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Tous les jours, 24 enfants sont abandonnés, sans compter les cadavres laissés dans une poubelle

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  • Tous les jours, 24 enfants sont abandonnés, sans compter les cadavres laissés dans une poubelle

    Deuxième volet de notre plongée dans un Maroc bien loin des plages, du soleil et des palmiers.



    "Les mères célibataires sont traitées comme des moins que rien au Maroc et c’est encore pire pour leurs enfants". Ce tabou vaut à des dizaines de milliers d’enfants d’être dans la rue. Ou du moins selon les estimations, car il n’existe aucun chiffre officiel. Il est vrai qu’estimer au plus près le nombre d’enfants qui vivent dans les rues est pratiquement une mission impossible. "Celui qui peut annoncer des chiffres avec certitude est probablement un menteur" dit Khadija Calicouba du Centre de Sauvegarde de l'Enfance d’Agadir. "Chaque jour des enfants atterrissent dans la rue. Qui en tient encore le compte ?"
    Selon le secrétariat marocain pour les enfants, la femme et la famille, il est difficile de connaître le nombre exact des enfants qui vivent dans les rues, car ceux-ci changent souvent de ville et même de région. Ce qui rend pratiquement impossible toute étude officielle. Il y a bien quelques tentatives d’estimation, mais les résultats sont fort différents d’une étude à l’autre. Par exemple un rapport de 2011 de Child Rights Governance Programme qui est lié à l’organisation internationale Save the Children annonce que les enfants sans foyer sont en hausse exponentielle. Entre 2002 et 2004, le nombre d’enfants qui vivraient dans des centres d’accueil serait passé de 29.304 à 46.500. Les journalistes marocains citent eux régulièrement le chiffre de 30.000. L’Unicef évalue qu'il y a entre 10.000 et 30.000 enfants qui vivent dans la rue. En 2008, 6480 enfants auraient été abandonnés. Et si l'on élargit encore la définition d’abandon, l’Unicef estime que près de 650.000 enfants vivraient sans aucune protection parentale.

    « Les divorces jettent les enfants dans la rue »


    Si l’estimation du nombre reste floue, les causes semblent elles mieux définies. «La pauvreté joue un rôle, mais il semble surtout que les familles sont de moins en moins unies. Les parents sont alcooliques ou divorcés et se désintéressent de leurs enfants » précise Calicouba. « Certains enfants optent eux-mêmes pour la rue, car leur foyer est devenu un enfer. »
    Lahoucine Talibi, responsable de village SOS enfants à Agadir, avance l’argument du divorce pour expliquer le phénomène. « Le Maroc est-il une exception ? Il existe aussi des enfants dans les rues dans d’autres pays d’Europe. Cela a pratiquement toujours à voir avec des difficultés sociales. Pour eux, il n’y a rien d’extraordinaire à ce qu’un enfant soit abandonné en rue lorsque les parents divorcent. »
    "Chaque jour 24 enfants sont abandonnés, les cadavres dans les poubelles non compris"

    Au Maroc, les mères célibataires sont fortement stigmatisées et sont traitées comme des moins que rien. Pire, elles ne sont même pas reconnues par la loi marocaine. Selon l’article 490 de la constitution, les femmes qui ont des relations sexuelles hors mariage risquent des peines de prison qui vont d’un mois à un an. Les enfants qui ne sont pas reconnus par le père tombent hors du cadre de la loi. Ils sont tatoués par le sceau de la honte dès leur naissance.
    Benzekri: "Les mères célibataires sont considérées par les lois marocaines comme des prostituées. Elles ne peuvent pas compter sur une aide quelconque de la société. Elles n’ont droit ni à des allocations ni à l’accès aux soins de santé. Beaucoup de femmes qui tombent enceintes, vont se cacher avant que cela ne soit trop visible, abandonnent leur enfant une fois né et retrouvent leur place dans la société".
    Aïcha Chenna, présidente de l’Association Solidarité Féminine (ASF) témoigne dans le journal marocain la Vie Éco sur ces enfants abandonnés: "Chaque jour, on retrouve 24 enfants abandonnés et l’on ne compte pas les cadavres laissés dans une poubelle"
    Se marier avec son violeur


    Pour éviter l’opprobre, les jeunes filles sont souvent les victimes d’un mariage précoce. Jusqu’il y a peu un violeur pouvait échapper aux poursuites en se mariant avec sa victime. Cette loi n’a été changée que fin 2013 et on ne voit que peu d’évolution dans les faits.
    "La famille va toujours pousser la jeune fille au mariage pour éviter le déshonneur. Et puis plus personne ne voudrait d’une femme qui n’est plus vierge. Même les juges ne tiennent pas compte de la loi. Ils disent souvent aux jeunes filles que comme il est trop tard, il n’y a plus de raison de punir l’homme. Que le problème se résoudrait de lui-même si le violeur épousait la victime"
    Même si l’âge minimal pour se marier est passé de 15 à 18 ans, les juges autorisent encore des mariages où les jeunes filles sont âgées d’à peine 13 ans. Le nombre de mariages de très jeunes filles est par ailleurs en hausse puisque selon les chiffres de Save the Children entre 2009 et 2010, on est passé de 3000 à 33.253 cas.

    "Les enfants sont battus par la police”


    Les enfants qui n’ont pas eu la chance de naître de parents mariés ou d’être pris en charge par une institution doivent survivre dans la rue. Pour cela, l’unique solution est souvent d’opter pour des activités illégales comme le vol à la tire, mendier ou se prostituer.
    Les enfants des rues sont aussi confrontés à la violence constante. Entre eux – 30% des enfants des rues sniffent de la colle ou fument du hashish ce qui peut entraîner un comportement violent . Mais aussi par la police.
    Une étude de l’Unicef de 2006 conclut que "les enfants des rues et les jeunes délinquants sont les principales victimes de torture et de traitement inhumains au Maroc. Lorsque les enfants sont arrêtés, ils courent le danger de se faire frapper dans le commissariat et même d’être brûlé avec des cigarettes".
    Les nombreux enfants qui vivent dans les rues du Maroc sont donc un problème bien réel. Sauf qu’il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Et si pour le touriste lambda la problématique est à peine perceptible, ce n’est pas pour autant qu’elle n’existe pas.

    Source: Le Vif
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