Les chaînes de télévision déversent doctement un flot continu de commentaires et d'analyses à donner le tournis. Tout cela est-il vraiment sérieux ?
Ils sont partout, mais affectionnent surtout les chaînes de télévision d'information en continu. Espions retraités n'ayant jamais beaucoup espionné, demi-soldes d'un journalisme à compte d'autrui (et pas d'auteur) ; spécialistes ès questions de sécurité qui ont surtout sécurisé leurs honoraires ; universitaires ayant usé leurs souliers d'aventurier sur les trottoirs du Quartier latin ; "consultants" que pas grand monde consulte ; chercheurs qui n'ont nullement vocation à trouver quoi que ce soit. Ils se bousculent, se succèdent sur les plateaux, déversent une logorrhée savante à donner le vertige à un derviche tourneur, à faire oublier la direction de La Mecque au plus enfiévré des islamistes. Tous ont généralement un point commun : ils n'ont généralement jamais mis les pieds, ou si peu, dans les pays dont ils parlent à profusion. Ils n'ont vu les terroristes qu'en photo et n'ont entendu siffler à leurs oreilles que des balles de golf ou de tennis.
Quelques semaines de silence ?
Mais ils parlent, parlent avec l'assurance des médecins de Molière du chiisme, du sunnisme, du djihad, du wahhabisme, du salafisme. Ils savent tout, ont réponse à tout. Ils sont "dans la tête" (pour reprendre une phraséologie journalistique à la mode) du sicaire décapitant les malheureux otages, dans le cerveau d'Abou Bakr al-Baghdadi qui a ravi la vedette au regretté Ben Laden et totalement occulté son pâle successeur Ayman al-Zawahiri. Ce dernier n'a manifestement pas su gérer la boutique et a laissé filer l'héritage. Les succursales algériennes de la terreur, de Tizi Ouzou au Grand Sud, n'ont aucun secret pour eux.
Quand on passe à la géopolitique, les "spécialistes" se régalent encore plus : ils dispersent la planète façon puzzle, font la psychanalyse d'Obama, dissèquent vivant l'horrible Poutine. Ils font et défont les alliances, donnent des explications rationnelles et invérifiables à des embrouilles à peu près inintelligibles. Ces marathoniens du commentaire - visiblement peu occupés - passent d'une chaîne à l'autre, courent à perdre haleine vers le plateau suivant sans avoir eu besoin de se démaquiller. Ils se lèvent à l'aube, se couchent au coeur de la nuit pour nous abreuver de leur science infaillible. Une performance entre 24 Heures chrono et les Six Jours cyclistes du Vél'dHiv de jadis. Peut-être pourrait-on leur imposer quelques semaines de silence à la mémoire des victimes de la terreur ? Cela les reposerait, et nous aussi.
lepoint.fr
Ils sont partout, mais affectionnent surtout les chaînes de télévision d'information en continu. Espions retraités n'ayant jamais beaucoup espionné, demi-soldes d'un journalisme à compte d'autrui (et pas d'auteur) ; spécialistes ès questions de sécurité qui ont surtout sécurisé leurs honoraires ; universitaires ayant usé leurs souliers d'aventurier sur les trottoirs du Quartier latin ; "consultants" que pas grand monde consulte ; chercheurs qui n'ont nullement vocation à trouver quoi que ce soit. Ils se bousculent, se succèdent sur les plateaux, déversent une logorrhée savante à donner le vertige à un derviche tourneur, à faire oublier la direction de La Mecque au plus enfiévré des islamistes. Tous ont généralement un point commun : ils n'ont généralement jamais mis les pieds, ou si peu, dans les pays dont ils parlent à profusion. Ils n'ont vu les terroristes qu'en photo et n'ont entendu siffler à leurs oreilles que des balles de golf ou de tennis.
Quelques semaines de silence ?
Mais ils parlent, parlent avec l'assurance des médecins de Molière du chiisme, du sunnisme, du djihad, du wahhabisme, du salafisme. Ils savent tout, ont réponse à tout. Ils sont "dans la tête" (pour reprendre une phraséologie journalistique à la mode) du sicaire décapitant les malheureux otages, dans le cerveau d'Abou Bakr al-Baghdadi qui a ravi la vedette au regretté Ben Laden et totalement occulté son pâle successeur Ayman al-Zawahiri. Ce dernier n'a manifestement pas su gérer la boutique et a laissé filer l'héritage. Les succursales algériennes de la terreur, de Tizi Ouzou au Grand Sud, n'ont aucun secret pour eux.
Quand on passe à la géopolitique, les "spécialistes" se régalent encore plus : ils dispersent la planète façon puzzle, font la psychanalyse d'Obama, dissèquent vivant l'horrible Poutine. Ils font et défont les alliances, donnent des explications rationnelles et invérifiables à des embrouilles à peu près inintelligibles. Ces marathoniens du commentaire - visiblement peu occupés - passent d'une chaîne à l'autre, courent à perdre haleine vers le plateau suivant sans avoir eu besoin de se démaquiller. Ils se lèvent à l'aube, se couchent au coeur de la nuit pour nous abreuver de leur science infaillible. Une performance entre 24 Heures chrono et les Six Jours cyclistes du Vél'dHiv de jadis. Peut-être pourrait-on leur imposer quelques semaines de silence à la mémoire des victimes de la terreur ? Cela les reposerait, et nous aussi.
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