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Le pain, la rente et la paix sociale

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  • Le pain, la rente et la paix sociale

    «Aujourd’hui, les gens connaissent le prix de toute chose et la valeur d’aucune.»

    Tout le passé est nécessaire et même indispensable pour mieux vivre et aimer le présent. Le pain quotidien que nous consommons et gaspillons ignominieusement aujourd’hui provient d’un long processus agricole, technologique, gastronomique et artistique ; il a été également de par son importance capitale le moyen le plus usuel qui a favorisé bien des transformations de société tant dans le bienséant pour ceux qui aspirent au bien-être global, mais aussi la désolation, comme ce qui se passe mal chez nous. L’histoire du pain quotidien a commencé depuis qu’Adam a mis les pieds sur terre.

    On rapporte religieusement que lorsqu’ Adam fut chassé du paradis, il fut jeté dans l’Hindoustan tel qu’il est rapporté par Tabari.(1) Adam prit terre sur la montagne de Serandib, Eve fut jetée à Djida, ils comprirent et sentirent qu’ils avaient péché contre Dieu. Ensuite, le Bon Dieu fait miséricorde à Adam et il lui envoya l’ange Gabriel qui lui dit : «Ne t’afflige point et récite ces paroles que je vais t’apprendre afin que Dieu t’accorde le repentir, qu’il accepte ta pénitence et qu’il approuve tes excuses comme il est dit dans la sourate 2 verset 35 du Coran». «Adam apprit de son seigneur des paroles, et le seigneur revint vers lui car il est celui qui revient, le miséricordieux» ; ensuite Adam interpelle Gabriel : «que ferai-je ?» Gabriel donna à Adam de ce blé qu’il avait mangé dans le paradis une quantité suffisante pour sa nourriture quotidienne en lui affirmant que voilà la nourriture de base que tu auras toi et ta progéniture dans ce bas monde.

    Ce blé qui est la base et la matière première du pain d’hier, d’aujourd’hui et de demain ; on le nomme de façon plus populaire «Enaâma» , un bienfait qui supprime tout état de famine. On nous a appris familièrement, on nous a éduqués et on nous a enseigné durant toute notre enfance de ne pas jeter par terre ce bienfait (pain) «naâmette Rabbi» encore plus de ramasser tout pain, en morceau ou en miette abandonné par terre, de l’embrasser et le positionner sur la partie frontale de la tête avant de le mettre sur un endroit garanti pour ne pas être piétiné, ni être humilié afin d’être mieux, le vénérer telle était cette sublime valeur chassée par des décisions politiques comateuses de potentat médiocre sinon pire.

    «Si tu donnes à manger un poisson à un pauvre, il mangera pendant un jour, si tu lui apprends à pêcher... il mangera toute sa vie», proverbe chinois. Ensuite, Gabriel enseigna à Adam et lui transmit l’art et la culture de fabrication du pain, il lui enseigna également à tirer le fer de la pierre et à faire des instruments de labourage pour semer le blé, il faisait la moisson, battait le blé et le vannait. Puis, Gabriel lui prescrit d’arracher deux grosses pierres de la montagne et lui apprit la fabrication de la meule pour égruger le blé afin de le réduire en poudre de farine. Gabriel appris ensuite à Adam la construction d’un four en fer, il lui ordonna encore de réduire la farine en pâte, de chauffer le four et d’y mettre la pâte dans le four pour enfin en sortir du pain.

    C’est toute une culture, un art, une technique, une connaissance, un savoir pour avoir (produire et consommer) du pain. C’était le premier processus technologique mis pour la première fois sur terre par le premier homme en associant matière première, moyens de production et savoir-faire. Ce processus, au fur et à mesure que meuvent la rotation de la terre et sa révolution autour du soleil, a été amendé, corrigé, perfectionné, rénové, transformé, réformé en fonction de l’état, la situation et l’évolution de l’homme et son environnement.

    Historiquement, chaque période de l’existence des sociétés humaines a vu naître un mode de production et de développement, ensuite des contradictions à ce mode ou système de production, de consommation et d’échange l’entraînait vers sa disparition pour être remplacé par un autre mode plus performant. L’être humain a toujours conçu des solutions pour se reproduire en engendrant sa progéniture, pour se nourrir, se loger, se vêtir, se déplacer, se soigner, s’amuser, s’éduquer, se cultiver ; c’est cette conception qui forme ce genre de processus social de reproduction que Marx a conçu dans son «capital».

