul diabétique qui s’ignore, j’estime que notre mission est réussie», dit-il, l’esprit déjà accaparé par la prochaine caravane médicale.

    Djamel Alilat- El Watan

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    • #3
      Ben au sud; ils les agressent, ils leur volent leur véhicules et ils les laissent errer seuls perdus dans le désert .. resultat les medecins ne sortent plus !

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