Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Pour les lobbies, il n’y a presque plus d’eau dans le gaz « de schiste »

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Pour les lobbies, il n’y a presque plus d’eau dans le gaz « de schiste »

    Une étude récente de chercheurs américains démontre que les pollutions dues à l’extraction du « gaz de shale » viendraient seulement de la piètre qualité des matériaux utilisés lors de cette phase. Bonne nouvelle pour les grandes sociétés pétrolières qui le vendent comme nouvel eldorado.



    La pollution des eaux lors de l’extraction du gaz de schiste, due à un mauvais béton? Voilà le nouveau credo offert aux lobbies pétroliers et gaziers, qui dorénavant peuvent s’appuyer sur une étude scientifique publiée le 15 septembre dernier. Dans la revue de l’Académie des sciences des États-Unis (pays champion de l’extraction), il est ainsi expliqué que la fracturation hydraulique et les forages horizontaux ne seraient pas les responsables de la contamination de l’eau potable dans les zones proches de récupération du gaz de schiste. Réalisée sur 113 puits entre la Pennsylvanie et le Texas, cette étude démontrerait que le gaz naturel décelé dans les nappes aquifères proviendrait en réalité de défauts dans le ciment du revêtement des puits forés pour l’extraction. Thomas Darrah, principal auteur de cette recherche et professeur assistant en sciences de la terre à l’université de l’Ohio, aurait même une explication à cela : « Le très bas prix du méthane résultant aux États-Unis du boom des gaz de schiste ces dernières années a poussé les sociétés d’exploitation à réduire le plus possible leurs coûts d’exploitation. » Évidemment aux dépens de la qualité de construction des puits !

    Eureka! Les 243 cas de pollution de l’eau recensés aux États-Unis depuis 2008 par une enquête du département américain de la Protection de l’environnement auraient une explication! Double Eureka! Les travaux de la société géologique américaine, l’US Geological Survey (USGS), ont démontré qu’en Oklahoma le nombre annuel de séismes de magnitude supérieure à 3 (multiplié par 20 entre 2009 et 2011) était dû aux opérations d’injection ou de fracturation, ce chiffre peut enfin chuter. Cette enquête tombe à pic aussi pour donner des idées à certaines nations, notamment européennes, quant à la suite à donner au débat : « pour ou contre le gaz de schiste ». Outre les États-Unis, où cette ressource représente déjà plus d’un tiers de la production de gaz, l’Argentine, la Chine, la Pologne... vouent un culte à peine dissimulé à cette production « miracle ». Cette ressource considérable, mais que de nombreux gouvernements se refusaient jusqu’à présent à exploiter, aurait donc miraculeusement un avenir « propre » grâce à ce rapport.

    Quoi qu’il en soit les questions demeurent car le business est bien trop juteux pour être tout à fait honnête et les pressions sur les États montent en puissance. En Europe, la Commission et le Parlement européen sont « assiégés » par les grands acteurs des secteurs pétroliers et gaziers. « Entre janvier et août 2012, treize réunions formelles avec pour thème les gaz de schiste ont eu lieu entre la Commission et des représentants d’ExxonMobil, Talisman Energy, Shell, Statoil, Halliburton, Chevron et GDF Suez », estime l’organisation Corporate Europe Observatory (CEO), qui étudie les actions de lobbying des grandes entreprises au niveau européen.

    La course au profit sera de courte de durée

    Ces interdictions d’exploitation, notamment en France, commencent sérieusement à gêner les intérêts économiques de nombreuses sociétés. Ainsi Total ou GDF Suez aimeraient beaucoup, et dans un avenir proche, exploiter le sous-sol français, comme ils le font déjà aux États-Unis ou en Pologne. Pas moins de dix groupes français cotés au CAC 40, d’Air liquide à Veolia, ainsi que plusieurs autres grandes entreprises nationales, sont impliqués de par le monde, dans l’extraction des gaz de schiste. Aux États-Unis, Total a acquis 25 % des concessions de Chesapeake Energy, premier producteur mondial de gaz de schiste, et premier foreur nord-américain. La compagnie pétrolière y a investi plus de 2,2 milliards de dollars! En Pologne, elle a récupéré une partie des concessions d’exploration d’ExxonMobil et en détient aussi au Danemark, Canada, Chine, Algérie, Argentine. Même en Libye... La soif de gaz de schiste de la compagnie est d’autant plus compréhensible qu’elle vient d’annoncer des prévisions de production d’hydrocarbures à la baisse.

    Mais Total n’est pas le seul. Dans un autre domaine, Vallourec (leader mondial des tubes en acier sans soudures) est aujourd’hui l’un des principaux fournisseurs de tubes de forage profond pour l’extraction des gaz de schiste. Son PDG, Philippe Crouzet, qui ne cache pas son espoir de voir « des productions massives de gaz de schiste en Europe d’ici à 2017 », n’hésite pas non plus à en faire une promotion dévoyée : « Il n’y a pas eu un seul accident dû au forage horizontal au cours des dernières décennies aux États-Unis. »

    Le secteur du BTP est également concerné: Lafarge, qui fabrique des ciments spéciaux pour les puits de forage nord-américains; Saint-Gobain, qui fournit des matériaux de fracturation. Technip, spécialiste des infrastructures pétrolières et gazières, a quant à lui redirigé une grande partie de ses investissements stratégiques (225 millions d’euros) vers les États-Unis afin de profiter des retombées du gaz de schiste.

    Car tous ont compris qu’il fallait se dépêcher. La course au profit sera de courte de durée. Les réserves ne sont pas aussi inépuisables qu’annoncé. Dans la revue Nature, David King, un ancien conseiller scientifique du gouvernement britannique, souligne même que « le rendement d’un puits de gaz de schiste décroche de 60 à 90 % au terme de sa première année d’exploitation ».

    par ÉRIC SERRES

    humanite.fr

    dz(0000/1111)dz
Chargement...
X