    «Vivre, ce n’est pas respirer, c’est agir»

    Le XVIIIe siècle était marqué par la famine ; à cette époque, l’histoire du pain connut déjà un tournant important grâce à des améliorations décisives dans plusieurs domaines : des développements en levurière, les premiers pétrins mécaniques voyaient le jour, d’importants progrès en matière de fours... C’était le début, les premiers germes de la boulangerie à l’échelle industrielle. Les moissons qui représentaient auparavant un travail énorme et nécessitaient une main-d’œuvre importante se sont peu à peu modernisées. D’abord, la faux des Romains a été remplacée par la faucille. Ensuite, dès la fin du XVIIIe siècle, la science a permis l’invention de machines capables de remplacer l’homme.

    Le XIXe siècle vit aussi les débuts d’une nouvelle science : la génétique. Mendel(2) fit des expériences d’hybridation végétale, dont les résultats furent appliqués au blé au début du XXe siècle. L’objectif était de créer des variétés de blé de meilleure qualité, capables de résister aux climats défavorables et aux insectes. Aujourd’hui, les boulangers façonnent et enguirlandent leurs magasins de toutes les variétés et qualités de pain pour une meilleurs tentation du consommateur, surtout en période de Ramadhan, (qui a faim rêve de pain), les autres journées de l’année des personnes ressortent les bras chargés de baguettes de pain.

    Malheureusement, ces grandes quantités de pain achetées ne seront pas toutes consommées, car une partie et même une grande partie iront moisir dans des sachets en plastique et dans des poubelles publiques (grands bacs) ; les médias ont rapporté en images ces insolites, et il suffit tout simplement de se balader dans n’importe quelle rue, dans n’importe quelle ville pour se rendre compte que la notion de civisme qui a pris une tournure scandaleuse de la part de «faux citoyens», de «ghachi» ou bien de «nass», la paix sociale veut que la valeur du pain ne se conforme point avec l’échelle des valeurs économiques, car devant une disette de pain on verrait bien la rue se soulever pour chambouler tout système de commande ou celui qui est mis en place.

    Par ailleurs, l’éducation sociale est également la cause de ce phénomène, les valeurs sociales n’ont plus ni le poids, ni la force, et les règles et les normes sociales ne sont point prises en considération, point de respect, le respect du bien est un mal en nous qui nous pousse à ne plus respecter les lois. Sans des valeurs morales suivies d’obligations profondément enracinées à l’intérieur des membres de la collectivité ; ni la loi, ni le pouvoir, ni la démocratie, ni d’autres systèmes ne pourront fonctionner correctement. Le pain est ce « bien», c’est déjà un bienfait «naâma» auquel on devrait attribuer toute cette vertu, ce que nous ne payons pas cher en valeur monétaire, comme nous l’apprécierons et mesurons trop légèrement (gaspillage), c’est la cherté qui prodigue la valeur des biens ou bien sa rareté.

  • #2
    Cette image hideuse du pain dans les poubelles, alors qu’Emile Zola, au lieu de dire «révolution ! révolution !», c’était plus captivant de crier «du pain ! du pain !» Ce gaspillage et galvaudage à grande échelle (la conséquence de la rente) nuit non seulement aux bourses des ménages et à leurs méninges, mais il cause aussi un énorme préjudice moral, financier et économique au niveau national, car la dépréciation de sa valeur d’échange modifie l’affectation de sa valeur d’usage à tel point que la poubelle se ravitaille, le pain est aussi servi pour l’usage alimentaire des animaux des basses cours et des écuries.

    Il serait préférable et judicieux en même temps que les APC collectent les baguettes jetées dans les poubelles pour les faire parvenir aux éleveurs qui en ont grandement besoin pour l’alimentation du bétail et que les «Ansejistes» montent une fabrique de chapelure ou bien les centres d’enfouissement technique pour une spécialité créative, si volonté et respect sont de mise. Par ailleurs, tous les produits alimentaires subventionnés par l’Etat, à l’instar du lait et du pain, représentent un fort pourcentage la matière gaspillée, d’autres biens mis entre les mains des «hallabas», car la demande du consommateur ne se fait pas selon sa propre valeur réelle.

    La richesse ne consiste pas à posséder beaucoup de biens, mais plutôt a n’avoir que peu de désir ; ne dit on pas que «El benna fel qalil», c’est-à-dire que «le goût se trouve dans la rareté du bien». Durant les années 70’, le pain était bien subventionné, mais sa valeur d’usage était bien respectable ; aujourd’hui, le soutien du prix du pain va plus aux riches qu’aux pauvres. La paix sociale enrichit plus le riche et appauvrit encore plus le pauvre. «Les systèmes économiques qui négligent les facteurs moraux et sentimentaux sont comme des statues de cire : ils ont l’air d’être vivants et pourtant il leur manque la vie de l’être en chair et en os» Gandhi (homme politique et philosophe indien). Le pain est jeté par terre dans les rues, dans les quartiers, dans tous les endroits où la morale humaine n’est plus une valeur sociale, encore moins une valeur humaine.

    L’Etat devrait s’investir de plus en plus dans des sujets tels la culture, les valeurs, l’éthique, la connaissance, le savoir et les choses immatérielles, au lieu d’être en prostration et en apathie, l’Etat devrait être un véritable jardinier et un narrateur afin de passionner les esprits de la société ; malheureusement, le système de ce pouvoir utilise la rente qui sert à calfeutrer l’esprit du bien. Dans les mosquées, les imams devront dans leurs causeries religieuses soulever cette question vécue quotidiennement, en prenant comme référence le Coran dont notamment le fameux verset 141 de la sourate «Les animaux» : «C’est Lui qui a créé les jardins treillagés et non treillagés, les palmiers et les cultures au goût si varié, l’olivier et le grenadier de même espèce ou d’espèces différentes.

    Mangez de leurs fruits quand ils ont atteint leur maturité et acquittez-vous de la dîme le jour de la récolte. Mais évitez tout gaspillage, car Dieu n’aime pas ceux qui gaspillent.» Le gaspillage étant proscrit dans la religion musulmane. Les gens, «ghachi» ou «nass» semblent ne pas en tenir compte de ce phénomène alors que dans leurs palabres ils sont les champions à le dénoncer. Mais ils ne savent point que celui qui fait du bien se sent bien, alors que celui qui fait du mal se sent très mal ; c’est la base de toute religion.En tête de liste du gaspillage, vient incontestablement le pain, comme constaté du reste à travers les autres régions du pays.

    Non seulement ce sont des centaines de baguettes qui sont jetées dans les poubelles et à même le sol, mais également, fait nouveau, le pain artisanal qui prend la même tangente du mal. Quand vous vous sustentez avec un morceau de pain, vous vous réconciliez avec un délice très ancien qui fait partie intégrante de l’anthropologie. Le pain a sa propre histoire que chacun de nous apprécie à travers sa petite fringale (bis expression : «qui a faim rêve de pain»). Sa chronologie correspond à celle des manuels d’histoire de votre jeunesse. Depuis les premiers temps jusqu’à nos jours, le pain a vécu maintes aventures économiques, participé au progrès, traversé des guerres. Il a été bon, noble, juste, vrai, pur, cher, moins bon, moins cher, de seigle ou de farine, tantôt blanc, tantôt noir.

    Aujourd’hui il est toujours là, meilleur que jamais depuis que les boulangers renouent avec les produits authentiques et le souci de la qualité. Si nous voulons vraiment progresser en tant que nation, loin d’être moralistes, nous préconisons que les citoyens, républicains et démocrates doivent faire marche arrière et redécouvrir les concepts précieux, la conscience et autres notions nobles que toute réalité repose sur des fondements moraux et que toute réalité entraîne un suivi et un pointage platonique.

    Ce n’est pas trop dur de prendre des décisions quand vous connaissez vos valeurs. Le ventre populaire appelle au pain si ce dernier n’est pas disponible, la révolution s’allume de plein feu. Le taux d’intégration de notre pain se situe à 50% , une chute de la rente pétrolière ferait naître des chaînes interminables devant les boulangeries ; encore une mauvaise récolte et un prix bas du pétrole, c’est tout le pays qui s’allume. Alors, à bon entendeur salut.

    Benallal Mohamed- El Watan

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